Tandis que certains éditeurs de séquenceurs revoient leurs tarifs à la hausse (suivez mon regard), Apple prend le contrepied et propose désormais Logic sous la barre des 500 €. Faudrait-il être fou pour dépenser plus ?
Dans le monde de l’audionumérique, le passage d’un numéro à l’autre implique généralement une avancée substantielle du logiciel, voire une refonte globale. Quand on y rajoute une période de transition assez longue, on est en droit d’attendre de sérieux changements, des corrections tous azimuts et de nombreuses réponses aux desiderata des utilisateurs. C’est dire que l’arrivée de Logic 8, trois ans après le lancement de la version 7, est sensée combler nombre d’attentes.
En termes de contenu, la suite Logic Studio a étonné tout le monde. On comprendra que l’espace dédié à ce test ne suffira pas à tout détailler, et se concentrera donc sur Logic 8, sans prétendre en faire un tour exhaustif, mais plutôt en suivant quelques points forts (et faibles) comme la refonte graphique, l’ergonomie et les nouveautés.
Full package
Précisons que j’ai pris le parti d’utiliser Logic en anglais, la localisation prenant parfois des tournures ubuesques : sombre/clair pour Low/High, Respiration pour Breath Control, Tempo Des Claquettes (Tap Tempo), Images par Clique avec Poids (Frame per Click with Eighths), Appliquer des Bémols (Flatten) et autres Bandes de Canaux (Channel Strip). Les références aux fonctions seront donc celles de la version anglaise. Bref.
La première surprise vient du fait, qu’à l’instar de Final Cut, le logiciel est inclus dans une suite sensée répondre à toutes les problématiques d’un domaine, ici l’audio et ses traitements, de l’enregistrement à la gravure. La deuxième est le prix (499 €) qui défie l’entendement…
Pour ce tarif, on a droit à plusieurs applications, une astuce marketing, du contenu et des utilitaires. Côté applications, on dispose de Logic Pro 8 et Soundtrack Pro 2, en provenance de la suite Final Cut, auxquels se rajouttent MainStage, soft dédié au live et qui fera rapidement l’objet d’un dossier tant l’application est réussie. Passé en version 1.5, le logiciel WaveBurner est aussi de la partie tandis que Compressor, un puissant outil d’encodage pour la gestion avancée des formats audio et vidéo. La cerise, c’est Quicktime Pro, qui offre nombre de fonctions supplémentaires. Mais où est SoundDiver ?
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Côté contenu, c’est Byzance avec 39 Go de boucles, samples et autres présets ! On trouvera des infos détaillées ici. Quant à l’astuce marketing evoquée plus haut, elle tient dans les Studio Instruments et Studio Effects. L’intitulé et la présentation de ces derniers peuvent laisser entendre que ce sont des packages séparés, alors qu’il s’agit en fait des plugs instruments et audio inclus d’origine depuis la version 7, plus quelques nouveautés. Apple joue peut-être sur le fait qu’on les retrouve dans MainStage, Soundtrack et WaveBurner…
Outre l’Utilitaire de Boucles qui permet de réaliser ses propres Apple Loops, on dispose aussi d’un logiciel pour fabriquer des réponses d’impulsion (du mono au 7.1, 22 formats…) à destination de la Space Designer, la réverbe à convolution maison. Un MacBook, une carte son multi-entrée, le nombre de micros nécessaire, et hop, par ici les acoustiques de toutes sortes, ou raccords d’ambiances pour la post-prod. Un clic et l’enregistrement est déconvolué, un autre et il est transformé en fichier et préset Space Designer. Chapeau…
Saluons pour finir la présence de manuels en français (1132 pages, rien que pour Logic). En ces temps où la plupart des éditeurs et importateurs se contentent d’un lapidaire .pdf en anglais sur les disques d’installation, c’est appréciable.
Refonte graphique
Si l’on a déjà des Jam Packs, on peut les remplacer par les versions en .caf (Core Audio Format) qui, à qualité audio presque égale (ils sont encodés en Apple Lossless), occupent moins d’espace disque : ainsi, les boucles du Jam Pack Remix Tools pèsent 2,35 Go en .aif et 1 Go en .caf.
Il conviendra alors d’enlever, outre les Jam Packs, les fichiers Receipts les concernant. Ceci si vous n’avez pas effectué d’installation sur plusieurs disques durs. Auquel cas il faudra avoir recours à un soft comme Pacifist, pour extraire les différents fichiers des DVD. Si vous n’avez aucune idée de ce dont je suis en train de parler, ne vous lancez surtout pas dans des installations maison, mais suivez la procédure normale. Dans le doute, on s’abstient… Attention, tous les logiciels n’ouvrent pas le format .caf et/ou l’Apple Lossless. Assurez vous donc de la compatibilité des outils avant d’effacer de l’AIFF.
Les deux versions de Logic cohabitent fort bien, et l’on retrouve sans souci ses présets, fichiers et autres réglages. L’import de projets LP7 n’appelle quant à lui aucun commentaire particulier. Le premier gros changement concerne en revanche l’affichage. Logic restait la dernière application donc le look et les multiples fenêtres détonait par rapport aux chartes graphiques et fonctionnelles d’Apple. Logic 8 ressemble donc enfin à une appli maison. Tout ou presque est maintenant disponible dans une unique fenêtre : gris foncé sur gris clair, couleurs vives, transparences, reflets, c’est très agréable. Les plugs ont aussi bénéficié d’une refonte graphique très réussie.
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La fenêtre principale se divise en 6. En haut, on trouve une barre d’outils que l’on peut personnaliser en rajoutant ou retirant au Set par défaut des accès à des fonctions que l’on affiche par icône, texte ou les deux. En bas la barre de transport, l’écran de contrôle et quelques commandes, que l’on peut personnaliser. On ne peut masquer ces deux barres, mais les réglages de la barre de transport s’effectuent par projet.
Au centre prend place la fenêtre Arrange, qui se scinde en deux (mais seulement dans le sens horizontal, dommage) pour afficher tour à tour le Mixer, le Sample Editor, le Piano Roll, le Score et l’Hyper Editor. Deux moyens d’appeler ces sous-fenêtres : par des Tabs situés en bas à gauche ou en double-cliquant sur un des objets-Régions de l’Arrange : sur un fichier audio, le Sample Editor ; sur un fichier Midi, le Piano Roll ; sur une tranche, le Mixer, etc.
Concernant ce dernier, un ajout appréciable, la possibilité de choisir entre visualiser toutes les tranches disponibles, celles de l’Arrange ou une seule avec celles qui en dépendent (Aux, sorties, Master). Dans ce dernier cas, c’est un moyen très rapide de vérifier les réglages et envois d’une piste donnée, sans avoir à scroller d’un bout à l’autre du Mixer.
Navigation à toute allure
À gauche de la fenêtre Arrange, l’Inspector (que l’on peut cacher) qui affiche deux tranches en permanence : piste et Master ou l’un des Aux utilisés par cette tranche (retour d’effet, sorties multiples). À droite se positionnent les navigateurs, affichés par les boutons Lists ou Media. Chaque navigateur dispose d’un système d’onglet : ainsi Lists donne successivement accès aux événements (Midi, régions…), marqueurs, tempo et signature. Chaque onglet dispose de ses menus déroulants avec fonctions propres. Enfin, saluons l’arrivée du regroupement intelligent des menus : fini la même fonction répétée dans 15 fenêtres différentes ! Maintenant, ce dont on a besoin est sous les doigts, dans la “fenêtre” courante. L’onglet Event dispose d’un filtre d’affichage, qui bascule en mode Create (rajout de notes, program changes, meta events, etc.), gain de temps encore.
Côté Media, on dispose d’un vrai chutier (Bin), avec visualisation complète des fichiers et de leurs éditions. C’est en donc fini de l’austère Audio Window. Loops est le navigateur pour les Apple Loops, qui sont normalement scannés à l’installation. Sinon un simple glissé-déposé des dossiers sur le navigateur les intégrera dans la base de données. Browser est un classique navigateur permettant de chercher dans tous les espaces de stockage de l’ordinateur, qui s’appuie certainement sur Spotlight.
Mais l’onglet le plus intéressant et le plus réussi est Library. On sait que Logic propose des Channel Strip Settings, c’est-à-dire des réglages de tranche complets, audio, instruments, bus et master. C’est là une méthode de travail très rapide, d’autant qu’on peut préparer sa propre bibliothèque de présets et l’appeler par Program Change.
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Et là, Apple a fait très fort : si l’on sélectionne une tranche, un Bus, un Master dans la fenêtre Arrange ou le Mixer, les présets disponibles s’affichent dans le navigateur. Un clic sur l’un, et il se charge à une vitesse hallucinante. Si l’on regarde la tranche, on verra que le slot Settings a pris le nom du préset et qu’il est entouré d’un halo blanc. Maintenant, si l’on clique sur l’un des slots occupés (inserts, sends, I/O, etc.), le halo se positionne dessus. Et le navigateur affiche aussitôt les dossiers/présets du plug chargé dans le slot, que ce soit un instrument ou un effet, dont on n’a plus besoin d’afficher l’interface !
Il n’est pas difficile d’imaginer la vitesse de travail induite, d’autant que les flèches du clavier permettent de naviguer dans les dossiers et de charger directement les présets, tandis que les combinaisons molette et touches clavier remplissent toutes les fonctions d’ascenseur, de zoom, de déplacement. Même si il y a quelques bugs : la combinaison molette+alt, par exemple, dézoomera toutes les pistes, sauf celles qui sont au zoom maximal (Individual Track Zoom: 50).
Simplicité
Rassurons tout de suite les inconditionnels de l’Environment (dont je suis) : il est encore là, avec toute sa puissance. Mais l’amateur ou premier utilisateur de Logic n’aura plus à y faire appel. En effet, Apple a grandement simplifié la prise en main du séquenceur : d’abord Logic scanne les périphériques, puis lance différents assistants, dont un qui propose des Templates, projets préprogrammés sensés répondre à des besoins aussi variés que le Mastering, l’orchestration, la gestion du TDM, l’enregistrement multipiste, etc.Quand on ouvre un projet vierge, Logic propose en outre une fenêtre à la Pro Tools (New Tracks) : on y spécifie le nombre de pistes, leur type (audio, instrument, Midi externe), leur format (mono, stéréo), les entrées/sorties (avec incrémentation automatique ou non), l’activation du monitoring direct et l’armement de l’enregistrement (pratique si l’on doit lancer un enregistrement multipiste rapidement). Mieux, le fait de glisser un fichier audio dans la fenêtre Arrange crée une piste Audio supplémentaire. Idem avec un fichier Midi qui crée lui une piste AudioInstrument, avec le Grand Piano par défaut. Si c’est un Apple Loops, il sera enfin joué comme un fichier audio si on le glisse sur une piste Audio, et il chargera l’instrument Midi correspondant, si on le glisse sur une piste Instrument. Bien évidemment, les tranches respectives apparaissent aussitôt dans le Mixer.
Deux boutons ‘+’ dans la fenêtre Arrange permettent aussi de rajouter des pistes, l’un en appelant la fenêtre New Tracks, l’autre en copiant la piste sélectionnée dans l’Arrange. Plus d’objets à créer, plus de câbles à tirer, tout est simplifié, ce qui offre un gain de temps considérable, même pour l’utilisateur confirmé. À l’attention de ce dernier, tout reste modifiable. On peut très bien réassigner les objets, en créer dans l’environnement, construire et importer des patches et protocoles de commande, filtrage MIDI, synthèse… Rien n’a changé de ce côté-là.
Du côté ergonomie, je dois avouer qu’après avoir douté du passage en mode ‘monofenêtre’, j’ai complètement changé d’avis. Ayant depuis toujours apprécié les Screensets pour la souplesse et la rapidité apportées, j’avais basé tout mon workflow sur leur utilisation. Or, je dois convenir que c’est encore plus rapide avec une seule fenêtre… En fait, la grande réussite sur ces points de simplicité et d’ergonomie est d’avoir proposé cette nouvelle interface, tout en gardant la puissance de l’environnement, des Screensets, et autres capacités de Logic, disponibles si nécessaire, mais plus indispensables. Regrettons juste que lesdits Screensets ne gardent plus en mémoire les pages de Folders éclatés : très ennuyeux quand on a l’habitude de travailler l’orchestration par pupitre, de réunir les groupes (chœurs, batterie), etc.
Full surround
Les nouveautés ne se limitent pas à ce renouvellement cosmétique et ergonomique. Ainsi, le circuit de l’audio est désormais réellement surround d’un bout à l’autre. Send, Bus, plugs, master, automation, Bounce, affichage des vumètres : tout a été repensé pour lire et produire de l’audio multicanal, de la quadriphonie au 7.1 (SDDS), avec gravure directe sur DVD-Audio ou export pour conversion en AC-3, grâce à Compressor. Les plugs ont ainsi été revus pour travailler en Surround, que ce soit en True Surround (Space Designer, Delay Designer…) ou en multimono, en proposant tous les raffinements nécessaires (gestion du LFE, prémix interne, retard, etc.). On dispose ainsi d’un compresseur et d’outils de Metering très complets. Enfin, en ce qui concerne les synthés, l’es2 et Sculpture offrent un réglage basique d’angle et de “balance”. Je ne m’attarderai pas sur cette partie de Logic, ne disposant pas d’un système multicanal, même si Logic intègre un plug Down Mixer, qui permet de réduire un mix 5.1 vers de la quadriphonie, du LCRS ou de la simple stéréo. Précisons aussi que Logic fournit un nouveau mode Binaural, qui présente un beau Panner graphique, avec application sur deux ou trois dimensions. Bon. Si l’on aime faire joujou avec la phase…
Plus intéressant, le Delay Designer, qui permet de créer des lignes de délai très sophistiquées, puisque chaque retard (jusqu’à 26 !) peut être traité individuellement, et ce au niveau du pan (avec inversion), du volume (avec Mute), de la hauteur (par ton et cents), de la fréquence et de la résonance d’un filtre multimode (HP, LP séparés ou simultanés, donc BP) et multipente (6 et 12 dB). Evidemment, on dispose également des habituelles fonctions Tap, de la quantification, de la synchro, d’un réglage du Feedback, de deux curseurs Wet et Dry (et non une balance) : bref tout est là pour produire des délais modulés hallucinants, voire des mélodies.
Question ergonomie, tout cela est bien conçu, puisque on peut zoomer, sélectionner et éditer plusieurs Taps avec des valeurs communes, dessiner une courbe à la souris (en maintenant Pomme appuyé), etc. Et quand on sait que tout peut être automatisé… Voilà un plug largement à la hauteur de ce qui se fait chez SoundToys, PSP et autres éditeurs.
Mega Ultrabeat
Ceux qui sont rentrés dans les profondeurs d’Ultrabeat savent que c’est un outil puissant, qui couvre tous les aspects de la production de rythmiques de batterie électronique, et dans une moindre mesure acoustique, avec un mapping compatible GM. Logic 8 en offre une version encore plus puissante. D’abord la production des sons : 2 oscillateurs avec forme d’ondes variable (en continu ou non), FM, (osc 2 vers osc 1), lecture de samples ou modélisation (osc 2 seulement) un générateur de bruit et, grosse nouveauté, un sidechain (sur l’osc 1 seulement, idéal pour transformer une ligne de basse en grosse caisse). Le tout passe avec plusieurs options de routing dans un filtre multimode (LP, HP, BP, BR) multipente (2e et 4e ordre), et/ou un générateur de distorsion plus un Ring Mod. On pourra encore moduler tout cela via deux LFO et quatre enveloppes, directement ou par l’intermédiaire de quatre contrôleurs Midi librement assignables, avant de passer par un EQ deux bandes et un Panner modulé. On peut répartir les sons en 8 groupes, pour créer les notes qui se coupent les unes les autres (hihat ouvert et fermé, etc.).
Notez que l’essentiel du processus d’édition est graphique, notamment celui des enveloppes. Puissant, non ? D’autant que cela se fait par voix. Et comme Ultrabeat en offre 24, on tient assurément là un des plus puissants synthés rythmiques qui soit. La 25è voix est en fait un synthé polyphonique 3 octaves reprenant toutes les caractéristiques de synthèse…
Grande nouvelle, on peut maintenant importer des programmes exs24, ce qui contourne la gestion du format de samples propriétaire (.ubs). Un simple drag’n’drop du fichier .exs sur la partie Mixer et le tour est joué, avec respect du mapping (dans la limite de 24 zones). Il m’a été en revanche impossible d’obtenir la moindre info que le nombre de layers. Les kits importés ne m’ont pas paru moins riches, sauf pour certains très détaillés, ceci dit sous toutes réserves.
La précédente version offrait aussi un Step Sequencer sur 32 pas maxi, quantifiable, avec sauvegarde de pattern, déclenchement d’icelle par note Midi et drag’n’drop vers l’Arrange. Apple l’a considérablement enrichi, d’abord en rajoutant une vision d’ensemble façon piano roll qui permet aussi de rentrer les données, avec quelques subtilités accessibles par menu contextuel. Plus intéressante est la mise à disposition du Sequencer pour les paramètres de synthèse (mode Step sur le bouton Edit) : on peut ainsi automatiser toutes les fonctions (à quelques exceptions, de type changement de samples) sur la grille du séquenceur, et faire un drag’n’drop du fichier Midi qui gardera toutes ces infos. On pourra, par exemple, lui appliquer les fonctions sophistiquées de Quantize de Logic. Bref, si l’on y ajoute de nombreux kits et sons d’origine, des sorties multiples à gogo pour post-traitement (8 stéréo, 8 mono), c’est encore une réussite. D’autant que comme tous les plugs de Logic, il est particulièrement bien optimisé, ne consommant que très peu de ressources CPU. En termes de qualité et possibilités, Ultrabeat pourrait aisément se vendre à la moitié du prix de la suite entière.
Un petit mot sur l’exs24 enfin : son éditeur a été entièrement revu, avec drag’n’drop et autres finesses d’ergonomie. Mais je recommande d’utiliser Keymap à la place, l’éditeur développé par Redmatica. D’abord parce que c’est un monstre de puissance. Et puis aussi pour ne plus voir ce type de message lors de l’import d’un sample (voir capture), bientôt 9 ans après la sortie de Mac OS X et la gestion des 255 caractères… Mais apprécions le fait que l’exs24 bénéficie maintenant de son propre adressage mémoire, ce qui permet de dépasser la limite précédente des 4 Go de Ram partagés avec Logic.
Manipulations I
L’édition et la manipulation de l’audio dans Logic sont certainement les points qui ont le plus fait couler d’encre. Cet article n’est pas l’endroit pour rappeler les guerres picrocholines qui ont opposé les défenseurs de l’un ou l’autre logiciel, les fora sont faits pour ça.Quelques nouveautés sont apparues concernant la gestion de l’audio, dont certaines de poids. Commençons par la compression/expansion temporelle audio dans la fenêtre Arrange, par drag’n’drop de la région en maintenant Alt, à la manière de ce qui existait déjà pour le Midi. Ce n’est pas parfait, encore trop d’étapes à valider et d’attente de processing, cela n’a pas la souplesse de Live (en attendant ce que prépare Pro Tools 7.4). Les algorithmes sont plutôt efficaces, mais l’on gagnera à utiliser Radius (un plug/extension qui s’insère dans la Time Machine) ou un plug dédié comme Melodyne (qui permet de faire beaucoup d’autres choses). Autre solution, on transforme le fichier en Apple Loops grâce à l’Utilitaire fourni, ce qui se fait rapidement, car même si l’on n’a pas toute la puissance de ReCycle!, le système de reconnaissance de transitoires est assez précis. On peut aussi procéder à un calage très fin des marqueurs pour un résultat optimal. Ensuite on peut ralentir/accélérer dans une plage de ± 30%, et transposer de ± une tierce sans trop d’artefacts.
Toujours dans la fenêtre Arrange, l’édition est enfin au sample près. Les manipulations sont grandement facilitées par les menus contextuels et icônes de la barre supérieure ; autre aide appréciable, on peut définir un outil différent pour la souris, que l’on appelle en cliquant sur Pomme. Les outils se choisissent maintenant dans les deux menus déroulants situés à droite de Snap (divers choix de calage lors de déplacement) et Drag (recouvrement ou non des Regions existantes, crossfade automatique, saut à la Region la plus proche, etc.).
Toutes les fonctions nécessaires sont présentes, de la répétition de Regions à l’effacement d’une section complète (avec recalage, y compris automation et changement de tempo), en se basant sur les Locators, la tête de lecture, les Markers, etc. De gros progrès ont été réalisés concernant l’automation, qui ne présente plus de points bizarres ou différents des originaux lorsqu’on coupe, copie, insère une Region. Logic place automatiquement des points au début et à la fin d’une Region quand elle n’en comporte pas d’origine. Une stabilité et une précision que l’on attendait depuis… quelques temps.
Si l’on veut une édition plus pointue d’un fichier audio, on l’ouvre dans le Sample Editor, dans lequel on trouvera les fonctions habituelles de traitement audio (normalisation, inversion, recherche de silence, coupes, etc.). C’est là aussi que l’on retrouve la Factory, incluant les fonctions de time stretch et de transposition. Et surtout les très efficaces Audio To Midi Groove Template, Groove Machine et Quantize Engine. Le souci de l’ergonomie se manifeste dans un petit détail tout simple : quand on veut monitorer le fichier dans l’éditeur, le signal est automatiquement dirigé vers la tranche 256, dédiée à la préécoute. Ce qui évite les aléas des versions précédentes (piste courante mutée, effets non bypassés, etc.).
Manipulations II
Mais on peut aussi ouvrir un fichier dans Soundtrack, en le définissant comme éditeur externe dans les Préférences, que l’on appellera d’un raccourci clavier (ST garde en mémoire le screenset que l’on a défini). Et là, on bénéficie d’à peu près les mêmes outils que dans Logic, mais aussi et enfin de l’application destructive d’effets (tous les AudioUnits du système, plus quelques plugs propriétaires). On peut aussi appliquer des Scripts, puisque Soundtrack les accepte sans aucun problème, allant jusqu’à les sauvegarder directement de son interface (à quand ces possibilités dans Logic ?). Ensuite on sauvegarde, et si l’on choisit d’écraser le précédent fichier, la mise à jour se fait automatiquement dans Logic. Bravo. Autre avantage non négligeable : même si l’on a sauvé le fichier après édition, tant que Soundtrack est ouvert, on peut annuler toutes les modifications et récupérer le fichier.On se rend vite compte du bénéfice qu’il y a à remplacer l’éditeur intégré par Soundtrack (sauf quand on a besoin des fonctions de la Factory). Ce qui amène cette réflexion : Apple n’a visiblement pas trop retravaillé cette partie de Logic, tout simplement parce que Soundtrack existait déjà et pouvait remplir les fonctions attendues par les utilisateurs. Comme l’intégration est réussie, on peut l’accepter. D’autant que la navigation d’une application à l’autre est rapide, il suffit de laisser Soundtrack en fond et de l’appeler au moment voulu.
Bien sûr, certains auraient préféré une seule application à la Pro Tools. Mais après avoir pratiqué intensément depuis l’arrivée de la version 8, la décision d’Apple semble pertinente, malgré le côté un peu forcé. Donc autant évoluer en même temps que les outils… Quelques problèmes sont aussi à noter, concernant les raccourcis clavier d’abord, puisqu’il est impossible de les paramétrer dans Soundtrack. On se retrouve donc à jongler entre deux jeux de raccourcis, même sur un simple zoom ou des appels de transport, dommage. Ensuite la non-reconnaissance des fichiers XML créés par Logic, alors que Final Cut les accepte…
Une dernière chose : si l’on fait lire en opposition de phase un bounce de LP7 et un de LP8, ils s’annulent. Les seules exceptions sont quand on utilise des lois de Pan sur LP8 différentes de celle de LP7, ou certains plugs. Donc, a priori, LP8, à utilisation strictement égale, ne devrait pas sonner mieux que son prédécesseur.
Comping sauvage
Passons à un autre sujet de fâcherie : la PDC (Plug-in Delay Compensation). Sa gestion dans Logic ne brille pas par son effacité. Il faut activer cette compensation sur All pour mixer, la désactiver si on veut rajouter une partie MIDI, la réactiver pour vérifier, et ainsi de suite. Il faut aussi faire le ratio entre la puissance apportée par le déport des calculs sur des DSP externes, et la surcharge des processeurs internes qui travaillent à compenser la latence. Hors bécane puissante, il vaut donc mieux éviter.La version 8 ne montre pas de changements dans la conception de cette PDC, mais offre un utile mode Low Latency : on paramètre la latence maximale que l’on veut accepter, et quand on active le mode (dans la barre de transport ou par raccourci clavier), Logic désactive momentanément tous les plugs qui ont une latence supérieure à celle paramétrée. C’est bien vu, ça marche très bien, mais ce n’est pas une PDC complète et transparente ! Un conseil, surveillez la sortie générale, car ce sont d’abord les réverbes et surtout les processeurs de dynamique (compresseurs et limiteurs) qui sont bypassés.
Avant de conclure, attardons nous sur les Takes et Comping. Que sont-ce ? Le principe des Takes n’est pas une nouveauté ou une révolution, mais c’est bougrement réussi dans Logic. Lorsqu’on enregistre une source audio (ou plusieurs simultanément) en boucle, Logic “coupe” à chaque retour au début le fichier, créant une “prise” virtuelle (Take). Un triangle sur la gauche de la Region bascule sur l’affichage de toutes ces prises, dont la dernière est active. Un autre triangle à droite ouvre un menu affichant le nom des Takes et diverses fonctions. Si l’on scrolle sur le nom de l’une des pistes, elle prend le rôle de la piste active, très pratique pour réécouter diverses interprétations.
Jusque-là, rien de neuf. La grande idée, c’est ce qu’Apple appelle le Comping : il suffit de sélectionner les parties que l’on souhaite garder sur les différentes « prises », et Logic ne lira que ces parties. On peut, à partir d’un seul enregistrement, créer autant de Comping que désiré. Puis, une fois le choix fait, on choisit Flatten dans le menu déroulant, et Logic compile la piste tout seul, en appliquant des crossfades. Flatten And Merge produit un bounce de la piste, et le réimporte en lieu et place de la Take d’origine, sans la détruire. Plus rapide et efficace, ça va être difficile.
Et pour le MIDI ? Pareil, il suffit de choisir Create Take Folders dans Settings>Recording. Un seul mot : bravo.
Bilan, une, première
Il reste encore nombre de domaines non évoqués, la vidéo, les Nodes, le ReWire, le partage via Bonjour ou .Mac, l’intégration des interfaces Apogee (attention au bug avec les surfaces de contrôle, Apple a publié un workaround), la gestion du TDM (possible sur Mac PPC à partir de PT 7.1.1, mais il faut attendre la 7.4 pour les Mac Intel), des imports-exports OMF, XML, etc., l’inconnue Leopard (les interfaces Apogee Ensemble non compatibles !), mais la place manque.
Cette version était très attendue, objet de nombreuses spéculations, telle l’idée d’un “Pro Tools killer”, relevant autant d’attentes légitimes que de visées utopiques. Au final, qu’avons-nous entre les mains ? Une suite complète, stable et performante, des applications et utilitaires professionnels et un contenu audio de très bonne qualité, qui vaut largement certaines banques de sons fournies avec des instruments virtuels concurrents. Et un prix défiant toute concurrence (voir l’annonce du tarif de Nuendo 4…).
Les solutions sont nombreuses : la paire Logic 8-Soundtrack est d’une grande puissance, et répond à tout ce qu’on attend d’un DAW. Cela implique certes un changement d’habitude de travail pour les utilisateurs de longue date. Mais il faut savoir évoluer avec ses outils. Et cela permet aussi au nouveau venu d’être directement aux commandes d’une solution rapide et extrêmement puissante. Le cas Mainstage (un dossier est à suivre) : on peut imaginer prendre un MacMini, une carte FireWire et se constituer un hébergeur d’instruments virtuels à la Receptor, pour une fraction du prix et sans les problèmes de compatibilité et de stabilité. Je ne m’avance pas trop en disant que l’on va certainement voir des configurations de ce type sur scène très rapidement.
Concernant Logic : l’ergonomie est particulièrement réussie, et c’est pourtant un ardent défenseur des Screensets qui le dit. L’interface graphique est reposante, claire, le nouveau look des plug-ins est très réussi, on visualise parfaitement ce qui se passe (la configuration idéale : deux écrans, un pour la fenêtre principale, l’autre pour les plugs ou des fenêtres flottantes).
Il y a bien sûr un prix à payer pour tout ça : mon bi-pro G5 est souvent à la traîne dans la gestion de l’affichage, du rafraîchissement, des manipulations (redimension, vumètres, ouverture d’un onglet…) sur des projets qui ne posaient aucun problème sous Logic 7. À noter cependant que d’autres G5 dotés de cartes plus puissantes s’en tirent sans problèmes. Mais, même si l’interface graphique a son importance dans le confort de travail, on dirait que les développeurs oublient parfois que la finalité d’un DAW, c’est de traiter du son, ce qui n’implique pas d’avoir une carte graphique digne des meilleurs machines de traitement 3D ou de jeux.
Juste pour comparaison : lors d’un benchmark, 70 pistes audio mono et 144 plugs (moitié Masterverb et moitié Trackplug) tournaient sur le G5 de test, sous OS 10.3, avec seulement 2,5 Go de Ram, dans Logic 6.4.2 avec un buffer de 512. Sous OS 10.4.10, avec 4 Go de Ram, dans Logic 7.2.3, si les commandes de transport prennent du temps, l’affichage, les zooms le défilement de la SPL et les mouvements d’ascenseur sont fluides, on peut ouvrir, déplacer des fenêtres, les rétrécir/agrandir sans aucun problème. Il a fallu rajouter 14 plugs avant ralentissement graphique (soit 158 plugs en tout !).
Et sous Logic 8, justement ? Au niveau CPU et Disk I/O, il y a un tout petit mieux. En revanche question graphisme, c’est assez catastrophique : si l’on redimensionne à la souris la fenêtre Arrange à partir de l’angle inférieur droit (quand on y arrive), on passe par des fenêtres blanches, ouvrir le Mixer provoque parfois des disparitions de graphismes (la moitié inférieure de toutes les tranches), les affichages de vumètres sont hachés, ouvrir/fermer Inspector, navigateurs ou un Screenset (même simple) prend 2 à 3 secondes, etc.
Bilan, une, dernière
Un mot sur WaveBurner : le passage en 1.5 améliore la stabilité du logiciel, même si certains utilisateurs se plaignent. C’est un puissant outil de gravure au standard Red Book, gérant les AU (Logic et tierce partie), qui s’est plutôt bien comporté, aussi bien avec l’audio interne qu’avec la RME, sans problèmes avec les plugs sur carte DSP. Il manque juste de quelques fonctions comme la possibilité de réaliser un export DDP, ou SDII régionalisé. Il présente aussi un bug ennuyeux : quand on quitte le soft, le tiroir du graveur s’ouvre…
Les souhaits pour le prochain update : une amélioration des exigences graphiques sur PPC (solution dans Leopard ?), une gestion complète et simplifiée de la latence des cartes DSP, la possibilité d’inclure des Scripts, un équivalent de Beat Detective, la possibilité de corriger les problèmes de Screensets, mais aussi un stretch automatique et transparent, le support des fichiers de noms longs (!), un Freeze pratique et permettant de geler les sorties multiples des instruments, le processing d’effets destructif dans l’Arrange (et par Region) et le Sample Editor, un Score mis à jour et quelques autres “bricoles”… À noter que si un certain nombre d’utilisateurs se plaignent de messages Core Audio Overload récurrents, l’étude de leurs configurations ne permet pas de discerner un schéma type. Il semblerait qu’il y ait une piste du côté du buffer des plugs… J’avoue en tout cas y échapper, ayant depuis longtemps pour principe de freezer presque systématiquement les instruments virtuels autres que ceux de Logic, à l’exception de quelques synthés légers, et ne pas mixer un projet de 50 pistes et leurs plugs respectifs avec un buffer de 64 samples.
Bref, on trouve les habituelles lacunes de lancement de version, mais dans une proportion plutôt raisonnable. D’autant qu’on apprécie la stabilité, exemplaire pour une mouture 8.0 : on a tous en mémoire la désastreuse 7.0, qui fut la pire version de Logic… On peut considérer qu’Apple a effectué une vaste mise à plat de son logiciel, et que c’est la plate-forme de départ vers de nombreuses améliorations, comme le pilotage par écran tactile, vu le nombre de brevets qu’a déposé Gerhard Lengeling, créateur de Logic ? Une nouvelle gamme d’écrans devraient voir le jour rapidement. Question mise à jour, on espère juste ne pas à avoir à attendre encore trois ans pour cela.
Mais on peut aussi considérer que l’on a là une des solutions natives les mieux conçues et intégrées. Si l’on accepte les quelques défauts de jeunesse et lacunes pourtant anciennes, l’ensemble Logic Studio et portable est d’abord une opportunité unique de se trimbaler avec un studio virtuel presque complet. Et sans y rajouter de carte son pour faire de la prise, on dispose d’une solution dédiée à la composition avec tout ce qu’il faut en termes d’instruments virtuels et plugs (attention quand même aux sollicitations du disque dur). Autre solution, Logic Studio et un MacPro 4 ou 8 cœurs : là, on se retrouve en possession d’une station de travail surpuissante (qui n’a pas vu les jauges CPU à peine frémir sur un projet surchargé ne peut comprendre), sans réel équivalent natif. Et peut-être sans réel équivalent DSP, l’avenir le dira. Rapidement ? Les rumeurs de MacPro encore plus puissants sont persistantes…
[+] Suite “logiciels + contenu” complète
[+] Intégration et interaction des applications et utilitaires
[+] Prix
[+] Refonte graphique, d’où ergonomie imparable
[+] Stabilité
[+] Takes et Comping audio et Midi
[+] Full Surround
[+] Refonte de l’Ultrabeat et de l’éditeur exs24
[+] Adressage mémoire indépendant pour l’exs24
[+] Mode Low Latency
[+] Les Nodes ne sont plus limités aux seuls plugs Logic
[+] Optimisation des plugs et instruments
[+] Gestion des instruments Midi externes
[+] Hiérarchie des menus
[+] Généralisation des menus contextuels
[+] Solution nomade sans rivale
[+] Surpuissant quand utilisé avec un MacPro 4 ou 8 cœurs
[-] Nécessite une carte graphique puissante sur PPC
[-] Stretch audio loin derrière la concurrence
[-] Pas de process d’effets destructif
[-] PDC encore perfectible
[-] Freeze toujours aussi peu pratique
[-] Screensets moins performants
[-] Quelques pertes de fonctionnalités
[-] Raccourcis clavier différents entre LP8 et STP
[-] Fichiers XML Logic non reconnu par STP
[-] Quelques bugs graphiques et de gestion de la souris
[-] Pas de Scripts
[-] Pas d’import des fichiers 32 bits…
[-] Une suite autour de Logic sans SoundDiver ?
[-] Le “coup du tiroir” de WaveBurner
[-] quid du Core Audio Overload ?
[-] Avenir sur PPC ?