Bien plus qu'une réédition, les récentes Solo6 de Focal sont assorties de nouvelles fonctionnalités et d'innovations technologiques : un nouveau modèle en réalité. Et quand Focal dévoile de nouveaux moniteurs haut de gamme, forcément on a hâte d'écouter !
![Test des enceintes Focal Solo6 : Des Moniteurs Hors Pair](https://img.audiofanzine.com/img/fr/article/cover/4671.jpg?fm=pjpg&w=704&h=396&fit=fill&s=f0a6f2e8242c220bbdb3d56e31c6881d)
Quelques mois après avoir testé les Alpha EVO qui sont plus l’entrée de gamme de chez Focal, on est ravis de retrouver la marque pour un produit made in Saint-Étienne dont on attend beaucoup. On gardera à l’esprit que c’est une paire à 2 780 € dont il est question, donc un produit qui est destiné aux professionnels, et dont on est en droit d’attendre beaucoup.
Ouverture Focale
À la mise en route, la LED « Power » s’allume en rouge, car un auto-standy est activé. Quand on enverra du signal, l’enceinte sortira de son standby et ce voyant passera au vert. Attardons-nous un peu sur les matériaux utilisés pour les haut-parleurs, puisque la marque stéphanoise attire souvent notre attention dessus : on avait testé il y a quelques semaines les Alpha EVO et leur membrane en Slatefiber, pour les ST6 voici le Béryllium et le composite W. Le Béryllium du tweeter est un métal dont l’extrême légèreté et la rigidité permettent de produire des fréquences très élevées, jusqu’à 40 kHz dans le cas de ce haut-parleur. Le matériau en lui-même pourrait même permettre de reproduire des fréquences jusqu’à 60 kHz, mais ce ne serait pas très utile à nos oreilles. En ce qui concerne le woofer, la membrane en structure sandwich dite « W » est faite de deux épaisseurs de fibres de verre, de part et d’autre de la couche centrale en mousse. La fibre de verre permet une grande homogénéité de la matière, moins de poids et d’épaisseur que d’autres types de membranes, et le constructeur nous assure ainsi une distorsion harmonique quasi nulle.
À cela s’ajoute la technologie Tuned Mass Damper développée par Focal : sans rentrer dans les détails, ce « TMD » agit sur la suspension de la membrane, comme amortisseur harmonique. Cette innovation inspirée des systèmes antisismiques (tout de même !) empêche les déformations du cône et par conséquent la distorsion harmonique, tout en conservant la dynamique.
Vocal Focus
Ce mode Focus, qui allumera donc la deuxième LED devant les enceintes, est une proposition très ingénieuse et particulièrement intéressante pour les mixeurs. Le principe, c’est qu’on passe sur un seul haut-parleur, le woofer, en full-range : plus de tweeter et un filtre s’active dans les graves. On passe donc sur une écoute beaucoup moins large, qui se rapprochera (légèrement) de ce que les gens entendent dans le monde de dehors, pas celui des studios professionnels ou des audiophiles. Beaucoup de producteurs ou mixeurs veulent avoir une écoute alternative pour vérifier de temps en temps leurs équilibres sur un système plus restreint : certains utilisent les haut-parleurs de l’écran d’ordinateur, des vieilles enceintes satellites de PC, ou bien des enceintes passives une voie comme les 5C Sound Cubes. Forcément, cela demande un contrôleur de monitoring pour changer d’écoute et une autre paire d’enceintes. Le Focus permet avec un simple footswitch d’accéder à cette fonction sur la même paire stéréo. On regrettera tout de même qu’un footswitch ne soit pas fourni avec, cela aurait été le top ! En tout cas, c’est très efficace, le spectre est considérablement resserré… On a même trouvé le résultat assez radical !
On écoute les moniteurs
La première impression quand on envoie de la musique dans les Solo6 est très séduisante. D’emblée, une sensation de précision, mais aussi de confort d’écoute se dégage. On va maintenant procéder à un test comparatif dans la control room des Studios Megaphone : on écoutera alternativement sur les Focal Solo6 et sur nos enceintes de référence qui sont les Genelec 1030A, des morceaux qu’on connait bien. On va effectuer quelques mesures au passage, avec un micro de mesure placé au point d’écoute et un analyseur de fréquences.
Radiohead – 15 Step
Il y a une densité dans le haut des graves, mais aussi dans le médium, qui donne beaucoup de corps à la voix. On ne ressent pas une bosse particulière, mais globalement une présence accrue de toute cette bande de fréquence assez large, de manière homogène et plutôt agréable. En comparant à nos moniteurs habituels, il semble que les aigus sont légèrement moins ouverts, on a un peu moins d’air, les hi-hats et la rythmique électro sont un peu moins précis et saillants. En revanche, ce qui se situe en dessous est dense et puissant, les médiums sont bien présents, de façon assez linéaire il nous semble. En faisant une petite analyse du spectre sur une séquence de 30 secondes, on constate en effet que la bande entre 5 kHz et 10 kHz est moins présente chez les Solo6, au contraire de la bande entre 800 Hz et 2 kHz qui est plus forte. On est un peu surpris de constater deux creux, l’un autour de 100 Hz et l’autre à 470 Hz, mais à part ça le plateau grave est effectivement assez haut, depuis 40 Hz jusqu’à 250 Hz environ.
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Kendrick Lamar – Alright
Sur cette production, dont les basses descendent bien dans les profondeurs du spectre, les graves des Solo6 excellent vraiment ; c’est généreux, mais pas excessif. Là encore, la voix est large, elle occupe beaucoup d’espace au centre de la stéréo. L’image stéréo, elle, semble moins large justement. Les différentes paires d’enceintes ne sont pas autant écartées, on en a bien conscience et on le prend en compte, au-delà de ça le mix tend à renforcer et valoriser les éléments centraux. Notre impression de l’écoute précédente se confirme : un peu moins d’attaque dans les éléments rythmiques, moins d’espace dans la latéralité, et plus de densité, de matière harmonique et de voix ! Nos Genelec 1030A, qu’on aime beaucoup et qu’on remet rarement en question, sonnent un peu froides par rapport aux Solo6 qui génèrent une matière plus intense. On met en place le même petit test sur une séquence de la chanson, et on compare ce que l’analyseur de fréquences révèle chez les Solo6 par rapport aux 1030A. Cela éclaircit pas mal notre idée sur les graves : à partir de 40 Hz on constate un gros niveau, puis un plateau qui mène à une bosse bien marquée juste en dessous de 220 Hz. Toute cette bande de fréquences est très présente, mais autour de 100 Hz la tendance s’inverse, là où les Genelec semblent avoir leur bosse dans le grave. À nouveau, le spectre est très dense autour de 1 kHz, mais décroît plus rapidement entre 5 kHz et 10 kHz.
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Moderat – A New Error
On a voulu tester aussi avec un morceau d’électro pure, une production moderne au spectre très large. Ici encore, le bas est impressionnant, on sent qu’il y a de la matière entre 40 kHz et 80 kHz. Les aigus sont moins claquants et les attaques moins chirurgicales qu’avec nos Genelec, ce qui n’est pas désagréable. On les compare également à nos 1037C, qui sont des enceintes nettement plus grosses, trois voies avec un boomer de 12’’. Les Solo6 ne descendent évidemment pas aussi bas, mais elles sont loin d’être ridicules, pour une taille d’enceinte et de haut-parleurs incomparables a priori.
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Neil Young – Heart of Gold
Enfin, on a voulu écouter un enregistrement bien plus ancien, une chanson des 70’s chère à nos oreilles et à notre cœur. Le grave n’est pas une question aussi cruciale ici : il n’y en a pas des masses. En revanche, on constate à nouveau cette densité de la matière harmonique, l’épaisseur des voix et des transitoires moins percutantes que ce qu’on perçoit sur nos enceintes de référence, certainement pas par un manque de réactivité des membranes, mais par cette répartition fréquentielle qu’on vous décrit depuis quelques lignes maintenant. À l’écoute, c’est très agréable, mais on se dit qu’il y a peut-être un petit embouteillage dans le médium qui empêche un peu de dissocier ou spatialiser les éléments du mix. En même temps, on se rend compte que notre écoute est un peu déformée par les moniteurs habituels du studio qui peuvent être un peu cruels.
Deux nuances de bruit blanc
Pour vérifier un peu tout ça, nos impressions à l’écoute et les analyses de fréquences sur ces différents morceaux, on procède à un dernier petit test. On mesure un bruit blanc envoyé dans les Solo6 puis dans nos enceintes de référence, toujours avec le même analyseur de fréquences. Sans surprise, les graves sont déjà très présents à partir de 40 Hz et culminent avec un dôme autour de 200 Hz. Ici, le filtre à 160 Hz, bien qu’un peu en dessous, va se révéler très utile. Autour de 1 kHz, nos impressions sont encore confirmées par cette mesure : le point le plus haut du spectre se situe là, entre 1 kHz et 1.5 kHz, alors que nos Genelec sont nettement en dessous dans cette zone. Pour les aigus, le graphique nous montre une certaine homogénéité chez les Solo6, alors que nos 1030A ont clairement des pics très hauts, notamment vers 10 kHz.
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Conclusion
Ces moniteurs sont de très grande qualité, aucun doute là-dessus ! Les possibilités de filtres et le mode Focus ajoutent des atouts à une paire d’enceintes qui n’en manquait pas. Dans notre ressenti, l’écoute sur des Solo6 est très agréable, voire peut-être un peu flatteuse. Sur du long terme, la douceur de leurs aigus sera un vrai confort pour le mixeur, et la richesse de leurs graves permettra de bien contrôler les basses et les kicks, étonnamment bien pour des enceintes de ce format.