Fender revoit ses classiques et sort les New American Standard. L'occasion de se retrouver en tête à cordes avec deux des plus vieilles et meilleures amies du rock : la Stratocaster et la Telecaster.
Pour les rares qui ne le sauraient pas, la Stratocaster et la Telecaster sont un peu les mères de toutes les guitares électriques, en vis-à-vis de leur alter ego chez Gibson, la LesPaul. Créées au début des années 50 par le génial Léo Fender, elles ont initié le concept de Solid Body (corps sans caisse de résonnance, ce qui résolvait les problèmes de larsen des guitares acoustiques amplifiées) et posé les bases de la lutherie et de l’électronique des guitares électriques, à tel point que depuis plus de 50 ans, ce sont ces principes qui sont réutilisés par tous les luthiers et fabricants de guitares pour réaliser leurs instruments.
Evidemment, au-delà de ce statut dans l’histoire de la guitare, la Strat et la Tele comptent aussi parmi les guitares les plus vendues au monde, et elles ont à ce titre jalonné l’histoire du rock : la Stratocaster, c’est Jimi Hendrix, Eric Clapton, Jeff Beck, David Gilmour, Stevie Ray Vaughan, Buddy Guy, Ritchie Blackmore, Dick Dale, Mark Knopfler, Yngwie Malmsteen, Rory Gallagher, Eric Johnson… Et la Telecaster ? Ben, c’est Keith Richards, Bruce Springsteen, Jeff Buckley, Johnny Greenwood, Joe Strummer, Andy Summers, Muddy Waters ou encore Steve Cropper…
Alors forcément, lorsqu’on pose ses doigts sur l’une des donzelles, c’est tout un monde de sons qui surgit comme sorti d’une madeleine proustienne à décibels. C’était vrai avec les Strat ou les Tele du siècle dernier et, quitte à tuer le suspense, ça l’est encore avec ces New American Standards.
Du vieux avec du neuf
Pour 2008, Fender a en effet décidé d’offrir un lifting à ses modèles phares (Stratocaster et Telecaster d’une part, et Jazzbass et Precion Bass de l’autre), en leur apportant quelques sensibles modifications. Il s’agit en effet d’améliorer les instruments sans perdre ce qui fait leur identité, leur essence. On ne change pas une recette qui gagne, on la sophistique…
Et c’est essentiellement sur la résonnance et le sustain de l’instrument que les efforts du constructeur américain ont porté. On a ainsi droit à un chevalet revu et corrigé qui, à la faveur de nouveaux pontets vintage et d’un bloc 'haute densité' solidement fixé (7 vis en lieu et place des 5 habituelles sur la Tele), entend favoriser la conduction des vibrations des cordes à l’ensemble du corps.
Puisqu’on parle de ce dernier, il est à noter que Fender a affiné la sous-couche de peinture appliquée à ses guitares. Sans pour autant fragiliser la finition de l’instrument protégé par son vernis, ce détail permet au bois de « respirer » et favorise encore la résonnance de l’instrument. Enfin, le vernis du manche a lui aussi été revu, la touche étant dotée d’une finition brillante tandis que le dos du manche est satiné. Résultat : le confort, sur Strat comme sur Tele, est optimal, surtout que les profils ont depuis longtemps fait leurs preuves en terme de jouabilité : un vrai bonheur.
Comme il ne saurait y avoir de joyau sans écrin digne de ce nom, Fender a également changé l’étui dans lequel il livre ses instruments. En plastique noir moulé, ce dernier est relativement imposant, mais s’avère extrêmement léger et semble d’une solidité à toute épreuve. Petit détail appréciable : les serrures de type TSA peuvent être ouvertes sans être forcées par les douaniers. Un plus pour les globe-trotters, un moins pour les trafiquants de drogue…
Finissons en précisant que de nouveaux coloris sont disponibles (Blizzard Pearl pour les deux modèles, Sienna Sunburst pour la Strat et Crimson Red Transparent pour la Tele). Un détail, certes, mais quitte à jouer une gratte, autant que sa couleur vous plaise, non ?
Et c’est tout ?
Oui. C’est tout. D’aucuns trouveront sans doute que ces changements sont en trop petit nombre pour que ces American Standards puissent se prévaloir du qualificatif New, quand d’autres se satisferont de retrouver l’essentiel, en mieux, de ces deux instruments de légende. Car en dehors des détails cités ci-avant, la forme, la lutherie ou l’électronique sont parfaitement fidèles aux américaines standards qui ont fait leurs preuves durant les décennies précédentes. Personnellement, je n’en demande pas plus et les gens de Fender ont montré avec la Strat VG qu’ils pouvaient innover. Ici, il s’agit cependant de retrouver ses repères avec des instruments qui ont formé des générations de musiciens, et d’accéder aux sons qui nous ont fait rêver sur les plus grands disques de rock, de blues ou même de jazz…
Bref, on est en plein dans l’esprit American Standard et on ne va pas s’en plaindre. La Strat fait toujours des merveilles en son clair sur du funk, en lead crémeux claptonien ou cristallin façon Gilmour tandis que la Tele garde, en plus de son légendaire son clair, ce petit côté cradingue dès qu’elle crunche qui donne envie de retourner un stade à grands coups de Start me up. A titre d’exemple, voici d’ailleurs quelques extraits audio enregistrés sur un Spider Valve à l’aide d’un SM 57, d’une carte M-Audio Audiophile 24/96, d’une table Yamaha MG10/2 et de Cubase SX3…
Conclusion
Avec « fromage ou dessert », « papa ou maman », « Ferrari ou Lamborghini », « Stones ou Beatles » et « Lennon ou Mc Cartney », « Stratocaster ou Telecaster » fait partie de ces dilemmes qu’il appartient aux fameux goûts et couleurs de résoudre. De toute façon, les vrais amoureux de la guitare finiront par se payer les deux et ils auront bien raison, d’autant que le prix public n’a pas bougé par rapport à celui des anciens modèles : de 1249 à 1399 € TTC selon la finition, pour la Strat comme pour la Tele…
Quant à savoir si ces New American Series valent le coup, la réponse est oui à 200 %. Certes, si vous avez acheté une des anciennes séries il y a quelques mois, il n’y pas de quoi nourrir de gros regrets, car les améliorations apportées par le constructeur, toutes réelles qu’elles soient, ne sont pas déterminantes. Reste que si vous envisagiez de vous payer une Strat ou une Tele, vous pouvez vous jeter dessus sans problème : le son Fender est bien là.