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Test du Mopho de Dave Smith Instruments - Un p'tit jaune pour la route

Dérivé du Prophet’08, le Mopho embarque une voix de synthèse analogique pure et dure dans un tout petit boîtier qui tient dans la main, à un prix hyper agressif. Voyons ce qu’on peut en faire…

Dérivé du Prophet’08, le Mopho embarque une voix de synthèse analo­gique pure et dure dans un tout petit boîtier qui tient dans la main, à un prix hyper agres­sif. Voyons ce qu’on peut en faire…

À la dispa­ri­tion de Sequen­tial en 1990, Dave Smith se lance dans le soft­ware et met au point Reality pour Seer Systems, le tout premier synthé virtuel. Mais c’est en aidant son compère Roger Linn à mettre au point l’Adre­na­linn qu’il retrouve le goût pour le déve­lop­pe­ment hard­ware. En 2003, l’Evol­ver marque le grand retour de Dave sur le devant de la scène sous la marque DSI. La machine est décli­née en rack, puis en claviers poly et mono­pho­nique. Sous la pres­sion des fans qui lui demandent de ressor­tir un pur analo­gique poly­pho­nique, Dave Smith lance le Prophet’08 en 2007. Il est à son tour décliné en rack. Mais en septembre 2008, bien avant le NAMM, DSI annonce, à la surprise géné­rale, un tout petit module à prix très calculé, une sorte de Prophet’08 mono­pho­nique. Allu­mons-le !

Prise en main

Intérieur

Euh, il est où le bouton on/off ? Ben y’en a pas, grrr… Dans sa carcasse métal­lique oran­gée, le Mopho a le format d’une cassette VHS (que les plus vieux d’entre nous expliquent aux autres !). La façade est recou­verte d’un auto­col­lant imprimé, moins cher et moins classe qu’une séri­gra­phie sur métal. Le LCD bleu flashy 2 × 16 lignes ne passe pas inaperçu. Il permet de visua­li­ser les programmes et les para­mètres en cours d’édi­tion, avec affi­chage des valeurs initiale et modi­fiée. Les commandes sont limi­tées : 6 pous­soirs, un potard de volume et 10 enco­deurs cran­tés sans fin. Le bouton « Push It » permet de déclen­cher le son à une note et une vélo­cité program­mables. Les enco­deurs sont soigneu­se­ment ancrés et semblent plus robustes que sur le Prophet’08 clavier. L’en­co­deur situé en haut à gauche permet de faire défi­ler les programmes. Il est secondé par 2 pous­soirs pour l’édi­tion fine et le défi­le­ment des banques. Sous l’écran, les 4 enco­deurs sont assi­gnés à 4 para­mètres défi­nis dans chaque programme. Pour ce faire, il faut enclen­cher un pous­soir et choi­sir le para­mètre par défi­le­ment, ce qui est très fasti­dieux vu que le Mopho offre une centaine de para­mètres par programme.

La rangée du bas est consti­tuée de 5 enco­deurs affec­tés « dans le dur » à la fréquence des DCO, la coupure du filtre, la réso­nance, l’at­taque et le decay/release de toutes les enve­loppes. Cette ergo­no­mie peu pratique pour l’édi­tion directe prédes­tine le Mopho à la scène, après avoir tout préparé d’avance à la maison. Pour ce faire, on peut se faire aider par un éditeur dédié gratuit (voir enca­dré). La façade arrière regroupe toute la connec­tique : sortie casque, sorties stéréo, entrée audio avec gain ajus­table (bien vu !), Midi In/Out (commu­table en Thru) et borne pour alimen­ta­tion externe, livrée avec transfo et connec­teurs univer­sels. A l’in­té­rieur, on trouve une carte élec­tro­nique très propre et très inté­grée, bapti­sée « Pro One II », montée en compo­sants CMS sous le contrôle d’un micro­pro­ces­seur très micro de 1 cm².

Pur analo­gique

Mopho

Le Mopho est un synthé analo­gique mono­pho­nique renfer­mant 3 banques de 128 programmes. L’unique voix comporte 2 DCO secon­dés par 2 Sub DCO. Les DCO fonc­tionnent sur une plage de 10 octaves, de 8 Hz à 8 kHz. Ils sont ajus­tables par centième de demi-ton. Ils produisent des ondes dent de scie, triangle, mélange dent de scie + triangle et impul­sion à largeur variable (0 à 100%). Ils peuvent être synchro­ni­sés, pour des effets métal­liques typiques comme ici et . Chaque DCO dispose de son propre Glide (porta­mento), à vitesse fixe ou dépen­dante de l’in­ter­valle entre les notes. La prio­rité de note peut égale­ment être para­mé­trée : haute, basse ou dernière note jouée.

Un para­mètre « Slop » permet de simu­ler le désac­cor­dage des véri­tables VCO, comme dans cet exemple simu­lant un SEM 2 voix Oberheim victime de la tempé­ra­ture ambiante. Les Sub DCO produisent une onde carrée à 1 et 2 octaves sous la fonda­men­tale. Cela permet d’en­ri­chir le son, plus ou moins subti­le­ment ou sans pitié pour les gamelles. Un géné­ra­teur de bruit blanc séparé vient enri­chir le tout. On peut égale­ment réinjec­ter le signal sortant du VCA gauche, ce qui permet de créer des satu­ra­tions plus ou moins déjan­tées comme ici. Enfin, on peut égale­ment mixer un signal audio externe. Tout cela est donc bien plus puis­sant qu’une voix de Prophet’08 (voir enca­dré). Tous ces signaux sont mélan­gés avec préci­sions avant d’at­taquer le filtre.

Back

Grosse frappe

Le filtre du Mopho est une véri­table réus­site. Il s’agit d’un filtre passe-bas réso­nant, capable de travailler sur 2 et 4 pôles. Il est très musi­cal, avec des évolu­tions, ouver­tures et ferme­tures typiques. Il peut sonner vintage, comme ici et . La fréquence de coupure agit sur 13 octaves et est réglable par demi-ton (164 pas). Cela permet une réponse beau­coup plus douce que la plupart des analo­giques à mémoire, que seul le Mini­moog Voya­ger surpasse. Le tracking clavier est réglable préci­sé­ment de 0 à un peu plus d’un ton par note. La fréquence du filtre est modu­lable par le DCO1, très utile pour les effets de réso­nance de type cloche, comme dans cet exemple où la FM sur le filtre est intro­duite progres­si­ve­ment.
.
En mode 4 pôles, le filtre peut entrer en auto oscil­la­tion, produi­sant une sinu­soï­dale à la fréquence de coupure. Idéal pour fabriquer des percus­sions analo­giques ou des basses sifflantes. La fréquence de coupure est direc­te­ment modu­lable par une enve­loppe DADSR et la vélo­cité. Ces modu­la­tions sont bipo­laires. En sortie, le signal passe par un VCA stéréo qui dispose de sa propre enve­loppe DADSR modu­lable égale­ment par la vélo­cité. Mais les modu­la­tions ne font que commen­cer…

To bleed or not to bleed ?


Pour luter finan­ciè­re­ment contre l’en­va­his­seur numé­rique, la plupart des derniers analo­giques de la grande époque inté­graient un synthé complet sur la même puce élec­tro­nique (chaîne DCO/VCF/VCA). Des machines hyper stables, mais aussi moins riches du point de vue sonore. Tout comme le Prophet’08, le Mopho reprend cette concep­tion, basée sur un circuit CEM spécia­le­ment conçu pour DSI, baptisé DSI-120. Si la qualité sonore de ce circuit n’est plus à prou­ver, sa concep­tion est telle que les oscil­la­teurs « repissent » un peu à travers le filtre. Lorsque le filtre est fermé et que le VCA est ouvert, on perçoit un faible bruit de fond, comme à la fin de ces 2 exemples sonores à écou­ter jusqu’au bout sur de bonnes enceintes (basse bleed & vocal bleed). Ce phéno­mène, appelé « Filter bleed », peut s’avé­rer gênant dans certaines situa­tions : sons très doux main­te­nus ou infra­basses avec ferme­ture rapide de filtre. Cela dit, dans un mix, bon…

 

Modu­la­tions

Editeur

Les possi­bi­li­tés de modu­la­tions infi­nies sont la signa­ture des produits DSI depuis l’ori­gine. Le Mopho propose pas moins de 3 enve­loppes, 4 LFO et une matrice de modu­la­tions à 4 slots pour faire bouger les sons. Toutes ces modu­la­tions sont numé­riques. À commen­cer par les LFO, avec une plage de fréquences de 0,033 Hz à 8 kHz en continu, puis jusqu’à 261 Hz par pas de demi-tons (niveaux audio). À fréquences élevées, il est certain que les réponses n’ont pas la flui­dité des LFO analo­giques, mais ces LFO permettent en revanche une synchro Midi parfaite, suivant diffé­rents multiples et divi­sions tempo­rels. Les formes d’ondes clas­siques sont de mise : triangle, dent de scie inver­sée, dent de scie, carrée et aléa­toire. Le départ du cycle peut être enclen­ché à chaque nouvelle note, mais il manque un délai, obli­geant de sacri­fier une enve­loppe pour y remé­dier. Les 3 enve­loppes sont de type DADSR. Les temps sont très rapides et permettent de créer des basses claquantes et des sons percus­sifs sans aucun problème.

Enfin, la matrice dispose de 4 slots permet­tant chacun d’af­fec­ter une source à une desti­na­tion, avec modu­la­tion bipo­laire. Parmi les 22 sources, on trouve les LFO, les enve­loppes, les séquences, la vélo­cité, la pres­sion, le numéro de note, les contrô­leurs physiques, le bruit, l’en­ve­loppe de suivi de l’en­trée audio et le niveau de l’en­trée audio. Un signal audio externe peut donc produire des modu­la­tions, un peu à la manière d’un CV / Gate. Parmi les 46 desti­na­tions, on trouve les DCO (fréquences, niveaux, impul­sions, globales ou sépa­rées), les Sub DCO (niveaux sépa­rés), l’en­trée audio (niveau sonore et quan­tité de modu­la­tion), le filtre (coupure, réso­nance), le VCA (niveau, pano­ra­mique), les LFO (fréquences, ampli­tudes globales ou sépa­rées), les enve­loppes (modu­la­tions, attaques, decays, releases globaux ou sépa­rés) et la quan­tité d’ac­tion des 4 slots de la matrice. Cette matrice est complé­tée par l’as­si­gna­tion de chaque contrô­leur physique (molette, after­touch, contrô­leur de souffle, vélo­cité et pédale) à une desti­na­tion via Midi, à choi­sir dans la même liste.

Inté­gra­tion obli­ga­toire


Éditer le Mopho depuis la façade est un véri­table tour de force, étant donnée l’er­go­no­mie de l’OS qui oblige à affec­ter au préa­lable l’un des 100 para­mètres aux 4 prin­ci­paux enco­deurs, plutôt qu’of­frir des pages de menu. Heureu­se­ment que la machine émet et reçoit tous ses para­mètres de synthèse via Midi (CC ou NRPN). Pour contour­ner cette diffi­culté, il existe un éditeur dédié au Mopho, déve­loppé par Sound­To­wer, compa­tible PC (XP/Vista) et Mac (OSX/10.3) en télé­char­ge­ment ici. La version gratuite permet une gestion complète de la machine, para­mètres et séquen­ceur. Pour $40, la version « pro » pousse plus loin la gestion des biblio­thèques sonores, l’au­to­ma­tion du séquen­ceur et la géné­ra­tion de sons par filia­tion (mélange, morphing…). Une version inté­grée VST et AU est d’ores et déjà annon­cée.

 

Arpèges et séquences

Editeur

Mais les modu­la­tions ne s’ar­rêtent pas là, grâce à un arpé­gia­teur et un séquen­ceur. L’ar­pé­gia­teur est rela­ti­ve­ment basique, puisqu’il n’offre qu’un para­mètre de mode : en haut, en bas, alterné ou dans l’ordre des notes jouées. Pas de plage d’oc­tave ni de mode Latch. Il est calé sur le tempo global. Heureu­se­ment, le séquen­ceur est nette­ment plus puis­sant. De « type analo­gique », il permet d’agir sur 4 lignes de 16 pas program­mables. Le déclen­che­ment des séquences peut se faire par enfon­ce­ment de touche, en pas à pas ou par un signal audio externe à partir d’un certain seuil, bien vu !

Chaque ligne est un para­mètre à choi­sir dans la liste des 44 desti­na­tions de la matrice de modu­la­tions. Pour chaque pas de chaque ligne, on règle la valeur (rela­tive ou abso­lue) du para­mètre. Un pas peut être mis sous silence, de même qu’une ligne peut être bouclée à n’im­porte quel pas, ce qui permet des motifs complexes et peu répé­ti­tifs en program­mant des longueurs diffé­rentes pour chaque ligne. Avec ce séquen­ceur, on se pren­drait à croire que le Mopho est multi­tim­bral, comme cette ryth­mique indus, cette synchro destroy ou cette ligne bitim­brale. Incon­tes­ta­ble­ment, c’est un point fort du Mopho et de l’en­semble des produits DSI, qui vient un peu pallier le manque de section effets.

Mopho vs Prophet’08


Le prophet’08 est un synthé poly­pho­nique analo­gique 8 voix couvert de commandes directes. Avec une seule de ses voix et une ergo­no­mie aux anti­podes, le Mopho le surpasse pour­tant dans certains domaines cruciaux pour les bidouilleurs : 2 Sub DCO, un feed­back entre la sortie de VCA et l’en­trée de filtre, sans oublier une entrée audio permet­tant de trai­ter des signaux externes à travers le filtre et de modu­ler des para­mètres sonores. Les 2 machines sont donc tout à fait complé­men­taires et on se prend à rêver d’un Mopho avec une édition plus intui­tive ou repa­ckagé.

 

Conclu­sion

Mopho

Au final, le Mopho est une excel­lente surprise. D’abord, le prix est très étudié. Ensuite, le produit est robuste et facile à trans­por­ter. Enfin, le son est typique­ment analo­gique : chaud, gras, pêchu, instable ou carré­ment crade quand on le souhaite. La pano­plie sonore est vaste, il y a plein de para­mètres à tritu­rer, une entrée audio pour bidouiller des sources externes, des mémoires ; bref le rêve… si ce n’est une ergo­no­mie frus­trante pour ceux qui aiment tout avoir sous la main. C’est sûr, l’édi­teur permet de contour­ner le problème. Cela destine donc le Mopho aux musi­ciens live ou à tous ceux qui souhaitent ajou­ter un grain analo­gique à un envi­ron­ne­ment infor­ma­tique en manque de chaleur. Et ils ne seront pas déçus.

Inter­view de Dave Smith

Audio­fan­zine : DSI est une société en plein déve­lop­pe­ment, avec une hausse des effec­tifs de 33%. Autre­ment dit, vous êtes 4 main­te­nant. Qui fait quoi ?

Dave Smith : chacun fait plusieurs choses. Joanne s’oc­cupe prin­ci­pa­le­ment des ventes, Andrew fait le support client, la main­te­nance du site et un peu de design. Chris est chargé des répa­ra­tions et du déve­lop­pe­ment des nouveaux produits. Pour ma part je travaille sur les futurs desi­gns et un tas de petites choses.

AF : quelle est ta plus grande satis­fac­tion dans ton travail ?

DS : ça a été un grand plai­sir de gagner des récom­penses majeures pour le Prophet’08 : MIPA, TEC Award et j’en passe. Pour une petite boîte de 4 personnes, c’est sympa de devan­cer tous les poids lourds de la synthèse.

AF : des plans pour un Mopho plein de boutons, une version clavier ?

DS : je ne peux rien dire sur les déve­lop­pe­ments en cours. Il y a plein de choses à faire, mais en tant que petite struc­ture, on ne peut pas faire tout ce que nous voudrions.

DSIde gauche à droite : Chris Hector, Andrew McGo­wan, Joanne McGo­wan, Dave Smith, Denise Smith

AF : un mot sur la Linn­Drum II ?

DS : avec Roger Linn, nous y travaillons dur. Nous avons fait un grand nombre de modi­fi­ca­tions récem­ment, donc nous ne montrons pas le design en cours tant que ce ne sera pas sur le point d’abou­tir, un peu plus tard dans l’an­née j’es­père. C’est un énorme projet pour nos deux petites socié­tés, mais nous pensons que le résul­tat en vaudra la peine. Notre approche risque d’en surprendre plus d’un, ce sera un instru­ment très cool.

AF : si tu n’avais aucune contrainte, qu’est-ce que tu aime­rais inven­ter ?

DS : diffi­cile à dire, car je suis un desi­gner très prag­ma­tique qui travaille avec des moyens restreints. J’aime le chal­lenge de créer de nouveaux instru­ments sans passer par des inves­tis­se­ments massifs dans de nouvelles tech­no­lo­gies. Donc je n’ai pas vrai­ment de produit cible dans mes rêves.

AF : quels contacts entre­te­nez-vous, Roger Linn, Don Buchla, Tom Oberheim et toi ?

DS : comme nous habi­tons tous au nord de la Cali­for­nie dans le secteur San Fran­cisco / Berke­ley, nous nous voyons de temps en temps, voilà tout.

AF : que fais-tu en dehors de DSI ?

DS : je fais du vélo, je déguste du vin et je voyage quand j’ai le temps.

AF : tu viens toujours un peu en France ?

DS : en 2003, j’ai couru dans la Paris-Brest-Paris et en 2007, j’ai passé 2 semaines à péda­ler dans l’ar­rière-pays niçois. À l’ave­nir, j’ai­me­rais vrai­ment pouvoir passer plus de temps sur un vélo en France !

  • Grosse pêche sonore
  • Son pur analogique
  • Boucle de Feedback
  • Entrée audio
  • Possibilités de modulation
  • Séquenceur « analogique »
  • Plutôt bien construit
  • Compact et léger
  • Excellent rapport qualité/prix
  • Édition prise de tête
  • Filter bleed
  • Pas d’effets
  • Pas d’interrupteur on/off
  • actualiweb 1 post au compteur
    actualiweb
    Nouvel·le AFfilié·e
    Posté le 06/01/2016 à 14:41:48
    Ouais ouais je confirme, très bon synthé !

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