La musique, est-ce un langage ?
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philou3004
Ex:
Une phrase mélodique ou la fin d'une oeuvre est conclus sur un accord stable de tonique, qui pour nous dans notre culture est perçu comme conclusif.
Pour cette conclusion, on est très habitué à entendre une sensible se résoudre sur la tonique.
Hors, est-ce que ce caractère conclusif se retrouve dans d'autre cultures musicales du monde ?
Anonyme
Quand tu dis comprendre exactement que veut tu dire ?
Si c'est avoir la même "image" je pense que ce n'est pas possible. Tout simplement parce qu'il est impossible de savoir à quoi pense l'autre.chacun vit les paroles d'une façon différente (une maison ne définit pas la même chose pour une inuit et un français)
Un définition possible c'est peut être de faire correspondre une pratique et un énoncé. Ainsi celui qui nous dis qu'il a mal au dent correspond avec le fait d'appeler un médecin,de se tenir la tête etc...
Néanmoins cette définition montre qu'il y a comme dans la notation musical un problème de précision ( ex on ne précise pas si le fait de choisir la main gauche ou droite constitue une différence pertinente pour savoir si X a effectivement mal au dents)
Anonyme
Citation : Tout simplement parce qu'il est impossible de savoir à quoi pense l'autre.chacun vit les paroles d'une façon différente (une maison ne définit pas la même chose pour une inuit et un français)
Bon, j'ai répondu au dessus mais une maison est un concept qui a du sens autant pour un français que pour un inuit. Il existe un mot français pour désigner une maison et, j'imagine, autant pour un inuit. Si on a un traducteur, inuit et français se comprennent exactement même si un inuit imagine un igloo et un français un appart dans une HLM.
Head Minerve
Comment définir des musiciens qui ressentent la même chose en écoutant une musique, ou en jouant ensemble ?
Comment définir le lien qui les unit ? Pourquoi auront-ils la même définition (avec des mots et des idées) pour expliquer ce qu'ils ont ressenti en écoutant un morceau, à eux ou à un autre ?
EDIT : j'ose avancer qu'il y a beaucoup de points communs entre le langage parlé (chaque mot renvoie à une image concrête ou abstraite) et le langage musical (qui renvoie à des images bien souvent abstraites, parfois concrêtes).
Plus que de poser une théorie genre la musique n'est pas un langage paske ceci paske celà, constatons plutôt les faits, et seulement à partir de là interprétons et théorisons.
Moi-même il m'arrive d'avoir un sentiment très précis sur un morceau, et que ce sentiment soit le même chez quelqu'un d'autre. je poste la suite sur un autre... post.
Head Minerve
Or, d'autres éprouvent les sentiments c et d par exemple. Plusieurs s'y retrouvent.
A partir de là, le langage musical n'est pas exact car l'homme n'en a pas établi de règles assez précises (ou pas de règles du tout) pour savoir si le morceau "maison" doit faire éprouver le sentiment a b c ou d, ou autre chose, ou un ensemblze de sentiments, ou si ce morceau laisse de multiples libertés de ressenti.
Ce que j'en conclus vite fait, c'est que l'homme fait une musique qu'il ne comprend pas, comme agencer des mots de diverses langues, mots exacts et bien orthographiés, avec un ton spécifique, mais que rien de tout ça n'a de sens.
Au mieux c'est le hasard ou l'intuition ou le feeling d'un artiste qui ferait agencer correctement les "mots musicaux" pour en donner un sens à peu près correct et "universel".
Se posent deux problèmes déjà :
- selon les pays et les cultures, certaines cadences, rythmiques ou façons de jouer la musique ne renvoient pas aux mêmes images. On aurait donc le droit de supposer que la musique n'est pas un langage universel, enfin seulement terrien car tous les humains peuvent l'utiliser comme la parole, mais que chaque nation (peut-être pas avec les frontières qu'on met aujourd'hui) a un langage musical propre.
- des mots parlés renvoient à des images, puis a des sensations ou des sentiments, comme par exemple la nostalgie. Or la musique ne prend pas le même cheminement, en tout cas pas aux mêmes degrés d'importance. Sans comprendre le sens de la musique, on arrive à ressentir ! Ce qui laisse de côté le point dont parlait adt dans son dernier post : la musique ne renvoie pas d'image concrête et uniforme pour tout le monde, ça varie. On interprète donc la musique aussi faussement qu'on croirait qu'un mec est gentil en disant sur un ton doux et amoureux : "je vais t'arracher les yeux sale p**e".
Anonyme
Citation : Comment définir des musiciens qui ressentent la même chose en écoutant une musique, ou en jouant ensemble ?
Des clones. Et encore, si on prend en considération la propagation d'ondes dans l'espace et le fait qu'aucun musicien ne prend la place d'un autre, l'écoute (et donc la sensation) sera différente. Je pense qu'il faut faire le deuil de l'idée que nous puissions ressentir la même chose. Ce qui ne veut pas dire que nous ne connaissons pas d'expérience qui porte exactement le même mot mais alors, cette expérience est "conceptualisée".
Citation : Comment définir le lien qui les unit ? Pourquoi auront-ils la même définition (avec des mots et des idées) pour expliquer ce qu'ils ont ressenti en écoutant un morceau, à eux ou à un autre ?
Le lien qui les unit ne prouve pas qu'ils ressentent la même chose même s'ils partagent une émotion qui porte le même nom. Si tu es amoureux d'une fille et que c'est réciproque, cela ne signifie pas que c'est exactement la même émotion. Tout ce que vous pouvez dire est que vous vous aimez. Le verbe aimer est un concept et c'est seulement à partir du moment ou vous avez conceptualisé votre émotion que s'établit le langage. Tu lui dis "je t'aime" et elle comprend que tu ressens pour elle quelque chose de comparable à ce qu'elle ressent pour toi (sans que cette comparaison n'implique l'identité). Bien sûr, il n'est pas toujours nécessaire de parler pour se faire comprendre mais cela ne suffit généralement pas et est source de problèmes car comment être sûr que l'émoi est réciproque si elle ne te répond pas "je t'aime" ?
Pourquoi la même définition pour un ressenti ? Parce que nous sommes formatés pour mettre des mots sur des émotions sans que nous ayons la certitude absolue que ces émotions soient identiques ou même réellement partagées. Par exemple, nous quand nous voyons un camion de pompiers nous disons tous qu'il est rouge. Pourtant, il n'existe aucune preuve scientifique que nous voyons tous ce rouge de la même façon (je ne parle même pas des daltoniens). Si, par exemple, je vois une couleur qui correspond à ton bleu et que depuis tout petit, ce qui correspond à ton bleu est appelé "rouge" par tout le monde, je dirai évidemment qu'un camion de pompier est rouge même si je le vois bleu. Cela ne signifie pas non plus que je confondrais la couleur du ciel et celle des camions de pompiers (ce qui, auquel cas, serait une anomalie détectable comme un daltonisme). En fait, je n'ai aucun moyen de savoir si "mon" rouge est bien "ton" rouge.
Citation : y a beaucoup de points communs entre le langage parlé (chaque mot renvoie à une image concrête ou abstraite) et le langage musical (qui renvoie à des images bien souvent abstraites, parfois concrêtes).
Tu fais bien de parler d'un "langage musical" car tu entends là que ce n'est pas la musique qui est un langage mais bien un mode de communication floue qui se sert de la musique comme vecteur.
Head Minerve
Citation :
Le lien qui les unit ne prouve pas qu'ils ressentent la même chose même s'ils partagent une émotion qui porte le même nom
Le problème que tu exposes se retrouve dans le langage parlé : on a beau entendre les mêmes choses, dire les mêmes choses, dans le fond il y a des différences, sinon nous serions des clones du langage parlé !
Citation : nous sommes formatés pour mettre des mots sur des émotions sans que nous ayons la certitude absolue que ces émotions soient identiques ou même réellement partagées
On est d'accord...
Citation : Tu fais bien de parler d'un "langage musical" car tu entends là que ce n'est pas la musique qui est un langage mais bien un mode de communication floue qui se sert de la musique comme vecteur.
Je pourrais dire de notre langue parlée qu'elle n'était pas un langage pendant longtemps, mais qu'on s'en servait comme un mode de communication floue pour faire passer des idées.
Combien d'années, de siècles ou de millénaires a-t-il fallu pour que l'homme apprenne à maitriser sa voix (outil proche de la musique déjà) afin de communiquer "clairement" ?
Sans doute suis-je optimiste et naïf, mais au vu des avancées exponentielles qu'on fait dans des tas de domaines depuis un à deux siècles, je ne serais pas surpris qu'après cette mode médiatique de la musique sans sens, c'ets-à-dire dans quelques décennies, on voit apparaître plus vivement qu'aujourd'hui des études, des travaux sur le langage musical apportant des réponses différentes.
Aujourd'hui on mystifie encore la musique car on est comme des bambins à jouer avec nos jouets sans savoir l'impact éducationnel qu'il y a derrière ces jouets.
Anonyme
Citation : Combien d'années, de siècles ou de millénaires a-t-il fallu pour que l'homme apprenne à maitriser sa voix (outil proche de la musique déjà) afin de communiquer "clairement" ?
C'est une question intéressante. Je serais tenté de dire que l'homme est né avec son langage. J'imagine aussi que ça ne s'est pas fait en un jour. Il existe des preuves, par déduction, que l'homme devait posséder un authentique langage dès lors qu'il a pu voyager, ce qui l'obligeait, étant donné l'importance de certaines embarcations, à communiquer des ordres clairs entre membres d'équipage. Or, les voyages datent pratiquement du début de l'humanité (il existe des études précises sur ce point mais je ne les ai pas en mémoire). Je crois que le langage parlé est venu avec la capacité à concevoir, c'est à dire avoir des modèles ou des plans dans sa tête.
Citation :
au vu des avancées exponentielles qu'on fait dans des tas de domaines depuis un à deux siècles, je ne serais pas surpris qu'après cette mode médiatique de la musique sans sens, c'ets-à-dire dans quelques décennies, on voit apparaître plus vivement qu'aujourd'hui des études, des travaux sur le langage musical apportant des réponses différentes.
Je ne sais pas si c'est très pertinent de comparer les avancées technologiques et la "linguistique musicale", si tant est que cette discipline existe et s'appuie sur quelque chose de sérieux, disons de scientifique. Je ne sais pas non plus exactement ce que tu entends par "musique sans sens". Qu'est-ce que serait une musique avec sens ? Une musique "prévisible", au sens laplacien ? Le sens de la musique n'est-il pas, précisément, d'être imprévisible sans être aléatoire ?
Anonyme
Citation : Pourquoi la même définition pour un ressenti ? Parce que nous sommes formatés pour mettre des mots sur des émotions sans que nous ayons la certitude absolue que ces émotions soient identiques ou même réellement partagées. Par exemple, nous quand nous voyons un camion de pompiers nous disons tous qu'il est rouge. Pourtant, il n'existe aucune preuve scientifique que nous voyons tous ce rouge de la même façon (je ne parle même pas des daltoniens). Si, par exemple, je vois une couleur qui correspond à ton bleu et que depuis tout petit, ce qui correspond à ton bleu est appelé "rouge" par tout le monde, je dirai évidemment qu'un camion de pompier est rouge même si je le vois bleu. Cela ne signifie pas non plus que je confondrais la couleur du ciel et celle des camions de pompiers (ce qui, auquel cas, serait une anomalie détectable comme un daltonisme). En fait, je n'ai aucun moyen de savoir si "mon" rouge est bien "ton" rouge.
tu va un peu vite en besogne... en gros tu dis qu'on ne peut pas savoir ce que pense l'autre (ça c'est vérifiable aisement) mais avancer l'existence de ce que tu appelles concept qui serait propre à chaque individu mais en même temps communicable. Au plutot qui aurait une partie sensible personnelle et un partie non matériel universelle... ça me semble un peu douteux ...
Ou sont ces dit concepts ?
Je crois que c'est une erreur courante en philosophie et dans la pensée en général. On est face à un problème qui semble un fatras complexe alors on invoque l'existence d'un nouveau type d'objet ( à l'existence non vérifiable si possible) pour résoudre tout le problème. C'est ni plus ni moins que de la pensée mythique. Ca a son charme mais à mon avis ce n'est pas comme ça qu'on résoud le problème.
Il faut abandonner ce type de mythe et bien comprendre que le concept n'existe pas en dehors de la pratique. Le concept d'avoir mal au dent c'est un ensemble de postures, de tonalités affectives etc..
Je crois qu'on touche ici au coeur du problème : quel est le contenu ontologique de ce que transmet la langue d'une part et d'autre part la musique
Anonyme
Citation :
avancer l'existence de ce que tu appelles concept qui serait propre à chaque individu mais en même temps communicable. Au plutot qui aurait une partie sensible personnelle et un partie non matériel universelle... ça me semble un peu douteux ...
Ou sont ces dit concepts ?
Les concepts ne sont pas des objets situés dans un espace-temps. Ce sont des modèles qui permettent d'avoir une représentation objective. Un modèle est une représentation "idéale", laquelle précède le plan d'exécution et donc la construction. Un vecteur, par exemple, peut modéliser une force ou une vitesse ou une quantité de mouvement... mais les vecteurs ne sont pas des objets "physiques" que l'on trouve chez un fournisseur d'objets. Ces vecteurs te permettent pourtant de te représenter exactement la direction, le sens et la grandeur d'une force. Cette représentation cependant n'est qu'une représentation de sa mesure (c'est utile pour faire des calculs). Pour faire l'expérience "individuelle" d'une force, il faut se placer dans un champ où elle s'exerce et ressentir ses effets. En musique (restons dans le sujet), les notes, les gammes, les cadences... sont les "vecteurs", c'est à dire les concepts à partir desquels on a élaboré des théories (c'est l'objet de la musicologie) mais, pas plus qu'un vecteur n'est une force, les gammes, notes, cadences... ne sont la musique. Je crois que si on ne comprend pas cette notion élémentaire, on n'est pas bien armé pour faire de la philosophie (et encore moins de la physique). Mais on peut être un excellent musicien
Citation : Il faut abandonner ce type de mythe et bien comprendre que le concept n'existe pas en dehors de la pratique.
Bin non, justement. Tu as tout faux. Les concepts n'ont pas besoin de pratique pour exister. J'ai assisté hier soir à une conférence de S. Hawking (il était à Ajaccio) à propos des trous noirs. Sa théorie de particules qui s'échappent d'un trou noir parce que celui-ci peut "aussi" ne pas exister (oui, je sais, c'est compliqué la gravitation quantique) ne repose sur aucune expérimentation. Pourtant il existe des "radiations Hawking" reconnues scientifiquement.
Head Minerve
Hors sujet : C'ets vrai que ton résumé sur la conférence là, il est pas très explicite, mais je suis très intéressé par la quantique, même si c'ets difficile de faire la part entre les théories humbles et les douces spéculations de certains chercheurs rêveurs)
On en est toujours au même point de toute façon, la musique n'est pas considérée comme un langage aujourd'hui, ce n'est pas un moyen de communication (maitrisé et posable sur théorie claire et nette).
Maintenant ça rejoint un peu la quantique, c'ets pour ça ADT que je me risque à faire un lien entre les avancées scientifiques (et donc physiques) et l'avancée deans le domaine de la compréhension de l'art.
Pour comprendre la musique, il faut comprendre l'Homme. Se comprendre soi-même. Et on ne peut pas nier que la physique quantique ouvrant d'innombrables portes, on peut espérer sans spéculer plus qu'un théoricien ambitieux, que tout est basé sur des principes logiques et clssifiables.
Aujourd'hui on mêle au mot quantique les termes "aléatoire" et "hasardeux" car on ne comprend pas toute la mécanique extrêmement petite, on ne sais pas bien ce que pourrait donner une cinquièeme ou sixième dimension. On arrive pas à se représenter certains concepts justement. On essaie, mais la manière dont on en fait l'image sera sans doute risible dans un siècle, quand on aura beaucoup avancer.
Pour la musique, selon moi y'a d'ça. On mystifie car on arrive pas encore à conceptualiser quelquechose qui pourtant doit avoir une logique implacable.
L'interprétation qu'on a de la musique, les débats d'idées, la culture de chacun me fait bien comprendre que si personne n'est vraiment d'accord, c'est que personne n'a trouvé ce qui était la vérité scientifique dans le domaine du langage musical.
Et y'a pas que dans ce sujet d'un site français que le débat existe.
Tout doit probablement être expliqué à partir de notre cerveau, lui qui contient à la fois ce qu'on sait et ce qu'on ne sait pas.
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