La firme américaine Blue Microphones, rendue célèbre, entre autres, grâce à son emblématique Bottle, a décidé depuis plusieurs années d’étoffer sa gamme de produits en proposant des microphones plus accessibles pour une qualité de fabrication toujours aussi sérieuse. Aujourd’hui, la marque confirme ses ambitions en annonçant la sortie du Spark, un microphone à condensateur qui redéfinit l’entrée de gamme de Blue.... et de ses concurrents. La mèche va-t-elle prendre ?
Packaging explosif
Si il est vrai qu’aujourd’hui c’est presque devenu un sport national (pardon international), voir une « grande marque » de microphones proposer des produits d’entrée de gamme rivalisant directement avec des adversaires pourtant redoutables est toujours aussi surprenant… Surtout lorsque l’on sait que le cheval de bataille de ladite marque dépasse largement la barre des 4000 €. Le Bottle a fait des émules, dans bien des studios et devant bon nombre d’artistes reconnus, cependant Blue n’est pas à son premier coup d’essai quant à sa volonté d’offrir aux moins fortunés la possibilité de disposer de moyens sérieux pour l’enregistrement… Des microphones USB aux accessoires pour iPod, la gamme de produits s’est élargie au fil des années et n’a fait que renforcer la réputation de la marque qui restait jusque-là inaccessible…
L’enjeu avec le Spark est tout de même sacrément corsé, notamment à cause de (ou grâce à?) son prix : 199 € TTC ! Comment diable un microphone à un prix aussi bas peut-il s’imposer dans un marché aussi coriace ? La marque ne profiterait-elle pas de sa réputation pour attaquer un marché presque saturé ?
Dans un premier temps, force est de constater que j’ai tout faux. Au moment du déballage, une bonne surprise s’offre à nous : le packaging. Le Blue Spark est livré dans un petit coffret en bois qui révèle des accessoires qu’on n’attend pas vraiment pour un tarif aussi bas. En effet, une petite suspension ainsi qu’un filtre antipop estampillé « Blue » et adapté à la taille de la capsule sont fournis dans le coffret. On constate donc que, dans sa modestie, la marque n’a pas perdu son bon goût ni son professionnalisme. Et encore moins son identité.
Dans le coffret on trouve également un petit manuel à la présentation et aux illustrations pour le moins originales. En effet, la documentation technique prend des allures de paquet d’allumettes, visuel qui vient renforcer l’univers et le design du Spark… C’est très bien vu. La notice d’emploi est complète et s’adresse à tous : du débutant au professionnel, chacun y trouve son compte. Ainsi on trouve de petits schémas expliquant comment on peut optimiser l’utilisation du Spark, dans quelles situations d’enregistrement, devant quels instruments, comment le placer pour en tirer le meilleur, etc. Évidemment, on y trouve aussi les données techniques nécessaires à ceux qui s’affranchissent de ce genre d’illustrations et qui viennent y trouver les informations voulues. Alors, s’il est vrai que le manuel n’est qu’une infime partie d’un produit, il peut parfois refléter le sérieux apporté à celui-ci… Et là on peut dire que, pour le prix, c’est surprenant et vraiment bien fait.
Escarbille cardioïde
Passons maintenant à l’utilisation à proprement parler. À la prise en main, même si le corps du micro dans sa jolie robe orange (bien assumée !) peut faire sourire et donner un aspect légèrement « plastique », la robustesse du micro est bien là pour nous rassurer. Sans être encombrant (moins de 20 cm de hauteur), le Spark sait s’imposer. Assurément, la finition ne vaut pas non plus le haut de gamme de la marque et c’est tout à fait normal. Néanmoins, tout comme pour le packaging, les prestations offertes sont définitivement sérieuses et on reconnaît bien la « patte » Blue.
Cette identité est d’autant plus flagrante que la capsule cardioïde se détache du reste du corps, conservant l’esthétisme si cher à Blue, que l’on retrouve dans d’autres micros de la série « Essentials » comme le Baby Bottle ou le Blueberry. D’un point de vue technique, le Spark annonce de belles performances, avec une réponse en fréquence de 20 Hz à 20 kHz, une sensibilité de 28 mV/Pa, un niveau maximum admissible de 128 dB SPL pour un rapport signal/bruit de 84 dB.
En regardant le micro de plus près, on remarque la présence d’un petit bouton Focus situé à l’arrière en bas du corps. Même si la documentation souhaite différencier cette fonction d’un classique filtre coupe-bas (par le biais d’une variation de la tension de charge de la capsule modifiant ainsi sa réponse en fréquence et son comportement dynamique général), la courbe de réponse affirme malgré tout que cette fonction agit principalement comme un filtre coupe-bas.
On constate la présence de quelques petites bosses à diverses fréquences sur la plage de réponse du micro, certainement pour « embellir » les prises de voix notamment. Néanmoins, rien d’affligeant dans la courbe de réponse fréquentielle du Spark qui reste globalement assez linéaire.
Une étincelle qui met le feu aux poudres
D’après le fabricant, le Spark – de par sa réponse en fréquence quasi linéaire et son absence de coloration sonore significative – peut être utilisé avec virtuellement n’importe quel instrument ou chanteur/euse. Avant cela, on peut déjà profiter des accessoires fournis dans le coffret en bois, dont la suspension. Bien que celle-ci remplisse parfaitement sa fonction, j’ai eu un peu de mal à serrer correctement sur le pas de vis. C’est vrai, nous n’avons pas affaire à la meilleure suspension du marché, mais pour un micro d’entrée de gamme, on ne peut pas non plus être trop exigeant.
Tout en haut du corps, à l’arrière du micro, se trouve une petite vis qui permet de fixer l’antipop livré avec le Spark. Parfaitement adapté à la taille de la capsule, très esthétique et suffisamment efficace, celui-ci est tout de même, après installation, à une distance un peu trop proche de la capsule. Pour la majorité des utilisateurs et pour l’exploitation qu’ils feront du Spark, c’est parfait. Mais pour ceux qui, comme moi, souhaitent pouvoir régler la distance entre le filtre antipop et le micro, il ne pourra se substituer à l’utilisation d’un autre antipop…
J’ai tenu à vérifier si le Spark offrait des résultats probants devant n’importe quel instrument. Afin d’offrir une référence (complètement déloyale, je l’avoue), je propose à chaque fois un extrait enregistré avec le Spark et le même extrait enregistré avec un Neumann U87 vintage. Comme je l’ai écrit plus haut, il ne s’agit pas là d’opposer le Spark à un adversaire qui a fait ses preuves (et qui coûte presque 10 fois son prix), mais simplement d’offrir un point de comparaison empirique…
- Acc strumming Blue Spark00:24
- Acc strumming U8700:24
- Acc fingers Blue Spark00:22
- Acc fingers U8700:22
- Clean Gtr Blue Spark00:25
- Clean Gtr U8700:25
- Clean Gtr + filter Blue Spark00:22
- Clean Gtr + filter U8700:22
- Dist Gtr Blue Spark00:32
- Dist Gtr U8700:32
- Drums Blue Spark00:19
- Drums U8700:19
- Voix Blue Spark00:29
- Voix U8700:29
Pour être honnête, les résultats sont assez bluffants. D’un point de vue général, le Spark se défend vraiment bien, offrant une reproduction sonore fidèle et agréable, sans « embellissement fréquentiel » outrancier. C’est vrai, on peut déceler les petites bosses à 1kHz et entre 8 et 12 kHz, ainsi que le creux entre 200 et 400 Hz. Mais globalement, rien d’outrancier. Techniquement, nous avons réglé les préamplis (Amek DMCL) de manière à ce que le niveau enregistré soit le même pour une écoute la plus « objective » possible. Mais globalement, pas de réelle différence de réglage puisque le niveau de sortie du Spark est élevé, très proche du niveau de sortie de ce U87, ce qui permet de l’utiliser avec n’importe quel préampli.
D’un point de vue dynamique, il réagit bien aux transitoires, donnant une réponse claire, mais pas agressive. C’est évident, les deux micros ne réagissent pas de la même façon dans les détails (précision du bas, bas médium différent, aigu légèrement moins « scintillant » pour le U87), mais attention, je le répète : il ne s’agit pas là de comparer deux micros incomparables. En revanche, on constate que, quelle que soit l’application, le Spark offre une qualité sonore plus que satisfaisante et qui rend ce micro bien plus polyvalent qu’il n’y paraît.
Évidemment, un atténuateur aurait été le bienvenu, si on souhaite utiliser le Spark devant des sources sonores très fortes, par exemple une grosse caisse. C’est sûr, ça n’est pas l’utilisation première que l’on peut faire avec ce micro et puis, pour le prix, on ne peut pas être plus royaliste que le roi… Je n’ai pas été totalement convaincu par la suspension qui, bien qu’elle remplisse ses fonctions, n’est pas des plus pratiques. Une seconde suspension, plus « simple » et moins encombrante aurait peut-être été la bienvenue… Mais encore une fois, à ce prix, que peut-on vraiment reprocher à ce micro ?
Pas grand-chose au final. Un rendu sonore vraiment appréciable, des performances techniques plus que satisfaisantes, une fabrication solide et un design original (fidèle à la marque) dans un packaging digne d’un micro haut de gamme… Le tout pour moins de 200 € TTC ? Franchement, Blue vient de lancer un micro flamboyant au rapport qualité/prix imbattable et il y a fort à parier que la flamme du Spark vienne littéralement « mettre le feu » à nos futurs enregistrements !
Conclusion
S’il est toujours aussi surprenant de voir une marque d’excellence s’attaquer à un marché d’entrée de gamme, on peut dire que Blue ne s’est pas franchement reposé sur sa réputation pour proposer le Spark. Très à l’aise en studio, ce véritable touche-à-tout microphonique peut s’attaquer à n’importe quel enregistrement sans rougir. Certes, le micro n’est pas destiné à rivaliser avec ses grands frères qui ont fait la renommée du fabricant, mais il offre des prestations rarement égalées et une fabrication soignée pour un tarif plus que raisonnable. Une excellente surprise et certainement une nouvelle référence chez tous les home-studistes.
Merci à Red Led pour son jeu légendaire ainsi qu’à Marc et le studio Mupson.
Red Led appears courtesy of Alsace Sauerkraut Records.