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Sujet de la discussion Sociologie de la Loudness War: tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la guerre du volume!
Bonjour à tous !

J'ai fait mon mémoire de sociologie sur la guerre du volume dans le monde de la production musicale, et j'aimerais le partager avec les membres de ce forum, que cela devrait intéresser. C'est un travail qui m'a pris énormément de temps, et dont je suis assez content ; je pense que c'est de la qualité.

C'est un mix entre des analyses statistiques sur l'augmentation du volume à partir d'un échantillon d'albums de musique, et une enquête "de terrain" (comme on dit) dans des studios, par l'interview d'artistes, de producteurs, de directeurs artistiques, de programmateurs radio, d'attachés de presse, etc.

La première partie est technique à certains endroits, mais j'espère que ça ne vous arrêtera pas si vous êtes intéressés, parce que la partie la plus intéressante pour les membres du monde musical est la deuxième partie, qui se donne la tâche de comprendre quel sens a le phénomène de loudness war pour ses acteurs ainsi que de montrer le réseau de contraintes qui la rend presque inévitable.

Je pense avoir découvert certains éléments intéressants dont on ne se doutait pas forcément a priori. Mais je ne dévoile pas tout maintenant...

Donc, si vous avez envie de lire sur le sujet, voici le résultat :

fichier pdf: Joël Girès - Des transformations convergentes sans chef d'orchestre..pdf

En espérant avoir des retours !

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 03:18:02 ]

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81
Citation :
Il est aussi très intéressant de remarquer la toute relative consistance du contenu de cette "qualité" dont on parle. Par exemple, lorsqu'on a introduit les nouvelles techniques électriques (microphones - avant on enregistrait directement devant le pavillon du phonographe ; tourne disque électrique - avant on tournait le cylindre à la main ; etc.), les audiophiles n'ont pas vu ça comme un progrès, mais comme des éléments qui venaient "dénaturer" le son ! CA nous fait voir que la "qualité", c'est une construction sociale, il n'y a rien qui soit en soi plus beau qu'une autre chose, c'est juste une question de jugement, jugement qui varie, selon la conjoncture, les périodes, etc. Et quand l'esthétique change, on observe des résistances, parce qu'on s'était habitué à une configuration esthétique donnée.


Mouais....là tu glisses un peu dans le sophisme...
Le terme hi-fi signifie "haute fidélité". Fidélité à quoi ??? au son d'origine évidemment. A la source.
Avec un bon équipement actuel (et un bon enregistrement), il est difficile de faire la différence entre un concert et un disque (sacd pour les plus exigeants).

Idem pour les jeux vidéos. Qui oserait dire que le jeu "pong" peut rivaliser en réalisme visuel avec les derniers jeux de tennis sur console ????
Les 2 possèdent une esthétique différente (qu'on aime ou pas) mais cependant leur niveau de réalisme est difficilement comparable.

Studio de Mastering en ligne http://www.lvmastering.com/

[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 03:30:51 ]

82
Citation de Lv :
Mouais....là tu glisses un peu dans le sophisme...
Le terme hi-fi signifie "haute fidélité". Fidélité à quoi ??? au son d'origine évidemment. A la source.


Justement, fidélité à quoi ?
A quoi est fidèle un album d'Amon Tobin, ou d'Aphex Twin ? A quoi est fidèle une piste éditée, avec automations, time stretch et autres joyeusetés ? A quoi est fidèle un enregistrement dans un studio à l'acoustique feutrée ? Au son que l'on aurait entendu si on avait été dans ce studio ? Je ne crois pas...

De manière très pragmatique, il faut bien se rendre compte que le son "original" auquel on fait référence n'existe, à proprement parler, pas. Il est un référent esthétique, une vue de l'esprit. En fait, cet original, il n'existe pas avant l'enregistrement, mais est produit par lui, au sens que c'est une catégorie d'appréciation créée par et dans la pratique de l'enregistrement.

Si ce sujet t'intéresse, ce texte est intéressant, et plus court que le bouquin que j'ai conseillé juste avant :
www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=MOUV_042_0043

[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 03:55:08 ]

83
Citation :
Justement, fidélité à quoi ?

A mon avis tu n'as pas souvent l'occasion d'entendre une chorale, un trio de jazz ou
un violon.
Le reste on est bien d'accord : c'est de la mode, du vent, ça tourne toutes les 5 minutes comme les girouettes....

Un stradivarius ça a 300 ans et ça sonne toujours à peu prés pareil.

Studio de Mastering en ligne http://www.lvmastering.com/

84
Mais là tu parles d'un style de musique marginale, la musique classique.
La grande majorité de la musique n'est pas enregistrée avec un couple stéréo dans une église.

Et encore, je dis ça mais j'y crois pas moi même : la musique classique est souvent enregistrée avec plus qu'un couple de micro, parfois on travaille l'acoustique du lieu (on met un panneau derrière un instrument pour réfléchir le son) pour rendre le son "plus naturel" (ça veut dire quoi "rendre naturel" ?) POUR l'enregistrement, etc etc.

J'en reviens à ce que je disais, cet "original" est mythique, il n'existe pas, il est un jugement esthétique plus qu'une chose réelle, qu'on pourrait saisir.
85
c'est ça que j'appelle un sophisme.
Tu pars du fait qu'il est impossible d'obtenir un enregistrement (et rediffusion) identique à 100% à l'original pour en déduire que tout se vaut, du phonographe au systèmes audiophiles actuels et que seule l'esthétique diffère.

En plus, tu noteras que que je n'ai pas parlé de musique classique mais de violon (classique, Klezmer, tsigane etc ???), chorale (gospel ? classique? variété (flying pickets,pow wow etc) et de trio de jazz.

Studio de Mastering en ligne http://www.lvmastering.com/

[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 04:32:20 ]

86
Citation :
J'en reviens à ce que je disais, cet "original" est mythique, il n'existe pas, il est un jugement esthétique plus qu'une chose réelle, qu'on pourrait saisir.

La musique actuelle n'est pas qu’électronique. Un batterie, une guitare acoustique, une voix humaine et bien d'autres instruments que l'on retrouve systématiquement dans la musique populaire ont bien une réalité acoustique.

Electronique ou pas, 2 éléments essentiels caractérisent toute la musique lorsqu'elle est enregistrée. La bande passante (le timbre) et le niveau (la pression). En comprimant à outrance on prive l'artiste de la moitié de son art. C'est comme si on interdisait la couleur aux peintres.

Le mastering, aujourd'hui, n'est rien d'autre qu'une opération technique semblable à un délavage à la javel de l'ensemble des toiles d'une expo ou d'un artiste pour les rendre plus claire et homogènes aux yeux du public. Un massacre...

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 09:49:01 ]

87
Ce que je veux dire, c'est ça :

www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=MOUV_042_0043
Citation :
Tout débat sur la soi-disant fidélité d’un enregistrement par rapport à sa source est en fin de compte un débat sur l’esthétique des sons : comment devraient sonner les enregistrements?


Par exemple, dans ce que vous me dites, vous maniez les catégories de "source", d' "original", pour critiquer une esthétique que vous n'aimez pas. La réalité de la source originale, elle est bien celle-ci : une catégorie d'appréciation.

Elle est un peu l'équivalent de la "nature humaine" que l'on invoque pour apprécier plein de phénomènes : elle serait hétérosexuelle lorsqu'on veut critiquer l'homosexualité, elle serait égoïste lorsque l'on veut justifier le capitalisme, etc etc. Ce qu'on voit, c'est que "la nature humaine" est une catégorie produite par et dans ce genre de jugement, mais elle n'existe pas avant lui.

L' "original", c'est pareil. Un jour on l'utilise pour critiquer la guitare électrique, parce que son son n'est vraiment pas "fidèle" à la "vraie" guitare (acoustique), alors qu'aujourd'hui cet argument paraîtrait ridicule. L'introduction des microphones a pu créé une indignation car ils "dénaturaient" le son. L'argument parait aujourd'hui insensé. Etc etc. Et on peut pas dire qu'ils avaient tort. C'était simplement le jugement de l'époque, comme on a le notre maintenant.

S'il fallait être fidèle, pourquoi on compresse une voix ? Pourquoi on l'égalise, pourquoi on la déesse ? Si on devait être fidèle à une batterie, pourquoi on met un micro à 2cm de la grosse caisse ? Que je sache, je ne mets pas mon oreille aussi près. Pourquoi enregistrerait-on une guitare acoustique en stéréo ? Que je sache, quand j'écoute une guitare, je sais parfaitement la localiser spatialement, pas comme certains enregistrements, très jolis, c'est pas la question, où il y a un énorme effet stéréo sur la guitare. C'est quoi le naturel dans tout ça ?

Et puis, vous n'avez jamais entendu que des groupes veulent avoir un son live "comme tel CD" ? Qui est fidèle a qui à ce moment là ? L'esthétique du son enregistré est devenu aujourd'hui le référent esthétique musical principal, contrairement à la situation de la fin XIXe / du début XXe, et influence le son du concert. La question n'est pas, pour moi, de savoir si c'est bien ou mal, ce qui reste une question ouverte, mais de savoir que c'est comme ça que ça se passe dans la réalité du monde musical.

La fidélité, c'est un jugement esthétique, et pas une adéquation à un quelconque original, je persiste.
88

Il n'y a pas de fidélité possible, et si j'avais un peu de temps je vous en ferais la démonstration imparable (de lapin).

Le terme Haute Fidélité se conçoit comme fidélité à ce qui est couché sur le support, on entend ce que l'ingé son a voulu mettre sur le disque.

Et même ça, ça ne tient pas la route, car ce que l'ingé son a entendu l'a été dans des conditions techniques que ne retrouve pas chez soi, et dans des conditions émotionnelles différentes.

On a même pas la fidélité d'une écoute à l'autre dans les mêmes conditions matérielles car la musique véhicule des émotions (c'est à ça que ça sert il parait) et on est jamais deux fois dans le même état émotionnel.

Et puis, pas besoin de thèse pour conclure que cette loudness war est le résultat de la concomitance de l'apparition du numérique et de ses contraintes (limite en crête) et des moyens de traitement du même tonneau, de l'apparition des radio FM commerciales, et la présences d'acteurs à courtes vues et au faible sens artistique, et enfin au renforcement de tout ça grâce à la diffusion internet.

JM

89
Citation de Jan :
Il n'y a pas de fidélité possible, et si j'avais un peu de temps je vous en ferais la démonstration imparable (de lapin).
Le terme Haute Fidélité se conçoit comme fidélité à ce qui est couché sur le support, on entend ce que l'ingé son a voulu mettre sur le disque.
Et même ça, ça ne tient pas la route, car ce que l'ingé son a entendu l'a été dans des conditions techniques que ne retrouve pas chez soi, et dans des conditions émotionnelles différentes.
On a même pas la fidélité d'une écoute à l'autre dans les mêmes conditions matérielles car la musique véhicule des émotions (c'est à ça que ça sert il parait) et on est jamais deux fois dans le même état émotionnel.


Merci pour ces arguments, je me sentais seul sur ce coup ! :)
90
Citation :
La fidélité, c'est un jugement esthétique, et pas une adéquation à un quelconque original, je persiste.


Non, la fidélité en audio, c'est seulement l'idée qu'entre l'artiste et l'auditeur, le message (la musique) soit respectée, par les matériels et les techniciens. Ce n'est pas de l’esthétisme mais une éthique. Le problème actuelle n'est pas le numérique dont la capacité de respecter le signal est absolue, mais bien les producteurs, les radios, les ingés son qui lorsqu'ils se prennent pour des artistes, interviennent et massacrent l'oeuvre initiale.

Et c'est rejoint finalement, par une partie de ton travail sociologique sur la question. La loudness War n'a été possible que parce que l'ensemble des acteurs (producteurs, programmateurs, ingé son et parfois même musiciens), par incompétence ou sous la pression économique, ont perdu tout éthique, tout respect pour la musique.

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

[ Dernière édition du message le 06/01/2012 à 12:57:38 ]