Mes chers amis, nous allons nous pencher aujourd'hui sur ce qui fait le sel de la rumba : j'ai nommé le rythme !
La rumba et la polyrythmie
L’expression rythmique de la rumba repose en bonne partie sur le concept de polyrythmie sur lequel je vais m’empresser de vous fournir quelques rapides explications.
La polyrythmie consiste en la superposition de plusieurs rythmes indépendants dont les différences peuvent se manifester au niveau du tempo, des schémas rythmiques non réductibles entre eux, de la signature rythmique, des accentuations, de la nature binaire ou ternaire des subdivisions temporelles etc. Le polyrythme ci-dessous est un exemple simple et typique de la superposition d’un rythme binaire en haut et d’un autre qui ne l’est pas en bas.
En occident, la polyrythmie est présente depuis le moyen-âge même si la musique classique ne l’a que peu employée jusqu’au 20e siècle. On la retrouve chez nous aujourd’hui beaucoup dans le jazz, plusieurs sortes de rock (notamment le prog et le métal), l’électro et bien entendu dans toutes les formes de musique dite expérimentale. Mais ce matériau musical a de tous temps été très largement employé dans les musiques traditionnelles du monde entier et notamment dans celles provenant du continent africain, dont la rumba. Le fait que la polyrythmie implique des rythmes différents ne signifie pas pour autant qu’elle ne repose pas sur des repères qui assurent sa cohérence et son efficacité. Dans le cas de la rumba, le repère principal est à la fois un instrument et la structure rythmique à laquelle les autres instruments vont pouvoir s’inclure. Son nom est d’ailleurs parfaitement adapté à sa fonction puisqu’il s’agit de la « clave », la clé en espagnol. Pour toutes les formes de rumba, la clave proposera une séquence de cinq coups répétés en boucle. Pour en terminer avec ce paragraphe d’introduction, je dirai seulement que j’ai choisi de vous présenter les exemples avec notre notation solfégique occidentale, même si celle-ci ne pourra représenter au final qu’une approximation de ce que les rythmiques rumba proposent réellement.
Le rythme de la Colombia
Et nous allons tout de suite pouvoir observer à quel point la notation occidentale peut s’avérer un peu défaillante dans la situation présente..
Le rythme de base de la clave dans toutes les formes de rumba est le suivant :
On constate qu’il est noté de manière binaire, et c’est ainsi qu’il sera souvent noté par les musiciens cubains eux-mêmes. Or, la Colombia possède à l’écoute une caractéristique ternaire que nous aurions plutôt tendance à noter de cette manière :
Une formation rythmique complète de rumba ne se limite pas à la clave, et l’on y trouve en général les instruments suivants : les catá (baguettes que l’on tape sur un bout de bois), le tres-dos (conga medium) et la tumbadora (conga basse). Je reviendrai plus en détail sur tous les instruments de la rumba dans le prochain article. Et voici donc à quoi ressemble une partie rythmique complète de rumba :
Et voici la manière dont on noterait cette même rythmique en reprenant le schéma binaire de la clave :
Mais dans la réalité de l’exécution de cette musique par des instrumentistes rompus à l’exercice, aucune de ces deux transcriptions n’est totalement pertinente.
Le rythme du Yambú et du Guaguancó
Le Yambú et le Guaguancó ne se différencient rythmiquement entre eux qu’au niveau du tempo, le schéma étant identique entre les deux styles. Avec les mêmes réserves que pour la Colombia, voici la transcription solfégique de ce dernier :