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Pédago
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Présentation de la synthèse granulaire

La synthèse sonore - 19e partie

Nous avons exploré dans les deux derniers articles le principe de la lecture d’échantillons. Cela nous a permis, entre autres, de constater que, grâce au numérique, les frontières entre les différents modes de génération du son – par exemple entre ondes simples et échantillons complexes pré-enregistrés — devenaient de plus en plus poreuses.

Accéder à un autre article de la série...

La synthèse granu­laire, sur laquelle nous allons nous concen­trer aujour­d’hui, est une illus­tra­tion supplé­men­taire de cette conver­gence. Elle est basée sur une nouvelle unité de base sonore, que nous avons déjà briè­ve­ment évoquée dans l’ar­ticle 4 de cette série : le grain.
Mais commençons par…

Un tout petit peu d’his­toire

Sans entrer dans des détails qui n’au­raient pas leur place ici, sachez que la synthèse granu­laire a été pour la première fois évoquée de manière théo­rique en 1925 par Norbert Wiener. C’est lui qui a eu le premier l’idée d’ap­pliquer à la musique la notion des « grains d’éner­gie » de la physique quan­tique.

La synthèse granulaire

Mais c’est le prix Nobel de physique et inven­teur de l’ho­lo­gramme Dennis Gabor (voir para­graphe suivant) qui l’a théo­ri­sée en 1947 avant d’être tota­le­ment vali­dée par Martin Bastiaans en 1980. Ce qui n’a pas empê­ché Curtis Roads, dès 1978, d’en implé­men­ter des éléments pour la première fois de manière logi­cielle.

Iannis Xena­kis (voir photo) et le compo­si­teur cher­cheur Barry Truax sont les prin­ci­paux ambas­sa­deurs artis­tiques de ce type de synthèse.

Gabor et les limites de la théo­rie de Fourier

Gabor est parti de la consta­ta­tion que la théo­rie de Fourier, si elle est parfaite pour déter­mi­ner les compo­santes harmo­niques d’un signal sonore, n’est par contre pas capable de déter­mi­ner la loca­li­sa­tion tempo­relle de ces dernières. En consé­quence, elle n’est pas adap­tée à l’ana­lyse et à la resyn­thèse d’un signal évoluant dans le temps.

Pour simpli­fier la chose pour les musi­ciens que nous sommes, on peut dire par exemple qu’elle sera inca­pable de diffé­ren­cier un accord (un certain nombre de notes jouées simul­ta­né­ment) et l’ar­pège de celui-ci (les mêmes notes jouées consé­cu­ti­ve­ment). Cela est dû, entre autres, au fait que la théo­rie de Fourier réduit le signal à des sinu­soïdes simples… de durée infi­nie. Il fallait donc trou­ver d’autres éléments de base que ces dernières si l’on voulait synthé­ti­ser des sons évolu­tifs. Les grains sont la concré­ti­sa­tion de cette recherche.

Les grains au micro­scope

La synthèse granulaire

En effet, les grains présentent un avan­tage énorme par rapport aux sinu­soïdes de Fourier : ils sont déli­mi­tés dans le temps ! Ils disposent à la fois d’un point de départ et d’une enve­loppe modu­lante (voir article 8 de cette série) qui englobe la forme d’onde elle-même.

Ci-contre, l’illus­tra­tion d’une sinu­soïde soumise à une enve­loppe. Cette forme d’onde peut être une forme d’onde simple, ou bien par exemple un signal issu d’autres types de synthèse, par exemple la modu­la­tion de fréquence (synthèse FM) que nous étudie­rons très prochai­ne­ment. La forme d’onde peut en outre avoir été stockée dans une table d’ondes (voir article précé­dent). Ou encore, il peut s’agir d’un élément tiré d’un signal sonore complexe tel que la numé­ri­sa­tion d’une note de musique jouée par un instru­ment.

Chaque grain comporte égale­ment ses propres infor­ma­tions de fréquences — défi­nis­sant sa hauteur — et de phase. La longueur du grain va déter­mi­ner notre capa­cité à perce­voir la hauteur de ce dernier. En effet, il a été prouvé qu’en dessous de 100 ms, l’oreille humaine n’est plus en mesure d’éva­luer la hauteur et le contenu spec­tral (harmo­nique) d’un grain. À noter que plus le grain sera court, et plus il sera aisé de le situer tempo­rel­le­ment, et plus il sera long, plus ce sera son contenu harmo­nique qu’il sera facile d’iden­ti­fier.

La longueur du grain, ainsi que l’am­pli­tude de sa forme d’onde, est défi­nie par son enve­loppe. Celle-ci peut être à segments (attack, « steady state » équi­valent au « sustain » des enve­loppes tradi­tion­nelles, et release) ou « fonc­tion­nelle », c’est-à-dire basée sur une fonc­tion mathé­ma­tique. Elle peut être elle-même sauve­gar­dée dans une table d’ondes — ou plutôt une « table d’en­ve­loppes » dans ce cas précis — avec les mêmes avan­tages que concer­nant les échan­tillons (voir article précé­dent).

L’en­ve­loppe peut être égale­ment affu­blée d’un para­mètre de gestion du pano­ra­mique, permet­tant de loca­li­ser les grains dans l’es­pace.


Lecture des grains

Il ne s’agit plus forcé­ment de lire les grains consé­cu­ti­ve­ment comme lors de la lecture d’échan­tillons « première défi­ni­tion » (voir article précé­dent).  Nous verrons dans le prochain article qu’il existe diffé­rentes manières de lire les grains, chacune faisant l’objet d’une sous-caté­go­rie de la synthèse granu­laire. Toute­fois, on peut dire que dans tous les cas de figure, la lecture est soumise à un para­mètre d’es­pa­ce­ment entre les grains. Ce dernier peut être repré­senté par une fréquence ou bien un temps fixe (période).

La synthèse granulaire

Dans le cas de l’uti­li­sa­tion d’une fréquence, plus celle-ci est basse, et plus l’ef­fet ressenti sera celui d’une ryth­mique, plus elle est haute et plus l’ef­fet sera asso­cié à une hauteur de note.

Ci-contre, des grains sonores regrou­pés de diverses manières : On observe donc – à la lecture de nos deux derniers para­graphes – que si la hauteur de chaque grain est conte­nue en lui-même, la percep­tion que nous aurons de la hauteur globale d’un signal sonore composé de grains dépend de deux facteurs : la longueur de ces grains et leur densité (défi­nie par la fréquence de leur déclen­che­ment).

 

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