Pour terminer notre cycle autour de la rumba cubaine, je vous propose de nous intéresser plus en détail aux principaux instruments qui y sont employés.
La rumba étant une musique principalement percussive, on n’y trouve traditionnellement pas d’instrument mélodique ou harmonique en dehors de la voix humaine. C’est donc par cette dernière que nous allons commencer.
Le chant
Dans un groupe traditionnel de rumba, on trouve souvent un ou une soliste au chant, parfois accompagné(e) d’un choeur. S’il est seul, le chanteur lancera la rumba par un appel (la diana) et enchaînera par un texte sur la forme de la « decima » andalouse, soit dix vers de huit syllabes. La diana proviendrait des îles Canaries, à partir desquelles de nombreux migrants embarquaient vers le Nouveau Monde. Quand il y a un choeur, c’est lui qui commence et « lance » le chant du soliste. Le chant est ensuite rejoint par les instruments et enfin par la danse.
Les percussions essentielles
Les percussions sont les reines de l’accompagnement rumba, et nous avons commencé à les évoquer dans l’article précédent. La percussion la plus importante est bien sûr la clave. J’avais déjà souligné la dernière fois la signification symbolique de l’une des traductions de son nom en français, la « clé ». Mais la clave est avant tout dérivée des chevilles en bois que les marins et dockers utilisaient pour réparer les bateaux. Après les esclaves des plantations sucrières, les premiers rumberos étaient notamment des ouvriers maritimes des ports cubains qui ont transformé leurs outils de travail en instruments de musique.
La deuxième percussion importante de la rumba es la catá, composée de baguettes que l’on tape sur un morceau de bois ou de bambou. À Cuba, ce dernier est appelé « guagua » et les baguettes des « palitos ». La catá participe fortement de l’héritage africain de la rumba car son nom est d’origine bantoue et elle-même se trouve être la recréation d’un instrument congolais.
Nous avons enfin les congas, appelés aussi « tumbadoras » à Cuba, composés de trois tambours de taille et de sonorité différentes. Le nom « tumbadora » désigne également le plus grand et le plus grave des trois, appelé aussi « tumba ». Ensuite vient le « dos-tres », ou « repicador », dont la taille moins importante implique forcément une sonorité plus « médium ». C’est lui qui clôture les percussions qui constituent l’ossature instrumentale de la rythmique rumba comme nous l’avons vue dans l’article précédent. Car la dernière et la plus aiguë des « tumbadoras », le « quinto », n’assoit pas la rythmique mais sert exclusivement à l’improvisation.
Le cas particulier du cajón
Le cajón occupe une place très particulière au sein de l’organologie rumba. S’il ne figure guère plus aujourd’hui dans la configuration instrumentale des groupes de rumberos car le plus souvent remplacé par les congas, il a pourtant joué un rôle crucial dans l’apparition et le développement de ce style musical. En effet, les propriétaires des plantations avaient proscrit les tambours parmi les esclaves afin de briser leur culture et de limiter les risques de révolte. Les ancêtres des rumberos se mirent alors à utiliser des caisses et des tiroirs de mobilier pour remplacer leurs percussions traditionnelles. C’est ainsi que naquit le cajón. Il s’agit aujourd’hui d’une caisse en bois dont la face avant qui sert à la frappe est plus fine que le reste. La face arrière est percée d’un trou d’une dizaine de centimètres pour laisser passer le son. Et l’instrument est en outre équipé de nos jours d’une corde de timbre comme les caisses claires des batteries.
Les autres percussions
On trouve également toutes sortes d’autres percussions qui viennent occasionnellement enrichir les rythmiques de rumba. On a ainsi les chekerés d’Afrique de l’Ouest qui servent à marquer les temps forts,
ou les maracas qui remplissent la même fonction.
Le quinto peut être secondé ou remplacé par les bongos, une paire de petits tambours tout aussi adaptée au jeu improvisé.
On peut enfin trouver également des instruments que l’on racle avec une baguette, comme la quijada, mâchoire d’âne surtout employée dans les musiques péruvienne et mexicaine
ou le güiro.
Comme il ne s’agit pas de percussions essentielles à la Rumba, je vous les présenterai de manière plus détaillée lorsque je vous parlerai des musiques qui font davantage appel à elles.
Et c’est ainsi que nous clôturons cette deuxième série d’articles concernant les musiques traditionnelles. Mais pas de panique, nous nous retrouverons très vite pour continuer notre grand tour du monde musical !