Le géant américain revient avec une nouvelle série fabriquée au Japon et baptisée « JV MODIFIED ». Fender promet un bond dans le passé pour ses deux modèles phares avec cependant quelques améliorations techniques permettant de donner une dimension un peu plus actuelle à ses guitares.
C’était mieux avant ?
Avec cette nouvelle série, Fender remet au goût du jour les modèles « Japanese Vintage » datant des années 1980, elles-mêmes basées sur les modèles américains des années 1950 et 1960. Il y a de quoi s’y perdre pour peu que l’on ne soit pas un puriste passionné par le catalogue de la marque américaine.
Quoiqu’il en soit, on est en présence d’une Stratocaster bien finie avec un vernis brillant en polyuréthane correctement appliqué et à la teinte « Olympic White » si caractéristique. Le corps est en tilleul et est monté d’une plaque blanche à trois plis avec ses trois micros simple bobinage « Vintage Style » dont nous découvrirons les performances sonores au chapitre suivant. On retrouve les traditionnels trois potentiomètres de volume et de tonalité, en deux exemplaires pour ce dernier. Le deuxième potentiomètre de tonalité est de type push-pull et permet de mettre en service le micro manche lorsque le sélecteur de micros se trouve sur les premières positions. L’accastillage de cette Stratocaster est chromé et elle est équipée d’un vibrato synchronisé à six points d’ancrage avec des pontets en acier. On aurait aimé un système à deux points d’ancrage réputé plus stable. Le système de fixation de la tige est traditionnel et une petite mise à jour de ce côté aurait été une excellente nouvelle. Néanmoins, les puristes apprécieront.
Le manche au diapason de 25.5" (648 mm) et la touche au radius de 9.5" (241 mm) sont en érable. Cette dernière est également vernie et l’arrière du manche propose quant à lui un touché satiné très agréable qui n’accroche pas lors de la glisse. Le profil du manche est de type « Soft V » qui est en réalité une version légèrement plus arrondie que le profil en « V » des années 1950. Fender propose sur cette Stratocaster 21 frettes de type « medium jumbo » dont la pose est excellente. Le sillet est en os et les mécaniques, au design vintage elles aussi, sont dites « bloquantes » afin d’offrir, en théorie, une meilleure tenue d’accord. Celles-ci reposent sur une tête recouverte de vernis offrant un rendu brillant et assorti au design général de la guitare. Les dimensions de la tête sont caractéristiques de la production de la fin des années 1960.
La guitare, proposée au tarif d’environ 1400 euros, est arrivée parfaitement bien réglée et avec une action extraordinairement basse et sans frise. Cette Stratocaster japonaise est livrée dans une housse rembourrée et peu encombrante. Pour le prix, certains auraient probablement apprécié un étui en dur, à juste titre.
Ça claque !
Fender ne fournit aucune information technique au sujet des micros qui équipent cette guitare au-delà du caractère « vintage » qu’ils promettent d’offrir, comme des dizaines de leurs micros. Voyons donc plutôt ensemble comment ils s’en sortent sur le canal clair d’un, très bon, amplificateur à lampes :
- 1 – Canal clair – position 500:33
- 2 – Canal clair – position 400:18
- 3 – Canal clair – position 300:21
- 4 – Canal clair – position 2 et positions 2 + 500:44
- 5 – Canal clair – position 1 et positions 1 + 500:38
Tout d’abord, le manche de cette guitare s’est révélé être très confortable que ce soit pour le jeu en accords ou en solo. Il n’est pas particulièrement épais, mais son profil permet de jouer sur des accords barrés sur une longue période sans ressentir de tensions dans la main. Ensuite, sa touche en érable offre une attaque bien claquante, peu importe la position choisie sur le sélecteur. Le micro manche apporte malgré tout suffisamment d’épaisseur et de chaleur au son pour le rendre efficace, par exemple, sur un accompagnement en accords. D’ailleurs le push-pull offert par le second potentiomètre de tonalité, qui vient rajouter le micro manche, offre une palette sonore supplémentaire que j’ai trouvée musicale. Cette option est d’autant plus pertinente que les deux premières positions sont en règle générale très difficiles à manier sur le canal clair d’un ampli, tellement le son peut être agressif. J’apporte néanmoins une réserve vis-à-vis de la manipulation du push-pull, la forme des potentiomètres n’étant pas la plus adaptée.
En passant sur le canal crunch, la première chose qui frappe c’est le silence des micros. J’ai quelques guitares équipées de micros humbucker qui se montrent à peine plus silencieuses dans la même situation. Très bon point, notamment pour un usage studio. Dans les quelques exemples que vous entendez, j’ai utilisé différents niveaux de gain et cette Stratocaster reste toujours très précise en plus de répondre de manière très dynamique à l’attaque du médiator, même sur le canal saturé poussé à plus de la moitié. Le sustain, malgré une action très basse, est très bon. Les notes tiennent, les bends ne s’effondrent pas, et ce, jusqu’à la dernière case. On peut saluer l’excellent travail effectué sur la lutherie par l’atelier japonais.
- 6 – Canal crunch – position 200:32
- 7 – Canal crunch – position 300:28
- 8 – Canal crunch – position 100:58
- 9 – Canal crunch – position 500:21
- 10 – Canal crunch – position 100:38
- 11 – Canal saturé – position 100:57
Une machine à divebomber ?
Fender propose sur cette guitare un vibrato synchronisé à six points d’ancrage et des mécaniques bloquantes censées apporter de la stabilité à la tenue de l’accordage. J’ai donc effectué un test très simple en jouant un accord de Mi, quelques notes accompagnées de légers coups de vibrato et enfin à nouveau un accord de Mi. Le résultat est, comme vous pouvez l’entendre, décevant. La corde de Sol ayant perdu sa justesse après quelques manipulations seulement. Bien entendu, la guitare est parfaitement bien réglée, les cordes sont neuves mais ont bénéficié de quelques heures de jeu et ont eu largement le temps de se stabiliser. En revanche, sans l’utilisation du vibrato, la guitare s’est montrée suffisamment stable malgré des températures estivales un peu élevées. Il y a probablement moyen d’améliorer les choses en cherchant du côté du sillet, mais en l’état, le résultat est peu concluant.
Conclusion
La célèbre marque américaine propose une énième Stratocaster, certes inspirée d’une ancienne série de guitares, elle-même inspirée d’une encore plus ancienne série de guitares, mais qui ne manque pas d’intérêt sur certains points. La fabrication japonaise est excellente, l’électronique est silencieuse et la guitare se révèle particulièrement polyvalente en encaissant sans broncher différents niveaux de saturation grâce à des micros précis, dynamiques et équilibrés. On pourra bien entendu reprocher le choix d’un système de vibrato un peu dépassé malgré des mécaniques modernes.