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Toute la vérité sur la compression

La compression démystifiée

Les compresseurs sont des outils essentiels pour l'enregistrement. Faisons toute la lumière sur leur fonctionnement.

Le compres­seur est l’un des proces­seurs les plus utili­sés, mais aussi l’un des plus mal compris. Il est géné­ra­le­ment utilisé pour donner plus de punch aux enre­gis­tre­ments, mais le résul­tat obtenu sonne souvent de façon terne en raison de réglages inap­pro­priés. Alors qu’il était censé dispa­raître avec l’avè­ne­ment du numé­rique et de sa plage dyna­mique éten­due, le compres­seur est devenu plus popu­laire que jamais. Il est même décliné en variantes toujours plus nombreuses qui reposent cepen­dant toutes sur un même prin­cipe de base. Voyons quels sont les outils dispo­nibles et exami­nons leurs avan­tages et incon­vé­nients ainsi que les appli­ca­tions auxquelles ils sont adap­tés. 

Intro­duc­tion

À l’ori­gine, la compres­sion a été inven­tée pour adap­ter la dyna­mique de la musique live, qui peut dépas­ser 100 dB, à la plage dyna­mique réduite de la diffu­sion radio et télé (40 à 50 dB), des vinyles (50 à 60 dB) et des bandes magné­tiques (40 à 105 dB selon le type de bande, la vitesse de défi­le­ment et le système de réduc­tion de bruit utili­sés). Comme le montre l’illus­tra­tion 1, le compres­seur atté­nue les crêtes du signal sans modi­fier ses portions faibles. Puis, il ampli­fie le niveau global pour rame­ner les crêtes au niveau maxi­mal. Notez cepen­dant que l’aug­men­ta­tion du niveau ampli­fie égale­ment le bruit… on ne peut pas tout avoir ! 

Compression

Ill. 1 : la première partie (en noir) repré­sente le signal audio origi­nal. La section centrale (en vert) montre ce même signal après compres­sion. La troi­sième partie (en bleu) repré­sente le signal compressé après qu’il a été ampli­fié. Remarquez que les portions de faible niveau du signal origi­nal (noir) possèdent un niveau bien supé­rieur dans le signal final (bleu) tandis que le niveau des crêtes est resté inchangé.

Malgré la plage dyna­mique éten­due des médias numé­riques tels que le CD, les ingé­nieurs du son conti­nuent de compres­ser les signaux. Pendant long­temps, la compres­sion consti­tuait la méthode clas­sique pour aider les portions faibles du signal à surna­ger dans les envi­ron­ne­ments d’écoute bruyants. De plus, les bandes magné­tiques utili­sées par les ingé­nieurs du son pendant plus d’un demi siècle compres­saient natu­rel­le­ment le signal.

Mais il existe d’autres raisons à la compres­sion audio. A l’in­verse de la tech­no­lo­gie analo­gique, l’en­co­dage numé­rique tord moins les signaux de niveau élevé que les signaux dont le niveau est faible. Ainsi, quand on enre­gistre avec un système numé­rique, la compres­sion permet d’aug­men­ter le niveau moyen de la plupart des portions du signal afin de maxi­mi­ser la réso­lu­tion sonore.

La compres­sion permet égale­ment d’aug­men­ter le volume sonore subjec­tif : à la télé­vi­sion, les spots publi­ci­taires sonnent beau­coup plus fort que les programmes car ils sont compres­sés à l’ex­trême. En effet, s’ils ont à choi­sir entre deux sources semblables, les audi­teurs préfè­re­ront majo­ri­tai­re­ment le signal qui sonne le plus fort. Enfin, la compres­sion permet de lisser les sons, par exemple en augmen­tant la réso­nance d’un piano ou en compen­sant les défi­ciences d’un chan­teur qui contrôle mal ses mouve­ments par rapport au micro. 

Les bases de la compres­sion

Les compres­seurs sont souvent mal utili­sés en raison de notre système de percep­tion des sons. Nos oreilles et notre cerveau nous permettent de perce­voir des varia­tions très légères de la hauteur tonale mais pas de l’am­pli­tude. Ainsi, on aura tendance à surcom­pres­ser afin d’en­tendre l’ef­fet, mais le résul­tat sonnera de façon peu natu­relle. Tant que vous n’au­rez pas entraîné votre oreille à perce­voir une compres­sion subtile, gardez toujours un œil sur l’af­fi­cheur de réduc­tion de gain du compres­seur car il indique l’in­ten­sité de la compres­sion. Vous serez certai­ne­ment surpris de consta­ter que vous ne perce­vez pas le trai­te­ment, même avec une compres­sion appliquant 6 dB de réduc­tion du niveau ; par consé­quent, n’hé­si­tez pas bypas­sez l’ef­fet pour compa­rer le signal origi­nal et le signal traité afin d’en­tendre la diffé­rence.

Qu’ils soient maté­riels ou logi­ciels, les compres­seurs possèdent les para­mètres stan­dard suivants :

Le seuil (Thre­shold) défi­nit le niveau à partir duquel la compres­sion est déclen­chée. Quand le signal source dépasse ce seuil, le niveau de sortie augmente moins rapi­de­ment que le niveau d’en­trée. Ainsi, plus le niveau seuil est faible, plus les portions de signal compres­sées sont nombreuses.

Le taux de compres­sion (Ratio) déter­mine dans quelle propor­tion le niveau du signal de sortie est modi­fié par rapport aux varia­tions du niveau d’en­trée. Par exemple, avec un taux de compres­sion de 2:1, l’aug­men­ta­tion de 2 dB du niveau d’en­trée entraîne une augmen­ta­tion de 1 dB du niveau de sortie. Avec un taux de compres­sion de 4:1, une augmen­ta­tion de 16 dB du niveau d’en­trée entraîne une augmen­ta­tion de 4 dB du niveau de sortie. Avec un taux de compres­sion « infini », le niveau de sortie reste constant quelles que soient les varia­tions du niveau d’en­trée. En bref, plus le taux de compres­sion est élevé, plus la compres­sion est intense. L’illus­tra­tion 3 montre la rela­tion entre le niveau d’en­trée, le niveau de sortie, le taux de compres­sion (Ratio) et le niveau seuil (Thre­shold).

Compression

Ill. 2 : Le seuil (Thre­shold) est réglé sur –8. Si une augmen­ta­tion de 8 dB du niveau d’en­trée (par exemple de –8 à 0) entraîne une augmen­ta­tion du niveau de sortie de 2 dB (de –8 à –6), le taux de compres­sion (Ratio) est 4:1.

L’at­taque (Attack) déter­mine le temps de déclen­che­ment de la compres­sion lorsqu’une modi­fi­ca­tion de niveau est détec­tée. Plus le temps d’at­taque est élevé, plus le compres­seur laisse passer la dyna­mique origi­nale du signal en ne trai­tant pas immé­dia­te­ment les portions de signal au-dessus du seuil. À l’époque de l’en­re­gis­tre­ment analo­gique, la bande absor­bait tout écrê­tage poten­tiel résul­tant de tran­si­toires soudains. Avec la tech­no­lo­gie numé­rique, ces tran­si­toires sont écrê­tés dès qu’ils excèdent le 0 de l’af­fi­cheur. Certains compres­seurs possèdent une option de satu­ra­tion qui imite le compor­te­ment d’une bande, tandis que d’autres écrêtent douce­ment le signal (soft clip­ping) pour éviter l’ap­pa­ri­tion de distor­sion dans les étages suivants. Une autre option consiste à ajou­ter une section limi­teur de sorte que tous les tran­si­toires soient « bloqués » à disons 0 dB.

Le déclin/relâ­che­ment (Decay/Release) désigne le temps néces­saire au compres­seur pour relâ­cher son emprise sur le signal lorsque le niveau d’en­trée repasse sous le seuil (Thre­shold). Un temps de relâ­che­ment court permet de créer des effets spéciaux, par exemple des sons de batte­rie psyché­dé­liques rappe­lant les années 60 dans lesquels le fait de frap­per sur une cymbale crée un violent pompage sur tout le son du kit. Les valeurs de relâ­che­ment élevées donnent de bons résul­tats et des effets plus discrets avec les signaux dont le niveau évolue progres­si­ve­ment.

Remarquez que de nombreux compres­seurs possèdent une option d’at­taque et/ou de relâ­che­ment auto­ma­tique. Elle analyse le signal en perma­nence et opti­mise les valeurs d’at­taque et de relâ­che­ment à la volée. Elle est utile pour les ingé­nieurs en herbe qui ne maîtrisent pas tota­le­ment les temps d’at­taque et de relâ­che­ment, mais aussi pour les utili­sa­teurs aguer­ris qui gagne­ront du temps en évitant de régler chaque para­mètre.

Niveau de sortie. En abais­sant le niveau des crêtes, on réduit le niveau crête global et on n’ex­ploite pas l’en­semble de la plage dyna­mique dispo­nible. Le fait de pouvoir augmen­ter le niveau de sortie compense donc la baisse de volume. Géné­ra­le­ment, on augmen­tera le niveau de sortie jusqu’à ce que le niveau des crêtes du signal compressé corres­ponde à celui des crêtes du signal source. Certains compres­seurs possèdent une fonc­tion de réglage auto­ma­tique du niveau de sortie (Auto Gain ou Auto Makeup) qui ajuste auto­ma­tique­ment le niveau de sortie.

L’op­tion hard/soft knee déter­mine la vitesse à laquelle le compres­seur applique le taux de compres­sion fixé avec le réglage Ratio. Avec la carac­té­ris­tique soft knee, lorsque le niveau d’en­trée dépasse le seuil (Thre­shold), le taux de compres­sion appliqué est d’abord faible, puis augmente jusqu’au taux de compres­sion fixé au fur et à mesure que le niveau d’en­trée s’ac­croît. Avec la carac­té­ris­tique hard knee (visible sur l’illus­tra­tion 2), le taux de compres­sion fixé est appliqué immé­dia­te­ment dès que le niveau d’en­trée excède le seuil (Thre­shold). En bref, utili­sez la réponse hard knee pour abais­ser le niveau des crêtes de façon abrupte et la carac­té­ris­tique soft knee pour obte­nir une compres­sion plus douce et plus discrète.

De nombreux compres­seurs hard­ware ainsi que certains compres­seurs logi­ciels offrent des connexions pour la chaîne laté­rale (Side Chain). La chaîne laté­rale vous permet d’in­sé­rer des filtres dans le circuit de commande du compres­seur afin de circons­crire la compres­sion à une bande de fréquences donnée. Par exemple, pour créer un effet dées­seur sur les voix, insé­rez un filtre passe haut dans la chaîne laté­rale afin de compres­ser unique­ment les hautes fréquences. 

Sonitus:Fx compressorIll. 3 : Le compres­seur Soni­tus:Fx en action.

Le bouton Link des compres­seurs stéréo fait passer le fonc­tion­ne­ment de double mono à stéréo. Lorsque les deux canaux sont liés, les réglages d’un canal sont appliqués à l’autre afin de préser­ver l’image stéréo.

L’illus­tra­tion 3 montre le compres­seur Soni­tus:Fx de Cake­walk Sonar Produ­cer Edition (sous Windows) réglé pour trai­ter une voix. Au moment de la capture d’écran, la réduc­tion de niveau était d’en­vi­ron –5 dB comme le montre l’af­fi­cheur GR (Gain Reduc­tion). On retrouve les para­mètres stan­dard : le seuil (Thre­shold), le taux de compres­sion (Ratio), l’at­taque (Attack), le relâ­che­ment (Release), la carac­té­ris­tique (Knee) et le niveau de sortie. Ce compres­seur possède égale­ment une section limi­teur, qui contrôle les tran­si­toires en sortie, et une option de réglage auto­ma­tique du temps de relâ­che­ment appe­lée TCR.

Descrip­tion des diffé­rents types de compres­seurs

On trouve des compres­seurs maté­riels, géné­ra­le­ment au format rack ou pédale pour les guita­ristes, et des compres­seurs logi­ciels sous forme de plugins pour appli­ca­tions audio­nu­mé­riques. Voici une descrip­tion des diffé­rents types de compres­seurs :

Compres­seurs clas­siques. Qu’ils soient maté­riels ou logi­ciels, ils four­nissent la plupart des réglages décrits ci-dessus et possèdent deux canaux ainsi qu’un affi­chage de la réduc­tion de gain qui indique l’in­ten­sité de la compres­sion.

Compres­seurs multi­bandes. Ils découpent le spectre audio en plusieurs bandes de fréquences qui sont compres­sées indi­vi­duel­le­ment. Cela permet d’ob­te­nir un son plus natu­rel (par exemple, les basses fréquences n’en­gendrent pas de compres­sion dans le haut du spectre). Certains modèles permettent de compres­ser unique­ment les bandes de fréquences que vous souhai­tez trai­ter.

Compres­seurs vintage et spécia­li­sés. Certains ne jurent que par le compres­seur des consoles SSL. D’autres trouvent que l’ou­til ultime est un bon gros compres­seur à lampes. Certains guita­ristes ne peuvent pas vivre sans leur compres­seur vintage Dan Armstrong Orange Squee­zer que beau­coup consi­dèrent comme le meilleur sustai­ner pour guitare jamais fabriqué. Le fait est que chaque compres­seur possède son propre carac­tère sonore. Par consé­quent, ce qui marche avec une source donnée peut s’avé­rer inadapté à une autre. Vous n’avez pas le super compres­seur à lampes des années 50 dont tous les ingé­nieurs sont amou­reux ? Cela ne doit pas vous empê­cher de dormir : de nombreux plugins émulent les équi­pe­ments vintage avec une fidé­lité éton­nante.

Quel que soit le type de produc­tion, vous trou­ve­rez toujours compres­seur à votre pied. Mais surtout, évitez de compres­ser à l’ex­cès ! En fait, évitez d’uti­li­ser la compres­sion pour rattra­per une mauvaise prise de son ou pour redon­ner vie à une guitare dont les cordes sont au bout du rouleau. Je n’irais pas aussi loin que ceux qui dénigrent toute forme de compres­sion, mais je recom­mande cepen­dant d’uti­li­ser cet effet de façon mesu­rée pour obte­nir les meilleurs résul­tats.

Origi­nel­le­ment écrit en anglais par Craig Ander­ton et publié sur Harmony Central.

Traduit en français avec leur aimable auto­ri­sa­tion.


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