Synapse Audio est une marque de plug-ins de synthés remarquable, dont la qualité des productions la place dans le podium des éditeurs à surveiller. Après la version 3 de Dune et un excellent OB-Xa virtuel, nous allons parler de la mise à jour de leur émulation de Minimoog, réalisée avec Hans Zimmer.
Aujourd’hui nous allons parler de Minimoog, de Hans Zimmer, de MPE, de gros sons de synthétiseurs, et de la marque Synapse Audio, tout un programme vous en conviendrez ! La marque de Richard Hoffmann fait partie de ces éditeurs dont j’aime bien parler dans mes tests, qui font figure de référence à mes yeux mais qui restent encore injustement mal connus. Nous n’avions parlé de leur catalogue que deux fois dans nos colonnes, d’abord avec le freeware TS-404 quand la marque s’appelait encore Sonic Syndicate, puis concernant la STAN Orion qui a tiré sa révérence après une version bêta 8.6 en 2015 et qui existait depuis 2002.
Elle avait eu le luxe de bousculer un peu le domaine de la STAN dédiée à la musique électronique à l’époque, avec dans son sillage les premières versions de Reason Studios / ex-Propellerhead Reason et Image Line Fruity Loops devenu depuis FL Studio, notamment grâce à son workflow axé patterns et séquences de notes MIDI, des instruments virtuels (Wasp !) et sampleurs emblématiques, le focus sur le mixeur, et parce qu’on pouvait dès les premières versions jouer en basse latence de ses instruments virtuels au format VSTi avec des drivers DirectX de carte son, ce qui n’était pas encore systématiquement le cas en dehors des gros STANs généralistes (on rappellera que le support VST dans Reason c’est 2017 quand même !). Elle a probablement eu un impact sur l’industrie de la STAN et même de la musique électronique au même titre que d’autres que tous les développeur·euse·s connaissaient — y compris celles et ceux des STANs modernes — mais moins les utilisatrices et utilisateurs, comme l’ensemble des trackers, Tracktion (de Julian Storer le papa de JUCE / Mackie / Julian Storer encore / Tracktion Software Company et renommé depuis Waveform) ou EnergyXT.
Synapse Audio s’est aussi fait connaître pour ses plug-ins au format Rack Extension pour Reason avec des effets spécifiques (un compresseur, des phasers, des égaliseurs, une réverbe, etc.), et le portage de ses instruments virtuels (issus du travail dans Orion ou des créations originales), peu de marques pouvant se prévaloir d’avoir le Rack Extension dans les formats proposés. Car on associe aujourd’hui principalement le travail de Richard Hoffmann aux synthétiseurs, de Hydra (synthétiseur FM multimodèles) sorti en 2003 (!) et toujours maintenu, à Dune — version survitaminée de Wasp qui en est à sa troisième version, sur laquelle un certain Coramel a fait une contribution niveau UI, et qui constitue aujourd’hui une référence en matière de soustractif à tout faire avec un moteur d’unisson très singulier et ses oscillateurs Virtual Analog / FM / à tables d’ondes — en passant par l’émulation du Oberheim OB-Xa intitulée Obsession, et du Minimoog Model D sobrement nommée « The Legend » en 2016.
The Legend avait été développé en partenariat avec Nico Herz de Big Tone Studios qui possède un vrai Minimoog et qui avait pu réaliser un certain nombre de mesures (on va en reparler), avec Marcin Lezak et Mikael Eidenberg sur la programmation et le design graphique, ainsi que le sound designer Kevin Schroeder qui est numéro 2 chez Synapse Audio (qui officie aussi pour u-he et Waldorf), mais qui travaille aussi régulièrement avec un certain Hans Zimmer… Et aujourd’hui nous allons vous parler de la deuxième itération du plug-in, qui a été conçue en partenariat avec le célèbre compositeur de musiques de film allemand naturalisé hollywoodien (les deux Dune de Villeneuve, Interstellar, la trilogie the Dark Knight de Nolan, les Pirates des Caraïbes, etc.). Hans Zimmer devient d’ailleurs coutumier des collaborations avec des développeurs de plug-ins, puisqu’il a participé à la création, par exemple de banques de sons orchestrales avec Spitfire Audio, ou à une version spéciale de u-he Zebra 2 appelée Zebra HZ / Dark Zebra qui inclut les filtres présents dans u-he Diva. Voyons ainsi si un nouveau plug-in Minimoog fait encore sens en 2025 !
Installation et compatibilité de The Legend HZ
The Legend HZ version 2.02 est donc un plug-in d’émulation du Minimoog Model D mais « augmenté », proposé au tarif de 179 euros hors promotions ou 79 euros pour les possesseurs de sa précédente itération, disponible aux formats VST2, VST3, AU, AAX et Reason Extension pour Windows et macOS, compatible NKS, avec un système de protection de type challenge / réponse. Il reprend les fonctionnalités de base de l’original, avec un niveau de similarité suffisant pour justifier son appellation, mais propose aussi d’aller beaucoup plus loin, et pas simplement à la manière du Voyager ou d’un Poly D de Behringer (ce dernier ayant touché au drive du VCF pour empêcher le chorus de saturer et supprimé le feedback, pure hérésie !). Rien de très original sur le concept au premier abord, aujourd’hui la plupart des émulations software de synthétiseurs hardware monophoniques proposent des effets supplémentaires, des modes polyphoniques et unisson, des réglages sur le mode de fonctionnement interne de la simulation, du séquenceur, des présets bien rangés évidemment (les exemples pleuvent chez Arturia, Korg, u-he, Cherry Audio, brainworx, GForce, Togu Audio Line, Softube, etc.).
The Legend premier du nom proposait d’ailleurs la même chose, avec un moteur de simulation du Minimoog qui d’après l’auteur n’aurait pas beaucoup changé dans la version 2. On y trouve l’architecture soustractive emblématique du Minimoog, à savoir :
- 3 oscillateurs avec différentes formes d’ondes et des réglages de pitch + volume, avec la possibilité d’utiliser le 3e comme un LFO
- un générateur de bruit blanc ou rose avec son contrôle de volume
- un volume intitulé « feedback » qui permet de simuler le comportement du Minimoog quand on branche une de ses sorties sur l’entrée externe
- le fameux VCF avec des contrôles de fréquence de coupure, de résonance, et de quantité de modulation à partir de l’enveloppe associée
- les réglages d’enveloppe pour le filtre et pour le volume
- quelques réglages supplémentaires pour le glide, l’accordage global, le key tracking sur l’oscillateur 3 ou le filtre, le volume de sortie, et des contrôles basiques de modulation supplémentaires à partir du bruit ou de l’oscillateur 3
À partir de là, The Legend proposait des fonctionnalités supplémentaires qui étendent les champs d’application de leur émulation, telles que le réglage de Drive du VCF ainsi qu’un mode passe-bande et différentes pentes d’atténuation, un réglage release supplémentaire pour chaque enveloppe au lieu du ADS avec la possibilité de régler le decay et le release sur des valeurs différentes, la polyphonie avec 4 ou 8 voix, un mode unisson avec réglages detune et spread, la possibilité de choisir entre un mode Minimoog Early ou Minimoog Late, différents modes de fonctionnement pour la priorité des notes ou le legato, des options sur le tuning global d’une octave à l’autre, un réglage de saturation du VCA, un délai et une réverbe, des paramètres de modulation supplémentaires (déjà compatible MPE d’ailleurs), et même le choix de la fréquence de l’alimentation, le tout disponible dans seulement deux vues différentes. Certaines de ces fonctionnalités ont été rajoutées au fur et à mesure après la sortie initiale du plug-in.
On notera également qu’une particularité du plug-in provient de son navigateur de présets, assez bien organisés, accessible dans une troisième vue dédiée, qui dispose aussi comme dans le plug-in Dune 3 d’un générateur de préset « génétique ». Celui-ci utilise deux ou trois présets au choix et permet ensuite d’en créer un nouveau, complètement original, qui reprend certaines caractéristiques des présets sélectionnés. Ceci étant, les présets fournis sont déjà d’une qualité particulière et singulière, non atypique chez Synapse Audio avec un Kevin Schroeder aux commandes qu’on a pu voir s’illustrer également avec les synthétiseurs Dune.
The Legend HZ : quelles nouveautés par rapport à la version originale ?
La nouvelle version de The Legend reprend alors toutes les fonctionnalités de l’ancienne, avec quelques différences ci et là, comme la disparition du mode de priorité notes basses, des modifications sur les mappings de paramètres, et rajoute pas mal de choses assez intéressantes.
Comme vous pouvez le voir dans cette image, l’interface s’est un peu remplie, notamment avec une polyphonie qui monte jusqu’à 12, deux algorithmes unisson, un contrôle de couleurs et de contraste de l’interface graphique assez rigolo, et la présence de trois oscillateurs supplémentaires. Ils disposent des mêmes caractéristiques que les trois premiers, et on imagine facilement que ce synthétiseur possède à présent un potentiel de nuisance sonore dans les basses fréquences qui atteint des sommets !
Contrairement aux rééditions des Minimoog Model D 2016 et 2022, ou à la version de Behringer, le plug-in ne dispose pas de LFO dédié, mais on peut cette fois utiliser deux versions de l’oscillateur 3 pour arriver à un résultat similaire comme sur les Model D d’origine… Ou utiliser les 4 MSEGs (générateur d’enveloppes multisegments) disponibles par patch pour faire beaucoup mieux ! Le module concerné propose de dessiner des signaux de modulation, en choisissant une longueur, un nombre de points, et une courbure de façon complètement libre, puis de faire boucler la lecture du signal ou de la déclencher une seule fois (en réponse aux triggers, au Note On ou Note Off, etc.).
De plus, The Legend HZ dispose d’un module arpégiateur / séquenceur hybride à 32 pas, qui peut jouer des notes ou générer des signaux de modulation (jusqu’à 4) avec vélocités customisables, des options sur le swing, la vitesse de lecture, le mode de lecture des pas ou l’utilisation de la polyphonie (arpégiateur ou en accords). Et on a accès à une vraie matrice de modulation, avec des sources et destinations très variées sur jusqu’à 12 slots, qui permettent d’interagir avec tous les paramètres du plug-in à partir de tout et n’importe quoi, du paramètre MPE à la molette de modulation, en passant par des constantes ou les sorties de nos paramètres de modulation.
Sur le MPE, Synapse Audio fait d’ailleurs fort, puisqu’il existe plus loin des paramètres dédiés, pour gérer l’étendue de la modulation du pitch et rajouter du lissage supplémentaire sur les paramètres Aftertouch et Timbre, jouer sur la courbe de réponse, et pour activer une gestion avancée des différents canaux MPE grâce au switch MPE Controller, ce qui explique que Expressive E s’en soit donné à cœur joie avec un soundset dédié à The Legend HZ pour l’Osmose, et dont on va parler plus loin !
D’un clic sur le haut de l’interface, on accède à la vue qui affiche des paramètres supplémentaires de simulation et les effets inclus avec le plug-in sur deux lignes différentes. Niveau effets, The Legend premier du nom disposait d’un délai et d’une réverbération assez simples niveau contrôles (cette dernière étant inspirée de la Lexicon 224). Dans The Legend HZ, les deux effets disposent de contrôles supplémentaires, comme de switchs pour changer le caractère de la réverbe, ou une saturation de type bande magnétique sur le délai, et surtout on a accès à quatre effets supplémentaires : un phaser, un chorus, un compresseur, et un EQ multibande avec deux filtres en plateau et 12 filtres passe-bande émulés à partir du Moog 914 Fixed Filter Bank personnel de Hans Zimmer, qui fait partie de son workflow de création.
Les ajouts niveau FX en plus des 3 oscillateurs supplémentaires semble faire partie des fonctionnalités demandées par le compositeur pour la nouvelle version du plug-in, qui en fait pleinement démonstration dans ses présets. On aurait aimé en avoir plus pour voir ce qu’il a fait des nouvelles fonctionnalités, même si ceux de la version 1 sont compatibles et inclus, d’autant qu’ils ont vraisemblablement été conçus pendant le développement du projet (commencé avant 2022), et que certains ont servi sur ses dernières productions pour le cinéma hollywoodien, dont un certain film qui a comme de par hasard le même nom qu’un autre des plug-ins de Synapse Audio !
Enfin, sur la ligne du dessus, en plus des paramètres MPE sus-cités, on retrouve les paramètres de simulation que l’on connaissait sur The Legend, avec le switch qui permet de passer d’une émulation du Model D version Early ou version Late, des réglages sur les quantités de modulation disponible, la phase de chaque oscillateur, l’étendue des paramètres de fréquence de coupure et de résonance, une quantité de saturation du VCA, un pitch global, des réglages de comportement de voix en mono ou en polyphonique (avec la disparition du mode basse priorité d’ailleurs en mono), et même la tension d’alimentation qui a un impact sur les formes d’ondes ! Au passage, la version Late du Model D n’avait jamais fait l’objet d’une autre émulation logicielle à notre connaissance, ce qui va impacter de manière très audible, par exemple sur les formes d’ondes carrées et triangle du synthétiseur.
Réalisme sonore : The Legend HZ face aux autres émulations Minimoog
À la sortie du premier The Legend, les membres de l’équipe ayant travaillé sur le projet avaient publié des comparatifs audio entre un Minimoog spécifique cible (version Late) et leur simulation sur des patchs particuliers, dans l’optique de démontrer le niveau de réalisme atteint sur la simulation. Celui-ci se trouve à l’adresse suivante : http://www.synapse-audio.com/legend/LegendVsHardware.zip. Quelques informations sur le comparatif peuvent se trouver ici.
De notre côté, nous avons cherché également à répondre dans ce test à plusieurs questions sur le réalisme de simulation : quels sont les phénomènes caractéristiques du Minimoog à observer, à quel point The Legend HZ est une simulation réaliste de Minimoog vintage, et comment le comparer à d’autres simulations existantes ?
En effet, il existe aujourd’hui un nombre de concurrents directs ou indirects à la dernière sortie de Synapse Audio qui commence à être important : Air Music Mini D (2022), Native Instruments Monark (2013), u-he DIVA (2011) dans une certaine mesure, Arturia Mini V4 (2023), Softube Model 72 (2020), Cherry Audio Miniverse (2022), UAD Moog Minimoog (2021), GForce Minimonsta 2 (2023), la simulation officielle de Moog (2018) disponible sur iOS et macOS seulement, et même des plug-ins gratuits comme le Broken Mini (2024) de Full Bucket Music, ou la fameuse émulation hardware Behringer Model D (2017). Pour répondre aux questions que nous nous sommes posées et que vous vous posez, on va regarder un peu tout ça, et même jeter une oreille avec vous aux concurrents — chose qu’on fait pas toujours dans nos lignes, mais que j’ai trouvée pertinente ici — et je me permettrai de laisser tomber certaines émulations quand même dans notre test, comme celles que nous pouvons voir en dessous :
Nous avons plusieurs choses à vous montrer, et à vous faire écouter. Pour commencer, j’ai réalisé un test très simple, qui consiste à écouter la forme dent de scie de l’oscillateur 1 seule, avec son volume au maximum, le filtre complètement ouvert et sans résonance, pas de modulations, les temps de l’enveloppe du VCA au minimum et le sustain au maximum, le tuning des oscillateurs sur la valeur centrale. Parmi les joujoux utilisés, j’ai inclus les émulations software citées ci-dessus, dont la version gratuite de Full Bucket Music, mais aussi la version hardware de Behringer, et un enregistrement réalisé par Coyote14 sur son Minimoog de 1981 (donc version Late).
- Test A – Air00:11
- Test A – ArturiaV400:12
- Test A – Cherry00:11
- Test A – GForce00:13
- Test A – Monark00:13
- Test A – Moog App00:11
- Test A – Softube00:11
- Test A – UAD00:13
- Test A – Broken00:12
- Test A – SynapseHZ00:12
- Test A – Behringer00:12
- Test A – Minimoog Late00:13
On remarque d’ores et déjà quelques différences entre les challengers, certains ayant par défaut un tuning qui est parfaitement juste, tandis que d’autres non, avec entre les deux des plug-ins qui permettent de modifier l’écart d’accordage d’une octave à l’autre de manière paramétrique, et le Model D de Behringer qui ne reste pas accordé pendant les 30 premières minutes d’utilisation (au moins). Mais surtout, il semblerait que le filtre ne soit pas ouvert de la même façon sur chaque entrée ! Cela va nous être confirmé avec le prochain test, qui consiste à utiliser le patch précédent, mais à faire varier la résonance de zéro à la valeur maximale de façon progressive.
- Test B – Air00:07
- Test B – ArturiaV400:09
- Test B – Cherry00:07
- Test B – GForce00:07
- Test B – Monark00:09
- Test B – Moog App00:10
- Test B – Softube00:06
- Test B – UAD00:10
- Test B – Broken00:10
- Test B – SynapseHZ00:09
- Test B – Behringer00:10
- Test B – Minimoog Late00:13
La fréquence maximale du filtre sur le Minimoog est censée être assez au-dessus des 20 kHz et donc de la zone audible. Par conséquent, l’effet de ce test si l’émulation est réaliste ne devrait être perçu plus ou moins que comme une réduction de volume, le gain sur les fréquences basses baissant avec l’augmentation de la résonance sur le fameux filtre transistor ladder. Or, sur certains plug-ins, ce qu’on entend ressemble plutôt à l’apparition d’une résonance très audible, ce qui est un très mauvais point pour le réalisme !
Autre test que j’ai effectué, on part toujours du même patch, et cette fois-ci, la résonance reste à zéro, mais c’est le fameux feedback que l’on va augmenter au fur et à mesure de l’enregistrement, via le niveau d’entrée pour les instruments externes. En effet, sur le Minimoog d’origine, il était possible de connecter quelque chose sur une entrée supplémentaire, ce qui faisait passer le signal au travers du filtre et du VCA, et, bien sûr, tout le monde s’en servait pour brancher plutôt la sortie casque, ce qui créé un son très chaotique et imprévisible caractéristique, que les utilisateurs des différents MS-20 connaissent bien et adorent également, avec des sauts d’octaves, de l’hystérésis, de la distorsion, la possibilité de doser ou de jouer avec l’effet… Voyons donc comment nos challengers performent là-dessus.
- Test C – Air00:07
- Test C – ArturiaV400:11
- Test C – Cherry00:10
- Test C – GForce00:09
- Test C – Monark00:13
- Test C – Moog App00:10
- Test C – Softube00:07
- Test C – UAD00:07
- Test C – Broken00:09
- Test C – SynapseHZ OSC1 1000:11
- Test C – Behringer00:13
- Test C – Minimoog Late00:11
Chaque produit se comporte d’une façon singulière sur ce test, parfois très caricaturale et pas toujours de manière réaliste, mais le plus souvent d’une façon intéressante au moins. Toutefois, The Legend HZ qui est quand même le sujet de notre test, fait ici quelque chose de très étrange, à savoir pas de distorsion, ni de chaos, ni d’aléatoire, mais juste une espèce de changement de timbre. Précisons également que The Legend HZ est probablement le plug-in qui propose de notre liste le set le plus complet de paramètres du moteur de simulation, avec le paramètre du Drive que l’on voit parfois ailleurs, mais aussi la symétrie de la saturation du filtre, un paramètre de gain et de saturation du VCA, et d’autres choses. En mettant ces paramètres sur leurs valeurs par défaut, on aurait pu s’attendre à obtenir ces sons caractéristiques du feedback, mais il ne s’est passé rien du tout ! J’ai donc dans un premier temps tenté de faire apparaître le feedback en jouant sur le Drive, puis sur les autres paramètres de simulation, avec des valeurs plus ou moins extrêmes, mais toujours sans succès, ce que j’ai trouvé honnêtement assez frustrant. Puis, avant d’abandonner, j’ai essayé de baisser le volume de l’oscillateur 1. Je me suis alors rendu compte que, si sa valeur est en dessous de 2 (donc relativement bas), on obtient cela :
On retrouve bien le phénomène recherché ! Mais on s’éloigne complètement du comportement attendu sur un Minimoog niveau mappage de paramètres. J’ai eu l’occasion d’en discuter avec Coramel et surtout avec Richard Hoffmann, qui est maintenant au courant de ce problème, qui a quand même de lourdes conséquences sur l’usabilité du plug-in, puisqu’il faut penser à baisser les volumes des oscillateurs pour pouvoir jouer avec les territoires chaotiques du Minimoog, ce qui est vous en conviendrez contre-intuitif et plutôt surprenant de la part de The Legend HZ qui semble jusque là s’en sortir très bien sur tous les tests (y compris les suivants d’ailleurs). Espérons que ce problème sera très vite corrigé, par exemple avec un mode de gestion du feedback alternatif switchable comme sur Monark. Dans le prochain test que je vous fais écouter, je me contente d’entendre l’onde carrée avec la plus petite longueur de pulse. Le son de cette onde est une des plus grosses différences existantes entre la V2 et la V3 du circuit des VCOs du Minimoog (donc Early vs Late), et permet d’affirmer que The Legend HZ est bien le seul plug-in du lot qui modélise cette V3 en plus de la V2.
- Test D – Air00:03
- Test D – ArturiaV400:04
- Test D – Cherry00:04
- Test D – GForce00:03
- Test D – Monark00:05
- Test D – Moog App00:05
- Test D – Softube00:03
- Test D – UAD00:03
- Test D – Broken00:03
- Test D – SynapseHZ Early00:03
- Test D – SynapseHZ Late00:04
- Test D – Behringer00:03
- Test D – Minimoog Late00:04
Je pourrais continuer encore longtemps sur des essais que j’ai effectués, par exemple en comparant le rendu des simulations lorsque tous les oscillateurs sont coupés (il reste des choses intéressantes qui sont superposées au son des VCOs qu’on peut entendre en isolation), ou en regardant le comportement des enveloppes, si elles sont assez percussives / courtes avec les réglages idoines, et si en activant la partie relâchement, avec un maintien à zéro et un déclin très long, on peut apercevoir l’enveloppe qui augmente au-dessus de la valeur qu’elle n’est pas censée dépasser en jouant plein de notes à la suite. Ce comportement caractéristique des enveloppes du Minimoog est facile à observer sur l’enveloppe de filtre en mettant une résonance haute et en jetant un œil au tuning de la sortie. J’ai écouté aussi le rendu du bruit quand il est utilisé en source de modulation pour la fréquence du filtre, ou regardé des phénomènes de repisse, mais on ne va pas y passer le reste du test :) Avant de parler d’autre chose, nous allons faire un dernier comparatif, plus difficile que les autres pour les produits, mais aussi pour votre serviteur, qui s’appelle le Coyote14 Stellar Explorer Challenge !
Coyote14 Stellar Explorer Challenge
Ce challenge, du nom d’un de nos modérateurs préférés, détenteur d’un Minimoog Late, et contributeur en samples sur l’original, consiste à jouer un fichier MIDI, avec des automations enregistrées en CC sur la quantité de modulation via la molette et sur la résonance, à son Minimoog, puis à le rejouer sur les autres produits en reproduisant son patch Stellar Explorer visible ci-dessous.
Vous trouverez également le fichier MIDI ci-dessous si vous voulez essayer de faire la même chose chez vous (prenez les précautions d’usage pour vos oreilles !)
Alors, disons qu’en reproduisant les paramètres à l’identique auprès de nos challengers, les résultats sont systématiquement assez éloignés, la faute aux différences entre le Model D Late de Coyote14 et ceux qui ont servi de modèle idéal pour les simulations des autres produits – qui sont je le rappelle presque systématiquement des versions Early, ce qui explique que j’ai recommandé un usage de dents de scie et de carré 50% uniquement pour la conception du patch. Mais le gros des différences vient surtout de la bête noire des développeurs d’émulations, le mapping des paramètres qui peut être erratique ! Du coup il n’est pas rare de réussir à se rapprocher en bougeant un peu ci et là les valeurs recommandées jusqu’à obtenir quelque chose d’assez ressemblant. Restent alors des différences supplémentaires qui viennent des interactions entre l’oscillateur 1 et 2. En effet, il est difficile de contrôler sur un vrai Minimoog l’exactitude de l’accordage par note, des relations de phase ou des écarts d’accordage d’une octave à l’autre… De ce côté-là, The Legend HZ donne la main sur beaucoup de paramètres, tandis que d’autres proposeront le strict minimum.
- Stellar ArturiaV400:57
- Stellar UAD00:57
- Stellar The Legend00:57
- Stellar The Legend HZ 100:57
- Stellar The Legend HZ 200:57
- Stellar Behringer00:57
- Stellar Minimoog Late00:57
En tâtonnant avec les mappings, j’ai réussi, je pense, notamment sur le début à avoir des sonorités qui se rapprochent un maximum de la cible, l’enregistrement du vrai. Sur la simulation de UAD en particulier, j’y arrive même assez facilement, car, de toute façon, je n’ai pas accès à grand-chose niveau paramètres, mais aussi parce que je suis arrivé facilement à avoir le son. Sur The Legend HZ, les choses sont compliquées parce qu’il y a beaucoup de paramètres sur lesquels jouer, en plus de ceux du Minimoog d’origine, ce qui explique que j’en ai proposé deux versions. En théorie on doit pouvoir arriver à un résultat plus proche que le reste, car c’est le seul plug-in qui propose la version Late, mais, dans la pratique, je pense qu’à un moment donné je suis tombé sur un os. Il s’agit soit de la forme des enveloppes, soit d’un truc sur l’interaction avec les deux oscillateurs, mais je n’ai pas réussi à faire matcher le début de l’enregistrement de manière satisfaisante.
Je trouve que l’émulation UAD et celle de Synapse se comportent bien toutefois sur les modulations plus violentes, mais je soupçonne que nous soyons pour The Legend HZ sur un autre problème du même acabit que celui du feedback, avec peut-être un souhait délibéré du développeur de ne pas chercher à coller plus que ça au son du vrai Minimoog. C’est pourquoi j’ai fait deux versions de mon essai sur The Legend HZ, mais aussi un troisième avec The Legend premier du nom, qui semble mappé complètement différemment de la dernière version, et plus focalisé sur le vrai Minimoog que sur une version augmentée. Après, soyons honnêtes, il ne s’agit pas de l’exercice le plus simple de la création que nous avons fait subir à toutes ces émulations, et aussi à ma capacité à bidouiller un patch pour le faire sonner comme un enregistrement donné !
En tout cas, pour conclure ces tests sur le réalisme, il me semble que The Legend HZ ne soit pas la simulation la plus réaliste de Minimoog. The Legend HZ est quand même dans le trio de tête pour un certain nombre de raisons, à commencer par le son des modulations, malgré le souci avec le feedback qui, je l’espère, sera corrigé dans une prochaine mise à jour. Mais ces plug-ins ne sont pas tous de simples émulations du synthé monophonique emblématique de l’année 71, et nous allons voir à présent ce qu’apportent les ajouts sur le concept de Minimoog de la collaboration Synapse Audio / Hans Zimmer.
Un Minimoog augmenté : entre modulations et effets intégrés
Évidemment qui dit synthé analogique monophonique augmenté dit unisson et polyphonie. The Legend HZ propose d’ailleurs deux modes d’unisson avec panoramique et désaccordage réglables. On obtient des sons plus gros que gros, comme chaque utilisateur de DIVA en raffole (mais avec la stéréo ici s’il vous plaît), et la polyphonie permet d’aller explorer des territoires très Junoesques ou Prophétiques.
Comme on le disait précédemment, The Legend HZ dispose d’un certain nombre d’effets, qui sont plutôt de très bonne facture, et qui peuvent servir à faire ressortir de façon intéressante les caractéristiques d’une émulation de Minimoog simplement sans fioritures, sur des sons typiquement Moog. La réverbération et le délai ont pas mal de caractère, encore plus avec les ajouts de la version HZ, le compresseur peut se régler en sortie de VCA ou être multiplié par le nombre de voix en mode Poly, et peut servir toutes sortes d’usages, de l’ajout d’un comportement percussif à un effet gros son comme lorsqu’on met un 1176 et un LA-2A sur une voix pour lui donner une couleur « produite ». L’émulation de 914 permet aussi de modeler le son d’une manière normalement dédiée aux plug-ins extérieurs dans un registre plutôt mixage, mais elle fera le bonheur des sound designers, et, de toute façon on ne dira pas non à un EQ dans le plug-in pour concevoir de jolis présets. Par contre, on notera des soucis de finition sur ces effets, ainsi que sur la version FX du plug-in, nous avons repéré quelques soucis (absence de report de la latence problématique en « send », entrée mono seulement, bugs sur le mode polyphonique du compresseur ou sur le potentiomètre Drive) que nous avons transmis et qui seront réglés prochainement, nous l’espérons. Sur cette démo audio, on utilise un peu tout ça, et je n’ai aussi pas pu résister à un rajout de réverbe à ressort :)
Les oscillateurs supplémentaires de The Legend HZ sont vraisemblablement la spécificité la plus visible du plug-in, mais pas forcément la plus facile à utiliser. Ils permettent d’obtenir un son assez gros, surtout avec les modes unisson ou avec de la polyphonie, voire des choses dans le registre de l’agressivité en allant beaucoup plus loin que ce que permet d’habitude le Minimoog…
Petit aparté, The Legend HZ ne propose pas le fameux switch A 440 qui était indispensable sur le vrai Minimoog pour l’accorder (au bout de 30 minutes), mais cela ne doit pas nous empêcher d’essayer de le reproduire quand même avec l’oscillateur 6, la matrice de modulation, et même de faire de la musique avec ! Nous en profitons également pour jouer avec les soundsets spécialisés MPE / Osmose que Expressive E vient de sortir, et qui nous a gentiment permis de les utiliser pendant ce test, le temps que je renvoie le contrôleur que j’ai eu en prêt ! Ici j’ai joué principalement avec le soundset horizons dans des registres ambiants et atmosphériques, sur lequel je retrouve les possibilités de jouer avec l’expressivité du moteur de synthèse, contrôleur MPE en main (petite reprise au passage).
- Four Hundred Forty05:50
- Horizon Glass Door04:02
En voyant cette matrice de modulation, les MSEGs et le séquenceur, je me suis aussi demandé à quel point on pouvait se rapprocher du territoire du DFAM (Drummer from Another Mother), semi-modulaire que j’affectionne particulièrement dédié aux sons percussifs analogiques, avec un séquenceur à pas assez rudimentaire, mais pas de mal de contrôles possibles. Malheureusement, The Legend HZ ne propose de double filtre, ou de filtre de type passe-haut, mais avec plusieurs instances et le passe-bande, on peut en faire un générateur de kicks et bloups assez sympathique, en n’oubliant pas de générer des enveloppes pour le pitch et pour à peu près tout et n’importe quoi.
D’ailleurs, il y a peu d’autres émulations de Minimoog qui vont aussi loin sur l’augmentation des capacités de synthèse et de sound design du moteur. La plupart s’arrêtent à quelques fonctions clés, notamment des effets supplémentaires, ou restent figées sur le concept de base de manière minimaliste (on pense aux plug-ins de UAD et de Softube, par exemple). The Legend HZ et le Arturia Mini V4 font figure d’exceptions là-dessus, ce dernier ayant plus d’effets différents que le sujet du test, mais va moins loin au niveau modulations et séquences (ainsi que fréquence de coupure visiblement). Et puis, citons évidemment le Broken Mini de Full Bucket Music, qui est hors catégories avec son côté découverte et « faussement cassé » en plus d’être gratuit…
Prise en main et performances en production
Alors, The Legend édition Hans Zimmer est un plug-in d’émulation de Minimoog qui va sur un registre généraliste analogique-like plus que décent, qui permet de retrouver les sonorités classiques du modèle d’origine, et aussi d’aller chercher beaucoup d’autres choses, sans être toutefois aussi polyvalent qu’un DIVA, par exemple. Il reste assez simple à utiliser puisque tout est accessible sur seulement deux onglets, malgré l’ajout de complexité de la dernière version voulu par le fameux compositeur, qui prend complètement son sens lorsqu’il s’agit d’étendre les possibilités du moteur de synthèse. Le concept semble parfois un peu schizophrénique (comme mes démos audio), étant donné que le plug-in se veut une reproduction fidèle du Minimoog (avec ici une tentative de sonner Calliope, la version polyphonique de mon instrument de musique préféré la flûte à coulisse, sur une idée de az). Ce qu’il réussit à être pratiquement sans fautes, à cause du feedback, de l’absence du mode low priority et des artefacts associés, et de quelques petites choses qui nous ont manqué sur le Coyote Stellar Challenge.
Mais dans le même temps, The Legend HZ cherche sciemment à se différencier en allant assez loin. J’ai apprécié particulièrement tout ce qui devient possible avec tous les modulateurs, le séquenceur / arpégiateur se complétant bien avec les MSEGs qui peuvent jouer un rôle identique ou étendu. La moindre petite fonctionnalité rigolote ou intéressante peut déclencher des heures d’exploration. Si le comportement chaotique du feedback nécessite pour le moment un peu d’attention pour être utilisé, il ouvre pas mal de possibilités d’amusement et de sound design, de même que les soundsets qui sont apparus déjà pendant le cycle de vie du produit. Je pense évidemment à ceux de Expressive E, mais aussi à un autre que Synapse Audio avait posté gratuitement pour Halloween, ce qui était une super idée !
Toutefois, il m’est arrivé régulièrement de rester sur ma faim niveau présets, que j’aime bien utiliser quand je suis en recherche d’inspiration ou pour trouver le son le plus proche de ce que j’ai en tête niveau sound design. Les possibilités offertes par le plug-in m’ont semblé incorrectement valorisées avec seulement 200 présets dans 10 catégories, certaines d’entre elles se retrouvant sous-approvisionnées. Heureusement, les présets de la version d’avant sont fournis avec, et sonnent à peu près identiques.
Autre point intéressant, Richard Hoffmann a apporté un soin particulier sur l’optimisation de son plug-in. Pendant le développement de The Legend, il avait trouvé des astuces qui permettaient de rendre la charge CPU raisonnable malgré la polyphonie, ce qui l’avait incité à étendre celle-ci à 8 notes au lieu de 4. Ici le plug-in va jusqu’à 12 (pourquoi douze, parce que c’est mieux que onze), et nous avons apprécié de pouvoir utiliser beaucoup d’instances du plug-in sur nos projets musicaux, ce qui nous a inspiré aussi une reprise moogesque, un poil plus agressive que la version originale.
Histoire de varier les registres, nous avons également la chance de vous proposer quelques démos audio du plug-in supplémentaires, réalisées gracieusement par Coramel !
- RadioAct (Coramel)03:23
- Tangerine Taste (Coramel)02:44
FAQ
1. The Legend HZ est-il une émulation fidèle du Minimoog ?
The Legend HZ offre un rendu sonore très réaliste grâce à son moteur analogique avancé. Cependant, il apporte aussi des ajouts modernes comme la polyphonie, l’unisson, des effets, et les possibilités de modulation étendues.
2. Quelle est la différence entre The Legend et The Legend HZ ?
La version HZ intègre des améliorations spécifiques apportées par Hans Zimmer, notamment plus d’oscillateurs, les enveloppes multi-segments, un séquenceur et une palette d’effets enrichie.
3. The Legend HZ est-il compatible avec les contrôleurs MPE ?
Oui, The Legend HZ est entièrement compatible avec les contrôleurs MPE, offrant une expressivité accrue pour le jeu en temps réel.
4. Quels sont les principaux concurrents de The Legend HZ ?
On peut citer Arturia Mini V4, UAD Moog Minimoog, Native Instruments Monark ou encore Softube Model 72, chacun ayant ses particularités.
5. Quel est l’impact sur les performances CPU ?
Malgré ses nombreuses fonctionnalités, The Legend HZ est bien optimisé et offre une consommation CPU modérée, même avec une polyphonie étendue.
Caractéristiques techniques
- Format : VST2, VST3, AU, AAX, Rack Extension
- Compatibilité : Windows et macOS, support NKS
- Système de protection : Challenge / réponse
- Oscillateurs : 6 oscillateurs (3 de base + 3 supplémentaires) avec modes Early et Late
- Filtres : Émulation du filtre Moog Ladder
- Effets intégrés : Delay, réverb, phaser, chorus, compresseur, EQ multi-bandes
- Modulation : Matrice avancée avec 12 destinations, 4 MSEGs, séquenceur 32 pas
- Modes de jeu : Mono, polyphonique (jusqu’à 12 voix), unisson
- Expressivité : Compatibilité totale avec le MPE
- Prix : 179 € (ou 79 € pour les possesseurs de la version précédente)