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Test écrit
Concentré de synthèses
8/10
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Un an après le lancement de l’Oasys, Korg a présenté le Radias au NAMM 2006. Héritant du savoir-faire de la marque en termes de moteurs de synthèse et de vocodeurs, le Radias se veut une alternative beaucoup plus abordable aux synthés modulaires.

Test du Radias de Korg : Concentré de synthèses

(Test initia­le­ment paru en juin 2006)

En 2005, l’Oa­sys a révo­lu­tionné le monde des synthés works­ta­tions en offrant une solu­tion tout inté­grée synthé / séquen­ceur / station audio très haut de gamme. L’OS de la machine n’a cessé de s’amé­lio­rer, non seule­ment pour corri­ger quelques bugs, mais égale­ment pour amélio­rer le moteur sonore. La dernière mise à jour comprend d’ailleurs ni plus ni moins qu’un nouveau moteur de synthèse. On pouvait penser que le construc­teur nippon concen­tre­rait l’es­sen­tiel de ses moyens de recherche et déve­lop­pe­ment sur cette très belle machine et qu’il faudrait attendre des lustres avant de voir naître un nouveau synthé­ti­seur. Mais c’était sans comp­ter sur la volonté de la firme d’oc­cu­per le haut du pavé, avec une offre tout à fait origi­nale. Origi­nale tant sur la forme (une combi­nai­son clavier + module multi posi­tions) que sur le fond (un synthé voco­deur capable de cumu­ler plusieurs types de géné­ra­tion sonore). Au moment où il est dispo­nible pour notre test, le Radias est déjà en maga­sins, parfai­te­ment opéra­tion­nel et dispose d’un mode d’em­ploi en français très bien conçu. C’est suffi­sam­ment rare et appré­ciable pour être souli­gné…

Physique origi­nal

Radias méca 1Dans sa version complète, le Radias est consti­tué d’un clavier 49 touches et d’un petit module. Le clavier (réfé­rence RD-KB) est dyna­mique et mais ne répond pas à la pres­sion. Il est de la même qualité que celui de la série TR et Triton-Le, à savoir touches courtes et non lestées, procu­rant une réponse un peu molle à notre goût. Ce n’est pas le clavier qui équipe les Triton haut de gamme. Il est fixé sur un cadre servant de support pour fixer à son tour le rack. Il dispose de deux molettes plutôt agréables à manier et de flancs en bois exotique, tout comme le Micro­Korg. Le module, que l’on peut se procu­rer seul (Radias Rack), est tout à fait astu­cieux. On peut en effet soit l’uti­li­ser en console à plat, soit le mettre en rack 19 pouces, soit le fixer au cadre du clavier dédié grâce à un support esca­mo­table. Dans ce dernier cas, on peut orien­ter l’angle de travail, comme sur un Mini­moog ou un Wave. Bien vu !
La construc­tion est solide, on est au niveau de la série II des Elec­tribe : carcasse alu brossé du plus bel effet, 63 boutons trans­lu­cides blancs avec rétro éclai­rage rouge, 39 rota­tifs de taille moyenne cerclés d’un éclai­rage orange (sympa pour la visi­bi­lité dans les salles obscures), une bonne soixan­taine de diodes rouges et une grosse molette d’édi­tion joux­tant un LCD rétro éclairé 128 × 64 pixels. Lorsqu’on lance des séquences, le Radias clignote comme un sapin de Noël. Pour parfaire le tout, la prise casque est placée à l’avant, merci. La face arrière offre une connec­tique clas­sique de nos jours : 2 paires de sorties audio, une paire d’en­trées, une entrée micro mini jack avec sélec­teur de sensi­bi­lité (pouvant accueillir le micro casque à conden­sa­teur livré avec le Radias), 2 entrées pédales, une prise USB vers PC, un trio Midi et une broche pour alimen­ta­tion externe 9 volts (dommage sur ce coup là). Seule parti­cu­la­rité, on trouve un connec­teur pour relier le Radias Rack au clavier dédié, ce qui permet de lais­ser libre le trio Midi.

Prise en main

Radias droit oblique 2La prise en main du Radias peut s’avé­rer ardue au départ. Certes, les diffé­rentes sections de synthèse sont logique­ment orga­ni­sées sur la face avant, mais les commandes sont assez diffi­ciles à repé­rer. Les rota­tifs sont de taille moyenne et un peu trop serrés. Certains boutons ont plusieurs fonc­tions, condi­tion­nées par l’état d’autres commandes ou le mode de la machine. De plus, lorsqu’on modi­fie un para­mètre sur la face avant, l’écran reste muet. On aurait aimé que s’af­fichent la valeur actuelle et la valeur stockée. Au lieu de cela, on doit se conten­ter d’une diode qui indique le passage du para­mètre à sa valeur d’ori­gine.
Au-delà de cela, l’OS du Radias a été pensé intel­li­gem­ment, avec plein d’as­tuces et de raccour­cis : la navi­ga­tion dans les menus est plutôt simple, les pages peuvent s’en­chaî­ner ou être appe­lées à l’aide de la rangée infé­rieure de 16 boutons séri­gra­phiés. Lorsqu’une page ne peut être affi­chée dans son inté­gra­lité, un ascen­seur appa­raît. De même, en mode de jeu ou d’édi­tion, on peut sélec­tion­ner un canal dans un programme avec 4 touches prévues à cet effet. Mais il faut une combi­nai­son de touches pour couper une partie et il impos­sible de créer un solo d’une pres­sion de touche. Autre astuce, la rangée de 16 rota­tifs permet d’en­re­gis­trer en temps réel des mouve­ments de para­mètres (séquen­ceur à pas, voir ci-après). Une ergo­no­mie au global plutôt bonne, mais perfec­tible sur certains aspects.

Banque sons

Radias displayLa mémoire du Radias renferme 256 programmes réins­crip­tibles, avec sélec­tion par caté­go­rie. La banque sons d’usine est bour­rée de clichés tape à l’œil, genre boucles d’ef­fets, voix trafiqués, ouver­tures de filtres, percus­sions noyées dans les délais… à la fois spec­ta­cu­laires et injouables. Mais elle recèle quelques perles synthé­tiques du meilleur cru, lais­sant présa­ger la qualité des synthèses embarquées : citons dans le désordre Glide 5thPad, un pad stra­to­sphé­rique hyper planant à la quinte, ultra large bande, façon gros poly­pho­nique Oberheim. Velo­Syn­cLead est une belle synchro d’os­cil­la­teurs avec balayage d’en­ve­loppe décrois­sante. La dyna­mique de frappe et la molette contrôlent la hauteur de l’os­cil­la­teur maître, qui module le cycle de l’os­cil­la­teur esclave. En chan­geant les formes d’ondes carrées en dent de scie, on se rapproche de certaines synchro carac­té­ris­tiques du Prophet-5 (en un peu plus métal­lique ici, toute­fois).
Moga­log Bass est émula­tion très réus­sie d’une basse Moog avec attaque de filtre courte, belle réso­nance et redé­clen­che­ment condi­tion­nel de l’en­ve­loppe. Toujours dans les basses, Dyno­Bass est une basse avec attaque FM très carac­té­ris­tique, assez agres­sive lorsqu’on frappe fort sur le clavier. En fait, elle est géné­rée par distor­sion de phase (VPM, voir ci-après). On trouve aussi quelques pianos élec­triques et orgues du niveau d’un module d’en­trée de gamme, sans plus. Il y a quelques programmes de séquences voco­dées montrant le poten­tiel de la machine (Motion Formant), mais diffi­cile à exploi­ter direc­te­ment. La bonne nouvelle est qu’on pourra se fabriquer ses propres séquences de formants, nous en repar­le­rons. Enfin, le Radias dispose d’une pano­plie de kits de percus­sions dans les styles Pop / Elec­tro. Les sons de percus­sions à base de PCM ne sont pas très convain­cants, mais les kits utili­sant des sons de synthèse sont excel­lents.

Synthèses multiples

Radias leftLe Radias est un synthé­ti­seur pur et dur, utili­sant un moteur à synthèses multiples géné­rées par DSP, capable de déli­vrer 24 voix de poly­pho­nie sur 4 canaux multi­tim­braux. Au niveau le plus élevé, un programme est consti­tué de 4 couches sonores (timbres), 2 entrées audio, 1 voco­deur, 1 arpé­gia­teur, 2 séquen­ceurs à pas et 1 effet maître. Chaque couche sonore dispose d’un EQ et de 2 effets d’in­ser­tion. Il y a donc 9 multief­fets simul­ta­nés au total (voir ci après), on se croi­rait revenu au temps du Trinity ! Les timbres peuvent être empi­lés (avec fenêtre de tessi­ture para­mé­trable, mais pas de fenêtre pour la vélo­cité !) ou joués sur diffé­rents canaux Midi (à noter que le clavier option­nel du RADIAS n’émet que sur un canal). Dans ce cas, on peut filtrer les contrô­leurs physiques, les chan­ge­ments de programme et le porta­mento. Au passage, on peut régler les commandes pour qu’elles n’éditent qu’un timbre déter­miné du programme ou le timbre en cours de sélec­tion, astu­cieux !
Chaque timbre peut fonc­tion­ner en mode poly­pho­nique, mono­pho­nique ou unis­son (2 à 6 voix, avec désac­cord et espa­ce­ment stéréo). Les sons sont géné­rés par 2 oscil­la­teurs et un géné­ra­teur de bruit blanc. Le premier oscil­la­teur est le plus complexe, puisqu’il fait appel à diffé­rents types de synthèse : modé­li­sa­tion analo­gique (4 formes d’ondes : dent de scie, impul­sion, triangle et sinus), synthèse à formants (voir para­graphe Synthèse à Formants), géné­ra­teur de bruit et synthèse PCM (voir para­graphe Synthèse PCM). On peut égale­ment choi­sir une source externe comme géné­ra­teur sonore, afin de la faire passer par les filtres et les effets. Lorsqu’on utilise l’une des 4 ondes à modé­li­sa­tion analo­gique, il est possible de travailler sur le contenu harmo­nique du signal : Wave Modu­la­tion (ce que Korg avait inau­guré sur le 01/W, avec modu­la­tions d’ondes exotiques ou clas­siques, telles que la largeur d’im­pul­sion), Cross Modu­la­tion (inter­ac­tion de 2 oscil­la­teurs façon JP-8 Roland), unis­son (para­mètre diffé­rent de l’unis­son de timbre, puisqu’il s’agit de la géné­ra­tion de 5 oscil­la­teurs déca­lés en hauteur et en phase, le tout sans consom­mer de poly­pho­nie, dans la pure lignée du Super­saw du JP-8000 Roland ou de l’Hy­per­saw du Virus TI), VPM (distor­sion de phase, une synthèse portée au plan commer­cial sur la série CZ / VZ Casio en réponse à la synthèse FM Yamaha à la fin des années 80). Le second oscil­la­teur ne dispose que des 4 formes d’ondes à modé­li­sa­tion analo­gique. Pour donner un peu de chaleur au son, on peut faire fluc­tuer l’ac­cord des oscil­la­teurs. Quelle que soit la synthèse choi­sie pour le premier oscil­la­teur, il est possible de faire inter­agir les 2 oscil­la­teurs : synchro­ni­sa­tion et modu­la­tion en anneau (simul­ta­nées, si besoin est). A ces 2 oscil­la­teurs s’ajoutent un géné­ra­teur de bruit blanc. Oscil­la­teurs et géné­ra­teur de bruit disposent de leur propre poten­tio­mètre de mixage sur la face avant. Une section remarquable !

Synthèse à formants

Radias droit oblique artLa synthèse à formants déve­lop­pée sur le Radias est une version beau­coup plus simple que celle mise au point par Yamaha sur le FS1r. En effet, le Radias n’uti­lise ici que 2 para­mètres sur un seul oscil­la­teur, là où le FS1r utili­sait des algo­rithmes de 8 opéra­teurs à para­mètres multiples. Sur l’os­cil­la­teur à formants de voix du Radias, le premier para­mètre affecte la largeur des formants : physique­ment, cela revient à défor­mer la forme de la bouche ; concrè­te­ment, cela corres­pond à géné­rer diffé­rentes voyelles. Le second para­mètre a pour rôle de déca­ler l’en­semble des formants (vers le haut ou vers le bas) ; physique­ment, cela corres­pond à modi­fier la taille de la bouche ; concrè­te­ment, cela revient à chan­ger la hauteur de tona­lité.
Pour trans­po­ser les choses dans le domaine acous­tique, lorsqu’on modi­fie la hauteur de sa voix, la fonda­men­tale varie avec certaines harmo­niques, alors que d’autres fréquences carac­té­ris­tiques consti­tuant le timbre ne bougent presque pas : ce sont les formants, respon­sables d’une certaine constance dans le timbre, quelle que soit la hauteur de tona­lité. Mais ce qui est vrai ici pour la voix s’ap­plique aux instru­ments acous­tiques, qui possèdent tous leur propre jeu de formants carac­té­ri­sant leur timbre. C’est bien pour cela qu’il faut éviter de trans­po­ser un échan­tillon loin de sa fréquence d’ori­gine lorsqu’on veut repro­duire un instru­ment acous­tique, car on trans­pose toutes les fréquences, y compris les formants – alors qu’ils restent quasi­ment à la même fréquence dans la réali­té…

Synthèse PCM

Radias ensemble joliLe Radias dispose de deux banques de sons PCM assez réduites : d’une part, 64 multié­chan­tillons instru­men­taux et formes d’ondes synthé­tiques et d’autre part, 128 échan­tillons simples de percus­sions. Parmi les multié­chan­tillons, citons 3 pianos élec­triques plutôt pas mal (Fender Stage / Fender Dyno et Wurlit­zer avec 2 couches de dyna­mique), 2 Clavi­net assez moyens, quelques orgues rock (façon B3, mais aussi un son du M1 et un Vox), des basses acous­tiques, des basses élec­triques (pick / slap), un ensemble de cordes et des chœurs synthé­tiques (pas très convain­cants à notre époque).
Cette section n’a pas voca­tion de rempla­cer les sections PCM des grosses works­ta­tions, c’est clair. Les ondes sont bouclées court et les échan­tillons peu nombreux sur la tessi­ture. On s’en servira de base pour mélan­ger des textures sonores avec les autres synthèses, c’est d’ailleurs le but affi­ché. On trouve aussi une impor­tante pano­plie de formes d’ondes numé­riques DWGS, tout droit descen­dues de la série DW6000 / 8000. Là encore, le mélange est inté­res­sant, notam­ment avec les formes d’ondes géné­rées par modé­li­sa­tion analo­gique.

Filtres doubles

Radias gauche obliqueChaque timbre d’un programme dispose de 2 filtres multi­modes réso­nants tota­le­ment indé­pen­dants. Leur routage est complexe : simple, en série, en paral­lèle ou séparé (chaque oscil­la­teur emprunte un filtre). On peut régler la balance entre les filtres. Le premier filtre est variable en continu, capable de passer progres­si­ve­ment entre plusieurs modes : 4 pôles passe-bas, 2 pôles passe-bas, passe haut, passe bande, thru. Le second filtre est « simple­ment » multi­modes 2 pôles : passe-bas, passe-haut, passe-bande et en peigne (mais pas de mode réjec­tion de bande). Ces filtres sont très musi­caux et se comportent bien sur une grande variété de signaux, internes comme externes. En parti­cu­lier le filtre en peigne, utilisé avec un balayage de la fréquence de coupure par un LFO, permet d’ob­te­nir des effets de Phaser très inté­res­sants, idéal pour trai­ter une nappe planante ou carré­ment un mix complet.
Les filtres peuvent entrer en auto oscil­la­tion : lorsqu’on pousse la réso­nance, il y a créa­tion d’une onde proche de la sinu­soïde. Contrai­re­ment à certains synthés à modé­li­sa­tion qui sifflent de façon stri­dente à réso­nance élevée, le Radias maîtrise parfai­te­ment les aigus : pas d’alia­sing, ni a contra­rio de rabo­tage des hautes fréquences souvent utilisé pour éviter ce phéno­mène. Les aigus sont bien là, tirant plei­ne­ment partie de la fréquence de travail à 48 kHz. En sortie, on retrouve une section ampli avec étage de satu­ra­tion et Wave Shaping (11 types de trai­te­ment), permet­tant de salir le son, là encore un héri­tage du Korg 01/W. Un para­mètre « Punch Level » booste les premières milli­se­condes du signal, histoire de lui ajou­ter la pêche comme sur un analo­gique et de faire claquer le son, une idée origi­nel­le­ment déve­lop­pée sur le K2500 Kurz­weil. Bref sur le Radias, le signal est bien traité, de part en part.

Modu­la­tions en tous genres

Radias rear 2La section modu­la­tions du Radias est égale­ment très four­nie. Pour modu­ler chaque timbre, on trouve 3 enve­loppes, 2 LFO et une matrice de modu­la­tions. Les enve­loppes sont de type ADSR, avec diffé­rentes courbes de réponse pour les segments : une linaire, une expo­nen­tielle et 3 loga­rith­miques. Les niveaux sont modu­lables par la vélo­cité de frappe ; les temps sont modu­lables par la vélo­cité et le tracking clavier. Les LFO offrent chacun 4 formes d’ondes élémen­taires (5 ondes diffé­rentes au total sur les 2 LFO) qui se démul­ti­plient en une multi­tude de varia­tions grâce à un para­mètre Shape : diffé­rentes symé­tries pour l’onde dent de scie, diffé­rentes largeurs d’im­pul­sion pour les ondes carrées (bipo­laire ou posi­tive), diffé­rentes courbes pour les segments de l’onde trian­gu­laire, diffé­rentes harmo­niques pour l’onde sinus… bref, c’est très complet. Tout ce beau monde se synchro­nise à l’hor­loge Midi, fort heureu­se­ment.
Termi­nons cet impres­sion­nant arse­nal par une matrice de modu­la­tions à 6 cordons, capable de relier 15 sources à 15 desti­na­tions, le tout avec une inten­sité de modu­la­tion bipo­laire. Parmi les sources, on trouve les 3 géné­ra­teurs d’en­ve­loppes, les 2 LFO, la vitesse de frappe, le Pitch­bend, la molette de modu­la­tion, le tracking clavier, le suivi d’en­ve­loppe généré par le capteur d’en­ve­loppe (analy­seur d’en­ve­loppe d’un signal audio entrant, voir ci après) ainsi que 5 contrô­leurs Midi externes program­mables. Parmi les desti­na­tions, citons la hauteur du son, le niveau des géné­ra­teurs sonores, les fréquences de coupure des 2 filtres, la réso­nance du premier filtre, le volume, le pano­ra­mique ou encore les fréquences des 2 LFO. C’est assez complet !

A chaque timbre ses séquences

Radias méca 2Déci­dé­ment, le son n’a pas fini de bouger… Dans un programme, chaque timbre dispose d’un séquen­ceur de modu­la­tion permet­tant de faire varier 3 para­mètres de synthèse dans le temps. Le prin­cipe de fonc­tion­ne­ment est iden­tique aux séquen­ceurs analo­giques : on sélec­tionne le para­mètre à faire évoluer (parmi les 41 dispo­nibles), puis on programme les valeurs qu’il doit prendre à l’aide de la rangée de 16 rota­tifs. Lorsqu’on tient une note ou un accord, le son évolue dans le temps, soit de façon discrète (par pas), soit de façon conti­nue (lissage entre les pas). On peut égale­ment boucler la séquence, régler le sens de lecture (à l’en­droit, à l’en­vers, alterné avec ou sans répé­ti­tion des pas extrêmes) et le déclen­che­ment à l’en­fon­ce­ment de touche (départ forcé ou non).
Il est même possible d’en­re­gis­trer l’évo­lu­tion d’un para­mètre en temps réel en action­nant direc­te­ment le rota­tif auquel il est assi­gné (Motion), ce qui crée 16 pas éditables avec les 16 rota­tifs. On peut recom­men­cer l’en­semble de ces opéra­tions avec 2 autres para­mètres de synthèse. Lorsque le son est main­tenu, la séquence tourne (avec ou sans synchro­ni­sa­tion Midi) et la rangée infé­rieure de 16 boutons clignote de tous les côtés. Il est alors possible de modi­fier la posi­tion de chaque pas en temps réel pendant des heures… les amou­reux de modu­laires appré­cie­ront !

Arpèges et séquences globales

Radias rack gauche obliqueCe n’est encore pas fini, puisqu’au niveau global du programme, on trouve un arpé­gia­teur assi­gnable à l’un des 4 timbres. Il dispose de 6 motifs ryth­miques : haut, bas, alterné (avec ou sans répé­ti­tion des pas extrêmes), aléa­toire et trig­ger (accords ryth­miques). Chaque motif peut conte­nir jusqu’à 32 pas et on peut fixer le dernier pas. A chaque pas, on peut assi­gner une durée (Gate), un niveau de vélo­cité et un état (activé ou coupé). L’édi­tion peut se fait à l’écran ou à la volée, via la rangée infé­rieure de 16 boutons. L’ar­pège peut fonc­tion­ner sur 4 octaves, dispose d’un para­mètre de Swing et d’une tessi­ture de mise en action.
Enfin, chaque programme dispose d’un step séquen­ceur 2 pistes / 32 pas, que l’on peut assi­gner à 2 timbres ou combi­ner sur un canal pour atteindre 64 pas. Ceci permet de créer des motifs ryth­miques simples sur un ou deux canaux, tout en pilo­tant les autres parties du programme. En plus de la note, les autres para­mètres mémo­ri­sables sont iden­tiques à ceux de l’ar­pé­gia­teur. On peut entrer des accords jusqu’à 8 notes. Il va de soi qu’avec l’en­semble des possi­bi­li­tés de modu­la­tion du Radias (matrice, arpèges, séquences), les sons ne sont pas statiques. Il faut toute­fois veiller à doser tout ce beau monde pour ne pas tomber dans la perte de contrôle complète.

Mode Drum

Radias rack face 2En mode Drum, le Radias permet d’af­fec­ter 16 sons aux touches du clavier pour créer des kits de batte­rie. 32 empla­ce­ments mémoires sont prévus à cet effet. Excel­lente surprise, on n’est pas obligé de se conten­ter de la banque de sons PCM pour créer ses propres kits. En effet, un son peu faire appel à toutes les formes de synthèse, tout comme un programme. On dispose rigou­reu­se­ment des mêmes para­mètres, avec toutes les possi­bi­li­tés de trai­te­ment des oscil­la­teurs, de filtrages sophis­tiqués et de modu­la­tions complexes que cela comprend, sauf le séquen­ceur de modu­la­tion (normal, car son rôle prend tout son sens sur des notes tenues, ce qui n’est pas l’objet des kits de percus­sions). Fabu­leux pour les amou­reux de la synthèse !
Les kits peuvent être affec­tés par les 2 séquen­ceurs à pas et l’ar­pé­gia­teur afin de créer des motifs qui bougent. Avec cela, le Radias se trans­forme en mini Groove Station. En mode programme, on peut affec­ter un kit de batte­rie à l’un des 4 canaux.

9 multief­fets simul­ta­nés

Radias gauche oblique artLa section effets du Radias est on ne peut plus musclée. D’abord, parce que chacune des 4 parties d’un programme possède, comme nous l’avons déjà dit, son propre EQ et ses 2 multief­fets d’in­ser­tion. Ensuite, parce que tout ce beau monde sonne parfai­te­ment bien et est loin d’être un gadget pour signal à revi­ta­li­ser. Les EQ sont de type 2 bandes semi para­mé­triques. Les 2 multief­fets d’in­ser­tion et le multief­fets maître disposent de 128 préré­glages pour ceux qui ne veulent pas partir de zéro. Chacun offre 30 algo­rithmes, mono ou stéréo en entrée et mono ou stéréo en sortie. Les algo­rithmes les plus gour­mands permettent de n’uti­li­ser qu’un seul effet d’in­ser­tion, pour des ques­tions de puis­sance de DSP. Pour les mêmes raisons, certains para­mètres ne sont dispo­nibles que sur les effets maîtres.
Dans la liste d’ef­fets, citons une série de compres­seurs / limi­teurs / Gate stéréo, un filtre stéréo, un wah-wah stéréo, des EQ 2 ou 4 bandes stéréo, des satu­ra­tions (distor­sion, simu­la­teur d’am­pli, préam­pli à lampe), un déci­ma­teur stéréo (réduc­teur de fréquence d’échan­tillon­nage et de réso­lu­tion), des réver­bé­ra­tions, des délais stéréo, des effets de modu­la­tion mono ou stéréo (Chorus / Ensemble / Flan­ger / Phaser / Ring Mod), un Pitch Shif­ter, un effet haut-parleur tour­nant et un simu­la­teur de voyelles. Le nombre de para­mètres dispo­nibles par algo­rithme est impres­sion­nant, souvent proche de la ving­taine. Certains para­mètres d’ef­fets peuvent être assi­gnés aux commandes de la face avant et l’un d’entre eux peut être modulé en temps réel par des sources internes ou Midi. Enfin, les timbres sont envoyés aux sorties physiques ou aux bus internes avec leurs effets d’in­ser­tion. Le multief­fets maître, quant à lui, est global et ne s’ap­plique qu’aux sorties prin­ci­pales. Une excel­lente section.

Un puis­sant voco­deur

Radias displayComme nous l’avons vu, le RADIAS est équi­pée d’en­trées audio pour trai­ter des sources audio externes très variées (niveaux ligne, micro à conden­sa­teur, micro dyna­mique, guita­re…). On va beau­coup plus loin que le simple trai­te­ment par les effets et les filtres. En effet, le Radias est capable d’ana­ly­ser l’en­ve­loppe du signal d’en­trée et de la conver­tir en source de modu­la­tion pour pilo­ter certains para­mètres de synthèse grâce à la matrice de modu­la­tions. Mieux, la machine est dotée d’un puis­sant voco­deur 16 bandes stéréo. On peut utili­ser les entrées audio comme signal porteur (synthèse) et signal modu­la­teur (analyse). Il est même possible de les combi­ner en signal porteur. Le synthé interne peut égale­ment faire office de signal porteur ou modu­la­teur, grâce à un système de bus interne permet­tant un routage tout en souplesse.
Tous les niveaux audio, ainsi que la sensi­bi­lité de la détec­tion (enve­loppe de suivi) sont réglables avec préci­sion, ce qui est la clé pour voco­der un signal de voix avec intel­li­gi­bi­lité. On peut déca­ler les fréquences des filtres d’ana­lyse et de synthèse. On peut même régler le volume des consonnes (signaux sans harmo­niques, donc non voco­dés). Les fréquences de coupure sont modu­lables par les 15 sources de la matrice de modu­la­tion. Leur réso­nance est égale­ment réglable (mais pas modu­lable). Le voco­deur du Radias donne aussi accès aux niveaux des 16 filtres de synthèse. Les réglages se font avec la rangée de 16 rota­tifs (déci­dé­ment beau­coup utili­sée) comme sur un voco­deur EMS3000. De même, la posi­tion stéréo de chaque bande est réglable, en utili­sant les 16 rota­tifs (toujours eux !) ou les pages de menu. Mai là où le Radias enfonce le clou, c’est dans sa capa­cité à enre­gis­trer des séquences parlées ou chan­tées (fonc­tion Formant Motion) pour modu­ler des signaux de synthèse. Au total, on peut captu­rer 7,5 secondes de signaux audio, à répar­tir dans 16 séquences. La mémoire est perma­nente, merci !

Editeur dédié

Radias droit obliqueLe Radias est livré avec un CD-Rom conte­nant les drivers USB pour Windows XP et OSX, ainsi qu’un éditeur dédié. Cet éditeur est plutôt bien conçu. Il reprend tous les modes d’édi­tion de la machine sous forme de pages claires et lisibles, avec appel de pages secon­daires lorsque c’est néces­saire. On entre ainsi par la page programme, de laquelle on peut éditer chaque timbre, chaque effet, chaque séquence, l’ar­pé­gia­teur et le voco­deur. Les séquen­ceurs sont affi­chés sous forme graphique (séquen­ceurs de modu­la­tion) ou sous forme de grille (séquen­ceurs pas à pas).
Idem pour les segments d’en­ve­loppes, y compris la courbe de réponse. Les LFO ont droit à leur fenêtre graphique affi­chant la forme d’onde, y compris sa varia­tion Wave Shape) et sa fréquence. En revanche, on n’a pas droit au moindre graphique repré­sen­tant le profil de filtrage, ce qui aurait été bien venu compte tenu de la sophis­ti­ca­tion des filtres. Le voco­deur dispose de sa propre page d’édi­tion, avec affi­chage graphique des niveaux et des pano­ra­miques des 16 bandes. Lorsqu’on enre­gistre une phrase (Formant Motion) en mode Global, l’édi­teur affiche graphique­ment sa trans­for­mée de Fourier, clas­se… A quand la retouche graphique direc­te­ment à la souris ? Pour termi­ner, signa­lons la présence d’un analy­seur d’évè­ne­ments Midi, toujours utile pour véri­fier son instal­la­tion.

Conclu­sion

Radias ensemble joliAu final, le Radias est une machine très surpre­nante. Passés les programmes d’usine dont la plupart sont diffi­ciles à placer dans un mix et la façade avant dont le nombre de para­mètres au centi­mètre carré peut paraître dérou­tant, on découvre une machine puis­sante et bien conçue. Les diffé­rents moteurs de synthèse permettent une grande variété de timbres. Le passage dans la section filtres sculpte le son de manière inté­res­sante sur le plan musi­cal. La pléthore de modu­la­tions (clas­siques ou matri­cielles) et les nombreux séquen­ceurs sont syno­nymes de sons évolu­tifs. Avec cette variété et ces sons qui bougent, la machine se montre tout aussi à l’aise dans un univers pop / rock que techno. Avec ses nombreuses commandes et sa physio­no­mie astu­cieuse, elle invite à l’ex­pé­ri­men­ta­tion et au jeu live. Le tout en beau­coup plus simple qu’un synthé modu­laire. En somme, une belle réus­site.

8/10
Points forts
  • La physionomie astucieuse
  • La qualité de construction
  • La puissance des différentes synthèses
  • La qualité audio, notamment l’absence d’aliasing
  • La qualité sonore, en particulier les mélanges de textures
  • Les kits de batterie, pouvant faire appel à n’importe quel type de synthèse
  • Les filtres multimodes très perfectionnés
  • Le vocodeur stéréo très puissant
  • La section effets très musclée
  • Les possibilités de modulation
  • Les nombreux séquenceurs et l’arpégiateur
  • L’éditeur fourni pour PC et Mac
  • Le fonctionnement des potentiomètres en mode saut et seuil
  • Les possibilités Midi (synchro, affectation de CC aux commandes, filtres)
  • Les traitements variés de sources audio externes
Points faibles
  • Les programmes d’usine
  • La façade un peu confuse au début
  • Pas d’affichage des paramètres pendant l’édition directe
  • Les multiéchantillons de la section PCM
  • Seulement 16 sons différents par kit de percussions
Auteur de l'article synthwalker Passionné de synthés, concepteur produits et rédacteur presse

J'aime tous les synthés, avec une préférence pour les poly vintage à mémoires, qui m'accompagnent depuis le début des 80's. J'écris depuis 25 ans sur les synthés et j'ai contribué au développement de certains d'entre eux. Plusieurs centaines de mes articles ont été publiés sur Audiofanzine et auparavant dans les magazines PlayRecord, Recording, Keyboards, Musicsound et Musiciens.

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    J'aime tous les synthés, avec une préférence pour les poly vintage à mémoires, qui m'accompagnent depuis le début des 80's. J'écris depuis 25 ans sur les synthés et j'ai contribué au développement de certains d'entre eux. Plusieurs centaines de mes articles ont été publiés sur Audiofanzine et auparavant dans les magazines PlayRecord, Recording, Keyboards, Musicsound et Musiciens.