Un test un peu particulier aujourd’hui puisqu’il s’agit de la première pédale d’une toute jeune marque française naissante, et que cette marque fait le choix un peu radical de s’adresser directement aux bassistes avec une pédale très typée pour leurs usages. Mais derrière la marque se retrouvent 3 bassistes dont un bien connu des AFien, ceci explique sans doute cela.
Le cékoidon du jour
L’Overbass est une pédale d’overdrive pour basse, qui offre un nombre de réglages limité pour un nombre de fonctionnalités assez conséquent. La première chose qui frappe en recevant le paquet est… le paquet, c’est-à-dire le packaging. Nos petits Français ne font pas les choses à moitié, avec une pédale livrée dans une boîte en bois gravée du nom et du logo de la marque et de la pédale, ceinturée d’un ruban rouge cacheté à la cire, l’ensemble évoquant nettement l’emballage d’une bouteille d’un alcool millésimé ou autres gourmandises de terroir. C’est rare, et ça mérite d’être signalé.
Dedans, on trouve la pédale elle-même, dans son boitier d’alu brillant où les logos et inscriptions sont non pas sérigraphiés, mais carrément gravés dans le métal. La marque offre même en option la personnalisation sur la plaque du fond du boîtier, ainsi l’exemplaire de test reçu comporte un magnifique logo Audiofanzine du plus bel effet. Vous voulez offrir un beau cadeau personnalisé à votre bassiste préféré ? Faites graver un souvenir sur une pédale d’effet ! Dès l’extérieur de la pédale, on est donc en face d’un produit qui se veut très sérieux, voire luxueux. Il faut dire que le prix n’est pas à la portée de toutes les bourses (environ 350€).
Une overdrive, un préampli, une DI et une tonalité sont dans un bateau…
La pédale offre à la fois un nombre limité de réglages (trois potentiomètres en plastique transparent, deux mini-switchs, et tout de même trois footswitchs), et un nombre impressionnant de fonctionnalités.
Faisons un peu le tour :
- deux entrées pour instrument (a priori pour basse), avec chacune un logo rond ou carré pour les différencier (un reste des jeux de la maternelle, ou une inspiration PlayStation ?)
- une sortie jack pour aller vers un ampli ou d’autres pédales
- une sortie DI en XLR
- une prise pour alimentation au format Boss, c’est-à-dire négatif au centre (la pédale accepte, d’après la notice, une tension de 9 à 18 V, je n’ai testé qu’en 9 V)
- un mini switch sélectionnant, pour la DI, si le son envoyé est « pur » ou teinté de l’overdrive
- un second mini switch sélectionnant, pour l’overdrive, le type de circuit de saturation, à transistors ou transistors + diodes
- un potentiomètre de réglage du niveau d’entrée (équivalent au gain de l’overdrive)
- un potentiomètre de réglage du niveau de sortie (pour compenser une éventuelle grosse montée de volume quand on active l’overdrive)
- un potentiomètre de réglage de la « tonalité » sur lequel on reviendra longuement dans la partie sur le son de l’engin
- un footswitch d’activation pour l’overdrive
- un second footswitch pour la tonalité
- et un troisième pour la sélection entre les deux entrées pour instrument
La pédale est donc une sorte de trois-en-un, voire même quatre ou cinq-en-un, simultanément une overdrive capable de salir plus ou moins votre son, un préampli/boîtier de DI permettant d’envoyer votre son en direct à une console de mixage ou d’enregistrement sans passer par un ampli, une pédale de sélection entre deux instruments pour ceux qui alternent entre deux basses sur scène, une tonalité passive (pratique pour les bassistes qui ont un préampli actif débrayable, mais pas de tone en passif), et le tout simultanément, de façon cumulable à la volée.
On est donc dans la catégorie des pédales type « couteau suisse pour bassiste », et ça tombe bien, car contrairement aux poules, les bassistes savent souvent se servir d’un couteau (suisse).
Plug In Baby
Avec autant de fonctions entremêlées dans le même boîtier, on pourrait craindre de se perdre en route, mais l’engin est en fait remarquablement logique dans son utilisation.
On branche tout d’abord une basse dans l’une des deux entrées (rond ou carré), et l’on utilise au choix la sortie DI pour aller vers une carte son ou une table de mixage, et/ou la sortie jack pour aller vers un ampli. Le premier switch de sélection d’entrée (rond ou carré) sert de mute si un seul instrument est branché. Notons que l’une des deux entrées (le carré) est sur la tranche à droite et l’autre (le rond) sur la tranche arrière, ce qui peut permettre une certaine souplesse dans les branchements dans un pedalboard encombré.
Si l’on utilise la sortie DI, on peut sélectionner si l’on veut bénéficier de l’overdrive ou l’employer pour un son pur. On peut ainsi imaginer une situation en live ou en enregistrement studio où l’on enverrait simultanément le son pur via la DI et le son saturé via la sortie jack (éventuellement via un ampli et une reprise micro), pour mixer ensuite les deux tranquillement selon son goût.
Un second footswitch permet d’enclencher l’overdrive. Le gain se règle à l’aide du potentiomètre d’entrée, il est très progressif, allant d’un son à peine teinté jusqu’à une saturation bien présente, tout en étant très dynamique, c’est-à-dire que le niveau de saturation répond très bien à l’intensité du jeu, ce qui permet aussi de doser naturellement avec ses doigts reliés directement à ses oreilles. Un type de réponse qu’on trouve sur des amplis à lampes et dont la reproduction réaliste dans une pédale d’overdrive est toujours très agréable. Le potentiomètre de volume de sortie permet de compenser l’augmentation du volume qui apparaît conjointement à l’augmentation du gain de l’overdrive.
Les deux « couleurs » d’overdrive disponibles sont bien distinctes, le mode « transistor seul » étant plutôt grassouillet et rappelant fortement un ampli à lampes poussé progressivement dans ses retranchements, tandis que le mode « transistor + diodes » donne une saturation plus moderne et tranchante, tout en étant une démonstration parfaite de comment obtenir un bon son de basse saturée sans perte significative des graves.
Le troisième footswitch permet d’enclencher la « tonalité ». Il s’agit en fait d’un filtre passif dont l’amplitude est fixe (- 3 dB) et dont le potard règle la fréquence entre 200 Hz et 2 kHz. Un concept tout simple, mais qui en fait un réglage du caractère sonore de la saturation, pouvant au choix creuser dans les hauts médiums pour éliminer un côté un peu abrasif de la saturation (apparaissant notamment quand on pousse bien le gain), ou au contraire creuser les bas-médiums et récupérer proportionnellement plus de clarté dans les aigus et d’assise dans les graves. Un potentiomètre dont l’effet est difficile à décrire avec des mots, mais limpide à l’oreille.
Du côté des signaux lumineux, pas de LED visible à la surface du boîtier, ce sont les potentiomètres eux-mêmes qui s’illuminent (!!) selon le code couleur suivant :
- quand on sélectionne l’entrée Carré, le potard de volume de sortie est éteint, le potard de gain/volume d’entrée s’illumine en vert quand on active l’overdrive, le potard de tonalité s’allume en rouge quand on active la tonalité
- si on appuie sur le footswitch de sélection d’entrée pour sélectionner l’entrée Rond (ou couper le son de l’entrée Carré si rien n’est branché dans l’entrée Rond), le potard de volume de sortie devient bleu, le potard de gain/volume d’entrée s’illumine en vert foncé quand on active l’overdrive, et le potard de tonalité s’allume en violet quand on active la tonalité
On a donc en permanence un rappel visuel des fonctions en cours. Personnellement, je trouve un peu redondant le signal visuel du potard de volume de sortie qui s’allume ou non pour indiquer quelle entrée est en cours d’utilisation, combiné avec le changement de couleur des réglages de l’overdrive et de la tonalité. J’aurais préféré que le changement de couleur des réglages de l’overdrive et de la tonalité serve à signaler quel mode d’overdrive est en cours d’usage (transistor ou diode), indépendamment de la sélection de l’entrée rond ou carré.
Et je remets le son
Comment ça sonne tout ça concrètement ? Voici une série d’enregistrements dans lesquels j’ai illustré successivement la course possible des réglages de gain et de tonalité :
- overdrive en mode 1, gain à 9h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 1, gain à 11h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 1, gain à 13h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 1, gain à 15h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 1, gain à fond : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 2, gain à 9h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 2, gain à 11h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 2, gain à 13h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 2, gain à 15h : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
- overdrive en mode 2, gain à fond : tonalité désactivée, activée à zéro, 9h, 11h, 13h, 15h, et à fond
Sur chaque enregistrement, on entend tout d’abord le son pur de la basse, puis j’enclenche la pédale. Le tout est joué aux doigts, sur une G&L El Toro en mode passif avec les deux micros en parallèle (c’est à dire en gros, une Jazz Bass), en direct dans la carte son (Focusrite 2i2) via la sortie DI de la pédale, directement dans GarageBand sans aucune retouche ni compression. Au fur et à mesure des enregistrements, j‘ai ajusté le potentiomètre de volume de sortie de la pédale pour compenser l’augmentation de volume quand j’augmentais le gain.
Je reconnais que l’écoute de l’ensemble pourra vous paraître fastidieuse (sans compter les pains qui se glissent à droite à gauche dans les prises), mais vu la polyvalence de l’objet, impossible de décrire la palette autrement qu’en essayant d’être exhaustif.
- Overbass mode 1 prise 1 01:58
- Overbass mode 1 prise 2 01:44
- Overbass mode 1 prise 3 01:20
- Overbass mode 1 prise 4 00:39
- Overbass mode 1 prise 5 02:13
- Overbass mode 2 prise 1 01:48
- Overbass mode 2 prise 3 01:47
- Overbass mode 2 prise 4 01:39
- Overbass mode 2 prise 5 01:55
Ensuite, deux tests de « mise en situation » avec des sons réglés comme ceci :
- médiator pop rock (overdrive en mode 1, gain vers 11h, tonalité à 11h), en attaquant progressivement de plus en plus fort avec la main droite
- médiator pseudo metal (overdrive en mode 2, gain vers 13h, tonalité à 14h), en attaquant aussi finement qu’un bassiste de death metal suédois
Coté technique : c’est la même basse, micro manche, jouée au médiator, et les boucles sont des loops par défaut de GarageBand.
- Overbass en situation prise 1 00:52
- Overbass en situation prise 2 00:40
J’ai également testé l’engin en répet, branchée dans un ampli (tête Ashdown, baffles Ampeg) : on retrouve le même grain de saturation très progressive et réactive au jeu. Devant un ampli comportant des lampes en préampli, c’est particulièrement croustillant comme boost, comme overdrive ou comme disto bien tranchée. Mes camarades de groupe, outre l’appréciation du look de la pédale, ont même préféré les sons de cette Overbass à mes sons habituels !
Notons tout de même que les meilleurs sons sont obtenus avec l’ajout du Tone en plus du Drive, or, une fois la pédale au sol, il faut appuyer sur deux footswitches simultanément pour enclencher les deux. En effet, les deux circuits sont indépendants, ce qui signifie qu’on peut utiliser le Tone sans Overdrive (ou réciproquement), c’est une bonne idée dans le cadre d’un usage comme préampli pour enregistrer (c’est plus polyvalent), mais un peu moins comme overdrive utilisée au pied… À l’usage, j’aurais préféré que l’activation du Tone passe par un switch classique plus qu’un footswitch, c’eût été tout aussi polyvalent comme préampli et plus ergonomique comme overdrive. Mais les deux footswitches sont assez rapprochés pour que ça reste utilisable.
Un plus un plus un égal ?
Passé les quelques premiers instants de manipulation, on en vient à des réflexes d’une pédale de saturation tout à fait classique : on ajuste le gain et la tonalité avec ses oreilles tout en jouant, on ajuste le volume de sortie selon le niveau souhaité, et zou. L’utilisation en tant que préampli, directement dans une interface audio, présente une polyvalence impressionnante. Du son à tendance vintage à peine coloré, jusqu’à la tronçonneuse meurtrière, la gamme de sons que l’on peut tirer de l’engin reste toujours parfaitement musicale et utilisable. Les saturations les plus élevées du mode transistor rappellent les sons de basse des années 70 avec les gros amplis Ampeg poussés à bloc, le mode transistor + diode permet l’accès à des saturations plus tranchantes qui doivent faire merveille dans les contextes les plus métalliques, mais pas seulement.
Branchée en tant que pédale d’overdrive entre une basse et un ampli, c’est à nouveau une très bonne solution, d’une polyvalence rare au regard du faible nombre de potentiomètres (pas d’égalisation complexe ou de potard de « voicing » ici, et encore moins de cumul des deux difficile à gérer – suivez mon regard…). Pour un premier produit, même pour le prix, c’est presque un sans-faute, j’ai hâte de voir les prochaines propositions de cette toute jeune marque !
Interview
Quelques questions à David Lo Pat, co-fondateur de la marque
Q : Comment est venue l’idée de lancer cette marque, et cette pédale en particulier ?
R : À part moi, il y a dans l’équipe un autre AFien connu (FloSon) et son frère qui est électronicien. L’idée de départ de la pédale vient d’un cadeau fait à FloSon (qui est guitariste et bassiste) par son frère : une pédale d’overdrive personnalisée. Je joue dans le même groupe que FloSon et j’ai eu l’occasion de jouer sur cette pédale, que j’ai trouvé excellente, et très adaptée à la basse. Une idée en appelle une autre, l’envie de changer de vie et de boulot… nous avons fini par nous regrouper pour lancer la marque, en utilisant ce circuit comme base pour concevoir une pédale pensée pour être la meilleure amie du bassiste.
Q : Où peut-on trouver la pédale ?
R : Nous avons fait le choix de ne pas vendre en direct, nous sommes concepteurs et fabricants, pas vendeurs, et nous ne voulions pas mélanger les genres. On peut donc trouver la pédale dans des vraies boutiques, où l’on peut l’essayer sur place, se faire un avis, et emporter un modèle de série ou commander un modèle personnalisé. Chaque boutique dispose d’un modèle de test avec le logo de la boutique gravé dessus, ainsi si vous achetez la pédale, vous aurez un modèle neuf scellé dans son emballage… et le déballage fait partie de l’expérience du custom fait main !
Q : Quels sont vos prochains projets ?
R : La prochaine pédale arrive le mois prochain, elle s’appellera The Parasite, et c’est un nouveau genre d’effet, pas forcément réservé aux bassistes, mais bien sûr utilisable à la basse. Ensuite, nous avons plein d’autres projets ! Notre idée est de proposer des effets « fun », qui font des choses différentes, pas forcément une gamme classique avec des énièmes overdrives et distos pour la guitare, un compresseur pour la basse et des modulations classiques genre chorus et flanger… Nous allons proposer autre chose.
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