Établie en 1976 à Neptune dans le New-Jersey, la marque Kramer a toujours été synonyme de hard-rock et métal. Les guitaristes américains des années 80 en ont fait leurs instruments de choix et ces guitares se sont rapidement retrouvées entre les mains d’Eddie Van Halen, Richie Sambora ou encore Mick Mars pour n’en citer que trois.
Kramitaine flam
Le catalogue de la marque américaine est aujourd’hui divisé en trois séries : Original, Modern et Custom Graphics. La SM-1 que nous avons entre les mains appartient à la série Original, série qui regroupe des guitares rendant hommage aux instruments sortis dans les années 1980. Dès le premier regard, on ne s’y trompe pas : on est bien dans le territoire de la super- Strat, même de la méga-Strat. Tous les ingrédient qui font de la guitare une véritable machine à shred sont ici réunis, des micros à l’accastillage en passant par la construction.
SM-1 Cousue main
La SM-1 dispose d’un corps en acajou et d’un manche traversant, également en acajou. La table est légèrement bombée ce qui lui confère un petit côté ESP assez moderne. De nombreux chanfreins garantissent une bonne prise en main et un accès aux aigus très correct, on atteint la 24e case sans trop se poser de questions. La touche est en ébène et elle est sertie de 24 frettes Medium Jumbo. Le manche traversant assure un très bon sustain à cette SM-1, on s’en rend compte dès qu’on joue la guitare à vide. Les vibrations se propagent bien dans tout l’instrument et sur toute la longueur du manche. La tête de manche est légèrement inclinée et dispose d’une jolie volute sculptée qui la solidifie. Les deux clés nécessaires au changement de cordes sont dissimulées derrière cette jolie tête. Cette légère inclinaison de la tête permet aux cordes de rejoindre leur mécanique sans avoir besoin d’une barre de rétention. Le profil du manche, K-Speed Slim Taper C et le rayon de la touche de quatorze pouces permettent toutes sortes d’acrobaties guitaristiques. On l’a bien en main sans pour autant avoir trop de matière et être gêné. La touche bénéficie d’ailleurs d’un binding blanc qui fait également le tour de la tête. Les repères de touche sont incrustés en nacre et il s’agit d’un motif baptisé HS.
Kramer a été la première marque à proposer des chevalets flottants Floyd Rose sur ses instruments. C’est donc sans surprise qu’on retrouve un Floyd Rose de la série 1000. Ce dernier est accompagné de son sillet bloquant R2 et dispose d’une cavité qui permet à la fois de descendre la note mais également de la monter. Tout l’accastillage, chevalet compris, est noir. Les mécaniques maison au ratio de 14:1 sont également noires tout comme les boutons de potentiomètres et les attache-courroie ainsi que l’embase jack située sur le côté de l’instrument. L’électronique ne fait pas exception et nous renvoie directement à l’âge d’or des super-Strat.
La guitare est équipée de trois micros, comme une Stratocaster, mais il s’agit de micros à double bobinage tous réalisés par la marque californienne Seymour Duncan. La position chevalet est occupée par un JB (Jazzy-Blues) qui est un grand classique quand on parle de micro custom. Il est monté dans la guitare à l’aide d’un contour en plastique et dispose d’aimants AlNiCo 5. Les positions manche et centrale sont occupées par des Cool Rails montés directement dans le corps de la guitare. Ces micros disposent d’aimants céramique et sont des humbuckers encastrés dans un châssis de micro simple. Ils développent des sonorités chaleureuses et bien articulées, avec beaucoup de sustain.
Le placement de ces trois micros est un peu resserré et le micro central devient assez vite gênant dans la mesure où il est placé pile à l’endroit où la main droite pince les cordes. En effet, là où une Stratocaster Vintage dispose de 18,5 centimètres entre la dernière case et le chevalet, ce même espace est réduit à 16 centimètres sur la SM-1. Ajoutez à cela un micro humbucker en position chevalet et tout est forcément plus resserré. Ces trois micros sont contrôlés par un sélecteur à cinq positions de type lame, un volume général muni d’un Treble Bleed et une tonalité générale. Ce sélecteur offre les mêmes combinaisons de micros que sur une Stratocaster. Un mini-switch supplémentaire permet de désactiver une des deux bobines du micro chevalet pour obtenir des sonorités proches de celles d’un micro simple. C’est une option assez sympa bien que le sélecteur de micros et le mini-switch relié au micro chevalet soient trop rapprochés sur la guitare. On cogne souvent le mini-switch en souhaitant changer de micro. L’angle d’inclinaison du sélecteur pourrait également gagner à être optimisé afin d’être davantage en concordance avec la position de la main droite en jeu. Quand on ne regarde pas les contrôles, c’est le mini-switch qui tombe naturellement sous la main, c’est dommage. De manière générale, les potards et les sélecteurs sont trop rapprochés. Les potards bénéficient néanmoins de petites cavités afin qu’ils soient moins proéminents sur la table.
Kramer, pas brûler
Malgré son sélecteur à cinq positions et son mini-switch pour couper une bobine du humbucker, la SM-1 ne brille pas par sa polyvalence. On peut obtenir des sons clairs décents grâce aux Cool Rails qui ne font pas trop saturer l’ampli mais dès qu’on passe sur le JB, on oublie les sons clairs. Même à un volume très raisonnable sur un ampli sans master volume de 30 watts, le micro chevalet fait saturer l’entrée de l’ampli. C’est un peu moins le cas avec les Cool Rails qui disposent d’une résistance de sortie inférieure à celle du JB. Néanmoins, ils envoient quand même un gros niveau et il faut tripoter le potard de volume si on veut un son très clair. Les différentes positions de micros permettent de jongler un peu avec les différentes sonorités mais l’identité et le caractère sonores de la guitare restent comme base commune à tous ces sons. Le mini-switch qui coupe une bobine du JB offre un son quasi similaire à celui d’une Stratocaster sur son micro chevalet. Néanmoins, pour un son clair doux et velouté, il faudra repasser. La position intermédiaire qui mélange le micro chevalet et le micro central, avec une bobine du micro chevalet coupée, génère des sonorités funky tout à fait honorables. Mais on sent quand même que les sons clairs constituent le talon d’Achille de cette SM-1. C’est dommage et en même temps est-ce bien ce qu’on lui demande ?
En attaquant les sons crunch, on entre davantage dans le territoire Kramer. Le comportement des Cool Rails est exemplaire, ils restent droits, ne bavent pas et disposent d’un sustain énorme. Le micro qui occupe la position centrale, bien que très gênant au jeu, développe une sonorité intéressante. Il est situé très près du micro chevalet et récupère un peu ce côté agressif tout en conservant une certaine douceur. Le micro manche est très velouté et chaleureux, promesse tenue de ce côté-là. Le JB placé en position chevalet est littéralement surpuissant. Même en son crunch, on sent que le micro est bridé et ne demande qu’à être face à de la grosse saturation bien 80’s. Son comportement reste tout de même très sain et il répond bien au potard de volume. Le JB a la particularité de compresser un peu le son. Tous les passages en jeu de paume ressortent alors très bien, la courbe d’égalisation du micro étant assez plate. Il s’agit d’ailleurs d’un TB-4, TremBucker, conçu spécialement pour se marier au chevalet Floyd Rose.
En attaquant la grosse saturation typée 80’s, la guitare est tout de suite très à l’aise. On se surprend d’ailleurs à baisser le niveau de gain sur l’ampli tant le micro chevalet fait encore une fois tordre l’entrée. Il faut d’ailleurs être bien vigilant, avec un niveau de gain trop élevé, le micro a tendance à rendre l’ensemble un peu baveux. Une fois les réglages ajustés sur l’ampli, on constate que la sonorité et la personnalité de la guitare s’affirment. La lutherie est saine et on retrouve les propriétés typiques de l’acajou : beaucoup de résonance et une légère bosse dans les médiums ce qui apporte du corps et de la présence. Les Cool Rails encaissent très bien les grosses saturations également. C’est vraiment le territoire dans lequel leur son est le plus articulé et précis. Rien ne dépasse ni ne bave, les aimants céramique sont précis et puissants. Leur position respective leur assure à la fois une certaine clarté dans la position centrale et un côté velouté très agréable en position manche.
- Kramer SM-1 – Clean all pu’s02:07
- Kramer SM-1 – Clean all pu’s melodies02:01
- Kramer SM-1 – Crunch all pu’s03:05
- Kramer SM-1 – Lead all pu’s02:30
Kramer is back
La marque américaine semble avoir renoué avec ses racines. Le guitariste Satchel du groupe Steel Panther en avait d’ailleurs fait sa marque de prédilection avant d’être séduit par la maison Charvel. Cette SM-1 dispose de tous les atouts nécessaires pour une super-Strat qui se respecte. Le manche traversant assure solidité, stabilité et sustain et la configuration électronique semble taillée pour le gros son années 80. Le Floyd Rose et le sillet R2 qui l’accompagne permettent à la guitare de très bien tenir l’accord, même si on s’est autorisé quelques « dive bomb » au fil de notre essai. La SM-1 ne fait pas exception et représente bien Kramer. L’identité de la marque est palpable et on comprend pourquoi elle a été le choix numéro un de tant de virtuoses de la six-cordes à l’époque. Fabriquée en Indonésie, la SM-1 affiche un prix juste sous la barre psychologique des mille euros ce qui est raisonnable compte tenu du niveau d’équipements et de finitions qu’elle propose. Les frettes sont bien polies et aucune arête ne dépasse, le vernis est appliqué avec soin et la teinte Candy Blue légèrement pailletée habille la guitare avec élégance. L’instrument inspire solidité et durabilité et semble réellement fait pour la scène. On sent que cette Kramer n’a pas peur d’être malmenée et c’est une bonne chose. Si on cherche une guitare typée métal 80’s solide, fiable, jolie et bien finie, sous la barre des 1 000 €, la SM-1 est à prendre très sérieusement en considération.