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Test de L'Arturia KeyLab MkII - Entre soft et brute

8/10

Devenu en quelques années l'un des acteurs majeurs du clavier de contrôle, Arturia revient avec une nouvelle version de son Keylab bien décidée à s'installer sur nos scènes comme dans nos studios.

Test de L'Arturia KeyLab MkII : Entre soft et brute

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 40 10Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en termes de look comme de construc­tion, le nouveau clavier greno­blois ne manque pas d’atouts pour nous plaire. Construit dans un métal laqué blanc du plus bel effet et rehaussé de joues en bois tout aussi sympa­thiques, il semble solide comme un tank et son poids, sensi­ble­ment plus élevé que celui de ses concur­rents, devrait être garant de sa stabi­lité.

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 36 31Même les molettes de pitch­bend et de modu­la­tion sont en métal chromé cepen­dant que les plas­tiques rete­nus pour les boutons semblent d’ex­cel­lente qualité. L’or­ga­ni­sa­tion du bandeau de commandes est simple : à gauche on dispose d’une matrice de 4×4 pads (sensibles à la vélo­cité et gérant l’af­ter­touch poly­pho­nique), cernée de 8 boutons de confi­gu­ra­tion et des 6 commandes desti­nées au pilo­tage de votre STAN, ce qui inclut évidem­ment un bloc de lecture. À droite, outre trois boutons de navi­ga­tion, on dispose de neuf sliders en regard de neuf boutons et neuf enco­deurs, tous libre­ment assi­gnables, sachant qu’on dispose de 3 banques de 27 assi­gna­tions pour ces derniers.

Au centre enfin nous attend une molette sous un écran à LED de 48 carac­tères, elle-même flanquée de 7 boutons de commande et navi­ga­tion. Il y a du monde donc mais comme Artu­ria a opté pour des contrôles de taille modeste, tout cela demeure bien espacé. Vous vous en doutez : à l’ex­cep­tion des poten­tio­mètres, sliders et molettes, tous les boutons sont rétroé­clai­rés, que ce soit par des LED blanches ou des LED RVB concer­nant les boutons assi­gnables et les pads.

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 41 20Disons un mot sur le clavier qui est bien évidem­ment sensible à la vélo­cité et gère l’af­ter­tou­ch… mais pas en poly­pho­nique. En face arrière, pas mal de monde nous attend puisqu’outre le connec­teur USB, une prise pour l’ali­men­ta­tion option­nelle et un bouton de mise en/hors fonc­tion, on trouve une entrée/sortie MIDI au format DIN 5 broches, 5 connec­teurs Jack pour pédales de Sustain, Expres­sion et 3 auxi­liaires (!), et enfin 5 connec­teurs minijack pour gérer le CV Gate : CV In, Pitch Out, Gate Out, Mod 1 et Mod 2.

Comme vous le voyez, Artu­ria a bien pensé son clavier en termes de contrôles et de connec­teurs pour pilo­ter des logi­ciels ou des instru­ments élec­tro­niques, ce qui le place, sur le papier, comme une sorte de chaî­non manquant entre les claviers dédiés à la MAO comme l’Ad­vance d’Akai ou le Komplete Kontrol de Native Instru­ments, et le Remote SL MkIII de Nova­tion, plus pensé quant à lui pour le pilo­tage d’ins­tru­ments élec­tro­niques maté­riels. En vis-à-vis de ce posi­tion­ne­ment, on reste tout de même un peu surpris du nombre d’en­trées Jack pour les pédales auxi­liaires, au point de se deman­der si le construc­teur n’an­ti­cipe pas sur la sortie de futurs produits dans sa gamme de contrô­leurs. L’ave­nir nous le dira ; voyons pour l’heure ce que nous dit le présent sur le confort de jeu.

Mise en jeu

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 43 19Ni trop mou, ni trop ferme et ne présen­tant pas un retour trop prononcé qui pour­rait le rendre fati­guant, le toucher du clavier est convainquant, tout comme la préci­sion qu’il offre en matière de vélo­cité et d’af­ter­touch. Je serai plus réservé en revanche concer­nant les molettes qui sont trop fines à mon goût et dont le métal strillé (sauf sur le renfle­ment central) n’em­pêche pas toujours les doigts de déra­per. Ce n’est pas un problème sur la molette de modu­la­tion qui offre peu de résis­tance, mais sur celle de pitch bend, c’est plus gênant. Il n’y a rien de rédhi­bi­toire là-dedans, je vous rassure, mais l’er­go­no­mie de tout cela est perfec­tible. Tous les autres contrôles présentent une qualité homo­gène : les boutons de fonc­tion rendent un petit clic aisé­ment sensible lorsqu’on les presse, tandis que les sliders comme les enco­deurs offrent une résis­tance souple et homo­gène. Quant aux pads, s’ils ne sont pas au niveau de ceux d’une Maschine ou d’une MPC, ils se sont avérés agréables à l’usage et suffi­sam­ment larges et espa­cés pour s’adon­ner aux joies du finger drum­ming. Finis­sons avec la molette centrale qui est autre­ment plus convain­cante que sur les Komplete Kontrol parce qu’elle est à la fois plus large, que les crans sont plus doux et qu’elle est surtout assu­ré­ment moins bruyante que sur ces derniers ; à cause de tout cela et de son revê­te­ment en caou­tchouc, elle fait aussi moins ‘plas­toc’.

Globa­le­ment, ce nouveau Keylab est donc très satis­fai­sant sur le plan des sensa­tions. Reste à voir comment il se comporte dans ses diffé­rents modes d’uti­li­sa­tion.

Ces petits détails qui changent tout

Même si la plupart des fonc­tions du Keylab n’ap­pellent aucun commen­taire parti­cu­lier, car elles fonc­tionnent comme attendu mais demeurent clas­siques, on se rend compte d’en­trée de jeu qu’Ar­tu­ria a pensé à plein de petits détails qui peuvent faire la diffé­rence au quoti­dien. C’est ainsi que le construc­teur four­nit un petit hub USB pour éviter les boucles de masse qui peuvent surve­nir lors de l’usage d’un synthé relié en CV/Gate avec un ordi­na­teur. On appré­cie aussi gran­de­ment la possi­bi­lité de chan­ger très simple­ment de canal MIDI utilisé, non pas en se rendant dans un menu, mais en pres­sant un bouton et une des 16 premières touches du clavier : simple, effi­cace, malin !

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 42 52Les pads eux-mêmes proposent des modes d’uti­li­sa­tion inté­res­sants : outre leur usage clas­sique (un pad = une note), on peut leur assi­gner des accords qu’on jouera sur le clavier, et trans­po­ser ensuite ces derniers. Avec un arpé­gia­teur inté­gré, c’eut été parfait mais même en l’ab­sence de ce dernier, avouons que c’est très bien vu et simpli­fiera gran­de­ment la vie des perfor­mers qui ne sont pas forcé­ment très à l’aise sur le plan du jeu pianis­tique.

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 11 43 40Une pres­sion sur le bouton DAW permet de bascu­ler dans en mode pilo­tage de STAN, sachant qu’en plus des géné­riques MCU et HUI, des mappings prêts à l’em­ploi sont propo­sés pour la plupart des séquen­ceurs du marché (Able­ton Live, Cubase, Logic, Reaper, Studio One, Pro Tools, etc.) et qu’Ar­tu­ria a eu la bonne idée de livrer son clavier avec des caches qui permettent d’adap­ter la séri­gra­phie des boutons au logi­ciel que vous utili­sez. Encore une fois, ce sens du détail fait plai­sir à voir, tout comme l’in­té­gra­tion avec le logi­ciel Analog Lab 3 fourni en bundle avec Able­ton Live Lite et Piano-V.

Le Lab est dans le camp

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 35 21L’une des plus grandes forces du Keylab tient évidem­ment dans le fait qu’il est pensé pour l’ex­cellent Analog Lab 3. Lorsqu’on presse la touche qui lui est dédiée, on dispose en effet d’une parfaite inté­gra­tion du logi­ciel au Keylab, le lot de commandes central permet­tant de navi­guer dans les plus de 6500 sons que propose le logi­ciel, tandis que les sliders et potards sont auto­ma­tique­ment mappés aux para­mètres de chaque preset. Il se dégage de cette inté­gra­tion réus­sie l’im­pres­sion d’avoir à faire à une works­ta­tion plus qu’à un clavier MIDI pilo­tant un logi­ciel, même si quelques petits détails gâchent un peu l’ex­pé­rience utili­sa­teur.

Outre le problème de latence qu’on a sur un chan­ge­ment de presets (tout comme avec le système Komplete Kontrol ou le VIP de l’Akai Advance) et qui est inhé­rent au fait que ce sont bien des modé­li­sa­tions de synthés diffé­rentes qui sont convoquées en interne, on regret­tera que l’af­fi­chage se borne à un bon vieux LCD sur deux lignes plutôt qu’à un bel écran LED comme chez la concur­rence, ce choix un peu old school rendant la navi­ga­tion plus labo­rieuse que sur un Komplete Kontrol à peine plus cher et riche­ment doté en termes d’écrans.

Arturia KeyLab 49 mkII : Photo 14-11-2018 10 39 47Par ailleurs, il faut souli­gner que les faders comme les enco­deurs du Keylab ne sont pas sensibles au toucher : pour voir à quel para­mètre ils sont assi­gnés ainsi que la valeur du para­mètre en ques­tion, il ne suffit donc pas de les effleu­rer mais il faut les mani­pu­ler et… en chan­ger ainsi la valeur. Certes, la plupart du temps, les contrô­leurs sont assi­gnés aux mêmes para­mètres qui corres­pondent à la séri­gra­phie qu’on trouve sur le Keylab (Cutoff sur l’en­co­deur 1, Reso­nance sur l’en­co­deur 2, etc.) mais ce n’est pas systé­ma­tique, à plus forte raison lorsqu’on utilise non plus l’Analog Lab mais les instru­ments de la V-Collec­tion. Souli­gnons-le enfin, on retrouve dans certains mappings les mêmes écueils que chez la concur­rence : para­mètre On/Off gérés par un fader (moitié de cours off donc, et moitié de course on), tandis que rien ne permet de gérer les intrer­faces de type XY autre­ment qu’en mode Télé­cran. Certes, ce dernier détail n’est pas tant un problème pour les instru­ments Artu­ria, mais dès lors qu’on entre­prend de pilo­ter des instru­ments ou des effets d’autres déve­lop­peurs, c’est plus gênant.

controlcenterFinis­sons d’ailleurs en évoquant le mode User qui permet de stocker jusqu’à 10 mappings de quasi­ment tous les contrôles du clavier (en dehors des touches de fonc­tion), mappings que vous crée­rez et gére­rez depuis le clavier même ou via l’uti­li­taire MIDI Control Center qui s’avère très bien foutu et permet de para­mé­trer assez préci­sé­ment chaque compor­te­ment et l’as­si­gna­tion de chaque contrôle. Géné­ra­le­ment, il convien­dra de rensei­gner un mode de fonc­tion­ne­ment (variable suivant le controle), un compor­te­ment, un contrô­leur continu, un canal MIDI et quand cela s’avère perti­nent, les bornes d’une plage de valeurs ou encore la couleur RVB de l’éclai­rage LED.

Rien à dire là-dessus, Artu­ria a bien fait le job, même si ce nouveau Keylab n’est pas exempt de tous reproches.

Le chaî­non manquant… ou presque

Entre un Nova­tion SL Mk3 très orienté vers le pilo­tage maté­riel (mais sensi­ble­ment plus cher, il est vrai) et les Komplete Kontrol et Akai Advance très orien­tés vers le pilo­tage logi­ciel, le posi­tion­ne­ment de ce nouveau Keylab a de quoi rete­nir l’at­ten­tion de ceux qui cherchent un habile compro­mis pour contrô­ler des logi­ciels comme du maté­riel, les claviers équi­pés de connec­tique CV/Gate n’étant pas légion sur le marché. On le compren­dra aisé­ment : cette poly­va­lence se fait toute­fois au détri­ment d’équi­pe­ments ou de fonc­tions présentes chez la concur­rence.

Pour ce qui est du logi­ciel d’abord, il va sans dire que rien n’a été prévu par Artu­ria pour faci­li­ter le contrôle d’autres logi­ciels que ses instru­ments ou les prin­ci­pales STAN du marché. Dès lors qu’on s’écarte de la V-Collec­tion, on ne dispose ainsi d’au­cune plate­forme qui permette de navi­guer dans les presets d’ins­tru­ments prove­nant d’autres éditeurs, ou de dispo­ser de mappings prêts à l’em­ploi les concer­nant, comme cela se passe avec le VIP d’Akai ou le tandem Komplete Kontrol/NKS de Native Instru­ments.

Du côté maté­riel, si l’on ne repro­chera pas néces­sai­re­ment aux Greno­blois de ne pas avoir four­nir plus d’en­trées/sorties MIDI ou CV/Gate, on regret­tera qu’au­cune fonc­tion d’ar­ran­ge­ment maté­rielle ne soit présente dans le clavier en dehors de la gestion des accords : pas d’ar­pé­gia­teur, pas de séquen­ceur, pas de contrainte de gamme… C’est d’au­tant plus dommage que l’on sait qu’Ar­tu­ria dispose de telles tech­no­lo­gies, comme le prouve le Keys­tep dont le prix serré montre qu’in­té­grer ces tech­no­lo­gies n’au­raient pas néces­sai­re­ment plombé le prix du produit…

Enfin, comme nous l’avons mentionné plus haut, malgré de bonnes idées ergo­no­miques et une expé­rience utili­sa­teur rela­ti­ve­ment convain­cante dans l’en­semble, on regret­tera le fait que les sliders et enco­deurs ne soient pas sensibles au toucher et qu’il faille se conten­ter d’un écran LCD à deux lignes un peu vieillot en lieu et place d’un bel écran à LED comme en propose la concur­ren­ce… sachant que l’idéal serait de propo­ser un écran tactile multi­point : 11 ans après la sortie de l’iPhone qui nous a habi­tués à faire défi­ler les 100 contacts de nos réper­toires télé­pho­niques d’un simple balayage du doigt, faire défi­ler 6500 presets en tour­nant une molette semble parfai­te­ment daté. C’est vrai pour ce Keylab comme pour le Komplete Kontrol ou l’Akai Advan­ce…

Certes, toutes ces choses auraient pesé sur la facture, mais disons qu’en faisant l’éco­no­mie de deux sorties auxi­liaires, des joues en bois ou de la fini­tion tout métal qui, bien qu’élé­gante, n’est pas forcé­ment toujours probante sur le plan de l’uti­li­sa­tion (manque d’adhé­rence (grip) de la molette de pitch bend) ou du trans­port, il y aurait sans doute de quoi épon­ger un mini­mum les surcouts occa­sion­nés par ces amélio­ra­tions, d’au­tant qu’un peu plus complet, le Keylab aurait pu se permettre d’être un peu plus cher aussi.

Bref, ce Keylab MkII est réussi à plus d’un égard, mais Artu­ria dispose d’une confor­table marge de progrès pour la version MkIII…

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Conclu­sion

La copie rendue par Artu­ria avec ce Keylab MkII est très bonne dans l’en­semble : amélio­rant la première version sur quasi­ment tous les points, le clavier s’ouvre au monde du CV/Gate sans pour autant délais­ser l’in­té­gra­tion avec Analog Lab qui faisait la force du premier modèle. Certes, à voir ce que propose la concur­rence, il y a bien des petites choses à redire ça et là, le Keylab n’étant ni aussi doué que l’Ad­vance ou le Komplete Kontrol pour le soft, et ni aussi abouti que le Nova­tion SL Mk3 pour le hard. On regret­tera surtout le manque d’un écran plus moderne qui aurait sensi­ble­ment amélioré l’ex­pé­rience utili­sa­teur, mais il faut en conve­nir : nous sommes face à un compro­mis dont la poly­va­lence, la fini­tion et l’élé­gance devraient séduire plus d’un utili­sa­teur. Bravo pour cela donc, en atten­dant le Keylab MkIII

Notre avis : 8/10

  • Construction sérieuse avec des matériaux de qualité et une finition élégante
  • Connectique fournie (CV/Gate, MIDI et nombreuses pédales) offrant une bonne polyvalence
  • Ergonomie bien pensée dans l’ensemble
  • Intégration avec l’excellent Analog Lab…
  • …qui est fourni avec le sympathique V-Piano
  • Mappings prêts à l’emploi pour la plupart des STAN du marché…
  • …et jeu de caches pour adapter la sérigraphie du clavier aux différentes STAN Hub fourni pour éviter les boucles de masse
  • Mode Chords pour les pads
  • Assignation simple du canal MIDI
  • Un clavier bien lourd qui ne risque pas de bouger…
  • ...mais qu’on aura pas forcément envie de trimbaler non plus !
  • Le choix du métal pour les molettes comme la taille de ces dernières n’est pas forcément judicieux à l’usage (on glisse sur le pitch bend)
  • Faders et encodeurs non sensitifs
  • Une écran LCD de 2 lignes alors que la plupart des concurrents sont passés à l’écran LED couleur autrement plus large
  • Pas d’arpégiateur, de séquenceur ou de contrainte de gamme intégrés

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