Alors que les constructeurs audio prennent conscience, plusieurs années après les vidéastes, des bénéfices que l'on peut tirer du port Firewire, Edirol mise pour sa part sur la technologie concurente USB 2.0. Un choix audacieux pour une interface novatrice sur laquelle AudioFanzine vous dit tout.
Aujourd’hui encore, les cartes audionumériques en USB 1.1 sont légion. Leur principal défaut est le nombre limite de pistes qu’elles peuvent lire ou écrire simultanément, à cause du débit trop faible de la norme USB 1.1, avec un maximum théorique de 12 Mbps (Megabits par seconde).
Pour pallier ce problème, Edirol propose l’UA-1000, historiquement la première carte audionumérique à utiliser le protocole USB 2.0, appelé aussi « Hi-Speed USB ». Là où d’autres constructeurs misent sur le FireWire, Edirol fait donc un choix différent. Pari qui limite certes pour l’instant l’utilisation de l’UA-1000 aux machines relativement récentes, mais qui permet des débits théoriques atteignant 480 Mbps, et par conséquent un nombre de canaux simultanés bien supérieur aux cartes audio en USB 1.1. Mais l’UA-1000 ne se limite pas à cette petite révolution. Elle a la prétention de remplacer un ministudio numérique en proposant un tout en un : une carte audio dix entrées et dix sorties, une interface Midi et quatre préamplis, le tout en un rack tournant en 24 bit / 96 KHz.
L’USB 2 : Les cartes mères d’un PC disposent de plusieurs ports USB. Les flux de ces ports sont gérés par ce que l’on appelle un contrôleur. Chaque contrôleur gère deux ports USB à la fois. Il définit s’il doit transférer les données en USB 1 ou en USB 2 en fonction des périphériques branchés sur ses ports. Il faudra donc veiller à ne pas brancher l’UA-1000 et un périphérique USB 1 sur les ports gérés par un même contrôleur. Sinon, le contrôleur se met au rythme du périphérique le plus lent (en USB 1) ce qui empêche l’UA-1000 de tourner correctement. A l’heure actuelle, Edirol fournit un « Service Pack » (mise à jour conséquente) de Windows XP avant Microsoft lui-même ! Il faudra impérativement patcher Windows XP avec cette mise à jour avant d’installer l’UA-1000 afin de limiter le temps machine consommé par les flux audio au travers de l’USB 2. |
Une construction bien pensée
La construction laisse une très bonne impression, notamment la connectique de marque Neutrik, dont la réputation n’est plus à faire. Les potentiomètres semblent également robustes. Edirol a pensé à une foule de petits détails qui font de l’UA-1000 une carte de construction intelligente. Par exemple, un clapet sur les entrées/sorties optiques empêche la poussière de se loger dans leur ouverture, tout en évitant les traditionnels embouts détachables que l’on perd facilement. Quatre entrées au niveau micro en combo (XLR + jack 6"35) sont accessibles en face avant, permettant aux musiciens de brancher facilement des microphones lors d’un enregistrement « live », le troisième connecteur possédant également une entrée haute impédance. Pourquoi l’entrée 3 seulement ? Cela reste un mystère.
Pour certains musiciens « de la vieille école », le passage d’une configuration purement hardware à software peut se faire dans la douleur. Ils apprécieront donc que de nombreux paramètres de la carte puissent être modifiés directement sur le rack 19 pouces plutôt que sur le panneau de contrôle, limitant l’utilisation contraignante de la souris et de l’écran. Dans le même esprit, Edirol a eu la bonne idée d’intégrer dix LEDs sur son rack qui indiquent la présence d’un signal sur chaque sortie audio. On aurait également apprécié que toutes les entrées possèdent de la même façon une diode d’indication de signal.
Quatre Inserts permettent d’intégrer des processeurs d’effets externes sur les quatre premières entrées de l’UA-1000. Les sorties analogiques de la carte peuvent être utilisées pour rejouer un son en 5.1. Pour cela, il suffit de choisir « hauts parleurs à effet surround 5.1 » dans le panneau de contrôle de Windows XP, et le tour est joué !
Un petit bémol à signaler au niveau de la conception (peut être était-ce un mal nécessaire ?). Le nombre de connecteurs, boutons et potentiomètres disponibles en un seul rack 1U rend la façade un peu déroutante au premier abord (chose à laquelle on s’habitue) mais ajoute aussi des contraintes au niveau des possibilités de connexions. Par exemple, l’alimentation 48V contrôle simultanément les entrées 1 et 2 et non l’une ou l’autre exclusivement (de même pour l’atténuateur 20 dB). Dans le même esprit, seule l’entrée 3 dispose d’un switch haute impédance pour une guitare ou une basse. Ceci imposera donc au musicien de bien penser la manière dont il connecte l’ensemble de ses instruments, pour éviter d’avoir à repatcher sa configuration au moment où il remarquera qu’il a besoin des entrées préamplifiées 1 et 2 pour des microphones (il les aura comme par hasard déjà utilisées pour brancher un synthétiseur en niveau ligne).
Pour finir, le manuel papier (en anglais seulement, le PDF en version française étant prévu sous peu) va a l’essentiel et donne toutes les instructions nécessaires à une installation propre. Plusieurs configurations types y sont également présentées (explications et schéma de montage), donnant au novice la possibilité de se lancer rapidement dans l’exploitation de la carte sans se poser trop de questions techniques.
Une carte audio musclée
…pour une configuration musclée. Nous avons effectué le test sur un PC Athlon XP 2000+ sous Windows XP avec 512 Mo de mémoire vive. La carte mère de l’ordinateur, une Asus A7N8X, incorpore 6 ports USB 2.0. Pour compliquer le tout, une RME Audio Digi 9652 trône déjà sur un port PCI, ainsi que deux interfaces Midi 8 IN / 8 OUT, l’une en parallèle (Motu Midi Xpress XT) et l’autre en USB (M-Audio MidiSport). Bref, une configuration atypique qui serait susceptible de générer des conflits… Et pourtant, les drivers fournis avec l’UA-1000 ne bronchent pas et fonctionnent parfaitement, malgré la configuration hétérogène MIDI + audio de notre PC de test ! La carte RME Audio n’est bien sûr pas utilisable en ASIO en même temps que l’UA-1000 : Cubase ne peut gérer qu’un seul pilote Asio à la fois. La Midisport a été branchée sur un port USB « éloigné » de celui utilisé pour l’UA-1000 (voir notre encadré « l’USB 2 »).
Sous Cubase SX, Les drivers Asio 2.0 de l’UA-1000 ont permis le jeu de notre morceau de test (seize pistes monophoniques) sur les huit sorties analogiques simultanément. Aucun craquement ou ralentissement s’est fait entendre, même avec la latence au minimum et en 96 KHz (dans SX, le projet s’ouvrant par défaut en 32 bits, il faudra prendre le soin de choisir « 24 bit »). Le CPU est utilisé à environ 25% lors de la lecture, mais aussi à l’arrêt, les ressources étant en partie consommées par l’utilisation de l’USB. La latence qui en résulte est suffisamment faible pour être inaudible (aux alentours de 3 ms pour être plus précis). Les drivers WDM permettent à Sonar 2.2 d’obtenir les mêmes performances sur un morceau d’une dizaine de pistes. Dans Sound Forge 6, la lecture d’un échantillon sonore prend également environ 25 % de CPU. Le temps machine pris par l’interface est donc à déplorer, puisqu’il nécessite une machine relativement puissante. Mis à part cela, les drivers fournis sont parfaitement stables et sans surprise. Seule originalité à ce niveau : l’UA-1000 doit être éteinte puis rallumée lorsque l’on change la fréquence d’échantillonnage, pour que le nouveau paramètre prenne effet.
Une machine récente : |
Un mini studio intégré
Les préamplis utilisés sur l’UA-1000 sont les mêmes que ceux des stations numériques VS2480 de Roland, gradués de –60 à –16 dB (si le PAD est enclenché) ou de +4 à –40 dB. La qualité de ces préamplis nous a agréablement surpris, compte tenu du « petit » prix de l’UA-1000 (comparativement à tout ce qu’elle intègre) : très bon rapport signal / bruit et réserve de dynamique très correcte.
Dans un souci d’exhaustivité, Edirol a intégré une entrée et une sortie Midi sur son rack. C’est malheureusement un peu léger dès que l’on possède plusieurs synthétiseurs ou expandeurs. Dans le cas d’un home studio contenant du hardware Midi en quantité, on devra donc s’équiper d’une seconde interface Midi. En mettant davantage d’entrées / sorties Midi, le home-studiste aurait pu se contenter de l’UA-1000 comme centre nerveux entre son hardware (audio et Midi) et son ordinateur.
Ceux qui font de la scène apprécieront que toutes les configurations de routing sont sauvegardées au sein du rack plutôt que sur le PC. Il est donc possible d’utiliser l’UA-1000 avec le PC éteint. Dans ce cas, la carte fait office de patch analogique ou de convertisseur analogique / numérique et numérique / analogique 8 canaux via l’entrée / sortie ADAT optique. Edirol ravira les utilisateurs de console numérique disposant d’entrées ADAT. Cerise sur le gâteau, une entrée / sortie WordClock permettra de synchroniser tout appareil numérique avec l’UA-1000 de manière plus fiable qu’une simple synchronisation sur le signal ADAT.
La surprenante laideur du panneau de contrôle contraste grandement avec la beauté du rack. Spartiate mais néanmoins fonctionnel, il possède des presets de routing permettant d’aller rapidement d’une configuration type à une autre. Dommage que l’on ne puisse pas visualiser le niveau des entrées sur le panneau de contrôle. Dans une mise à jour prochaine, espérons-le.
Au niveau des extensions, L’UA-1000 n’est pas en reste puisqu’il est possible de cumuler deux mêmes interfaces pour un maximum de vingt entrées et autant de sorties simultanées. Une vraie « table de mixage informatisée » !
Conclusion
Avec l’UA-1000, Edirol a visé le haut de gamme du home studio. C’est visiblement chose réussie, car l’UA-1000 frôle le sans faute. Robuste, rapide et stable, elle pourra être transportée en live ou en studio nomade. Il faudra simplement posséder un PC à la hauteur, puissant et sous Windows XP. L’achat d’un séquenceur audionumérique sera également nécessaire pour pouvoir profiter de l’enregistrement en multipiste, aucun logiciel n’étant fourni avec la carte (un bundle avec Sonar 3 est prévu pour bientôt).
Cet article est paru dans le magazine Recording Musicien.