L'équipe d'AudioFanzine s'est rendue au Danemark afin de visiter l'usine de Dynaudio. Nous y avons rencontré Roland Hoffmann qui nous explique comment sont fabriqués les moniteurs.
La visite en vidéo (sous-titres français et anglais)
Interview de Roland Hoffmann
Après la visite de l’usine, Roland Hoffmann a accepté de répondre à quelques-unes de nos questions…
Que produisez-vous le plus dans votre usine ? Des systèmes pour l’automobile, pour le Pro Audio ou la Hi-Fi ?
Beaucoup de haut-parleurs sont destinés à être envoyés aux constructeurs automobiles, plus que pour le Pro ou la Hi-Fi. Mais il n’y a pas besoin de construire d’enceintes autour, les HP sont intégrés directement dans les voitures. Il y a donc moins de travail. De plus, nous pouvons nous permettre d’automatiser certaines tâches pour les HP destinés aux voitures, ce qui n’est pas le cas pour la Hi-fi et le pro audio.
Partagez-vous des technologies entre les enceintes Pro et la Hi-Fi ?
Oui, tout à fait. La section Recherche et Développement est d’ailleurs la même. Certaines équipes travaillent pour tel ou tel projet, mais il arrive souvent que des personnes travaillent pour la section Pro et la section Hi-Fi. Ce n’est pas plus mal, car finalement les attentes sont les mêmes, nous avons tous envie d’entendre le piano comme si on était face à lui.
La Hi-Fi n’est-elle pas parfois du Pro Audio, mais avec un prix supérieur ?
Parfois, oui (rires), mais c’est un peu caricatural car les finitions des bois ne sont pas les mêmes non plus !
Construisez-vous chaque jour tous les produits dans votre usine ?
Il y a un ou deux jours par semaine où nous produisons les woofers des modèles Evidence, car nous avons certains groupes de personnes qui sont très bons pour faire cela.
Fournissez-vous des haut-parleurs à d’autres compagnies du marché de l’audio ?
Nous l’avons fait par le passé, mais cela tend à se raréfier et à devenir anecdotique.
Vous avez choisi de produire ici au Danemark et de ne pas délocaliser en Asie. Pourquoi cette décision ? Quels sont les avantages et les inconvénients ?
Produire en Asie peut être un bon choix quand vous le faites en masse, mais pas forcément quand vous produisez en petites quantités comme nous, car leurs usines ne sont pas faites pour cela et du coup les prix remontent. De plus, le processus de délocalisation est long (former les gens, contrôle qualité, etc.) et cela coûte de l’argent. Les usines en Asie sont imbattables quand il s’agit de produire du matériel d’entrée de gamme, mais ce n’est pas forcément le cas quand il s’agit de produire du haut de gamme. D’après notre expérience, en Europe, les gens qui travaillent dans nos usines portent plus d’attention aux petits détails. Ce n’est pas seulement une question de tradition, il faut trouver un bon équilibre entre la qualité et le coût de production.
Avez-vous été confrontés à de la contrefaçon ?
Il nous est arrivé de constater que certains boomers concurrents ressemblaient aux nôtres d’un point de vue cosmétique, mais ce n’était pas le cas côté son… Ce n’était pas de vraies contrefaçons, ils essayaient juste de nous imiter, rien de vraiment attaquable et ce n’est pas un problème.
Il y a eu dans le marché des enceintes, différentes modes : Genelec, DynAudio puis de nouvelles marques ont fait leur apparition comme Adam ou Focal. Vous en pensez quoi ?
C’est amusant de voir que certains de nos modèles sont restés très longtemps au catalogue. Non pas que nous soyons paresseux, mais les utilisateurs sont habitués à ces modèles et sont très demandeurs. Ils ne ressentent pas l’envie de changer.
Le rythme du marché est assez lent, est-ce un problème pour un constructeur comme DynAudio ?
Ce n’est pas vraiment un problème, car beaucoup de studios ne sont pas encore équipés en DynAudio ! De plus, nous pensons que la fidélité des utilisateurs est une bonne chose, ils sont à la recherche d’une référence et d’une marque en qui ils peuvent avoir confiance.
Vous arrive-t-il d’essayer des produits concurrents et de les comparer aux vôtres ?
Oui, mais généralement assez tardivement dans le processus. On n’achète pas un produit en se disant « on doit avoir un truc équivalent ou faire aussi bien ». La concurrence, même si nous en tenons compte, n’est pas à l’origine de nos recherches. Car ce n’est pas comme ça qu’une entreprise doit fonctionner pour progresser.
Que pensez-vous des EGG de SE Electronics, dessinées par Andy Munroe qui a travaillé pour Dynaudio il y a quelques années ?
Leur forme confère certains avantages acoustiques et permet notamment de diminuer les ondes stationnaires, mais d’un point de vue commercial ce n’est pas aisé de vendre une enceinte avec un look pareil. Certains aiment et d’autres non… Concernant le matériau utilisé pour l’enceinte (un alliage de plastique), nous n’avons pas encore considéré remplacer nos caissons en MDF car nous sommes déjà très satisfaits des résultats. Cela confirme quand même que les matériaux faits à partir d’un mélange de 3 ou 4 matières premières (plastique, bois ou métaux) sont les meilleurs. On ne peut pas avoir d’aussi bons résultats avec un matériau tout fait. Nous utilisons des granules de bois, car cela nous permet d’avoir une constance dans la qualité et la fréquence de résonance est toujours la même. De plus, le bois travaille, mais pas notre MDF.
Comment choisissez-vous la fréquence du crossover ?
Cela dépend des haut-parleurs, nous la calculons. Nous savons qu’elle doit être en dehors de la zone critique pour les oreilles humaines, vers 2/2,5 kHz.
Pour vous, le dôme du boomer est important pour les moyennes fréquences, que pensez-vous des dômes inversés ?
Nous pensons que c’est moins rigide et que la radiation et la définition sont meilleures avec un dôme non inversé, même si les deux fonctionnent bien.
Tannoy utilise des HP concentriques, qu’en pensez-vous ?
Cela a un avantage pour l’image sonore : le son vient d’un seul et unique point. En revanche, le tweeter est confiné dans le cône du boomer qui est tout le temps en mouvement et cela a de mauvaises répercussions sur le son qu’on est obligé de corriger ensuite d’une manière ou d’une autre…
Comment voyez-vous le futur du marché des enceintes ?
Le son doit venir de quelque chose qui fait bouger de l’air, donc l’enceinte existera toujours, peut-être dans une autre forme et avec d’autres matériaux, mais DynAudio sera toujours là, car nous sommes bons pour cela. Ce n’est pas forcément le cas des constructeurs de matériels électroniques où les choses peuvent être bouleversées plus facilement…
Croyez-vous aux nano-technologies ou autres matériaux intelligents ?
Il faut toujours rester à l’affût, mais quand nous avons vu débarquer par le passé les panneaux plats pouvant remplacer des enceintes, nous nous sommes dit que c’était le futur. Finalement, nous avons toujours des enceintes classiques chez nous ou dans notre studio… C’était innovant, mais les performances sonores n’étaient pas meilleures que celles de nos bonnes vieilles enceintes.
Vous pensez avoir atteint un palier de qualité ?
Non, nous cherchons toujours à améliorer nos produits avec des nouveaux matériaux ou une nouvelle conception.
Où pouvez-vous faire encore le plus de progrès ?
Dans le tweeter, car il n’est jamais assez léger et on peut encore améliorer les choses, plus que dans le woofer. Mais le plus compliqué dans une enceinte, c’est de trouver un bon équilibre entre le tweeter, le woofer et le crossover. Même si on trouve un nouveau tweeter miraculeux, il faut réussir à bien l’intégrer dans l’enceinte…