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Sujet Dis moi ce que tu lis.

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1 Dis moi ce que tu lis.
... et je te dirais qui tu es...

En ce moment je lis "L'ombilic des Limbes" d'Antonin Artaud, décidement (dément?) ce mec était génial!!!

Et vous c'est quoi vos lectures en ce moment???
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4831
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Voici un large extrait de la première page:

Citation :
Dans ce temps-là, la nuit pénétrait dans les maisons et ne restait pas à la porte, car on ne la rejetait pas durement dehors comme maintenant. On n'avait à lui opposer que la clarté dansante des flammes du foyer [...].
L'obscurité arrivait, lente, digne et fière.
On la voyait monter au flanc du mont Roger, elle hésitait, puis gagnait la combe, lentement, avec ses voiles sombres flottants.
Elle s'étendait doucement sur les prés du bas de la montagne et repliait son écharpe sur le village pour se glisser dans les chambres et dans la grande salle.
Enfant, je la regardais venir avec un frisson d'inquiétude et de plaisir.
Lorsqu'elle régnait partout, sur les bois, les friches, les forêts, aussi bien que dans la maison, je me blottissais près du haut poêle de faïence et je regardais ma grand-mère aller et venir avec, sur le visage et sur les mains, seuls visibles, les couleurs de La Tour et de Rembrandt.


L'auteur raconte son enfance dans la campagne bourguignonne fin des années 20 et courant des années 30.
Roman de terroir donc.
Il y est beaucoup question de chasse, de saisons, d'odeurs, de couleurs, de sons, de traditions, de bonne bouffe, de métiers anciens, de connaissances séculaires permettant entre autre de se soigner avec des mixtures de plantes, de savoir-faire et de savoir-être...un art de vivre en rapport très étroit avec la nature, un art de vivre dans lequel chacun a sa place et participe ainsi à un équilibre subtile mais solide de la société rurale.

Il y a aussi les personnages de la famille, du village ou du canton.
La grand-mère guérisseuse, le grand-père maréchal ferrant, le prêtre défroqué vivant caché dans une maison en ruine isolée au coeur de la forêt, l'illuminé du coin surnomméLa Gazette, le Comte "fin de race"...

On trouve aussi une critique assez acerbe, voire extrême, de la modernité avec ses excès.
L'auteur raconte par exemple qu'à l'époque 90L d'eau par jour suffisait pour la cuisine, la lessive, le ménage
d'un foyer de 6 personnes comme celui dans lequel il vivait.
A l'époque de la rédaction du livre (années 70) nous en étions selon l'auteur à 120L par jour...et par personne.

Il explique aussi comment tout se recyclait et que les nouveaux WC en céramique avec système d'évacuation
semblait une hérésie. Pensez-vous !!! On fait ses besoins dans de la céramique et la merde est perdue en plus.
"Ça fait cher le kilos de merde." dixit l'auteur.

L'arrivée des machines agricoles aussi a détruit un pan de vie rural.

Globalement j'ai beaucoup aimé ce livre malgré une diabolisation
de la modernité un peu trop péremptoire quelques fois.

Le style n'est pas flamboyant mais le ton de conteur coloré de traits poétiques est parfaitement adapté au propos.
Une belle échappée dans la campagne bourguignonne d'un temps révolu.

[ Dernière édition du message le 04/10/2015 à 20:29:53 ]

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Plaisir de lire ce post sur Vincenot. Mon grand père bourguignon adorait, il se retrouvait dans cet écrivain. Merci Kumo. :bravo:

Pour moi, de l'exceptionnel:
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"Histoire véridique de le conquête de la Nouvelle Espagne" de Bernal Diaz del Castillo.
Plaçons le livre en son temps.

1511, au large de la Jamaïque, un bateau espagnol coule et quelques rescapés s'échouent au Yucatan, dans l'actuel Mexique. 2 survivent, Geronimo de Aguilar restera esclave et sera retrouvé par les espagnols de Cortes et Gonzalo Guerrero deviendra Maya, prendra femme et aura des enfants. Nous y reviendrons...
1517, Cordoba découvre le Yucatan, son expédition échoue, mise en échec par les Mayas qui accueillent l'expédition aux cris de "castilan", Guerrero est probablement à leur tête... Retour de Cordoba à Cuba où il meurt.
1518, Grijalva poursuit les explorations, rentre à Cuba.
1519, Cortes, maire de Santiago de Cuba, monte une expédition à ses frais pour aller explorer et coloniser le Mexique. Au nez et à la barbe de Diego Velazquez, gouverneur de Cuba.

Cortes débarque au Mexique, coule ses bateaux et fonde la première ville espagnole au Mexique, Veracruz.
En 2 ans il renverse un empire et conquiert tout le Mexique, central et sud, et l'actuel Guatemala et Honduras.
Comme un joueur d'échec Cortes a toujours un coup d'avance sur les Aztèques, il bénéficie des traductions de...Geronimo de Aguilar, qui traduit du maya en espagnol et de la fameuse Malinche, Dona Marina la princesse aztèque aux mains des Mayas qui elle traduit de l'Aztèque en maya. Par la même elle deviendra la compagne de Cortes et lui donnera un fils, Martin.

Et on retrouve dans les archives du Guatemala et d'Espagne au 19ème siècle un document exceptionnel retraçant toute la conquête de Cortes. Ecrit par un inconnu ou presque, Bernal Diaz del Castillo. Seulement connu pour avoir été propriétaire terrien et conseiller municipal de Santiago de Guatemala, l'ancienne capitale. Le document date des années 1560. Les historiens sont ébahis, rien de ce qui est écrit ne vient contredire l'histoire connue à travers d'autres documents, d'autres témoignages de conquistadors.
Sauf que là ça fait 700 pages.
Et que le niveau littéraire stupéfait aussi les spécialistes de la littérature espagnole.

On se retrouve à suivre Bernal tout au long des 3 premières expéditions espagnoles au Mexique, jusqu'à la colonisation de feu l'empire aztèque.
Alternance de langage de soldat avec des citations latines, de descriptions de batailles avec le commun de la vie d'un soldat.
C'est à mi chemin entre le langage fleuri du soldat et le travail de l'historien cultivé.
Batailles, négociations entre espagnols et aztèques, découverte d'un empire, d'une civilisation. L'auteur ne peut cacher son admiration pour ce qu'il découvre.

Aujourd'hui aucun historien ne peut sérieusement parler de Cortes, du Mexique, sans citer abondamment Bernal Diaz. Il a fait un travail exceptionnel d'historien, d'ethnologue... et d'écrivain.
C'est vivant, d'une langue à la fois populaire et savante, on suit cette période de l'histoire comme un roman, rebondissements, coups fourrés entre espagnols, descriptions de l'empire aztèque.
J'en parle très mal mais c'est vraiment exceptionnel et pas besoin d'être un accro à l'histoire latino-américaine pour le dévorer.
Du coup je me suis vaguement intéressé à ce bouquin, les spécialistes en histoire le comparent à La guerre des Gaules de César, comme exemple unique de la description d'une conquête et les spécialistes en littérature espagnole le placent au panthéon de la littérature hispanique.
Je ne parle même pas des spécialistes en histoire de la conquête pour qui ce bouquin est LE chef d'oeuvre.

Allez, 2 bémols...
Je ne dis pas merci aux éditeurs français de Bernal Diaz.

Les éditions de La découverte ont publié Bernal Diaz en version expurgée mais ont eu la bonne idée de ne pas sacrifier les premiers chapitres sur les expéditions de Cordoba et Grijalva, ce sont elles qui décident Cortes à partir.

Acte Sud commence le bouquin par l'arrivée de Cortes au Mexique... genre il arrive là par hasard, il était en promenade avec ses potes, c'est n'importe quoi. Mais ils ont le mérite de ne sauter aucun chapitre après, ne passant pas l'assassinat de Cuauhtemoc par Cortes, l'expédition au Honduras contre Cristobal de Olid...

Donc pour avoir l'intégralité de cette oeuvre faut alterner entre 2 éditeurs.

Mais c'est qui ce Bernal Diaz del Castillo, auteur d'un chef d'oeuvre ?
Rien sur lui avant 1560 et sa présence au conseil municipal de Santiago de Guatemala. Aucune trace dans les archives de la conquête.
Jamais cité parmi ceux qui ont prêté allégeance à Cortes. On connait nommément tous les soldats, du plus gradé au simple fantassin, qui sont avec Cortes. Pas de Bernal Diaz. Et aucun doute pour les historiens, ce livre n'est pas apocryphe. Mais qui l'a écrit ?
C'est là qu'intervient Christian Duverger, sa biographie de Cortes est remarquable, historien français spécialiste de l'histoire du Mexique de cette époque. Mais oubliez son "Origines des Aztèques", si vous n'avez pas de doctorat en étymologie aztèque c'est incompréhensible... J'ai rien pigé.
Duverger a fouillé les archives, enquêté, et très scientifiquement prouvé que Bernal n'est pas l'auteur de ce livre mais que seul Cortes lui même a pu l'écrire, trop de détails ne peuvent être décrits que par le conquistador lui même.
Duverger tue le mythe, ça s'appelle "Cortes et son double, histoire d'une mystification".

Mais quel putain de chef d'oeuvre que cette "histoire véridique de la conquête de la nouvelle Espagne".

Voilà. C'est dans mon panthéon littéraire.

[ Dernière édition du message le 05/10/2015 à 14:02:11 ]

4833

rapport très lointain avec ça : "l'homme à cheval", de Drieu la Rochelle qui imagine un troubadour suivant la quête du pouvoir d'un officier dans une Amérique latine en carton pâte. superbe roman fasciste avec cet amoureux du chef-viril-et-hyper-proche-de-son-peuple.

4834
Citation :
Plaisir de lire ce post sur Vincenot.[...] Merci Kumo. :bravo:


Ah ben de rien :bravo:

4835
De Vincenot, Les Etoiles de Compostelle, prophétique, visionnaire, épique, picaresque. Un régal!

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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.

4836
Il est dans ma pile :bravo:
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Pierre Doutre est en pension depuis l'âge de 8 ans.
Ses parents travaillent dans un cirque.
Son père est prestigiditateur et sa mère probablement son assistante.
Depuis sa mise en pensionnat il n'avait jamais revu sa cette dernière. Seul son père lui rendait visite une
ou deux fois par an, tant le couple était pris par les tournées.
Mais il lui promettait qu'elle viendrait la prochaine fois.

Un soir de sa 20ème année, toujours pensionnaire, il reçut un billet
d'avion pour Hambourg où il devait se rendre expressément.
Pour quelle raison?



Pour ceux qui comme moi avant de lire cet ouvrage, ne le savent pas, Boileau et Narcejac
est un duo d'écrivain composé de Pierre Boileau et Thomas Narcejac.
Plusieurs de leurs romans ont été adaptés à l'écran.
"Celle qui n'était plus" est devenu devant la caméra de Clouzot "Les Diaboliques".
"Les magiciennes" aussi a été adapté au cinéma sous le même nom par Serge Friedman.

Je ne sais lequel des deux cela peut bien être mais il y en a un qui a vraiment
la génie de l'expression imagée, de la phrase poétique qui m'a donné envie de lire le
livre. Le même ou l'autre est aussi fort pour les dialogues et le ton de ces derniers.

Les deux premiers chapitres m'ont particulièrement enchanté, tout en nuance, emplis
de perceptions fugaces, de flottements, d'incertitude et d'interrogation.

Ensuite on passe dans le récit, les personnages parfaitement définis, ayant chacun
leurs parts de mystère, se mettent en place et l'intrigue survient alors.
On perd un peu en nuances et en poésie mais on est accroché par autre chose
même si tout ne m'a pas convaincu.

Spoiler - Cliquer ici pour lire la suite


La final m'a carrément déçu tant il m'a semblé grotesque.
Ceci dit je n'exclus pas d'avoir loupé un truc.

J'ai tout de même pris du plaisir à lire ce roman, ne serait-ce
que pour certaines de ces éclats poétiques qui surgissaient
au détour d'une phrase.




[ Dernière édition du message le 07/10/2015 à 22:11:31 ]

4838
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Manosque peu de temps après la Seconde Guerre Mondiale.
Pierre a 15 ans. Il s'est levé exceptionnellement tôt pour chercher
des escargots. A 10 francs le kilo, ça améliorera un tant soit peu les comptes
de la famille pauvre dont il est issu.
Soudain un coup de feu. Il voit l'assassin, la victime et prélève sur le cadavre
une quelque chose expliquant tout cela.
Pierre, le sale, le pauvre, le puant, que l'on croit bête pour toutes ces raisons, a les moyens de devenir populaire
et de trouver un peu de considération.
Mais est-ce si simple?
N'y a-t-il pas autre chose à tirer du fait d'être le seul détenteur du secret de l'intrigue?



Je ne connaissais pas cet auteur apparemment réputé pour ses romans policiers.
Ici c'est un peu le polar terroir avec une touche d'érotisme pas racoleuse du tout
bien au contraire.
Le style est assez direct mais truffé de formules poétiques à tomber par terre.
Il y en a en moyenne 2 ou 3 par page qui mériteraient qu'on s'y attarde.

Dans les premiers chapitres de longues descriptions trop minutieuses à mon goût m'ont un peu
agacé car pendant ce temps l'histoire n'avançait pas vraiment.
Puis au milieu de l'ouvrage des basculements s'opèrent et la flamme est ravivée
et durera jusqu'à la fin.
C'est assez cinématographique et on imagine aisément une adaptation filmique.

Un très bon livre au final, qui révèle des promesses qui n'avaient pas été tenues.


[ Dernière édition du message le 14/10/2015 à 09:14:03 ]

4839
Ho encore un chouette topic !!
Je n'ai regardé que la dernière page, on peut parler de SF & HF ?

Long Live Rock'n Roll (Rainbow)

4840
On peut parler de n'importe quel livre :bravo:

[ Dernière édition du message le 23/10/2015 à 08:26:23 ]