Elles commencent à arriver en masse, les interfaces audionumériques Thunderbolt ! Après Universal Audio, la concurrence s’agite, et dans cette dernière cargaison, il y a une invitée surprise.
Car cette T4 de Resident Audio, personne ne l’attendait. Et pour cause, il y a encore quelques mois de cela, personne ne connaissait la marque. Cette nouvelle figure dans le monde de l’audio peut-elle avoir la prétention de se faire une place au soleil ? C’est ce que nous allons voir…
Here comes a new challenger
Une boîte en carton frappée d’un joli logo que l’on connait à peine, cela suffit pour attiser notre curiosité. À l’ouverture, la T4 fait plutôt bonne impression avec son châssis moitié aluminium, moitié plastique noir brillant. C’est joli, mais attention aux rayures et poussières, ce genre de finition étant très sensible !
Avec son bon gros kilo sur la balance, la T4 restera bien en place sur le bureau, mais ne se fera pas complètement oublier dans un sac à dos. C’est dommage, car l’interface reste assez compacte pour une « 4 entrées micros » : 27 × 11,18 × 4,57 cm. En plus, l’absence de prise secteur confirme son auto-alimentation par le port Thunderbolt, ce qui rappelons-le, est une très rare et très bonne chose pour une interface possédant 4 préamplis micros. L’inspection commence donc plutôt bien, avec un joli petit minois, de jolies LEDs autour des potards, des dimensions et une alimentation permettant un transport pas trop contraignant. On aurait quand même aimé avoir un deuxième port Thunderbolt afin de pouvoir chaîner un autre appareil.
Dans la boîte, il y a une autre bonne surprise : le câble Thunderbolt (de 50 cm) est fourni. Vu le prix d’un tel câble et la fâcheuse habitude des constructeurs (de disques durs, de hubs…) à ne pas le mettre dans la boîte de leur produit Thunderbolt, c’est une bonne nouvelle. Les drivers Mac et Windows, ainsi qu’un fichier PDF, sont livrés sur une clé USB au format carte de crédit, ce qui oblige parfois les utilisateurs à débrancher certains périphériques adjacents… Pourquoi ne pas donner une clé USB « classique » ?
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Côté connectique, c’est du très classique, avec à l’avant les entrées, et à l’arrière les sorties. Les 4 entrées de types combo XLR/Jack TRS/TS 6,35 mm Neutrik permettent à la fois d’y brancher des micros, des instruments ou n’importe quoi d’autre au niveau ligne. Des switchs permettent de passer du niveau ligne au niveau instrument (cela marche par paire d’entrées : 1/2 et 3/4) et d’activer ou non l’alimentation fantôme pour les micros statiques sur toutes les entrées simultanément. On retrouve aussi à droite de chaque entrée un potard de gain dénué de toute graduation : pas génial pour rappeler un réglage.
À l’extrême droite de la face avant sont situés deux potards : un gros pour le niveau de la sortie principale et un petit pour régler le niveau du retour des entrées dans le casque et les enceintes. Vient à nous une première interrogation : les volumes du casque et des enceintes sont-ils communs ? Oui, si les enceintes sont connectées aux sorties 1/2. Si on branche quelque chose sur la sortie 4, le volume ne contrôlera que le casque. Les sorties 1/2 seront donc envoyées plein pot, ce qui n’est pas top si vous ne possédez pas de contrôleur de monitoring. De plus, on s’aperçoit que les sorties 3 et 1 peuvent aussi faire office de sortie casque, même si le niveau est moins élevé. Il y a donc en fait trois sorties casques, situées à l’arrière et partageant le même potard de volume…
Nous sommes assez dubitatifs face à certains choix faits par le constructeur. Pour commencer, brancher un casque à l’arrière, ce n’est pas pratique. Ensuite, avoir le même potard de volume pour le casque et les enceintes, ce n’est pas pratique non plus. On peut bien sûr brancher ses enceintes sur les sorties 3/4, mais il faudra acheter un contrôleur de monitoring pour ses enceintes, et la sortie 1 fera office de 2e prise casque. N’aurait-il pas été plus simple de rajouter une prise jack à l’avant et un petit potard ? Chacun son volume et tout le monde est content. Une dernière chose est à savoir : si on branche un deuxième casque sur la sortie 3, les sorties 1/2 sont coupées.
Si vous êtes du genre solitaire, nous vous conseillons de vous munir d’un contrôleur de volume et de brancher vos enceintes sur les sorties 3/4, sinon vous devrez éteindre vos enceintes à chaque fois que vous faites une prise, et souvent, les interrupteurs sont situés à l’arrière. Vous pouvez aussi brancher/débrancher votre casque sur la sortie 3 à chaque prise de son, mais le fait que cette sortie soit située derrière l’interface ne rend pas l’intervention très aisée. Si vous enregistrez un musicien, le fait d’avoir deux sorties casque, mais un seul volume va aussi être problématique…
Heureusement, les prises DIN 5 broches pour le MIDI viennent égayer l’arrière de l’interface, et comme c’est plutôt en voie de disparition, on prend.
Une autre chose importante reste à savoir : si vous branchez un micro et que vous voulez avoir votre retour au centre du champ stéréo, il faudra penser à mettre le switch INST/LINE sur INST, l’interface passant alors les deux entrées 1/2 ou 3/4 en mono dans le monitoring. De plus, le potard de mix affecte le casque, mais aussi les sorties 1/2, attention aux larsens si vos enceintes sont allumées et le micro est dans la même pièce !
Vous l’aurez compris, cette T4 ne nous convainc pas totalement en termes d’ergonomie, et complique, de notre point de vue, inutilement les choses, tant pour les home-studistes solitaires que les groupes.
Qu’en est-il de la qualité audio ?
T4 ou t’es pas 4 ?
Une installation sur notre MacBook et un redémarrage plus tard, on se retrouve devant la fenêtre permettant de régler les volumes des sorties, de changer le taux d’échantillonnage, et… c’est tout. C’est bien maigre tout ça.
Côté latence, c’est en revanche très bon : avec la mémoire tampon au minimum (32 échantillons), on a 2,29 ms en entrée et 1,54 ms en sortie.
Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APX-515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces que nous avons précédemment testées.
Voici les résultats obtenus avec les niveaux lignes :
Avec une déviation de ±0,756 dB, la T4 souffre d’une atténuation à partir de 5 kHz. C’est dommage, car le reste du spectre est linéaire. On reste loin des ténors que nous avons testés : Metric Halo ULN8 (±0,06 dB) ou encore Apollo Twin (±0,023 dB). Du côté des interfaces plus abordables, on obtient aussi de meilleurs résultats : AVID C600 (±0,230 dB) ou Steinberg UR22 (±0,496 dB).
Concernant la distorsion, le ratio THD de la T4 tourne autour de 0,01 %, ce qui reste moins bon que les Crimson de SPL (0,005 %) et Fireface 802 (0,001 %), mais meilleur que l’UR22 (0,02 %). Le bilan des entrées et sorties ligne est donc assez mitigé, avec une réponse en fréquence en dessous de la moyenne et une distorsion plutôt dans la norme.
Du côté des entrées micro, on observe un gain maximum de 53 dB, ce qui est plutôt en dessous de la moyenne, sachant que la plupart des interfaces audio actuelles offrent au moins 60 dB. Avec le gain à environ 34 dB, le rapport signal/bruit est de 91 dB, soit environ 10 dB de moins que les Crimson, Fireface 802 et ULN8, mais un peu mieux que les UR22 et C600 (89dB). En ce qui concerne le bruit de fond, la T4 garde donc une légère avance sur les interfaces d’entrée de gamme.
La déviation des entrées micro est meilleure que celle des entrées ligne, avec ±0,186 dB, ce qui reste mieux que la C600 (±0,260 dB) et l’UR22 (±0,289 dB), mais inférieur à l’Apollo (±0,073 dB) ou encore la Crimson (±0,046 dB). Des résultats donc plus logiques au vu du prix.
Du côté de la distorsion, cela oscille toujours autour de 0,01 %, un résultat assez moyen.
Pour conclure, la T4 est une interface aux performances audio assez moyennes. Pour environ 500 €, il est clair qu’on paie le prix de l’interface Thunderbolt qui a cependant le mérite de pouvoir alimenter les 4 préamplis micro à elle toute seule et d’offrir une très faible latence.
Conclusion
Si Resident Audio a su proposer un produit original et relativement inédit dans le monde de la MAO, il reste quelques soucis d’ergonomie et les performances audio n’ont rien d’exceptionnel. Si vous recherchez à tout prix une interface auto-alimentée par le bus Thunderbolt et incluant 4 préamplis, la T4 s’impose d’elle-même, car il n’y a pas vraiment d’alternative sur le marché. Pour les autres, allez plutôt faire un tour du côté des interfaces audio USB, l’offre est plus étoffée et vous aurez plus de chance de trouver celle qui vous convient parfaitement.