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Dis moi ce que tu lis.

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Sujet de la discussion Dis moi ce que tu lis.
... et je te dirais qui tu es...

En ce moment je lis "L'ombilic des Limbes" d'Antonin Artaud, décidement (dément?) ce mec était génial!!!

Et vous c'est quoi vos lectures en ce moment???
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Merci du conseil, oryjen. J'avais acheté à Prague un bouquin sur l'histoire et la légende du Golem, tu me donnes envie te suivre. :bravo:
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Le golem c'est effectivement une créature fascinante. Adolescent, j'avais vu le film La Forteresse Noire (1984) qui se résume en gros à nazi vs golem. Il m'avait fait une forte impression. Mais je l'ai revu il y a quelques années et si l'idée était assez bonne la réalisation n'est pas terrible.
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La réalisation est bien marquée dans son époque, elle a vieilli.
Mais moi aussi en salle ce film m'avait scotché au fauteuil.
Le scénar est très bon, je trouve.

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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.

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C'est du Michael Mann avec l'acteur de Das Boot.
Le ciné-club de mon collège avait diffusé Le Golem, film muet de 1920, le prof qui s'occupait de ça était un bon !!!

Mon thread sur le jazz, principalement bop et post bop:

Wham Bam Jazz

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la-chronique-de-travnik.jpg

La Chronique de Travnik
Ivo Andric
Bosnie-Herzégovine 1945



1806. Jean Daville est nommé consul français dans la petite bourgade de Travnik en Bosnie.
Travnik, se trouve dans une petite vallée humide, balayée par le vent où le Soleil est le plus souvent masqué par le relief. Lorsqu'il arrive, en traversant la rue principale, les enfants lui crachent dessus et l'insultent. Depuis les volets entrebaillés il perçoit les vitupérations des femmes. Au bazar, les commerçant ne lui prêtent aucune attention lorsqu'ils n'affichent pas une certaine forme de mépris. Habitué à certains protocoles, il se rend bien compte qu'ici les règles sont bien différentes et il n'est pas au bout de ses surprises.






J'avais bien aimé Le Pont sur la Drina du même auteur, et dès les premières lignes de ces chroniques j'ai retrouvé ce qui m'avait plu, cette façon de vous faire entrer dans l'histoire sans trop de baratin.

On se retrouve donc dans cette petite ville de Bosnie du début du XIXème siècle sous l'Empire Ottoman. Les guerres napoléoniennes sont également en train de modifier la géopolitique contemporaine. Il y a donc ici des musulmans, mais aussi des catholiques, des orthodoxes et des juifs, chacun prenant partie pour celui qui lui est le plus favorable en ces temps de guerre: les musulmans s'en remettent au vizir, les catholiques au consulat français, les orthodoxes au consulat autrichien par opportunisme anti-napoléonien. Quand à la minorité juive, originaire d'Espagne, elle n'a aucun représentant ou lieu de culte religieux mais entretien des relations plus étroites avec le consulat français.

Aux nombreuses figures locales hautes en couleur, viennent s'ajouter les consuls français et autrichiens avec tout leurs entourages respectifs: femmes, enfants, assistants, fonctionnaires ambitieux, secrétaires exerçant des abus d'autorité, éminences grises voire troubles, médecins, interprètes et personnel autochtone employé de maison ou jardinier.

Nous avons droit à une multitude de portraits d'une psychologie extrêmement fine, révélant des personnages plus ou moins sympathiques et comment tout ce petit monde interagit dans ce contexte très particulier. Des interactions compliquées par les différences culturelles. Le pragmatisme oriental ne s'embarrasse pas des modalités bureaucratiques occidentales. Une chose dite un jour peut se voir infirmer le jour suivant. Les vizirs sont de véritables seigneurs locaux et il est rare qu'ils aient des comptes à rendre à Istanbul pour ce qui est des affaires locales mineures, là où les consuls d'Europe de l'Ouest passent leur temps à écrire des rapports.

Bien évidemment chacun essaye d'être au mieux avec le vizir mais pour ces derniers, tout n'est pas seulement question de pays ou d'administration mais aussi d'homme et de rapport d'homme à homme. Ce vizir aura plus de sympathie pour le consul français. Le suivant, un an plus tard, sera plus enclin à satisfaire le consul autrichien. Et c'est tout un travail de confiance et de relation à reconstruire pour l'un et/ou pour l'autre.
Mais il faut aussi satisfaire les habitants de la ville et les différentes confessions. Prendre les juifs en considération mais pas au détriments des catholiques et ne pas oublier les orthodoxes ou faire quelque chose qui porterait préjudice aux musulmans.

Je résume là extrêmement brièvement les près de 700 pages de ce roman passionnant partagées entre engagement politique, questions d'éthique, de morale voire existentielle, conflits culturels, petites histoires dans la grande histoire, idéaux confrontés à la réalité, désillusions, traits d'humour, quelques romances discrètes, problèmes de couples, problèmes de l'expatriation etc etc...

Pour ce genre de livre rien ne remplace l'immersion que permet la lecture que chacun fera. Ivo Andric est un conteur, et il saura peut-être vous rendre sympathique et attachante cette affreuse localité aux Étés suffocants et aux Hivers insupportables, peuplée d'autochtone divers et imprévisibles, administrée par des vizirs plus ou moins sympathiques et imprévisibles eux aussi. On s'y crois vraiment et à la fin de la lecture on se retrouve un peu comme lorsqu'on revient d'un voyage, avec des anecdotes à raconter, parler des gens qu'on a rencontré. Voyager dans l'espace et dans le temps, avec Ivo Andric c'est possible.



[ Dernière édition du message le 12/06/2019 à 10:29:50 ]

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Toujours aussi bien les vidéos de Analepse.

Cette fois c’est moins histoire que littérature. Petite discussion autour de Jules Verne : est-ce de la SF ? En est-il l’un des inspirateurs ?
Très intéressant :

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Ce n'est pas un roman mais un recueil comprenant 5 nouvelles et 2 courts essais.

1/ Dans "L'éléphant du vizir" la petite ville de Travnik attends son nouveau vizir. Si d'habitude chacun vient habituellement avec un animal exotique: lion, tigre, panthère, perroquet...mais là il s'agit d'un éléphant, ce que personne a Travnik n'a jamais et ne sait en fait même pas à quoi cela ressemble.

2/ "Gens d'Osatitsa" raconte comment la petite ville se retrouve dans l'embarras puisque la flèche de l'église est cassée et doit être réparée. Cela n'a l'air de rien mais la ville est divisée en deux, les chrétiens et leur église sont dans la partie haute et les musulmans et leur mosquée dans la partie basse. Perdre la pointe du clocher c'est un peu perdre de la hauteur, ce qui fait ricaner les musulmans. Il y a bien Lekso, un artisan qui sait travailler le métal mais il lui manque tout de même quelques compétences. Alors on en fait venir un plus qualifié, à gros frais donc, d'une localité voisine. Leskole secondera.
Le jour venu, les deux hommes grimpent sur le clocher, faisant ce qu'ils ont à y faire.

Une fois terminé, toute le monde se félicite du succès de l'opération et Lekso compte bien tirer quelque gloire de tout ça. Or, il n'a droit à aucun égard particulier, et les jours suivants personne ne le regarde autrement, personne ne le félicite chaleureusement, on ne lui prête pas plus d'attention que d'habitude. En fait, personne ne lève même la tête vers la flèche de l'église pour admirer le travail effectué, comme si elle n'avait jamais été endommagée. Mais la flèche neuve brille toutefois de tous feux.

Lorsqu'il se joint a un petit groupe dans la rue ou à la taverne et qu'il évoque insidieusement les travaux de l'église, personne ne semble se souvenir qu'il en a été un des acteurs.
Ce n'est pas seulement son orgueil qui est touché mais aussi sa santé mentale, sa perception de la réalité: il y est tout de même bien monté sur ce clocher non? À moins que...! Mais si ! Bien sûr que si ! Mais que s'est-il réellement passé?

3/ Maître Yevrem est le personnage principal de "Une année difficile". C'est un homme détestable. Outre son mépris et sa froideur, il a un certain don et il est intraitable en affaire. Ce don lui a permis d'amasser une énorme fortune et permet à lui et sa famille de vivre dans un confort dont bien des gens rêvent.
Malheureusement, voilà maintenant une quinzaine d'années que Maître Yevrem, aujourd'hui grisonnant, ne peut plus tenir sur ses jambes qui ne supportaient plus son poids. Il est donc assigné dans une grande pièce dans laquelle il trône et reçoit pour affaire. Pour ses tâches quotidiennes et autres besoins, il est assisté par sa femme, ses enfants et quelques employés.

Il y a quelques années, sa femme avait recueillie une jeune tzigane de moins de 10 ans que ses parents avaient abandonnée dans un fossé à une période où le typhus faisait rage. Elle a grandit et entre désormais a son service. Il sera troublé par cette jeune fille qui ose lui tenir tête alors qu'il est craint et haït dans toute la région.

4/ Un homme, raconte comment il lui arrive régulièrement non seulement de sentir soudainement la présence de Yéléna, une femme qu'il aime plus que tout, mais également de l'apercevoir ici ou là, mais toujours trop loin, disparaissant au coin de la rue, sur un quai de gare bondé alors qu'elle monte dans un train. Le titre de ma nouvelle donne le ton: "Yéléna, celle qui n'était pas". Plutôt romantique et onirique voire légèrement surréaliste, loin en tout cas des histoires "folkloriques" qui précèdent.

5/ "Figures" est un essai de moins d'une dizaine de page dans lequel l'auteur essaye de dire ce que nous avons quelques fois perdu en remplaçant le symbole par le verbe.

6/ "Entretien avec Goya" raconte l'entretien imaginaire entre lui et le peintre. Un texte réellement passionnant et un hommage intéressant à bien des égards, qui intéressera tous les gens faisant de la peinture mais également n'importe quel artiste.

Plusieurs passages ont retenu mon attention, mais la description d'une des mains de Goya m'a particulièrement marqué:
Citation :
Pendant qu'il parle, mon regard tombe sur la table où gît sa main droite, comme quelque chose jouissant d'une vie à part. Une main terrible, une sorte d'amulette, noueuse, grise, puissante mais sèche comme un monticule de sable. Cette main vit, mais de la vie invisible des pierres. Elle ne contient ni sang ni suc, mais une autre matière dont les propriétés nous sont inconnues. Elle n'est faite ni pour les poignées de main, ni pour les caresses, ni pour prendre ni pour donner. En la regardant, on se demande avec horreur si une main humaine peut devenir cela.


7/ "Histoire japonaise" est un petit conte moral dont je ne saurais dire si il est vraiment issu de la culture japonaise ou si l'auteur en a voulu ainsi afin de donner un réceptacle à une histoire qu'il ne savait pas où placer.


Un ouvrage divers ou les histoires et la réflexion sont au rendez-vous, toujours servies par le talent indiscutable de Ivo Andric.



[ Dernière édition du message le 01/07/2019 à 14:39:49 ]

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Terre Natale
Marcel Arland
1938

Citation :
Même à midi, la cuisine restait sombre. Tout le jour de la rue s'amassait en vain devant l'étroite fenêtre; je ne la vis jamais ouverte; de vieux rideaux d'alcôve et des pots d'hortensias la réduisaient encore. Et comme la pièce était longue et déclive, tous les degrés de la pénombre s'y succédaient jusqu'aux angles du fond, où quelque reste de la nuit passée semblait attendre la nuit prochaine.


C'est le premier paragraphe du livre et ça m'a tout de suite plu. Je l'ai aussi acheté par erreur, car il était mélangé aux livres de Marcel Aymé et comme je ne connaissais pas ce titre de ce dernier, je l'ai pris. Ça n'est que plus tard que j'ai réalisé que ça n'était pas un livre de Marcel Aymé.
Alors ça n'est pas Marcel Aymé, malgré un contexte rural qu'on trouve dans certains de ses livres, mais j'ai trouvé ça très très bon.

C'est une biographie de l'auteur né en 1899, comprise entre sa toute petite enfance et le début de l'entre-deux-guerres. Je ne sais pas dans quelle mesure elle est romancée. On suit donc notre homme, qui grandit à ce qui s'appelait Terre Natale, un petit village de la Haute-Marne, aujourd'hui disparu puisque rattaché à Varennes-sur-Amance.
Ça ressemble un peu à Ma vie parmi les ombres de Richard Millet, mais en moi prétentieux dans le style.

On retrouve tout l'environnement d'un village avec ses personnages (vieille femme assimilée à une sorcière, vieux célibataire taciturne habitant une maison légèrement isolée, bigots et bigotes, idiot du village, jeune femme vivant seule avec un enfant dont le père est inconnu, ce qui est bien mal vu à l'époque...) mais aussi l'omniprésence de la campagne où l'auteur, enfant solitaire et taciturne, aime se perdre et passer du temps dès que possible.
Ce qui donne lieu à de très belles descriptions champêtres, diurnes et nocturnes. Il y a quelque chose de contemplatif voire de mystique dans sa fascination pour son environnement et sa façon d'appréhender champs, bois, forêts, collines, animaux...

Les conditions de vie sont rudes, mais l'auteur ne tombe jamais dans le misérabilisme. Les gens, tous plus ou moins agriculteurs, fauchent à la main des km2 de champs sous un soleil de plomb, mais c'est comme ça, c'est ce qu'il y a à faire et ça ne se discute pas.
J'ai beaucoup aimé aussi ces anecdotes typiques de villages: la famille qui a perdu un fils, mort frappé par la foudre alors qu'il revenait des champs; un point d'eau assez petit mais apparemment très profond puisqu'on dit qu'un carrosse entier, chevaux compris, y était tombé sans qu'on n'ait jamais pu retrouver aucune trace; des noms de lieu-dits, comme Le Fossé de la Morte...

Le style est "simple" mais très travaillé avec de très beaux passages. Si vous avez vécu à la campagne dans votre enfance, vous trouver immanquablement de souvenirs avec des restes de ce genre d'ambiance. Acheté par erreur, le livre s'est avéré être une excellente surprise. C'est un des livres qui m'a le plus parlé ces derniers mois.
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Euh en trucs moins "prestigieux", j'ai attaqué récemment "la Horde du Contrevent" d'Alain Damasio. Ça semble assez étrange, mais prenant. Et j'aime beaucoup le style (je vais pas oser dire que j'aimerais écrire comme lui).
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Excellent bouquin pour moi aussi!

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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.