Chez iMusician, le master est un peu plus cher, et surtout beaucoup plus lent qu'ailleurs. Forcément, on se demande : est-ce que ce serait gage de qualité ? Le suspense est longtemps, vraiment longtemps, resté entier...
Moi Je
On ne peut pas passer à côté, iMusician reprend la célèbre formulation égocentrique que la marque Apple a déclinée pour ses téléphones, tablettes et autres lecteurs de musique. Ce préfixe « i » est d’ailleurs très à la mode dans la musique et le matériel audio depuis quelque temps. On pense à la marque iZotope, aux enceintes iLoud… Avant d’aller plus loin, on va expliquer le contexte de ce test, parce que, sans vous révéler la suite, on se sent un peu obligé de se justifier. Nous avons donc testé iMusician et son Mastering en ligne avec un ordinateur de la marque à la pomme, MacBook Pro plutôt récent, et une connexion internet par la fibre. Une configuration qui d’ordinaire marche bien ! Précisons également qu’on a commencé ce test un lundi, et au vu des difficultés rencontrées, on l’a mis en pause pour aller voir ailleurs, puis on l’a repris un jeudi pour vérifier si cela fonctionnait mieux…
I Me Mine
On commence par une petite incompréhension : le site qu’on doit tester se trouverait sous l’URL imusician.app, mais notre moteur de recherche nous mène lui vers imusician.pro. Aurait-on à faire à des homonymes ? Après quelques clics, on se rend compte qu’il s’agit du même service. iMusician n’est pas seulement un service de Mastering, mais aussi un outil pour distribuer et promouvoir sa musique. Moyennant une commission (10 % par défaut, mais cela peut évoluer en fonction des options choisies), on peut obtenir une distribution numérique sur un nombre important de plateformes de streaming, faire « pitcher » ses morceaux auprès de créateurs de playlists et créer des outils en ligne pour promouvoir ses œuvres. Tout en haut du tableau de bord, on nous encourage à inviter d’autres musiciens et « gagner de l’argent ». Car iMusician est aussi une histoire d’argent : vos écoutes génèrent des euros, qui transitent par ici puisque c’est votre distributeur, vous les réinvestissez dans les services proposés, par exemple, le mastering. À propos d’argent, parlons du prix : un master coûte ici 9,99 €. C’est clairement un des services les plus chers qu’on aura testés ! Pas d’abonnement ni de tarif dégressif, la seule possibilité est le master à l’unité. Il y a tout de même une autre option : « JP Masters », qui est un studio à Boston, propose de travailler pour 42 € par titre. Pas si cher pour un studio, mais notre test porte sur les services algorithmiques, donc on passe notre tour là-dessus.
Des styles, des genres…
Beaucoup de préréglages et quelques paramètres sont accessibles pour donner une direction au traitement qui va être appliqué à nos morceaux. Par style musical, en plus du master « équilibré » par défaut, on trouve quatorze possibilités ! La moitié d’entre elles sont en fait des genres qui appartiennent aux musiques électroniques, mais il reste quelques nuances possibles pour du rock ou du hip-hop. Quelle que soit l’option choisie ici, on a ensuite la possibilité de régler sur trois niveaux chacun des paramètres suivants : Clarté (qu’on imagine dans les aigus), Volume (il n’est pas précisé si cela joue sur le traitement dynamique), Graves, Chaleur (on suppose que cela peut jouer sur les bas médiums) et Médiums. Voici une offre assez conséquente pour agir sur les bandes de fréquences, l’équilibre tonal de notre master. Par défaut, tout est au milieu et vous pouvez augmenter ou réduire d’un cran chaque bande. Reste une dernière option, la possibilité d’activer l’élargissement stéréo. On a souvent regretté le manque de largeur avec d’autres masters obtenus par ailleurs, alors ce bouton nous semble vraiment bienvenu.
… et des galères !
Une fois le fichier téléversé sur la plateforme, on génère une première pré-écoute du mastering dans sa version par défaut. Le site nous indique alors qu’on peut comparer nos pré-écoutes, et on décide de tenter d’aller affiner les réglages de traitement de notre morceau pour générer une deuxième pré-écoute et pouvoir les comparer. Les masters sont un peu chers à l’unité, on adopte donc cette stratégie pour arriver rapidement à quelque chose qui nous plait sans générer trop de fichiers payants. Seul problème, le site ne retrouve plus le morceau dans notre librairie et en tentant de relancer un téléversement, il nous indique maintenant que l’audio de notre fichier est manquant, et ce, lors de nos maintes tentatives. À ce stade-là, en allant dans notre librairie, chaque tentative de téléversement a généré une référence du même nom, mais aucune ne peut être lue, car l’audio est manquant pour chacune d’entre elles. Incompréhension totale ! On tente de vider notre librairie en supprimant tous les fichiers qui y sont présents, mais ça ne fonctionne pas et notre librairie reste inexorablement pleine de ces fichiers qui ne comportent pas d’audio. Aux grandes causes, les grands moyens, on tente donc de changer de compte pour comprendre si notre compte est corrompu pour une raison inconnue ou si on a par mégarde fait dysfonctionner un service efficace en temps normal. On essaie de nouveau de téléverser notre morceau, mais il apparaît que l’audio de ce morceau est maintenant identifié comme étant déjà répertorié, le site nous annonce par conséquent que notre fichier est détecté comme étant dupliqué, et nous demande de l’ajouter depuis notre librairie, ou de vérifier s’il n’est pas lié à un autre compte. On tentera même d’effacer notre premier compte avec toutes ses données pour qu’il n’y ait plus de conflit, mais les développeurs du service nous informent que tous nos fichiers resteront disponibles pendant une période de quinze jours, au cas où nous changions d’avis, et qu’une simple reconnexion nous restituerait l’accès à l’intégralité de nos données.
C’est un véritable casse-tête, et on se décide donc à tenter l’expérience avec un nouveau morceau pour tenter de comprendre si c’est bien la redondance de l’audio de notre fichier qui a fait planter la plateforme. Bingo, on parvient à téléverser notre nouveau morceau et à en générer une version masterisée dans le mode par défaut, ce qui est déjà une petite victoire. Entre temps, on aura aussi expérimenté des difficultés avec la pré-écoute : lorsque celle-ci est disponible, le lecteur apparaît comme s’il lisait le master, alors qu’on entend en réalité le fichier audio d’origine, et c’est seulement après avoir désactivé puis réactivé le bouton master qu’on peut entendre celui-ci. On passe à la caisse et on tente de récupérer notre facture qui met plusieurs minutes avant d’être disponible, alors que notre fichier masterisé apparaît maintenant dans notre bibliothèque, mais mettra lui un bon quart d’heure avant d’être lisible et disponible au téléchargement. Globalement, beaucoup d’actions mettent du temps sur ce site, et la navigation est loin d’être fluide. De nombreuses situations génèrent une petite animation d’attente, lignes grisées et désactivées, comme si un travail était en cours… mais ces situations d’attente n’aboutissent à rien et il faut finalement recharger les pages pour vérifier si le travail est terminé, si le fichier est disponible. Pénible… Le chemin pour générer plusieurs versions du même morceau doit donc passer automatiquement par notre librairie, dans laquelle on retrouve tous nos morceaux téléversés. Le fait de tenter de téléverser plusieurs fois le même morceau provoque une erreur dans le système, qui est apparemment irrémédiable. En tout cas, c’est ce qu’on a expérimenté. On note que le fichier une fois masterisé apparaît dans notre librairie avec le même nom que le fichier d’origine, bien qu’on puisse par la suite le modifier manuellement. On note aussi qu’une fois le master effectué, on trouve très facilement comment le distribuer par les services iMusician, mais pour le télécharger, il faudra d’abord cliquer sur « modifier », ce qui n’est pas très instinctif.
Enfin, des masters
Parlons un peu de son, après toutes ces péripéties, il est temps de se dégourdir les oreilles. Du fait de nos aventures avec les fichiers, on ne pourra pas faire ce test sur les mêmes morceaux qu’on avait utilisés pour les autres services de mastering. Un seul morceau pour cette fois, Dam Gonna Break et ses nombreuses pistes de guitares électriques. On commence par noter que le fichier est limité à –0,4 dB en instantané, et qu’il nous paraît correspondre à peu de chose près à notre master de référence en termes de volume perçu à l’oreille (on analysera par la suite qu’il y a finalement 0,6 dB de plus pour la version de iMusician). Le résultat du mode par défaut est finalement assez prometteur, les dynamiques sont joliment préservées et la balance tonale, bien que légèrement différente de notre référence, nous paraît plutôt à propos. La basse semble légèrement envahissante néanmoins, particulièrement dans les tenues dans ses fréquences les plus graves. Sur un autre plan, on note que toutes les composantes centrales ou légèrement spatialisées ont avancé d’un pas, et nous paraissent un peu trop frontales, au détriment des petites réverbes de guitares et des autres éléments qui sont plus loin dans la stéréo, comme les cymbales par exemple. On est convaincus pour un premier jet, surtout qu’on peu maintenant aller peaufiner notre résultat en rentrant dans les options. On coche l’option Pop / Radio rock ainsi que celle de l’élargissement de la stéréo (qu’on apprécie avec anticipation), on tente de donner un peu plus de mordant dans les médiums, et de diminuer les graves. Les options, même si elles ne sont pas formulées comme ça, nous proposent une sorte d’égaliseur à quatre bandes qui sépare les médiums de la chaleur, qu’on pourra traduire ici comme une bande de fréquences correspondant aux bas médiums. Les pré-écoutes mettent un certain temps à être générées, et le résultat de celle-ci n’est pas satisfaisant, le mix en ressort étriqué et démuni d’assise. On ne sait pas trop si ça peut venir du mode Pop / Radio Rock, mais on prend le parti de plutôt changer nos réglages fréquentiels pour rajouter des aigus, appelés ici Clarté, ainsi que de la Chaleur, donc des bas médiums. Une fois le fichier importé dans notre session, on se rend vite compte que le mode Pop / Radio Rock a augmenté drastiquement le niveau intégré du master, qui finit par plafonner à –7,4 dB LUFS. Il flirte donc avec les chiffres convoités lors de la guerre du niveau que connaissait le milieu du Mastering fin des années 90, début 2000. Les étages de compression sont beaucoup plus poussés et le limiteur se ressent assez fortement dès que le morceau se remplit et que les arrangements se chargent, certains éléments souffrent clairement de ce nouvel équilibre. Néanmoins, l’élargissement de la stéréo nous permet de redonner de la place à une partie des arrangements et l’augmentation des aigus vient homogénéiser l’ensemble du spectre, donner un peu d’air pour faire reculer les éléments qui nous paraissaient trop frontaux lors de notre tentative précédente. Hormis l’augmentation du niveau, on n’arrive pas forcément à déduire ce que le mode Pop a apporté à notre master, mais on a l’impression que ses caractéristiques sont excessives. De la même manière, la correction de la balance tonale nous semble un peu trop marquée par rapport à ce qu’on aurait attendu d’un travail de mastering fin et précis.
Tous les fichiers en 48 kHz et 24 Bits sont dans le fichier archive suivant.
Conclusion
On ressort de notre expérience auditive avec un peu de frustration, parce que la version par défaut était prometteuse, mais nous ne sommes pas réellement parvenus à apporter les corrections nécessaires pour affiner le résultat et le rapprocher de nos attentes. On reste très frileux sur cette pléiade de styles proposés, qui sont pour la plupart des dérivés de musiques électroniques et donc nécessitent ou occasionnent des niveaux de limiteur très élevés. Surtout, si l’objet de notre visite n’avait pas été d’écrire un test, on aurait baissé les bras bien plus tôt et on n’aurait même pas été jusqu’à écouter un master, tant la navigation sur ce site a été compliquée.