Sociologie de la Loudness War: tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la guerre du volume!
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JolX
J'ai fait mon mémoire de sociologie sur la guerre du volume dans le monde de la production musicale, et j'aimerais le partager avec les membres de ce forum, que cela devrait intéresser. C'est un travail qui m'a pris énormément de temps, et dont je suis assez content ; je pense que c'est de la qualité.
C'est un mix entre des analyses statistiques sur l'augmentation du volume à partir d'un échantillon d'albums de musique, et une enquête "de terrain" (comme on dit) dans des studios, par l'interview d'artistes, de producteurs, de directeurs artistiques, de programmateurs radio, d'attachés de presse, etc.
La première partie est technique à certains endroits, mais j'espère que ça ne vous arrêtera pas si vous êtes intéressés, parce que la partie la plus intéressante pour les membres du monde musical est la deuxième partie, qui se donne la tâche de comprendre quel sens a le phénomène de loudness war pour ses acteurs ainsi que de montrer le réseau de contraintes qui la rend presque inévitable.
Je pense avoir découvert certains éléments intéressants dont on ne se doutait pas forcément a priori. Mais je ne dévoile pas tout maintenant...
Donc, si vous avez envie de lire sur le sujet, voici le résultat :
fichier pdf: Joël Girès - Des transformations convergentes sans chef d'orchestre..pdf
En espérant avoir des retours !
[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 03:18:02 ]
blackbollocks
JolX
Mon message, ce n'est pas que l'art est perverti par le marché, l'argent, le capitalisme, à la Adorno, et qu'il faudrait extirper ce bien supérieur, "la musique", des forces du marchés, pour qu'il ne soit pas un produit de consommation "comme les autres".
C'est, au contraire, que la musique se produit dans des relations de comparaison, de concurrence, et que les aspects artistiques et concurrentiels sont intrinsèquement liés. Le monde musical peut être conceptualisé comme un "champ", au sens de Bourdieu, c'est-à-dire comme espace de lutte relativement autonome (par rapport au champ économique, par exemple).
Ça veut aussi dire que la musique peut rester un champ, c'est à dire un espace de lutte, ou il y a des rapports de force, des hiérarchies, même s'il est complètement autonome par rapport au monde économique. Ou, autrement dit, que le monde musical, même s'il n'y a plus d'intérêts directement économique, au sens restreint, peut être traversé par des enjeux de prestige, de pouvoir, de crédit, de notoriété.
Bon, là ça renvoie à des trucs sociologiques très abstraits...
[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 13:34:27 ]
JolX
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1977_num_13_1_3493
Bon, c'est long et Bourdieu est pas évident à lire...
Hi Bou
Des liens persee avec des articles de Bourdieu, le dernier truc que je m'attendais à voir sur AF
Anonyme
Citation de Samplehunter :
Non, la fidélité en audio, c'est seulement l'idée qu'entre l'artiste et l'auditeur, le message (la musique) soit respectée, par les matériels et les techniciens.
Ben non, ça c'est pas possible. Ou alors le musicien signe un bon-à-tirer en entendant le master final et prend toutes les responsabilités.
Citation de Samplehunter :
Le problème actuelle n'est pas le numérique dont la capacité de respecter le signal est absolue, mais bien les producteurs, les radios, les ingés son qui lorsqu'ils se prennent pour des artistes, interviennent et massacrent l'oeuvre initiale.
On ne peut absolument pas affirmer que la capacité du numérique à respecter le signal est absolue. Et quand bien même, on serait encore loin du compte.
Citation de Samplehunter :
La loudness War n'a été possible que parce que l'ensemble des acteurs (producteurs, programmateurs, ingé son et parfois même musiciens), par incompétence ou sous la pression économique, ont perdu tout éthique, tout respect pour la musique.
Ce n'est pas dans l'esprit de défendre ma chapelle, mais c'est bien de la part des musiciens, encore plus que des prods, que je reçois le plus de pression pour "jouer fort". L'ordre dans lequel tu mets les "acteurs" me parait franchement biaisé.
Mon expérience personnelle montre que dans ce domaine comme dans d'autres, entre les techniciens et les musiciens, lorsque nous parlons de respect de la musique nous ne parlons pas toujours de la même chose. J'ai souvent l'impression que les musiciens ont beaucoup de mal à se mettre à la place de l'auditeur, et sont bien perméables aux modes et rumeurs en tous genre sur les manières de gérer un mix. C'est encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'un groupe. Une sénce de mix avec tous les membres d'un groupe ressemble à une psychanalyse. Pour chaque membre du groupe, c'est souvent l'occasion de constater qu'ils ne rêvent pas tous du même CD (parfois, ça se termine mal).
Je remarque que les seules à avoir officiellement lancé une pétition et des alarmes sur la "loudness War" sont les ingés sons. On a peu vu les musiciens au front dans ce domaine.
JM
JolX
emmanuel.d
La "fidélité" dans les domaines liés à l'enregistrement n'est pas une notion objective. Il s'agit en général d'une fidélité à une "idée", et même à un "idéal", et non pas à une "réalité.
Comme Jolx le dit, à quoi est fidèle un morceau d'Aphex Twin? Et même dans le domaine de la musique dite "classique": un enregistrement d'un grand orchestre post-romantique peut-il être "fidèle"? C'est-à-dire, peut-on raisonnablement espérer et même souhaiter avoir un orchestre post-romantique dans son salon? Une telle "fidélité" n'aurait pas de sens, à moins d'accepter une intervention des pompiers à chaque écoute, pour peu qu'on habite en ville
Je comprend ceci dit le souhaite de SampleHunter de disposer d'enregistrements qui paraissent fidèles. Mais dans ce cas, la fidélité n'est pas un fait avéré, mais plutôt un "idéal esthétique" en soi, qui se traduit non pas par une "fidélité" au sens strict au concert original, mais plutôt par le respect de critères tels que la transparence, la définition, et l'aspect "naturel" de l'image sonore. Non pas que cette image sonore soit vraiment naturelle, l'important c'est qu'il faut dans ce cas qu'elle le *paraisse*.
Un bel enregistrement qui paraît "réaliste" sera plutôt travaillé dans le sens de l' "illusion de réalité" que dans le sens d'un reflet exact de la réalité en question, c'est à dire d'une "littéralité". C'est une problématique qui n'est pas tellement éloignée d'un problème classique de sound design: pour une ambience de ruisseau ou cascade, on n'enregistre pas un ruisseau ou une cascade, parce que même si c'est "littéral", ça ne "fait pas vrai" (ça sonne plat...). On fait plutôt des simulations dans une salle de bain, ce qui est moins littéral mais beaucoup plus "réel".
En résumé, "fidèlité" = illusion réussie de la réalité ≠ littéralité.
Emmanuel
Grebz
Une question : tu dis que ce mémoire est accompagné d'un CD auquel tu fais référence dans le texte pour donner des exemples sonores. Il n'est évidemment pas inclus dans le PDF mais est-ce que tu as la possibilité de mettre les pistes du CD en partage quelque part ? Ce serait intéressant d'avoir accès à ces extraits sonores...
Si ça t'est possible, merci d'avance, et sinon... va pourrir en enfer !
(je plaisante )
JolX
Merci, très intéressant !
> Grebz
Pas de soucis, je poste les fichiers ! Ce n'est pas nécessaire, surtout pour des gens qui font du son, mais je poste ça tout de même quand je peux
Grebz
Autre question. Je suis en train de lire le chapitre 8, les artistes.
Je me trompe ou ce ne sont que des artistes de la mouvance Rap / Hip hop ? Akro, Flexa Lyndo, Sharko, Code Rouge, Owen Replay, etc.
(je n'en connais aucun, désolé)
Parce que si c'est ça, n'est-ce pas un peu biaisé ? Est-ce que les réactions seraient les mêmes avec des artistes Rock, Pop, Electro, Chanson Française...
Bon, cela dit, j'aurai peut-être mes réponses plus loin dans le document...
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