Laissez-moi vous dire, ma brave dame, que tout fout le camp. Ces jours-ci, dès qu'on a le dos tourné, y'a une marque de pédale qui pousse et on se retrouve comme par magie avec des petits boitiers métalliques à tester pour AudioFanzine. Le nom de la nouvelle marque ? Eagletone. « Le son de l'aigle ».
C’est sympathiquement trouvé, ça évoque les grands espaces américains, la route 66, sillonnée par des Harley ou des camions grands comme des porte-avions… sauf que c’est français et que c’est fabriqué en Chine. Compliqué ? Pas tellement en fait. Il s’agit en quelque sorte d’une marque « distributeur », Woodbrass se chargeant de faire fabriquer ces pédales et de les commercialiser exclusivement sur son site en ligne.
Les trois pédales ont en commun une construction robuste. Entièrement métalliques, aux flancs noirs emboutis et à la face supérieure en alu, elles ne sont pas sans rappeler certains de ces footswitchs que l’on n’hésite pas à écraser sauvagement sans crainte de les malmener. Il semble vraiment difficile de les abîmer.
Au niveau des entrées / sorties et des contrôles, on retrouve la traditionnelle entrée à droite, la sortie à gauche. Les potards semblent de qualité, opposant une saine résistance quand on les tourne. On retrouve également sur tous les modèles un footswitch métallique, une Led de mise en service, et un à plusieurs mini-switches pour jongler entre les possibilités qu’offre chaque pédale.
Comme sur la plupart des pédales, on retrouve bien sûr une prise d’alimentation externe (toute alimentation « standard » de pédale à centre négatif fait l’affaire), et une trappe pour la pile. Cette trappe, c’est la seule chose que j’aurai à reprocher à ces pédales sur le plan de la construction, est fermée par une vis-rondelle qu’il faut dévisser à la main, aucune encoche n’étant prévue pour s’aider d’un tournevis. Sauf que, quand celle-ci est vissée avec enthousiasme, on a vraiment énormément de mal à avoir une prise pour la tourner et changer la pile, surtout quand on est un adepte de la gros-doigtitude, comme votre serviteur. Bref, préférez les alimentations secteur, de toute façon c’est plus écologique, et du coup ça vous fera moins mal aux doigts.
Que dire de plus ? Ha oui, que ces pédales sont livrées dans un spartiate emballage en carton sans fioritures, après tout on est pas là pour rigoler, et sans manuel d’utilisation, ça c’est moins sympa pour les mecs qui n’y connaissent rien… remarquez, ils n’ont qu’à utiliser leurs oreilles pour comprendre comment ça marche, ce qui n’est pas forcément plus mal… C’est bien aussi de se servir de la force son instinct pour régler une pédale, non ?
Bon allez, c’est pas que je m’impatiente, mais en bon gros chevelu que je suis, j’ai des envies de me friter avec ce gars de l’enfer, ce « Hell Dude »…
Hell Dude, where is my car ?
Il est temps de se brancher et de voir comment la pédale tient ses promesses…
Pour le test, j’ai utilisé comme guitare de référence ma fidèle Takamine GX100 de 1985, solid-body de forme Explorer tout en acajou, équipée d’une paire d’EMG 85 et accordé en Si grave (c’est pas fait pour jouer de la musette, on est d’accord…). La Hell Dude était insérée entre celle-ci et un Jet City JCA20H, réglé pour rester le plus clean possible avec égalisation au neutre. La prise de son est effectuée sur le Torpedo de Two Notes, avec un baffle Marshall 4×12 en V30, repris par un Beyerdynamic M160. Pour mesurer l’impact des différents réglages, j’ai joué le même riff (connu).
Les switches de grain (classic, normal, modern ) et de voicing (normal, bright, warm) servent à déterminer un grain de base, sur lequel on peut agir très efficacement avec le médium paramétrique, notamment. Pour ma part, j’ai trouvé que de booster légèrement la plage des médiums, pour jouer sur la fréquence centrale de celles-ci avec le semi-paramétrique, donnait le meilleur rendu sur cette pédale. Le high-cut permet d’enlever le trop-plein d’aigus, le cas échéant.
Ce qui est plus surprenant, et là où j’émettrai quelques réserves, c’est à propos de ce switch « amp simulator ». Vu qu’il a tendance à rajouter de la brillance quand il est branché, je me suis sincèrement demandé si la sérigraphie était inversée, ou si c’était une erreur à la conception. Personnellement, même si je suis très sceptique quant à une utilité réelle pour jouer en direct, en revanche je l’ai trouvé très convaincant pour encore changer totalement le grain de la pédale, rajoutant encore autant de possibilités sous le pied.
Pour en terminer sur le chapitre des « peut mieux faire », j’avoue que le réglage de la fréquence centrale du médium paramétrique aurait gagnée à être plus progressive. Là, on sent une grosse efficacité sur le premier tiers de la course du potentiomètre, un « creux » au milieu, puis de nouveau un dernier tiers de course de potentiomètre efficace. Dommage, mais pas du tout rédhibitoire.
En fait, je me suis retrouvé au cours du test à essayer beaucoup de combinaisons, parfois très extravagantes, pour retrouver des sons heavy, thrash, death, et même « true black metal » (le truc: pousser les deux boutons de médiums à fond…). Tous les styles de Metal passent sans problème, on prend rapidement contrôle de la pédale pour en faire un peu ce qu’on en a envie. Pour moi, cette pédale est la parfaite illustration que pas cher ne rime pas forcément avec un son cheap. Une pédale à essayer, très sincèrement.
- 07 action du semi parametrique, mids00:08
- 01 son clean00:06
- 06 action du medium semi parametriqu00:15
- 04 mode normal + normal, high cut on00:39
- 03 mode normal + high cut off, norma00:19
- 05 normal + amp sim on00:19
- 02 modes classic, normal, modern + w00:54
- les sons
- la diversité des sons métal proposés
- le rapport qualité/prix
- le switch « amp simulator » mériterait une autre appellation
- la course de réglage des fréquences médiums pas assez régulière
Pour la suite du test, on va redescendre un peu dans les tours, et se pencher sur le cas de l’overdrive/distorsion, la « The Crusher ».
A little crush
On retrouve donc des contrôles de gain, tone et level en potentiomètres, et 3 positions intitulés « TS » (pour Tube Screamer), Bright et Warm.
Le grain est en général assez épais, et on obtient un overdrive que je qualifierai allant de « présent » à un « début de distorsion » . Bizarrement, des 3 modes disponibles, le bright est celui qui me semble le plus « Tube Screameresque », notamment parce que c’est le seul qui coupe un peu le bas du spectre, comme le fait la Tube Screamer originale.
Moins radicale dans ses changements de grains que la Hell Dude, la The Crusher a cependant conservé le petit défaut de progressivité du potard de tonalité, qui n’agit pas « efficacement » tout le long de sa course.
En guise de conclusion, je dirais que cette pédale, aux sonorités que je qualifierai de « classiques », a surtout pour elle un rapport qualité/prix qui va plutôt dans son sens quand on la compare à des références plus connues.
- 02 drive 50%, modes TS, bright, warm00:44
- 06 utilisation en boost sur un jca 200:51
- 04 Drive 10%, modes TS, bright, warm00:40
- 01 clean00:12
- 05 Action du tone sur les modes TS, 00:56
- 03 drive 100%, modes TS, bright, war00:44
- le rapport qualité/prix
- des sonorités plutôt classiques
- course de réglage du potentiomètre « tone » pas assez régulière
- des sonorités plutôt classiques
Pour finir, goutons à un délai analogique, le « Pipeline ».
Du délai en tube
Quand on se branche dans le Pipeline, on réalise très vite que nous sommes en présence d’un engin qui va ravir les amateurs de shoegazing, de vintage et de triturages « lo-fi ». En effet, le son des répétitions se dégrade très vite, allant même, si l’on augmente le nombre de répétitions, à s’empiler jusqu’à distordre les circuits de la pédale (cf exemple sonore)
Bien sûr, on peut jouer avec les applications classiques du délai, faire un slapback ou un délai classique, et tant qu’on ne recherche pas la fidélité des delay digitaux, on sera certainement très satisfait.
Au final, j’ai trouvé la Pipeline très attachante, possédant une forte personnalité, et comme ses comparses, dotée d’un rapport qualité/prix qui la rend très intéressante.
- 01 slapback00:24
- 02 1100ms + repeat infini00:28
- 03 solo metal + delai (300 ms circa)00:19
- forte personnalité
- simplicité et efficacité
- qualité/prix
- rien, surtout pour le prix
Le son de l’aigle
En guise de conclusion, je dois avouer que j’ai été agréablement surpris par les produits Eagletone. Si la « The Crusher » reste très classique, les qualités de la Hell Dude, qui fait parfaitement son job en évitant les écueils que l’on associe d’habitude aux pédales « Metal » et celles de la Pipeline, qui ravira les amateurs de vintage et de Low-Fi, le tout associé à une construction robuste et un prix resserré, font d’Eagletone une marque qui vaudra le coup d’oreille à qui est à la recherche de sonorités de qualités et à la bourse plate.