Amis guitaristes et bassistes, vous ne connaissez pas de batteur et les boîtes à rythmes conventionnelles sont trop compliquées pour vous ? Alors imaginez-vous créer des patterns de batterie sans jamais lâcher votre instrument à cordes. C’est beau de rêver, non ? Pourtant, Digitech l’a bel et bien fait.
Digitech occupe une place à part dans l’univers des effets pour guitares. Rarement cité parmi les marques qui comptent, le fabricant n’en reste pas moins une valeur sûre dont les produits présentent souvent un bon rapport qualité/prix. Surtout, le constructeur se permet régulièrement des folies en développant des machines au concept innovant. Découvrez la SDRUM !
Le concept
La SDRUM s’inscrit dans la droite lignée des pédales Trio de Digitech. La Trio ? Mais oui, rappelez-vous, cette étonnante machine proposait aux guitaristes un accompagnement basse/batterie automatiquement généré en fonction du jeu de l’instrumentiste. Il suffisait de jouer une série de notes pour que la basse suive le musicien et que la batterie s’adapte à son rythme. La SDRUM reprend le principe de génération automatique d’un accompagnement musical, mais se concentre exclusivement sur les sons de batterie. De plus, il ne s’agit plus de jouer une mélodie pour créer un morceau, mais bien de littéralement jouer de la batterie en frottant les cordes d’une guitare ou d’une basse. Ça y est, nous avons capté votre attention ? Alors, permettez-nous un bref retour en arrière.
La SDRUM prend la forme d’une pédale dont les dimensions et le poids sont quasi-similaires à celle de la Trio première du nom (13,34 × 7,62 × 6,22 cm, et 0,52 kg). Le châssis blanc est sobre, mais il est parsemé de nombreux boutons lumineux et d’une sérigraphie élégante. C’est plutôt joli ! Deux gros potards permettent de régler le volume et le tempo des rythmes de batterie générés, alors que deux autres, cette fois crantés, offrent la possibilité de naviguer entre différents sons de batterie et de régler certains paramètres. Huit petits boutons donnent accès à différentes fonctions, et deux gros pads façon MPC permettent de jouer des rythmes directement sur la pédale. On peut donc générer des batteries en frottant les cordes de sa guitare, ou bien en s’improvisant beatmaker.
La pédale est équipée d’un port USB pour les mises à jour, d’une connexion dédiée aux loopers JamMan afin de synchroniser les machines, d’une entrée pour instrument, d’une entrée pour un footswitch externe, et de trois sorties différentes : Amp, Mixer L et Mixer R. La première est dédiée aux amplis guitares et basses. Si vous l’utilisez seule, le son de votre guitare et les batteries créées par la SDRUM sortiront de votre ampli. Les sorties Mixer L et Mixer R sont de niveau ligne et permettent de diffuser les sons de guitare et de batteries dans une sono ou une interface audio. Si vous en utilisez une seule, le son sera mono, alors qu’il sera stéréo en connectant les deux. Attention, le son de guitare ressemblera à celui d’un instrument branché dans une DI, et le signal est plus faible que celui des batteries. Heureusement, il existe une alternative : utiliser les trois sorties à la fois ! En faisant cela, le signal de la guitare se retrouvera uniquement dans la sortie Amp, et le signal des batteries dans les sorties Mixer. De cette manière, vous pourrez diffuser la batterie sur un système son en stéréo, et jouer de la guitare à travers un véritable ampli. Il est même possible de connecter la sortie Amp à une interface audio pour utiliser les simulations d’amplis et de baffles de votre choix. Enfin, il n’y a pas de sortie casque contrairement à la Trio.
La création de motifs rythmiques
Comme nous l’avons indiqué, il est possible de créer des motifs de batterie en frottant les cordes d’une guitare. Pour être précis, cela marche avec une guitare électrique, une guitare électroacoustique, ou une basse. Une technologie appelée BeatScratch offre la possibilité d’assigner aux cordes graves de l’instrument un « kick », et une « snare » aux cordes aiguës. Un mode de calibrage est d’ailleurs là pour s’assurer que la SDRUM comprendra vos intentions.
Cela peut paraître étonnant, mais le système marche à merveille ! Il faut par contre s’y prendre de la bonne manière. En effet, on comprend rapidement qu’il faut utiliser le BeatScratch en bloquant la résonance des cordes avec la main gauche, et en grattant avec la main droite comme on le ferait avec une Wah Wah pour obtenir un effet façon Voodoo Child (Slight Return). Il est alors très facile de créer un enchainement assez fluide de kicks et de snares. Une fois que l’on adopte cette technique et que l’on a bien calibré la guitare, le tracking est bon. Il faut un peu d’entrainement, mais l’on arrive à réaliser les rythmiques Kick/snare que l’on a en tête. Il arrive que la pédale bafouille et qu’un kick remplace une snare, mais c’est la plupart du temps dû au manque de précision du musicien. L’utilisation d’un médiator peut d’ailleurs aider.
Les kicks et les snares que l’on produit avec la guitare vont servir de base à la génération d’une rythmique complète. En activant le footswitch de la pédale, celle-ci va se mettre en mode « apprentissage ». Il suffit alors de jouer un rythme, puis d’activer à nouveau le footswitch. C’est magique : votre motif basique va se boucler et prendre vie avec la création automatique de hats et de rides. Comme avec la Trio, une fois le mode « apprentissage » enclenché, la pédale va attendre le premier grattage de cordes avant de commencer à enregistrer. Par contre, il faudra « boucler » votre pattern en appuyant une seconde fois sur le footswitch bien en rythme, de façon à ce que la transition soit naturelle. Sachez qu’il est possible de créer une base kick/snare de quatre mesures maximum.
Grâce à différents boutons, vous pouvez choisir les sons de kicks et de snares, différents styles de hats et rides, et même modifier le tempo. On peut faire cela après avoir créé un motif, ou bien avant ! Il est donc possible de préprogrammer les sons de la batterie et le tempo avant de jouer.
Écoutons tout de suite des extraits dans lesquels nous générons des motifs de batterie en utilisant le système BeatScratch. Dans le premier son, nous avons préprogrammé le tempo avant de créer le pattern afin qu’il colle au delay utilisé. La SDRUM pousse à faire de la musique et, pris par l’inspiration, nous n’avons pas pu nous empêcher de rajouter a posteriori une autre piste de guitare pour ajouter des petits ornements. Pour le second extrait, nous n’avons rien préprogrammé. La pédale s’est calquée sur le rythme que nous avons produit en grattant la guitare.
- 1 Beatscratch E Pop tempo préprogrammé 02:06
- 2 Beatscratch PWR Tempo reperé par la pédale 02:10
Sachez qu’il est aussi possible d’utiliser les pads pour apprendre un rythme à la SDRUM. C’est certes plus instinctif et peut-être plus précis, mais c’est bien moins fun. Surtout, il faudra avoir la pédale près de ses doigts, ce qui complique les choses. D’ailleurs, nous aurions aimé que les pads aient une sensibilité légèrement accrue. Ce n’est toutefois pas si gênant, puisque, comme avec le BeatScratch, la vélocité n’est pas prise en compte.
La programmation des batteries
La SDRUM est certes là pour générer des parties aléatoires, mais l’aspect programmation de batteries est essentiel. La personnalisation des batteries est basée sur quelques potards et des petits boutons permettant d’activer des fonctions alternatives. Les LED et les boutons lumineux jouent donc un rôle essentiel pour avoir un retour visuel des différents paramètres, et savoir où l’on en est. On peut, bien entendu, créer un pattern, puis modifier chacun des réglages pour obtenir le rythme et les sons que l’on aime. Mais lorsqu’on maîtrise bien la pédale, on peut faire ces choix en amont, puis enregistrer et boucler à la volée. C’est là que la SDRUM est puissante, d’autant plus que l’on peut enregistrer des « chansons » avec des réglages prédéfinis. Il est alors possible de préparer des sets à l’avance tout en les jouant réellement pour adapter le tempo à l’humeur du jour.
En parlant de tempo, la SDRUM reconnaît parfaitement le rythme que vous produirez avec votre instrument ou les pads. Il est aussi possible de taper le tempo sur un bouton façon Tap Tempo, mais il faut utiliser ses doigts puisque le footswitch ne permet pas cela. Le bouton permet de visualiser le rythme grâce à une LED, et cette dernière s’illumine en rouge à chaque début de mesure. Si vous tenez vraiment à gérer le rythme avec votre pied, il faudra acheter le footswitch externe Digitech FS3X. Enfin, sachez que le tempo peut être fixé avant l’enregistrement, ou bien être modifié a posteriori. Pour vous faciliter la tâche, il est possible d’activer un métronome (quand aucune boucle n’est encore enregistrée) ou un décompte (avant qu’une boucle existante ne se lance).
La SDRUM embarque 5 kits de batterie, avec une variation kick/snare pour chacun. Les styles sont variés et couvrent un panel assez large. Jetons une oreille à tout cela.
- 3 Sons Clean 01:00
- 4 Sons PWR avec changement de Tempo 01:22
- 5 Sons Perc 01:00
- 6 Sons Brush 01:08
- 7 Sons E Pop 01:08
Les sons de batterie proviennent de RealiTone et Digital Sound Factory, des spécialistes de la banque de samples. Il s’agit d’échantillons, mais il y en a de nombreux avec des vélocités différentes de façon à créer l’illusion d’un jeu humain. Les sons sont convaincants, mais caricaturaux. Ce sont des grands standards sans grande originalité et un peu génériques. Ne vous attendez pas à être soufflé, mais ce n’est pas pour autant ridicule. La stéréo offre une belle ampleur, et il paraît clair que les sorties Mixer sont à privilégier. Nous avons tout de même branché la SDRUM dans notre Fender Twin Reverb et le résultat n’était pas mauvais.
Digitech applique un traitement particulier au signal de batterie qui provient de la sortie Amp, de façon à ce qu’il ait un meilleur son. Toutefois, le fabricant ne peut faire de miracle, et certaines fréquences ont tendance à se chevaucher, ce qui dénature légèrement le son de guitare. Vous vous éclaterez sans problème à la maison, mais une utilisation plus professionnelle exigera un branchement avec les sorties Mixer.
Comme vous avez pu l’entendre, Digitech a intégré une réverbe à la SDRUM. Elle provient de chez Lexicon et participe grandement à la qualité du son. Vous aurez aussi remarqué que la pédale n’a eu aucun mal à repérer que le rythme de l’extrait 5 est en 3/4. Elle s’est adaptée automatiquement à notre jeu ! Attention, seules les mesures 4/4 et 3/4 sont prises en compte.
À présent, écoutons les différents sons de hats/rides. Il existe trois banques avec 12 variations essentiellement rythmiques et parfois tonales. Le manuel détaille assez bien les caractéristiques de chaque son et les éléments de la batterie que l’on entendra (tom, shaker, tambourin, etc.). Il ne faut donc pas hésiter à le consulter.
- 8 Sons Hats Rides Clean 02:44
- 9 Sons Hats Rides PWR 02:36
- 10 Sons Hats Rides Perc 02:34
- 11 Sons Hats Rides Brush 02:52
- 12 Sons Hats Rides E Pop 02:46
En plus des kits et des différents sons de hats/rides, de nombreuses options permettent de varier les batteries. On peut notamment modifier l’intensité des hats/rides, changer l’intensité générale, ou encore passer d’un groove Straight à un groove Swing. Une dernière fonction modifie la richesse de la batterie : Simple, intermédiaire, ou Busy. Écoutez :
- 13 Changement intensité Hats Rides E Pop 00:40
- 14 Changement intensité partie Brush 00:50
- 15 Straight puis Swing Perc 00:38
- 16 Modes Simple, Intermédiaire, puis Busy PWR 00:48
Si la relative faible quantité de kits de batterie peut inquiéter, il faut bien avouer que les nombreuses variations de hats/rides et les paramètres d’intensité et de groove offrent une grande polyvalence. Sans rivaliser avec d’autres solutions en termes de quantité, la SDRUM devrait combler la plupart des guitaristes et bassistes.
La composition de chansons
Avant de conclure ce test, nous nous devons d’aborder la section « chanson » de la SDRUM. Il est possible d’enregistrer jusqu’à 36 presets de sons de batteries, composés de trois parties chacun. Ces parties correspondent aux trois grands moments d’un morceau : le refrain, le couplet et le pont. À tout moment, on peut naviguer entre chaque partie en appuyant une fois sur le footswitch de la pédale. Le changement de partie se fait dans l’ordre suivant : Couplet —> Refrain —> Pont. Si vous appuyez deux fois rapidement sur le footswitch alors qu’un couplet est en train de jouer, vous passez automatiquement au pont. Ce n’est pas forcément évident, et il faudra acheter le footswitch FS3X pour pouvoir sélectionner exactement la partie que vous souhaitez avec votre pied.
Afin d’apporter un peu de vie à votre chanson, vous pourrez modifier l’intensité de chaque partie. Vous souhaitez avoir des couplets dynamiques et des refrains plus calmes ? C’est possible, et l’inverse aussi. Les transitions entre les parties sont naturelles avec des roulements aléatoires assez crédibles. Surtout, nous ne sommes pas face à un looper, et la pédale est donc permissive. Il suffit d’appuyer un peu avant la fin d’une mesure pour que la SDRUM change automatiquement la partie à la fin de cette mesure. De plus, Digitech a corrigé l’un des gros défauts de la Trio. Cette fois, l’on peut arrêter les chansons de manière moins brutale puisqu’un appui long sur le footswitch d’activation stoppera la batterie et enclenchera une cymbale qui résonnera jusqu’à ce que l’on relève le pied.
Enfin, si vous ne souhaitez pas vous embêter à créer vous-même différentes parties, il est possible de générer automatiquement un refrain et un pont à partir de l’enregistrement d’un pattern pour le couplet. La génération automatique d’un refrain ou d’un pont est assez caricaturale, et il faut souvent repasser derrière la machine. Toutefois, c’est très pratique pour se lancer en un rien de temps.
Conclusion
La SDRUM est une pédale unique grâce à la technologie BeatScratch et aux possibilités de programmation. L’on peut créer des rythmes de batterie complexes sans jamais lâcher sa guitare, et c’est une véritable petite révolution. Pour cela, la SDRUM mérite notre Award Innovation. De plus, l’on peut se reposer sur l’aspect automatique de la pédale, ou bien programmer relativement finement, en amont et en aval, des sons et des rythmes. La SDRUM va donc plus loin que la section batterie de la Trio, et c’est un excellent point.
Toutefois, la SDRUM est moins intuitive que la Trio. On ne retrouve pas ce côté immédiat et magique qui consiste à jouer une suite d’accords pour générer un morceau en un rien de temps. Il faut connaître la dernière pédale de Digitech avant de s’amuser réellement, mais, une fois que cela est fait, on s’éclate !
Malgré des défauts mineurs comme la non-sensibilité à la vélocité ou l’impossibilité de régler finement le volume des hats/rides, la SDRUM est une réussite proposée à un tarif très correct vu les possibilités (à partir de 189 €).