A peine les MiniBrute 2 et 2S sur le marché, Arturia présente une déclinaison de sa BAR analogique : la DrumBrute Impact. Voyons les ingrédients de cette nouvelle recette…
Il y a presque deux ans, Arturia présentait sa première BAR analogique, la DrumBrute, testée dans nos colonnes. Nous avions particulièrement apprécié les commandes directes, les fonctionnalités avancées du séquenceur, la qualité de construction et les sorties individuelles. Sans oublier le tarif tout à fait abordable ! Outre l’absence de mémoires et d’automation liée à l’approche purement analogique, nous étions restés un peu mitigés au plan sonore, certaines percussions affichant une forte personnalité alors que d’autres étaient plus fades. Un MatrixBrute et deux MiniBrute plus tard, Arturia remet le couvert avec une nouvelle BAR tout aussi analogique, cette fois bien décidée à mettre du punch dans nos rythmes : la DrumBrute Impact. Alors, la grosse patate ?
Droit au Brute
La DrumBrute impact est plus compacte que sa grande sœur, puisqu’elle affiche 35 × 25 cm pour 1,9 kg. Cela en fait un instrument tout à fait transportable. La construction est correcte : coque grise et flancs orange moulés en plastique rigide, dessous en métal. Les commandes, très généreuses, sont solidement ancrées et répondent précisément, idéal pour les manipulations. La partie supérieure est dédiée à l’affichage (tempo, données, motifs… avec un afficheur à 3 LED 7 segments), au transport du séquenceur, au mode de synchronisation (interne, USB, Midi, impulsion), à la gestion des banques (effacement, copie, sauvegarde), au choix de la section du motif à afficher (4 sections de 16 pas), à l’effet distorsion et au volume.
En dessous, on sélectionne le mode de travail (morceau, banque, motif, pas, accent), puis on règle le tempo (potentiomètre et touche Tap), le facteur de Swing (potentiomètre et activation globale/par piste) et le facteur aléatoire (potentiomètre et activation globale/par piste également). Une rangée de 16 touches lumineuses permet de sélectionner le numéro de morceau/banque/motif, programmer les pas et visualiser leur état (activation/accent/couleur – nous y reviendrons). Avec la touche Shift, on peut directement changer la signature rythmique, choisir le mode d’enchaînement des motifs (immédiat ou en fin de boucle), ajouter des roulements automatiques ou des répétitions (en conjonction avec un ruban à quatre zones), quantifier/dé-quantifier un motif, isoler/couper une piste ou encore enclencher la polymétrie (nous y reviendrons). C’est très bien vu et très clair !
Tout cela n’occupe que la moitié de la surface bien remplie de la DrumBrute Impact, puisque les 50 % inférieurs sont dédiés aux réglages des percussions. En gros, on a 8 colonnes et 3 rangées de commandes pour modifier les 10 percussions que peut produire la machine, soit 22 potentiomètres et 2 sélecteurs (pour choisir entre deux percussions qui partagent une même tranche). Nouveauté par rapport à la DrumBrute, une touche « Color » permet, comme nous le verrons plus tard, de déclencher à tout moment une variante sonore de la percussion. On termine cette visite de la façade par les 8 pads pour le jeu et la programmation en temps réel des percussions. Ces pads sont dynamiques et transmettent 2 niveaux de vélocité en interne (normal/accent) et 128 valeurs via Midi. Ils sont lumineux et bicolores pour indiquer l’instrument sélectionné (blanc fixe), puis lorsqu’il est joué (blanc) et coloré (orange). Le métronome bénéficie de son propre réglage de volume et bouton d’activation, bien pratique. Tout cela facilite la prise en main, grande force de la DrumBrute Impact, pourvue par ailleurs d’un manuel de 100 pages au cas où on se perde !
La connectique a été revue et compactée par rapport à celle de la DrumBrute : la prise casque se limite cette fois au format jack 3,5 mm et perd son potentiomètre de volume. De même, les sorties séparées (toujours en jacks 3,5 mm) sont limitées à quatre : Kick, Snares, Hi-hat et FM Drum. Pour le reste, on retrouve les mêmes caractéristiques que sur la grande sœur : sortie audio hélas monophonique (jack 6,35 mm), entrée/sortie horloge fonctionnant en 1–2 impulsions par pas ou 24–48 PPQ (jacks 3,5 mm), entrée/sortie Midi DIN et prise USB (Midi). L’alimentation 12V/1A est également externe, rien de surprenant. Connecter un casque à la sortie idoine supprime astucieusement le métronome de la sortie audio. Connecter un jack à une sortie individuelle enlève naturellement l’instrument correspondant du mix. Ça roule !
Passe à dix
La DrumBrute était capable de générer 17 percussions analogiques, la DrumBrute Impact se contente de 10, dont 9 simultanées. Au menu, un kick, deux caisses claires, deux toms, une cymbale, une cloche, un hi-hat fermé, un hi-hat ouvert et une percussion FM. Toutes les percussions possèdent un réglage de volume sonore, nous n’y reviendrons donc pas. Les toms (haut et bas) partagent leurs commandes et leurs réglages, alors que la cymbale et la cloche partagent leur réglage de volume (un peu dommage, mais à l’usage, ça passe). Les hi-hats sont exclusifs, normal… La qualité audio est excellente, le niveau est élevé et il n’y a pas de souffle, même quand on pousse la distorsion analogique placée en sortie mix, qui apporte une belle saturation pas du tout criarde.
Le kick, d’inspiration TR-808, a une bonne pêche et une belle rondeur ; on peut en régler le déclin et la hauteur sur une plage confortable. La première caisse claire rappelle sans hésitation la TR-909 ; on peut en varier le déclin et le timbre, avec une plage de réglages permettant une belle diversité sonore, du son le plus sec et fermé au son allongé et timbré. La seconde caisse claire s’inspire plutôt de la TR-808 ; on peut en altérer le déclin et la brillance, là aussi pour une grande variété sonore. Les toms haut/bas sont dans la pure tradition analogique, avec de la rondeur et un déclin correct ; on peut modifier leur hauteur (écart fixe entre les toms haut et bas). Passons à la cymbale, cristalline et lisse (sans tremolo intempestif), dont on peut faire varier le déclin. La cloche de vache, qui manquait cruellement à la DrumBrute, est ici bien présente ; très classique, elle n’a aucun autre réglage que le volume ni variation ; on aurait aimé pouvoir changer la hauteur et rallonger le déclin. Les hi-hats, bien tranchants, sont dans la même veine que la cymbale ; on peut en régler la brillance avec une plage confortable très appréciable (pour les deux en même temps) et le déclin (pour le hi-hat ouvert) ; rappelons qu’ils s’excluent mutuellement, comme sur la plupart des BAR. Enfin, on trouve une percussion originale, générée par FM entre deux oscillateurs ; le territoire sonore est varié, avec ici plus de réglages pour les autres percussions : pitch de l’onde modulatrice, quantité de FM, déclin et pitch de l’onde porteuse.
Au plan sonore, la DrumBrute Impact est beaucoup plus homogène que sa grande sœur, avec des sons efficaces et des plages de réglages bien étudiées. Les deux machines ne font pas doublon, puisque la première revendique une filiation plutôt TR-606, alors qu’ici on est davantage connoté TR-808 avec un soupçon de TR-909 pour la caisse claire. Aucun de ces réglages sonores n’est mémorisable, nous sommes en pur analogique, comme sur une TR-808… ou une DrumBrute ! Cela pourra enchanter les uns et gêner les autres, suivant son approche de travail.
Chaque percussion peut être accentuée à partir d’un seuil de vélocité (ajustable via un éditeur), ce qui permet d’altérer le volume et parfois le timbre (destinations fixées par le constructeur). Mieux, un paramètre « Color » permet, à chaque pas, de déclencher une variation de l’instrument (paramètres là encore choisis par le constructeur) : drive pour le kick, corps pour la caisse claire 1, clap pour la caisse claire 2, déclin pour les toms, tonalité pour la cymbale, déclin pour le hi-hat fermé, brillance pour le hi-hat ouvert et enveloppe de pitch pour la percussion FM ; seule la cloche ne possède pas de variation de couleur. On peut regretter de ne pouvoir ni choisir ni doser la couleur, mais on apprécie cet ajout original, qui permet, avec l’accent, de créer quatre variations sonores par percussion (hormis la cloche), ce à chaque pas d’un motif !
Loop and Roll
Le DrumBrute possédait un séquenceur à pas puissant et très facile à prendre en main. Le DrumBrute Impact en reprend toutes les qualités, en y ajoutant quelques nouveautés que nous détaillerons au fur et à mesure. On trouve 64 motifs (4 banques de 16) possédant leur propre tempo, que l’on peut facilement basculer en tempo global. Chaque percussion a sa propre piste indépendante (à l’exception des hi-hats qui se coupent), avec une longueur de 1 à 64 pas (modifiable en lecture et en enregistrement). En lecture, on peut couper/isoler des instruments, ajouter du Swing (50–75 %) et introduire un facteur aléatoire (dosable) qui agit sur l’ordre des pas et les instruments. On peut aussi créer des boucles ou des roulements (nouveauté) en temps réel, avec différentes longueurs/vitesses, à l’aide du ruban à quatre zones. Plus fort encore, la DrumBrute Impact est capable de polymétrie, c’est-à-dire que chaque piste de percussion peut avoir sa propre longueur : tout cela se règle en temps réel avec le bouton Last Step et l’une des touches de pas, pour chaque piste souhaitée ; résultat, des motifs complexes, à période très longue… Tout cela est mémorisé dans chaque motif, excellent !
Passons à la programmation des motifs. On choisit d’abord la division temporelle (1/8, 1/8T, 1/16, 1/16T, 1/32). En mode temps réel, on entre les notes avec les pads ou un appareil Midi. Elles sont enregistrées sur deux niveaux de vélocité (normal/accentué) et quantifiées suivant la division temporelle prévue ; elles sont, en plus, enregistrables suivant deux niveaux de couleur (deux variations de timbre, comme vu précédemment) ; chaque percussion (sauf la cloche) possède deux notes Midi (une par couleur) ; on peut dé-quantifier le motif avec une touche dédiée et décaler les notes de plus ou moins 50 %, sympa. Tout en enregistrant, on peut ajouter des roulements automatiques, remplacer des notes (par écrasement), supprimer des pas… en mode pas à pas, on peut entrer/supprimer/accentuer/colorer des pas à l’aide des 16 touches lumineuses de pas et 4 touches de sélection de section de motifs. Les couleurs de touches et de pads permettent de s’y retrouver : touche bleue = pas actif ; touche rouge = pas accentué ; pad blanc = pas non coloré ; pad orange = pas coloré. Bien vu ! Si on veut revenir à la version sauvegardée d’un motif, un appuie sur la nouvelle fonction « Revert » et c’est fait !
Les motifs peuvent ensuite être assemblés en morceaux. La mémoire interne renferme 16 morceaux de 16 motifs. Chaque motif est chainé à son propre tempo (sauf si le tempo global est activé) et avec ses paramètres Swing et Random. On ne peut entrer qu’un motif par pas (pas de répétition au sein d’un même pas), donc si on veut enchaîner plusieurs fois un même motif, on consomme plusieurs pas (à concurrence de 16). A la fin de la lecture d’un morceau, celui-ci est rebouclé. Un morceau est donc un super motif, ni plus ni moins. La DrumBrute Impact reste donc une machine à jouer plus qu’à laisser tourner seule. Toutes ces manipulations se font sans interruption, un gros point fort. Dans tous les modes, la machine possède toutes les fonctions utiles de gestion telles que copier/coller/effacer.
- 1Base 00:58
- 2Cowin 01:04
- 3CowClap 01:13
- 4FM 01:14
- 5Beat 01:04
- 6Groovy 00:52
- 7Rolls 00:54
Conclusion
La DrumBrute Impact complète le concept de la DrumBrute tout en l’améliorant, avec de nouveaux sons de percussions analogiques éditables pour compléter la panoplie sonore de la grande sœur. Mais cette fois, les sons de percussions ont à notre goût plus de caractère et plus de mordant… et la cloche est bien là ! Tout cela rend la machine plus homogène au plan sonore. La partie séquenceur progresse encore un peu, s’il en était besoin : elle reprend la programmation temps réel et pas à pas, les fonctions Swing et Aléatoire, le générateur de répétitions et la polymétrie ; elle y ajoute les roulements, la quantification/dé-quantification et la couleur sonore, donc plus de feeling. L’ergonomie est toute aussi bonne, avec des commandes directes bien étudiées et des possibilités de synchronisation variées. Par ailleurs, elle offre une bonne qualité de construction, quelques sorties individuelles et une gestion externe des mémoires de séquences. Tout comme son aînée, elle souffre toutefois d’une absence de mémoires et d’automatisation pour les sons, d’un mode Song simpliste et d’une sortie mix monophonique. Avec son prix très serré, elle se positionne comme outil de composition et de performance très abordable pour commencer ou compléter avantageusement son équipement analogique de scène ou de studio. Nous lui décernons un Award Qualité/Prix 2018.