Annoncée en grande pompe lors du NAMM 2017, la première interface audio Thunderbolt de Slate Digital est enfin en test sur Audiofanzine. Ça valait le coup d’attendre ?
Avant toute chose, sachez qu’il ne sera question ici que de l’interface audio en elle-même, n’ayant pas à disposition le Virtual Microphone System du constructeur. Il s’agira ici de vérifier la transparence annoncée des préamplis, des sorties casques et des sorties lignes, sans oublier bien évidemment la question de la latence et de la partie logicielle de l’engin.
Premier constat, Slate a soigné le look de son interface qui reste sobre mais classe. Sur la face avant d’1U de hauteur, on retrouve les deux premières entrées au format jack 6,35 mm pouvant s’adapter aux niveaux ligne et instrument via des mini-switchs. Une rangée de 8 potards occupe une grande partie de la façade et sera dédiée aux réglages des niveaux de gain des entrées ligne et micro (et instrument sur les deux premières, du coup). Pour chaque nous retrouvons un pad d’atténuation de –20 dB pour les entrées micro et une petite LED qui clignotera en rouge lorsque le signal sature en entrée. À noter que les potards de gain ne sont pas contrôlés numériquement, ce qui sera peut-être un problème pour sauver et rappeler des réglages précis. C’est d’autant plus dommage que la majorité des concurrentes le font.
Deux autres petits switchs permettront d’activer l’alimentation fantôme de 48 V par groupe de 4 entrées (1–4 et 5–8), et deux potards ajusteront le volume des deux sorties casques situées juste à côté. Si les deux casques sont indépendants en termes de niveau sonore, ils ne le seront pas en termes de source. Entendez par là que l’on ne pourra pas envoyer un mix différent dans chacun des casques. C’est l’une des limites de la partie routing et logicielle que nous verrons un peu plus tard. On termine avec le gros potard de volume (contrôlé numériquement) pour les sorties 1–2 qui serviront à brancher vos enceintes, tandis qu’un switch permettra de mettre l’interface sous tension.
Après avoir retourné le rack, on se retrouve face à la prise pour l’alimentation externe, les deux ports Thunderbolt, le connecteur PCIe au format HDMI qui servira pour les PC sous Windows, ces derniers étant interdits de Thunderbolt avec cette interface, et le MixLink qui servira à interconnecter les mixers internes de plusieurs interfaces. Une E/S MIDI en DIN 5 broches et une E/S Word Clock en BNC sont aussi disponibles. Enfin, on termine avec les 8 sorties en jack TRS (dont la paire pour vos enceintes) et les 8 entrées micro et ligne en combo Jack TRS/XLR. On notera donc l’absence d’E/S numérique, chose que l’on retrouve sur quasiment toutes les concurrentes. Dommage.
On se console comme on peut
Vient donc la partie logicielle, que nous avons testée sur Mac, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle est spartiate. Nous nous retrouvons face à une console virtuelle assez classique, avec à gauche les réglages de l’horloge et du Word Clock ainsi que les 8 entrées et le retour DAW 1–2, et à droite les 8 sorties. Au-dessus de chaque est indiquée la source, Mix Out ou une paire de retour DAW. Pour chaque E/S, nous avons un fader linéaire et un bouton Mute. La particularité de cette console se situe en haut de l’interface avec le choix des modes Production, celui par défaut, et Studio. Le premier envoie le « Mix Out » (le mélange des entrées et du retour DAW 1–2) aux sorties casques et 3–4. En mode Studio les sorties casques et 3–4 sont alimentées par le retour DAW 3–4, ce qui permet d’envoyer un mix différent que vous aurez préparé avec votre STAN. Et voilà. C’est tout.
Nous sommes bien loin de ce que propose la concurrence en termes de routing et de flexibilité, notamment chez RME, UA, Antelope ou Metric Halo, et le système de modes ne nous semble pas des plus intuitifs. Comme dit plus haut, on ne pourra pas envoyer un mix différent dans chaque casque, envoyer n’importe quelle entrée dans n’importe quelle sortie ou encore gérer plusieurs mixages en interne. C’est franchement une déception et il n’y a plus qu’à espérer une mise à jour prochaine de la partie logicielle concernant le routing. Pour les traitements internes, les utilisateurs peuvent aussi faire une croix dessus si cela n’a pas été prévu dès le départ par le constructeur.
Benchmark
Nous avons réglé la mémoire tampon au minimum (32 échantillons) afin d’obtenir la meilleure latence : 0,6 ms en entrée et 0,6 ms en sortie (en 96 kHz). Le résultat est excellent et le Thunderbolt tient toutes ses promesses.
Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APx515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces précédemment testées.
Voici les résultats avec les niveaux lignes, à 96 kHz :
Avec une déviation de ±0,084 dB, le résultat est équivalent à l’Apollo x8p testée la semaine dernière et confirme que la VRS8 possède de très bons convertisseurs. Nous sommes face à une interface haut de gamme sans aucun doute.
La distorsion reste aux alentours de 0,005 % sur une grande partie du spectre, ce qui reste un peu moins bon que ce que l’on retrouve généralement sur des interfaces de ce prix, qui tournent plutôt autour des 0,001/0,002 %. Rien de scandaleux mais la différence reste notable.
Voici les résultats au niveau micro, avec le gain réglé à 34 dB (sur 57 dB disponibles).
Les résultats restent exactement les mêmes au niveau micro, ce qui prouve que ces derniers sont très transparents, c’est une très bonne chose. Côté bruit de fond, avec ce réglage de gain, on obtient un rapport signal/bruit de 98 dB. Cela reste moins bien que ce que l’on obtient généralement sur les interfaces haut de gamme (entre 105 et 110 dB), l’Apollo x8p testée dernièrement a par exemple obtenu un rapport de 108 dB. Rien de scandaleux non plus, mais cela reste quand même un cran en dessous.
Si les sorties casques demeurent très puissantes (17 mVrms contre 10 pour l’Apollo x8p) et sont raccords en termes de déviation et distorsion aux sorties ligne (les résultats sont quasiment identiques), nous avons été surpris par leur bruit de fond assez important. Ceci a été confirmé par les mesures avec un rapport signal/bruit de 88 dB. C’est dommage, on aurait peut-être préféré des sorties casques un peu moins puissantes et plus silencieuses.
Les entrées instrument tiennent quant à elles leur rang, avec une déviation de ±0,075 dB et une distorsion identique aux autres entrées. Rien à signaler !
Pour résumer les résultats, on peut regretter un rapport signal/bruit un peu faiblard et une distorsion un peu trop importante pour une interface haut de gamme. Il est aussi à noter que les sorties casques ont un niveau de cheval, attention aux oreilles.
Conclusion
Pour sa première incursion dans le monde des interfaces audionumériques, le bilan de Slate Digital est plutôt mitigé. Si la VRS-8 intègre des préamplis neutres et des convertisseurs honnêtes, la liste des points faibles est bien trop longue pour venir chatouiller les marques déjà bien en place sur ce marché. Il n’y a plus qu’à espérer une amélioration côté logiciel pour sauver les meubles, même si cela ne comblera pas les manques matériels pourtant bien présents.
Tarif généralement constaté : 1 999 €