Spitfire Audio est comme toujours un éditeur de banques de sons très productif avec des sorties de plus en plus fréquentes. Dans ce test nous allons parler de l’Abbey Road Two : Iconic Strings, une banque dédiée aux cordes dans un format très intimiste.
Nous avions déjà testé l’Abbey Road One, une banque orchestrale généraliste typée plutôt « gros son ». Dans cette nouvelle édition, Spitfire Audio a investi le célèbre studio « Two » d’Abbey Road (The Beatles, Oasis, Pink Floyd…) pour nous offrir une banque de cordes intimiste composée de deux violons, d’un alto, d’un violoncelle et d’une contrebasse, le tout sous la direction technique de l’ingénieur son Sam Okell.
Cette banque de sons existe, comme souvent chez l’éditeur, en deux versions : standard et professionnelle. La version standard (300 euros) offre uniquement deux mixages, ce qui permet de n’occuper qu’une cinquantaine de giga-octets d’espace disque. La version professionnelle est quant à elle bien en chair, ainsi pour 500 euros, on se retrouve avec quatre mixages et douze micros répartis entre huit combinaisons. Une flexibilité qui ne pèse pas loin de 300 giga-octets sur le SSD.
L’Iconic Strings utilise sans surprise le moteur maison de Spitfire Audio, Kontakt étant de plus en plus boudé par l’éditeur. L’équipe britannique avait fait un joli travail d’optimisation de son moteur maison et les divers bugs avaient fini par disparaître. Bizarrement, j’ai rencontré sur cette banque des bugs assez aléatoires comme des ralentissements avec une charge CPU conséquente sans raison apparente ou encore une réverbe qui au moment de l’export, se remet sur la sélection par défaut. La version testée est certes la 1.0.0, mais c’est assez surprenant. La machine de test pourrait être en tort bien entendu, cependant, il n’y a aucun problème de cette sorte avec la « Abbey Road One » ou encore avec la « BBC Symphony Orchestra » qui reposent sur le même lecteur.
Autrement, l’interface reste très élégante, à l’image de la marque. On retrouve le suivi en temps réel de l’expression et de la modulation (CC11 et CC1), l’accès à différents paramètres comme le niveau de réverbe, de vibrato, de compression ou encore la vitesse de relâchement des notes. Les articulations sont personnalisables et chacun pourra se débarrasser de celles qu’il estime inutiles afin de libérer un peu de mémoire vive. Comptez quand même plusieurs giga-octets d’occupation dans la mémoire vive selon les mixages/micros utilisés et les articulations chargées. La banque est d’ailleurs pratiquement inutilisable sur un disque dur mécanique, il va donc falloir faire de la place sur vos SSD.
Un quintette qui en jette
Spitfire Audio propose six patchs : un patch d’ensemble et cinq instruments solos (premier violon, second violon, alto, violoncelle, contrebasse). Les techniques de jeu sont globalement toutes là, en tout cas, elles sont suffisantes pour couvrir 99% des usages courants. On pourra apprécier le fait de disposer de plusieurs patchs de legato. Ainsi, le patch « Performance Legato » s’adapte à votre jeu et permet de jouer de longues phrases lyriques ou encore des passages rapides, sans programmation supplémentaire. Celui-ci gère l’effet de portamento automatiquement en fonction de la vélocité des notes. On dispose de deux patchs supplémentaires, totalement indépendants : « Slurred » et « Portamento » (le second n’est toutefois disponible que dans la version professionnelle). Un bon point si on ne veut utiliser qu’une des deux techniques sans avoir à se soucier de gérer les niveaux de vélocité.
On retrouve bien entendu différentes variantes de l’articulation « Long » avec du « Sul Pont », « Sul Tasto » ou encore les superbes « Flautando ». Les harmoniques et les diverses articulations courtes indispensables sont au rendez-vous avec en plus des habituels « Spiccato », « Staccato » et « Marcato » la présence des « Spiccatissimo ». On pourra aussi apprécier les trois modes de trémolo, dont deux synchronisés sur un tempo de 150 et de 180 à la noire.
L’éditeur britannique met à notre disposition une articulation appelée « Live Patch » qui interprète en temps réel votre jeu et permet de basculer automatiquement d’une articulation longue à courte. Sachant que nous sommes en présence d’une banque de sons constituée uniquement de solistes, c’est en effet une option pertinente qui permettra de faire des prises en direct de phrases mélodiques. Toutefois, une fois la phrase enregistrée, il faudra repasser dessus si jamais on souhaite appliquer un effet de portamento par exemple. Il s’agit surtout d’un mode permettant de rapidement noter une idée avant de perdre l’inspiration et de se concentrer sur la programmation dans un second temps.
Toujours dans les propositions techniques innovantes qui doivent nous simplifier la vie au quotidien, on retrouve un mode « Arranger » disponible sur le patch « Ensemble ». Son fonctionnement est intéressant : vous plaquez un accord et l’algorithme réparti automatiquement chaque pupitre dans l’harmonie. Il est possible de personnaliser le tout en ajustant les tessitures des instruments et de choisir entre un mode monophonique ou polyphonique. Là encore, c’est une chouette fonctionnalité permettant, par exemple, d’enregistrer des idées avec le plus de réalisme possible avant de procéder à une programmation plus détaillée.
- 1 – Violon 1 – Live Patch00:29
- 2 – Ensemble – Arranger – Flautando00:21
- 3 – Legato violon 1 puis violon 200:37
Réverbes et micros en veux-tu en voilà
Spitfire Audio a utilisé une bonne dizaine de micros pour capturer cet ensemble. La version professionnelle offre 4 mixages, 2 modernes et 2 vintages. À cela s’ajoutent plusieurs propositions de combinaisons de micros placés à différents endroits qu’il est possible de doser selon ses goûts. J’ai trouvé l’offre des mixages intéressante en ce sens qu’elle permet de passer d’un esprit très classique à une ambiance davantage pop-rock à la sauce anglaise « vintage ». Cette banque de cordes n’est donc pas destinée uniquement aux musiques orchestrales ou cinématographiques, bien au contraire, vous pourrez en faire un fabuleux usage sur des compos de groupe pop-rock voir même sur des projets R’n’B.
Je vous parlais au début de ce test de la possibilité de gérer le niveau de réverbe. Cela était déjà possible sur les banques plus anciennes de Spitfire Audio. Toutefois, dans cette édition l’éditeur met à notre disposition 13 réverbes tirées du studio 2 d’Abbey Road dont une de type « large hall » destinée à être utilisée conjointement avec la banque orchestrale « Abbey Road One ». Notez bien qu’en désactivant la réverbe, cette banque de cordes se révèle être très sèche et brute, ce qui n’est pas flatteur bien entendu, surtout sur un ensemble de cette taille, mais l’intérêt est de pouvoir appliquer le plugin de votre choix en toute transparence. On notera également la présence d’un compresseur interne, activable au besoin. Il est assez musical même avec un réglage poussé.
- 4 – Mix 1 – Rev plate 2s00:34
- 5 – Mix 2 – Rev plate 2s00:34
- 7 – Vint 1 – Rev plate 2s00:34
- 8 – Vint 2 – Rev plate 2s00:34
- 9 – Mix 2 – Rev plate 1s 60 %01:16
À ma grande surprise mais aussi déception, la possibilité de gérer le vibrato n’est pas systématique sur les articulations longues qui s’y prêtent. Ainsi sur les modes « Live Patch » ou « Legato », le potard de vibrato est tout simplement grisé ! C’est incompréhensible, sachant qu’il est disponible sur l’articulation « Long ». C’est vraiment dommage car on perd énormément au niveau du réalisme et du lyrisme sur des instruments solos à cordes. À noter toutefois que la version testée est la 1.0.0, on peut donc espérer quelques corrections de ce côté-là dans les prochaines mises à jour. Tout du moins, il faut l’espérer.
Conclusion
Avec cette Abbey Road Two : Iconic Strings, Spitfire Audio propose une banque de cordes avec un caractère et un grain british très marqués. L’éditeur est fidèle à sa réputation et offre une belle qualité sonore grâce aux moyens techniques déployés. Il est évident, aussi, qu’une certaine aura se dégage du lieu d’enregistrement quand on en connaît tout le passif. Cette nouvelle édition de la série Abbey Road est en somme un très bon produit, présentant certes quelques défauts techniques mais offrant une polyvalence certaine. Elle pourra s’intégrer sans problème dans un registre pop-rock ou R’n’B en plus de tous les usages plus classiques, dans tous les sens du terme, que l’on peut attendre d’une banque de cordes signée par Spitfire Audio. Enfin, le placement tarifaire est une fois de plus dans la moyenne du marché.