Sorte de résumé du fameux Vintage Vault d’UVI, la Synth Anthology revient dans une mise à jour majeure qui pourrait bien en faire le « go to synth » de pas mal de monde…
Comptant parmi les plus grands spécialistes du synthé virtuel, UVI a depuis toujours suivi un credo différent de la plupart de ses concurrents : point de modélisation physique ici mais un échantillonnage minutieux des synthés les plus légendaires ou les plus rares qui soient, histoire de ne pas transiger sur la qualité du rendu sonore. S’appuyant sur le fameux moteur UVI Engine qu’on retrouve au cœur de l’UVI Workstation comme de Falcon, les instruments UVI concilient de fait sampling et synthèse pour un résultat qui a fait la réputation du fameux bundle Vintage Vault… Ce dernier n’étant toutefois pas à la portée de toutes les bourses, UVI a pris l’habitude avec la Synth Anthology d’en proposer une sorte de résumé, tout comme Arturia le fait aussi avec l’Analog Lab pour sa V-Collection. Or, on aura tort de ne voir dans cette banque qu’un résumé du copieux bundle, car la Synth Anthology est aussi un tout-en-un polyvalent qui pourrait bien tenir lieu de seul instrument à sons synthétiques pour plus d’un home studiste.
Cela est d’autant plus vrai qu’avec cette version 4, l’éditeur a revu son concept de fond en comble. L’opus précédent proposait plus de 3500 presets issus de 132 modèles de synthés différents pour une quinzaine de gigas ? Voici que son remplaçant promet près de 4800 presets issus de 200 modèles de synthés pour plus de 20 Go de sons ! Or, l’éditeur ne s’est pas contenté de jouer sur l’argument quantitatif, de nombreuses nouveautés fonctionnelles et ergonomiques faisant leur apparition…
UVI se met quatre !
Cela commence par une refonte complète de l’interface : on est toujours comme en V3 dans un style vectoriel minimaliste mais le bleu électrique et l’orange acidulé sur fond anthracite cèdent la place à des nuances de bleus et de blancs sur un fond bleu foncé, tandis que quelques petites touches de couleurs pastels viennent ça et là réhausser discrètement le tout. Sobriété ? Sobriété ! Personnellement, je trouve cela plutôt convaincant d’autant que l’organisation de l’interface s’avère très logique, ce qui n’est pas un mal vu la fausse simplicité du logiciel…
L’onglet Main qui vous accueille présente l’essentiel d’un preset en juxtaposant les représentations vectorielles des synthés chargés sur chacun des deux Layers qui le composent. Vous pouvez ici changer leur volume à chaque comme leur mapping sur le clavier, mais vous accédez aussi à cinq potentiomètres Macro dont les affectations varieront suivant le preset.
Un clic sur une des deux représentations permet d’accéder à l’édition de layer que nous allons détailler
Comme une double couche à l’intérieur…
Pour chacun des deux layers, on peut évidemment choisir la source parmi l’impressionnant catalogue du logiciel. Ce choix passe par un navigateur qui se résume hélas à une simple arborescence : dans la colonne de gauche, on sélectionne un type de synthèse, ce qui permet ensuite d’accéder à tous les types d’instruments disponibles pour cette dernière, puis enfin aux patches.
Pas de sélection multiple, pas d’exclusion, pas de tags descriptif du son (clean, saturé, swell, etc.) ou de moteur de recherche : tout cela est plutôt rustique fonctionnellement, sachant que le navigateur global de presets ne fait pas mieux : il se résume à une arborescence qu’on parcourra par type d’instruments ou par machine, ce dernier classement ne présentant qu’un faible intérêt quand on cherche un son.
Pour se faire pardonner, notons qu’UVI nous gratifie tout de même d’un système « intelligent » pour naviguer par similarité. La fonction est la bienvenue même si elle ne compense pas malgré tout les lacunes du navigateurs…
Revenons toutefois à l’édition proprement dite : on dispose ici d’une enveloppe de volume, d’un filtre multimode résonnant flanqué aussi de son enveloppe, mais aussi d’une section Pitch & Voicing et d’un Unison. À côté de plusieurs paramètres, on remarque des petits cercles de couleur qui indiquent qu’il peut être assigné à une modulation à choisir parmi 4 et paramétrables au bas de la fenêtre : on dispose en effet de 2 FLO et 2 séquenceurs à pas.
Et c’est tout ? Que nenni car sur la droite du panneau, on remarque une pastille nommée FX. Un clic sur cette dernière et nous voici dans la section d’effets du Layer, laquelle propose un Waveshaper, un Flanger, un Phaser, un Chorus et un EQ, sans oublier les quatre départs vers la section d’effets globale de l’instrument : nous y reviendrons.
Tant que nous sommes sur le layer, précisons qu’un clic sur un des modulateurs permet d’accéder à son paramétrage, qu’il s’agisse d’un LFO ou d’un séquenceur à pas. Il n’y a pas grand-chose à dire sur ce qui nous est proposé là, tout comme sur l’onglet suivant qui propose les outils de séquençage. On parle ici d’un arpégiateur dans le plus pur style de ce à quoi UVI nous a habitués : simple, complet, efficace.
Panneau suivant ? Les effets globaux, c’est-à-dire les quatre bus d’envoi où nous attendent la réverbe algorithmique SPARK, un processeur à convolution, Dual Delay et Feedback, un filtre à peigne résonnant… Trois effets pour le bus Master complètent le tout : une saturation, un EQ et un maximizeur…
Enfin, l’ultime panneau nous permet d’accéder aux préférences du logiciel : le débattement du pitch bend notamment… mais aussi la mise en fonction de la compatibilité MPE. Car oui, Synth Anthology 4 est compatible MPE et gère donc l’aftertouch comme le pitch bend polyphonique, ce qui le rend particulièrement expressif pour ceux qui ont la chance de disposer de contrôleurs compatibles. Tempérons cette bonne nouvelle toutefois puisque les 4000 presets, seuls 35 ont été pensés pour cet usage.
Au rendez-vous du gros son
Comme vous le voyez, pour un « petit » produits, Synth Anthology vous donne de quoi faire, le meilleur étant la qualité sonore qui sort de tout cela. Le parti pris « real thing » d’UVI paye en effet sur ce point tandis que les nombreuses possibilités pour traiter ou animer le son ne donnent jamais l’impression qu’on se trouve face à des samples trop raides.
Voyez ces quelques exemples qui rendent grâce à l’excellent travail de sound design réalisé par les gens d’UVI :
- SynthAnth – Bass – Andromeda00:09
- SynthAnth – Bass – Daikin00:09
- SynthAnth – Bass – Doom Bass00:09
- SynthAnth – Bass – Everlasting Crush00:09
- SynthAnth – Bass – Momentum00:09
- SynthAnth – Lead – Drunk Circuits00:08
- SynthAnth – Lead – English Rose00:08
- SynthAnth – Lead – Hive Mind00:08
- SynthAnth – Lead – Hybrid Analog00:08
- SynthAnth – Lead – Power Electric00:08
- SynthAnth – Lead – Soloh00:08
- SynthAnth – Lead – Voyager00:08
- SynthAnth – Rhythm & arp – AKSNoise00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Colibri00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Four Drive00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Future Paris00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Imperial Mod00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Manners00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Note Tension00:09
- SynthAnth – Rhythm & arp – Sub Religion00:09
Plutôt convaincant, non ? Est-ce que cela en fait pour autant le « Go to synth » dont on rêvait ? Oui et non… Oui pour quantité d’utilisateurs car la qualité audio qui nous est proposée comme les possibilités de personnalisation font vraiment de Synth Anthology 4 un instrument qui suffira à l’écrasante majorité usages. Et non parce que le pendant de cette simplicité demeure malgré tout l’impasse sur quelques formes de synthèse complexes, comme la synthèse granulaire : si vous cherchez ce genre de sons paysages qui se meuvent sur 30 secondes, ce n’est pas ici que vous allez les trouver, et il faudra au mieux compter sur les arpégiateurs, les modulations et le delay pour aller vers ce genre de sons. On est donc bien face à un synthé pour composer et produire la plupart des musiques, mais pas forcément face à l’outil ultime pour faire de la recherche sonore et faire de la musique expérimentale… à moins d’utiliser la banque dans Falcon et de bénéficier alors des outils extrêmement puissants de ce dernier en termes de synthèse ou de script…
Surtout, on peste un peu sur la grosse lacune de l’UVI Engine depuis des années : son navigateur de presets trop basique. Que ce soit au niveau des patches ou des sources sonores, on se sent souvent frustré de disposer d’une telle richesse sonore et de devoir aller à la pêche du son que l’on cherche à défaut d’un outil de navigation un peu plus évolué… Alors bien sûr, la fonction de suggestion de sons similaires est un bon ajout, mais encore faut-il trouver le premier son qui s’approche de ce que l’on veut avant de pouvoir l’employer, sachant qu’on manque alors cruellement d’attributs pour le faire. On adorerait disposer d’un vrai navigateur comme on en trouve dans les produits Output par exemple… Vu que c’est un défaut qui revient fréquemment dans les produits de l’éditeur, la question se pose toutefois de savoir si cette limitation n’est pas une limitation de l’UVI Engine lui-même, au quel cas on espère qu’UVI aura à coeur de le faire évoluer sur ce point.
Ultime petit regret enfin : quand bien même il s’agit d’une « Synth anthology », on aurait adoré que le concept voit un peu plus large pour intégrer quelques sources plus acoustiques ou électroacoustiques, UVI ayant quelques très belles choses dans son catalogue à ce sujet… Cela rendrait à coup sûr cette Anthology encore plus polyvalente et lui permettrait de donner le change à son principal concurrent Analog Lab.
Conclusion
La messe est dite en une vingtaine de Go pour 150 euros : cette Synth Anthology 4 est l’un des plus fameux tout-en-un qu’on puisse trouver actuellement sur le marché parce que l’instrument sonne vraiment bien cependant qu’il est loin d’être limité en termes de traitements comme de possibilités d’édition ou de modulation. Certes, on aurait bien aimé que le concept s’aventure un peu au-delà de la seule collection de synthés et on aurait surtout aimé, face à autant de contenu, qu’UVI bosse un peu plus les fonctions de recherche de son instrument, mais force est de constater que le rapport qualité/puissance/prix fait de cette quatrième Anthology un très bon plan qui pourrait suffire à nombre de compositeurs ou producteurs en termes de son synthétiques. Bravo pour ça !