Peu de pianistes ont suscité durant leur existence autant de fascination et d'admiration que le canadien Glenn Gould. Même 20 ans après sa mort, des fans du monde entier continuent à glorifier le petit génie de la musique, fascinés par sa manière de jouer, de penser et simplement de vivre…
Naissance et Parcours
C’est le 25 septembre 1932 que naît à Toronto l’un des personnages les plus importants pour la musique qu’ait connu le XXème siècle. Glenn Herbert Gould, fils de Florence (née Grieg) et Russell Herbert sera en effet destiné à un avenir peu commun !
Il commencera l’étude du piano avec sa mère dès 1935, celle-ci remarquant déjà son esprit musical : contrairement aux autres enfants de cet âge, Glenn n’appuie pas en même temps sur toutes les touches du clavier mais préfère déjà en laisser s’évanouir la sonorité avant de passer à une autre note.
Mais son premier 'vrai’ professeur fera son apparition en la personne d’Alberto Guerrero en 1943. Ce pianiste d’origine chilienne lui inculquera tout son savoir au sein du 'Royal Conservatory of Music’ de Toronto jusqu’en 1952, date à laquelle il annoncera ne plus rien avoir à apprendre à son protégé.
De la modestie ? De la lucidité plutôt, tant la technique pianistique du prodige et son approche de la musique sont stupéfiantes. Ce qui frappe d’abord, quand on écoute un de ses disques, c’est la clarté de son jeu, cette musicalité, ce sens inouï du 'staccato’. A le voir jouer avec autant de simplicité, de rapidité et de précision, on croirait presque que tout un chacun y parviendrait. Mais cette apparente simplicité, trompeuse, est le signe d’un grand musicien qui parvient à cacher la difficulté pour faire ressortir uniquement l’essentiel : la musique.
Gould remporte son premier festival de musique en 1944 à Toronto, il gagne une coupe en argent et rafle le grand prix solo de piano ! Mais les festivals et les concours ne seront pas ce qui caractérisera le mieux le pianiste, il reniera tout au long de sa vie ses rassemblements allant jusqu’à se retirer définitivement de la scène…
Concerts et Tournées
Glenn Gould débuta les concerts et les tournées au début des années 1950. Il parcourut beaucoup le monde et, de récital en récital, il joua avec les plus prestigieux orchestres sous la baguette de chefs tels que Leonard Bernstein ou Karajan. Mais au fil des années, son profond mépris de la scène et la distance qu’il affectait en concert ne firent qu’amplifier sa sensation de mal être au milieu d’une foule. A l’âge de 30 ans, il pris alors la décision irrévocable de quitter la scène. Voici quelques mots très 'crus’ à propos du récital cités par Gould lui-même :
« Le récital ? Un rassemblement de gens assis là avec la sueur des deux mille neuf cent quatre vingt dix neuf autres pénétrant les narines de chacun. »
Quitter la scène était paradoxalement pour lui le meilleur moyen de se rapprocher de son public. L’idée qu’il s’était fixée était d’atteindre un certain confort financier afin de pouvoir se consacrer uniquement à ses activités en studio pour l’enregistrement de disques et de documentaires radio et télévisuels.
L’Homme derrière le Musicien
Combien on prétendu que le génie était lié à une certaine forme de folie, d’excentricité… Excentrique ? Gould l’était certainement, non pas pour attirer l’attention sur lui, mais parce que c’était là sa manière de vivre : il aimait la solitude, il aimait les promenades le long du lac Simcoe près du chalet familial d’Uptergrove, accompagné de son chien. Il y passait de longues heures à penser la musique, à la chanter intérieurement pour qu’une fois de retour chez lui, assis devant son piano 'Chickering’ qu’il affectionnait tant, il n’ait plus qu’à laisser couler la musique qu’il venait d’imaginer :
« Ce n’est pas avec les doigts que l’on joue du piano mais avec le cerveau. »
On a souvent parlé d’autisme concernant Gould, et notamment du syndrome d’Asperger. Ses rituels d’avant concert, sa chaise pliante fabriquée au début de sa carrière par son père et qu’il ne quitta jamais, même lorsqu’à la fin de sa vie elle tombait en lambeaux ! Sa façon de toujours se recouvrir de manteaux, mitaines, chapeaux, écharpes, même en plein été afin d’éviter les maladies, son obsession à prendre lui-même plusieurs fois par jour sa tension artérielle et la noter sur un cahier pour en voir l’évolution.
Entre autres choses, les tonnes de médicaments qu’il emportait partout avec lui ont forgé sa réputation d’excentrique…
Sa production discographique
Nombreux sont les disques que Gould sous a laissés. En effet, tout au long de sa vie, l’enregistrement et le studio ont occupés une place à part dans l’univers du pianiste. Surtout connu pour ses enregistrements des œuvres de J.S Bach, Gould est à l’origine d’une discographie qui va bien plus loin, jusqu’à des compositeurs de musique dite moderne, 'sérielle’ ou encore 'dodécaphonique’ comme Arnold Schoenberg ou bien Alban Berg.
Il est évident que c’est par la première version qu’il enregistra en 1955 des Variations Goldberg de Bach que le génie du pianiste éclata au grand jour ! Cette oeuvre, vendue à des millions d’exemplaires dans le monde, entama la carrière de Gould et la clôtura également.
Les Variations Goldberg
Comme pour boucler la boucle, le dernier enregistrement de Glenn Gould, fut en fait son premier puisqu’il réenregistra une nouvelle version des Variations Goldberg de Bach en 1981, jugeant la version précédente (de 1955) comme plusieurs très bons petits morceaux empilés les uns derrière les autres mais sans un véritable sens musical.
Cette nouvelle version, avec des tempos plus calmes et plus cohérents, parue peu après la mort de Gould le 4 octobre 1982 qui succomba à une lésion du côté droit du cerveau. Cette fois il ne remporta pas le combat contre la maladie !
DVD des Variations Goldberg
Le fantasme de Gould d’assister à ses propres funérailles fut en quelque sorte réalisé lorsqu’à la cérémonie d’enterrement retentit l’Aria des Variations Goldberg, enregistrées par Glenn peu de temps auparavant.
C’est ainsi que le génie partit, laissant derrière lui toute sa grâce, son intelligence, sa musique et sa façon de jouer qui, encore tant d’années après, suscitent l’intérêt et le respect des jeunes musiciens, mais aussi celui des plus grands maîtres ! Gardons surtout l’image d’un passionné de la musique à qui il voua toute sa vie…
Source photos : Bibliothèque et Archives du Canada
Repères discographiques, bibliographiques et liens
Coffret rassemblant les deux versions des Variations Goldberg (1955 et 1981) ainsi qu’un cd bonus contenant des extraits de l’enregistrement de 1955 plus la dernière interview de Gould accordée au journaliste Tim Page. Le tout remasterisé ! | |
'Glenn Gould – Une Vie en Images’ : Un livre que je conseille à tous ceux qui veulent découvrir Glenn Gould à travers des images rares et des textes très bien écrits. A posséder absolument ! Editions Flammarion |
Liens Internet :
http://www.collectionscanada.ca/glenngould/index-f.html
https://www.glenngould.com/
http://www.glenngould.ca/index.ie.htmlhttp://archives.radio-canada.ca/IDD-0–18–309/personnalites/glenn_gould/