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Interview / Podcast
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Le son qui tue

Interview d'Eric Sarafin, alias Mixerman

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Mixerman Publishes Musician’s Survival Guide To A Killer Record
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Mixerman Publishes Musician’s Survival Guide To A Killer Record

Livre & Méthode de la marque Mixerman Publishes

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Prix public US : $21 incl. VAT

C’est une chose assez rare pour être soulignée sur AF : nous ne rédigeons que très peu d’articles concernant des ouvrages « extérieurs » ayant été publiés sur la question de l’enregistrement, du mixage et/ou de la production et ceci, pour plusieurs raisons.

Interview d'Eric Sarafin, alias Mixerman : Le son qui tue

Premiè­re­ment, parce que le portail Audio­fan­zine lui-même tend à conser­ver une âme quelque peu « péda­go­gique » – avec toutes les précau­tions que nous puis­sions y placer derrière ce terme – tout du moins pour les amateurs que nous sommes en perpé­tuelle quête de réponses. Ensuite, parce que les ouvrages trai­tant de ces sujets font moins partie des articles que des news, étant donné qu’il sort moins de livres chaque jour que de plug-ins ou autres maté­riels desti­nés à la produc­tion sonore ou musi­cale. Et qu’en­fin, la plupart des ouvrages réel­le­ment dédiés à la produc­tion étant en anglais, il n’est pas toujours aisé d’ap­pri­voi­ser un public pas forcé­ment anglo­phone pour le rallier à sa cause.

Néan­moins, nous avons décidé de faire une entorse à la règle en nous penchant sur le cas de ce Musi­cian’s Survi­val Guide to a Killer Record. Pourquoi? Parce que le titre est osé déjà et que, malgré sa rédac­tion en anglais, il importe à de plus en plus d’ama­teurs (au sens de « mélo­manes »), partout dans le monde, de comprendre comment tirer le meilleur parti de leurs compé­tences et de leur équi­pe­ment, surtout depuis que celui-ci s’est radi­ca­le­ment démo­cra­tisé.

Mixerman - 3Et puis aussi et surtout, à cause de l’au­teur. Pour ceux qui le connaissent déjà, Mixer­man n’en est pas à son premier fait d’arme. Après un reten­tis­sant Daily Adven­tures of Mixer­man (imagi­nez une sorte de Spinal Tap du studio se dérou­lant dans la première moitié des années 2000, en moins cari­ca­tu­ral mais tout aussi drôle et grotesque), ce même auteur avait rédigé trois ouvrages beau­coup plus « péda­go­giques » que ce premier essai concluant, qui conte­nait lui-même énor­mé­ment de passages instruc­tifs derrière son carac­tère humo­ris­tique et roma­nesque. C’est ainsi que la série Zen and the Art of… Mixing/Produ­cing/Recor­ding fit son appa­ri­tion, abor­dant un nombre incroyable de notions pratiques et théo­riques dont les appli­ca­tions ont fait écho aux expé­riences des profes­sion­nels comme des amateurs.

C’est dans cet esprit que Mixer­man revient donc avec Musi­cian’s Survi­val Guide to a Killer Record. Malgré un titre quelque peu auda­cieux, Mixer­man aborde à nouveau des notions déjà vues dans ses précé­dents ouvrages, mais de manière plus concise, abor­dable et… directe aussi. Car, comme le titre l’in­dique, il s’agit d’un « Guide de Survie » destiné à des gens pour qui la produc­tion musi­cale n’est pas le corps de métier initial, mais devient inévi­table. 

Présen­ta­tion du livre de Mixer­man Musi­cian’s Survi­val Guide To A Killer Record

Mixerman - 4Divisé prin­ci­pa­le­ment en trois grandes parties – The Music, The Basics, The Process – Mixer­man distille ses conseils et points de vue concer­nant les éléments-clef d’une produc­tion réus­sie, c’est-à-dire qui révè­lera le meilleur de nos créa­tions. Les deux premières parties du livre reviennent de façon exten­sive sur les concepts et notions théo­riques évidem­ment, mais couvrent égale­ment l’as­pect quasi « philo­so­phique » des choses lorsqu’il s’agit de penser la produc­tion musi­cale et l’en­re­gis­tre­ment. « The Process », quant à lui, aborde une bonne partie des tech­niques néces­saires à la bonne réali­sa­tion des prises de son, de l’an­ti­ci­pa­tion du mixage et de la concep­tion géné­rale du « produit ». Tout y est rédigé pour que chaque para­graphe, chaque section aille à l’es­sen­tiel et apporte des réponses claires, simples, appli­cables rapi­de­ment, pour que n’im­porte quel musi­cien, amateur, profes­sion­nel, puisse utili­ser au mieux le maté­riel dont il dispose, en tirer le meilleur – et s’en affran­chir ! –  toujours dans un seul but : enre­gis­trer la matière la plus cohé­rente pour livrer, au final, le meilleur disque qui soit.

Alors on pour­rait lui repro­cher de rester un peu trop dans la litté­ra­ture ; en effet, les visuels, tableaux, sché­mas et diagrammes ne sont pas légion – les photos inexis­tantes même – pour un « guide de survie » que l’on aime­rait pouvoir re-consul­ter rapi­de­ment et dans lequel on aime­rait retrou­ver l’info en un clin d’œil. Mais la grande force de Mixer­man, c’est son fameux ton plein d’hu­mour, et son point de vue aiguisé, qui fait passer des notions barbantes de manière presque diver­tis­sante et insuffle discrè­te­ment un carac­tère quasi récréa­tif, malgré les 300 pages, à un sujet qui devrait toujours le rester… Une façon très souple d’abor­der des rudi­ments pas forcé­ment sédui­sants, mais ô combien néces­saires quand on souhaite garder la musi­ca­lité au centre de l’équa­tion. Car c’est bien là l’enjeu de ce livre : nous faire (re)penser la produc­tion afin de nous recen­trer sur l’es­sen­tiel : la musique.

Musi­cian’s Survi­val Guide to a Killer Record, par Mixer­man – Mixer­man Publishes – 298 Pages. 

Inter­view d’Eric Sara­fin, alias Mixer­man

À l’oc­ca­sion de la sortie de son dernier livre Musi­cian’s Survi­val Guide to a Killer Record, nous avons eu la chance de nous entre­te­nir avec l’in­gé­nieur du son, produ­cer et musi­cien Eric Sara­fin (Ben Harper, Forei­gner, Hillary Duff, Life­house) alias Mixer­man, afin d’en savoir plus sur ses moti­va­tions quant à l’écri­ture d’un ouvrage destiné aux musi­ciens, et son regard sur l’in­dus­trie de la musique actuelle.

MixermanBootz : Comment t’es venue l’idée d’écrire un livre sous cette forme ?

Mixer­man : En fait, je traîne pas mal sur les forums, régu­liè­re­ment, y compris Face­book d’ailleurs, et j’ai remarqué qu’il y avait de plus en plus de groupes qui parlaient d’au­dio, desti­nés aux home-studistes, aux musi­ciens, aux amateurs de DIY, mais aussi aux profes­sion­nels de l’au­dio. Et j’ai vu qu’il y avait de plus en plus de musi­ciens qui venaient et posaient des ques­tions. Plein de musi­ciens déboulent et répondent aux ques­tions et ça instaure une grande confu­sion dans la tête des gens, parce que les musi­ciens essaient de raison­ner comme des ingé­nieurs du son – et ce n’est pas une bonne chose ! [Rires] Évidem­ment on a besoin des ingé­nieurs du son – je ne dénigre pas du tout, bien au contraire ! – mais je veux dire par là que, quand tu es l’ar­tiste, le produ­cer, le mana­ger et l’in­gé­nieur, eh bien la première casquette à lâcher est celle de l’in­gé­nieur parce que, honnê­te­ment, c’est la moins impor­tante de toutes dans ce que tu es en train d’ac­com­plir. Par exemple, quand je vois des musi­ciens poser des ques­tions sur la fréquence d’échan­tillon­na­ge… Du style : « Est-ce que c’est impor­tant la fréquence d’échan­tillon­nage ? » Et les ingé­nieurs profes­sion­nels de répondre : « Oh évidem­ment, je ne travaille qu’à 96 kHz ! » Mais cette personne qui répond est un profes­sion­nel, qui travaille tous les jours, et qui fait les choses pour un résul­tat opti­mum qui devrait, au final, lui faci­li­ter la vie. En revanche, du point de vue du musi­cien, ça ne va pas forcé­ment être le cas, et ce n’est pas ça qui va faire en sorte que son disque soit meilleur ou plus mauvais. 

Je me suis rendu compte que les musi­ciens avaient besoin d’une sorte de « guide » pouvant analy­ser un peu toutes les infor­ma­tions concer­nant l’en­re­gis­tre­ment, de manière à ce qu’ils puissent prendre des déci­sions effi­caces et pratiques, plutôt que de penser comme des ingé­nieurs du son. Du coup, je reviens un peu sur la façon de penser la produc­tion d’un disque dans des termes un peu plus musi­caux, pour que les gens puissent faire leur disque en étant au meilleur d’eux-mêmes, c’est-à-dire en tant que musi­ciens.

Comment t’es-tu mis à leur place ? T’es-tu basé sur ta propre expé­rience de musi­cien ?

Mixerman-MasterclassEn fait, en 2015 j’ai démé­nagé de LA à Ashe­ville, qui est une petite ville de 100 000 habi­tants [NDA : oui, comparé à Los Angeles, Ashe­ville est une petite ville, en effet…!] située en Caro­line du Nord, au sud des montagnes Appa­laches. C’est une ville de taille moyenne, avec une énorme commu­nauté de musi­ciens. Le ratio de musi­ciens par habi­tant dans cette ville est juste incroyable. Et il y a des tonnes de petits home studios, à tel point qu’on a carré­ment lancé un forum pour les gens du coin ; il y a quelques chose comme 140 ingé­nieurs du son sur place ! Ça te donne une petite idée de l’im­por­tance qu’a la musique dans cette ville, compte tenu de sa taille. Beau­coup de musi­ciens en vivent, mais pas forcé­ment bien, il y a plein d’en­droits pour jouer car c’est une ville touris­tique un peu « arty » – les gens viennent ici pour écou­ter de la musique – mais je pense qu’il y a trop d’en­droits pour jouer, trop de musi­ciens et trop de concur­rence entre eux. De fait, les musi­ciens se retrouvent à tour­ner dans la région et ils ont besoin d’avoir un produit à faire écou­ter. J’ai rencon­tré tous ces musi­ciens, j’ai appris à les connaître, je suis même devenu ami avec certains d’entre eux et je me suis rendu compte à quel point il était diffi­cile pour un musi­cien d’en­re­gis­trer. Parce qu’en effet, ils ont toute la puis­sance que je pouvais avoir, disons, au milieu des années 80, quand j’ap­pre­nais à faire des disques, mais ils n’ont pas le temps que j’avais pour le faire car ils sont musi­ciens ou artistes ! Et ça prend des années pour deve­nir bon dans ce domaine qu’est l’en­re­gis­tre­ment. Pour quelqu’un comme moi qui s’est retrouvé à enre­gis­trer, jouer et produire en même temps, sur diffé­rents disques, je sais qu’à un moment, il y a un de ces aspects qui finit par en pâtir. Au fil des années, j’ai réalisé que si je ne pensais pas trop à l’en­re­gis­tre­ment, si je me concen­trais unique­ment sur l’in­ter­pré­ta­tion et l’ar­ran­ge­ment et tout ce qu’il y a autour, l’en­re­gis­tre­ment se « fait un peu tout seul ». Ça ne veut pas dire qu’on ne doit porter aucune atten­tion à l’in­gé­nie­rie de l’en­re­gis­tre­ment – bien au contraire ! – mais si j’avais dû me pencher un peu moins sur une de ces fonc­tions, du point de vue du musi­cien, c’est bien le poste d’in­gé­nieur du son.

J’ai donc passé du temps à parler avec ces musi­ciens, j’ai vu à quel point ils étaient fauchés et combien ils devaient lutter pour travailler, je les ai écou­tés, j’ai écouté leurs enre­gis­tre­ments et j’ai essayé de comprendre où était le problème. J’ai rassem­blé mes forces pour écrire un livre, basé sur toutes ces infor­ma­tions collec­tées au fil des années, aussi bien auprès de ces personnes qu’au sein des forums.

C’est donc une collec­tion de plusieurs points de vue ?

C’est un point de vue, mais basé sur des mois d’ob­ser­va­tions du monde réel. Quand tu sors de ton studio, tu te rends compte qu’il y a un vrai besoin pour les musi­ciens d’en­re­gis­trer ; mais il faut qu’ils puissent enre­gis­trer vite et bien. Le défi c’était ça en quelque sorte. Je me suis donc appuyé sur mes connais­sances pour propo­ser quelque chose qui aille dans ce sens, et qui puisse être utile aux musi­ciens. 

C’est pour cette raison que tu l’as appelé « Survi­val Guide » (Guide de Survie, en français) et que, même si on retrouve certaines notions que tu as déjà abor­dées dans tes précé­dents ouvrages, ce n’est pas qu’un livre de plus sur l’en­re­gis­tre­ment…

Mixerman - 1C’est vrai, à certains égards :  il y a des recoupes un peu inévi­tables que l’on peut faire avec Zen and the Art Of Mixing ou Zen and the Art Of Recor­ding, bien sûr, mais c’est à cause du sujet prin­ci­pal. En revanche, Musi­cian’s Survi­val Guide…, je l’ai vrai­ment fait à l’in­ten­tion des musi­ciens et, oui, comme tu le soulignes, c’est un « Guide de Survie ». Le truc avec un guide de survie c’est que, si tu es en avion, que tu te crashes et que tu échoues sur une île déserte, tu fais avec ce que tu as à portée de main. Tu vas utili­ser les ressources dont tu disposes sur cette île, peut-être les ressources liées au crash en lui-même : c’est tout ce dont tu disposes pour survivre en fait ! Tu dois te débrouiller. Le postu­lat de base de ce livre est le suivant : tu es musi­cien, tu as certai­ne­ment quelques micros à ta dispo­si­tion, tu as certai­ne­ment une STAN, un ordi­na­teur, une inter­face, un mini­mum d’équi­pe­ments. Tu disposes d’une pièce qui, certes, n’est pas la meilleure pièce du monde pour enre­gis­trer certaines choses mais, à un moment, tu dois adap­ter tes exigences aux moyens que tu as et avoir une atti­tude du genre : « OK, voilà ce que j’ai à ma dispo­si­tion, j’ai un nombre limité de choses, voilà comment ça, ça marche ! » Et si tu sais exac­te­ment comment les choses dont tu disposes fonc­tionnent, eh bien tu peux faire un super enre­gis­tre­ment ! Si tu le fais sans tenir compte de tes moyens réels, ton enre­gis­tre­ment ne sera pas aussi fabu­leux que ce à quoi tu t’at­tends. Mais si tu utilises correc­te­ment les moyens dont tu disposes, tu peux faire un super disque dont tu seras fier toute ta vie. Donc, en gros, j’ai essayé de distil­ler un peu l’es­sence de la produc­tion, de l’en­re­gis­tre­ment et du mixage pour qu’une seule personne – celle qui fait le disque – puisse l’ap­pré­hen­der et je lui donne les outils dont elle a besoin pour accom­plir toutes ces tâches. 

Penses-tu que la tech­no­lo­gie a déli­bé­ré­ment changé la façon dont on voit et pense la produc­tion musi­cale aujour­d’hui ? Je pense au fait de pouvoir faire, défaire et refaire, au point de ne jamais finir nos projets…

Tu sais, la tech­no­lo­gie a toujours été un outil, mais dans notre métier, elle est aussi géné­ra­trice de tendances ; dès qu’une nouvelle tech­no­lo­gie est intro­duite, c’est frais, c’est nouveau, et les gens font des choses avec qu’ils ne pouvaient faire aupa­ra­vant. La Linn­drum en est le parfait exemple. La musique a pris une nouvelle tour­nure au début des années 80, notam­ment dans la Pop – si on la compare à la Disco qui se faisait dans les années 70. Et tout ça a eu à voir avec cette petite boîte à rythmes de Roger Linn, et l’ar­ri­vée des synthé­ti­seurs abor­dables aussi. De même, quand les ADAT sont sortis, il y a eu plein de disques qui ont été enre­gis­trés dans le milieu des années 90, qui n’au­raient jamais pu voir le jour autre­ment.

Mixerman - 5Ensuite on a vu Auto-Tune arri­ver et aujour­d’hui c’est un outil qui est utilisé quasi­ment de manière systé­ma­tique ; en fait, la ques­tion n’est plus de savoir si tu utilises Auto-Tune ou pas, la ques­tion est de savoir si tu veux entendre le son d’Auto-Tune ou non ! [Rires] Aujour­d’hui, c’est parfai­te­ment accep­table, alors qu’il y a 15 ans, les gens auraient dit : « Oh non, ne corrige pas cela, pas d’Auto-Tune, s’il te plaît ! » Aujour­d’hui, cela fait partie inté­grante du proces­sus. La tech­no­lo­gie influe donc sur nos déci­sions de produc­tion, et sur notre façon de travailler bien sûr. Ça m’a bien fait marrer quand les STAN ont commencé à deve­nir popu­laires, les gens allaient sur le net pour apprendre à se servir des séquen­ceurs audio, ils commençaient avec la MAO – pas dans le monde analo­gique comme ce fut le cas pour moi – et j’en­ten­dais souvent « Oh mais moi je peux faire plein de trucs avec ma STAN que tu ne peux pas faire sur un magnéto 2’’ ! » Et bien sûr, cela était complè­te­ment faux ! Il y a plein de choses que tu peux faire plus rapi­de­ment avec un séquen­ceur que sur un magné­to­phone 2’’, mais il n’y a rien que l’on ne puisse faire sur une STAN qui ne soit pas issu ou inspiré de ce que l’on faisait déjà. La tech­no­lo­gie nous a donc permis d’édi­ter plus faci­le­ment, et si c’est plus facile et plus rapide d’édi­ter aujour­d’hui, alors tu peux prendre un batteur qui n’est pas très bon et le reca­ler dans le timing. Et donc toute cette tech­no­lo­gie a à voir avec la produc­tion ; mais en fin de compte, rien de tout ça n’a d’im­por­tance ! Ce qui compte, c’est la chan­son, l’in­ter­pré­ta­tion et l’ar­ran­ge­ment. Et ça c’est l’en­re­gis­tre­ment, déjà. La tech­no­lo­gie est un vague condensé de modes, de lubies, de passades, peu impor­te… Ça n’a plus d’im­por­tance qu’un kick provienne d’une Linn­drum ou d’un mec qui appuie sur une pédale de grosse caisse. La grosse caisse aura toujours la même fonc­tion dans la produc­tion. Seul le timbre et la couleur changent. 

Tu travailles dans l’in­dus­trie musi­cale depuis plus de 30 ans main­te­nant, tu as connu pas mal d’évo­lu­tions tech­no­lo­giques. Penses-tu que les musi­ciens ont un peu aban­donné leur « savoir-faire » de musi­ciens au profit de la tech­no­lo­gie, comparé aux chan­ge­ments que tu as pu consta­ter dans les années 80, ou est-ce que c’est la même chose…?

Je dirais sans aucun doute que l’avè­ne­ment des stations audio­nu­mé­riques a fait chuter de manière consi­dé­rable le niveau moyen des musi­ciens. Après c’est juste un chiffre. Ça ne veut pas dire que le meilleur guita­riste du monde en 2000 ne sera pas l’un des meilleurs guita­ristes au monde, quelle que soit l’époque. Ce n’est pas ça. C’est juste que, d’un point de vue global, il y a de moins en moins de très bons musi­ciens – parce que la plupart des gens se reposent sur la tech­no­lo­gie pour corri­ger leur jeu, au lieu de s‘ap­puyer sur la pratique de leur instru­ment pour l’amé­lio­rer. Donc oui, bien sûr, cela a un effet indé­niable sur le niveau géné­ral, et ça risque même de conti­nuer dans ce sens.  

Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de super musi­ciens ! Au contraire ; ce qu’il y a de bien aujour­d’hui, c’est que, peu importe tes goûts en matière de musique, aujour­d’hui, tu es en mesure de trou­ver des gens qui vont jouer cette musique. Et ce qu’il y a de bien à travailler dans l’in­dus­trie de la musique aujour­d’hui, c’est que, quel que soit le genre de musique que tu décides de faire, tu trou­ve­ras toujours des gens qui vont l’ai­mer ! Tu peux donc trou­ver ton public, et vendre à ce public ; c’est une grande force ! C’est certai­ne­ment l’avan­cée tech­no­lo­gique la plus impor­tante que nous ayons pu voir dans cette indus­trie.

C’est une pers­pec­tive très posi­tive !

C’est très posi­tif en effet ! Je suis réel­le­ment opti­miste. À un moment donné, ces grosses socié­tés seront obli­gées de payer ce qu’elles doivent payer [aux artistes, NDA] ; peut-être que cette nouvelle loi qui vient de passer aux États-Unis va aller dans ce sens, nous verrons bien… J’ai l’im­pres­sion qu’en Europe vous êtes bien meilleurs pour main­te­nir Google et toutes ces grosses entre­prises hi-tech sous pres­sion, comparé à ce que nous sommes capables de faire aux États-Unis. Ces socié­tés conti­nue­ront de croître jusqu’au moment où nous n’au­rons pas d’autres choix que de les stop­per.

Dernière ques­tion : peut-on s’at­tendre à une suite des fameuses Daily Adven­tures of Mixer­man ?

Mixerman-3J’en ai écrit une ! [Rires] Je l’ai inti­tu­lée #Mixer­man and the Billion­heir Appa­rent ! [Voilà ce qui arrive quand un jour­na­liste ne fait pas son travail correc­te­ment… mea culpa! NDA] Et ça a été un gros flop ! [Rires]  D’ailleurs, je ne comprends pas bien pourquoi ça a été un tel flop ; mais bon, c’est comme ça…! Enfin si, il y a un paquet de raisons qui ont fait que ce livre n’a pas pas marché. D’abord parce que la fiction est un genre beau­coup plus incon­sis­tant que les livres « péda­go­giques »… Et puis, dans cet ouvrage, j’in­siste sur le fait que l’in­dus­trie musi­cale nous escroque comme jamais, et je pointe du doigt les inéga­li­tés dans ce milieu. Je veux dire, il y a toujours eu des inéga­li­tés, la fameuse règle du 80/20, mais aujour­d’hui il semble­rait que ce soit plus la règle du 98/2, pour laquelle 98% des profes­sion­nels n’ar­rivent plus à vivre de leur métier pour seule­ment 2% qui le peuvent. Les socié­tés qui s’en sortent le mieux sont les plus grosses entre­prises qui engrangent des millions de dollars chaque année, et qui nous disent : « Nous ne pouvons plus payer les artistes ! » et qui jouent aux pauvres. C’était le message initial du livre. Je pense avoir touché une corde sensible.

J’ai donc tiré un certain nombre de leçons de cette expé­rience et je ne vais pas tour­ner le dos aux livres de fiction ; je vais bien refaire un livre de Mixer­man ! – proba­ble­ment plus tôt que prévu. J’ai quelques idées pour un nouveau livre de fiction qui, à mon avis, va plaire à pas mal de gens !

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