Suite à l'article précédent, il me semble opportun d'aborder un sujet d'une importance capitale lorsque l'on s'intéresse sérieusement à la captation sonore : la connaissance du matériel à disposition. Ainsi, je vous propose aujourd'hui d'étudier une méthode simple qui vous permettra de mieux appréhender les caractéristiques sonores de votre matériel d'enregistrement, ce qui, à terme, devrait faciliter vos prises de décisions lors de vos sessions de travail.
Faire ses gammes…
Comme nous l’avons déjà vu, le choix du matériel à utiliser ainsi que le placement des micros sont des questions à ne pas prendre à la légère lorsqu’il s’agit d’obtenir l’enregistrement parfait pour votre production. Or, vous aurez beau lire en long, en large et en travers l’ensemble des articles de cette série en décortiquant les exemples audio fournis, rien ne remplacera jamais l’expérience avec votre propre matériel. C’est pourquoi je vous propose dans cet épisode une approche qui devrait vous aider à révéler le véritable potentiel de vos jolis joujoux. Cette méthode se décompose en deux phases.
Tout d’abord, il y a la phase bête et méchante d’enregistrement. Choisissez un instrument dont vous maîtrisez la pâte sonore de A à Z dans le monde réel, c’est-à-dire un instrument que vos oreilles connaissent suffisamment bien lorsque vous l’entendez vraiment et non pas au travers d’un enregistrement. Notez que l’instrument en lui-même n’a pas vraiment d’importance car ce n’est pas lui l’objet de l’étude. Ceci étant, plus la plage de fréquences qu’il couvre sera grande, mieux ce sera puisque cela vous permettra alors de cerner le matériel de captation étudié de façon plus globale. À ce stade, aucune considération artistico-esthétique ne devant interférer dans le processus, la musique jouée doit être suffisamment simple pour que l’interprétation ne vienne pas influencer le jugement. Du coup, il m’arrive souvent à titre personnel de choisir une reprise que je maîtrise sur le bout des doigts à la virgule près plutôt qu’une de mes compositions. En effet, j’ai une fâcheuse tendance à m’autoriser plus de liberté sur mes propres morceaux… C’est à mon sens une bonne chose pour la scène mais cela ne colle pas avec l’exigence de constance spécifique à l’exercice du jour.
Bref, il convient maintenant de choisir l’un de vos micros et de le placer en position d’enregistrement au premier endroit qui vous vient à l’esprit. Pour que mon explication soit plus claire, je vais prendre comme exemple une guitare électrique avec l’ampli repiqué par un bon vieux SM57, un grand classique pour ce type de prise. Je place donc dans un premier temps mon SM57 directement devant la gamelle de l’ampli guitare, dans l’axe du HP, et j’enregistre. Il faut bien faire attention à bien nommer la prise ainsi qu’à prendre des notes, voire des photos du positionnement du micro, car ce sera primordial pour la deuxième phase. Une fois cela fait, la suite logique consiste à déplacer le micro devant la source sonore en variant la distance et/ou l’angle d’inclinaison, puis de refaire une prise avec une interprétation aussi proche que possible de la précédente tout en veillant à toujours bien documenter les conditions d’enregistrement. Dans le cas d’une guitare électrique, il peut être judicieux d’avoir au préalable enregistré un riff ou une rythmique quelconque via un boîtier de DI pour ensuite faire du « reamping », cela élimine la variable de l’interprétation. Bref, recommencez la manoeuvre autant de fois que vous le jugez nécessaire. Je vous invite également à refaire tout ça avec chacun de vos micros, ou bien encore en testant différents préamplis, compresseurs et/ou égaliseurs le cas échéant.
Passons à présent à la seconde phase : l’analyse. Notez qu’il est fortement conseillé d’attendre quelques jours entre la phase d’enregistrement et celle de l’analyse afin de repartir avec une oreille neutre.
Le principe de cette étape est tout aussi simple que pour la précédente. Il se résume à écouter attentivement vos enregistrements en prenant une nouvelle fois des notes relatives au rendu sonore de chacun d’eux. Relevez les changements de balance spectrale, les variations de la réponse dynamique, les altérations de la sensation d’espace, etc.
En recoupant les notes de la deuxième phase avec celles de la première, vous devriez maintenant pouvoir mieux appréhender le maniement des micros/préamplis/etc. passés sur le grill. Pour affiner encore plus avant votre maîtrise du matériel dont vous disposez, n’hésitez pas à appliquer cette méthode à d’autres sources sonores. Certes, cela prend du temps, mais je vous assure qu’au final, ce sera du temps de gagné plus tard, lorsqu’il vous faudra prendre des décisions rapides en situation d’enregistrement réel.
Sur ce, rendez-vous la semaine prochaine pour le début du prochain chapitre qui sera logiquement consacré à l’enregistrement de la guitare électrique !