Après avoir vu la théorie et les cas pouvant poser souci, nous allons aujourd'hui jeter un oeil aux façons d'identifier les éventuels problèmes. Enfin, nous évoquerons les différents moyens à votre disposition permettant de remédier à tout cela.
Identification
Le premier outil pour repérer les problèmes de phase est tout simplement votre oreille. En effet, avec un peu d’entraînement, il est très facile de savoir lorsque quelque chose cloche. Pour déceler aisément le phénomène de filtre en peigne, il convient d’écouter en mono. Lorsque le timbre restitué par l’enregistrement ne semble pas correspondre au timbre réel de l’instrument capté ou si des harmoniques ressortent de façon agressive, il ne faut pas chercher midi à quatorze heure, c’est la phase qui vous joue un tour pendable ! Il en va de même lorsque le son semble manquer d’énergie. Une grosse caisse « molle », une rythmique funky pas assez incisive ou bien encore une caisse claire plate, alors que les musiciens se la donnent sévère sont autant d’indices désignant le coupable.
Une bonne façon de comprendre cela est de provoquer volontairement le phénomène sur un instrument en lui appliquant un delay très court (inférieur à 25 millisecondes). Cette sensation de « son troué », « mou du genou » ou « agressif un coup sur deux » crève alors les tympans.
Si vous ne faites pas entièrement confiance à vos oreilles, il existe bien entendu des solutions plus « scientifiques » permettant de mettre à nu les éventuels problèmes. Vous pouvez tout d’abord vous servir d’un analyseur de spectre et partir à l’affût du schéma typique du filtrage en peigne. D’autre part, certains plug-ins permettent de décortiquer les soucis de phase d’un signal stéréo, comme par exemple le Blue Cat’s StereoScope Pro ou le freeware Stereo Tool de Flux.
Correction
Bien, passons maintenant aux solutions qui s’offrent à vous si problème il y a. Avant de commencer, dites-vous bien que la méthode miracle n’existe pas et que vous aurez toujours, quoiqu’il arrive, un léger déphasage. Et ce n’est pas plus mal car lorsque cela est bien géré, la palette sonore qui s’ouvre alors est beaucoup plus vaste que celle procurée par le plus bel EQ qui soit. D’ailleurs, si ce n’était pas le cas, cela ferait bien longtemps que nous aurions abandonné l’idée d’enregistrer avec plusieurs micros ! Le but du jeu est donc de trouver le meilleur compromis possible afin de minimiser les interactions néfastes.
À la prise, le plus simple est d’essayer d’inverser la polarité de l’un des deux signaux mis en cause. La plupart des préamplis disposent de cette fonction dont l’effet pourrait se résumer ainsi : cela retourne la forme d’onde comme une chaussette, les « bosses » deviennent des « creux » et versa vice. Par conséquent, là où les signaux s’annulaient, maintenant ils s’additionnent… Et inversement, les fréquences qui s’ajoutaient avant l’inversion de polarité viennent se soustraire à présent. Il est facile de comprendre là où le bât blesse. Cependant, cette solution s’avère souvent suffisamment probante, dans le cas de sons percussifs notamment.
Une astuce beaucoup plus efficace consiste tout bêtement à déplacer les micros afin d’obtenir l’équilibre le plus adéquat. Ça ne mange pas de pain, et le résultat en vaut largement la peine.
Les plus fortunés d’entre vous pourront également investir dans du matériel spécialement conçu pour régler ce type de problème comme par exemple l’IBP de Little Labs (en test sur AF ici) ou encore le Phazer de Radial Engineering. Ces appareils permettent d’ajuster la phase de façon continue, et même de cibler la zone du spectre affectée.
Enfin, il est évident qu’un local d’enregistrement suffisamment traité pour limiter toutes réflexions indésirables vous facilitera grandement la vie.
En situation de mixage, il est bien entendu toujours possible d’utiliser l’inversion de polarité. De plus, avec un peu d’huile de coude et en zoomant sur les formes d’onde, il est relativement facile d’aligner ces dernières. Pour les plus fainéants, il existe même des plug-ins qui s’en chargeront pour vous comme l’Auto-Align de Sound Radix ou le Track Align Pro d’Advanced AudioWaves. Enfin, l’IBP de Little Labs cité plus haut existe également en version virtuelle sur plateforme UAD.
En ce qui concerne les rotations de phase induites par une égalisation, il convient d’utiliser des EQs à phase linéaire pour y remédier. Attention cependant pour les sons percussifs, au phénomène de pré-écho qui peut survenir lors de l’utilisation de ce type d’égaliseur.
Lors de l’utilisation de traitements de spatialisation (delay, réverbération), pensez à toujours vérifier le rendu en mono afin d’éviter toute mauvaise surprise. Ajustez les réglages de vos plug-ins au besoin.
Pour finir, en ce qui concerne les problèmes dus à une mauvaise compensation de latence de vos logiciels, l’une des solutions consiste à faire un rendu de la piste incriminée, d’importer le résultat et de caler la forme d’onde à la main. Sans oublier de vous plaindre auprès des éditeurs des logiciels concernés !
Le mot de la fin
Nous espérons que ces quelques articles auront su répondre à la majorité de vos questions concernant les tenants et les aboutissants de ce vaste sujet qu’est la phase. A priori, vous devriez être à présent suffisamment bien armés pour circonscrire efficacement le moindre souci. Cependant, voici un dernier conseil avant de vous quitter : dans le domaine de l’audio comme ailleurs, rien ne remplacera jamais l’expérience ; alors pratiquez, encore et toujours ! Et nous vous donnons rendez-vous dans les commentaires pour discuter allègrement de vos expériences !