Chacune de ces trois approches est efficace lorsqu'elle est mise en place correctement, quoique la structure en line array soit actuellement la plus utilisée. Voyons pourquoi et anticipons sur l'avenir !
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Zone, somme et ligne : chacune de ces trois approches est efficace lorsqu’elle est mise en place correctement, quoique la structure en line array soit actuellement la plus utilisée. Voyons pourquoi et anticipons sur l’avenir !
On me pose beaucoup de questions sur le son.
Dans la plupart des cas, ces questions nécessitent des éclaircissements et des explications à propos des fonctions, des propriétés et des concepts ; les autres questions concernent mon opinion sur les méthodes ou les tendances actuelles.
Il y a quelque temps, on m’a posé des questions qui m’ont amené à réfléchir en profondeur.
Parmi ces questions, certaines revenaient régulièrement, notamment : Pourquoi les systèmes line array sont-ils si populaires ? Sont-ils le fruit d’un effet de mode ou vont-ils perdurer ? Quelle solution s’imposera à l’avenir ?
Le fait est que les systèmes line array ont été adoptés presque unanimement par les professionnels de la sonorisation. Quasiment tous les fabricants proposent différents produits basés sur ce concept.
Mais quelles sont les raisons de la domination sans partage des structures en line array sur les autres systèmes ? S’agit-il d’une tendance sans fondement ou la configuration verticale possède-t-elle des avantages intrinsèques réels par rapport aux autres types de système ?
En observant et en analysant les choses, j’ai découvert que ces structures en ligne possèdent des atouts tangibles, et surtout qu’elles apportent un avantage réel qui est peut-être le plus important de tous malgré son insignifiance apparente.
Pour que cet article conserve tout son intérêt et toute sa clarté, nous allons examiner les bases des systèmes de sonorisation quels qu’ils soient sous un angle légèrement différent de ce qui se fait habituellement.
Sonorisation par zone
Une approche conventionnelle et intuitive consiste à considérer les lieux de grande taille comme un ensemble de plusieurs zones plus petites. On forme donc des clusters (grappes d’enceintes) qui sonorisent différentes zones afin de couvrir tout l’espace acoustique. La réponse de chaque enceinte du cluster peut ensuite être optimisée en termes d’égalisation et de volume sonore.
Cette approche, que l’on appelle sonorisation par zone, nécessite de minimiser les recoupements entre les champs de dispersion sonore des différentes enceintes. Le but des développeurs d’enceintes et des techniciens qui installent ces systèmes est d’obtenir une transition homogène d’une zone à l’autre.
Ce système est conçu de sorte que les auditeurs ne soient pas exposés au son d’enceintes proches les unes des autres ou placées à des distances différentes. Plus simplement, disons qu’il est nécessaire que les signaux des différentes sources sonores atteignent les oreilles des auditeurs sans décalage temporel.
Le fait de diffuser le son sur des distances différentes engendre plusieurs problèmes. Étant donné que la zone de couverture de chaque enceinte augmente au fur et à mesure que la distance parcourue par le son s’accroît, il convient d’augmenter l’angle entre les enceintes qui diffusent le signal sur une longue distance.
Cependant, pour contrecarrer la diminution de la pression acoustique au fur et à mesure que la distance de diffusion augmente, on a tendance à réduire les angles entre les enceintes afin qu’un plus grand nombre d’entre elles pointe vers la zone cible et soutienne ainsi le volume sonore sur une longue distance.
C’est pourquoi les systèmes de sonorisation par zone utilisent généralement des enceintes à longue portée et à dispersion étroite.
Les enceintes Electro-Voice X-Array, Nexo Alpha, Turbosound Flashlight et Aspect sont toutes d’excellents outils pour la sonorisation par zone.
La conception de ces enceintes a nécessité des efforts importants afin que chacune dispose de caractéristiques de dispersion verticale et horizontale distinctes et constantes.
Habituellement, ce type d’enceintes utilise relativement peu de transducteurs associés à des pavillons de contrôle de la dispersion.
Sonorisation par somme
L’autre architecture utilisée pour la diffusion sur de grandes distances est ce que j’appelle la sonorisation par somme. Ici, le but est de constituer un groupe d’enceintes qui sonne comme une seule et unique source de grande dimension.
La caractéristique de dispersion de ce point de diffusion géant est ensuite ajustée et optimisée pour couvrir toute la zone d’écoute en variant les angles entre les différentes enceintes qui le constituent.
Lors de la mise en place de cet ensemble, la principale difficulté est d’optimiser la « coopération » entre les différentes enceintes qui le composent. Le plus souvent, on dispose les enceintes très proches les unes des autres pour les empêcher de fonctionner comme des sources séparées (les groupes de subwoofers sont généralement conçus de sorte qu’ils fonctionnent comme une somme, c’est à dire comme une seule et unique source sonore).
Le but commun de ces deux approches est d’éviter que les auditeurs perçoivent deux sources acoustiques séparées placées très
près l’une de l’autre mais non équidistantes de l’auditeur.
Pourquoi ? Essentiellement parce que des sources sonores non équidistantes diffusant le même signal créent un effet de filtre en peigne qui a pour conséquence d’affaiblir le niveau de sortie, de détériorer la réponse en fréquence et, plus grave encore, de sonner de façon désagréable.
Par le passé, la sonorisation par somme était très peu répandue, les seules enceintes disponibles pour ce type d’architecture étant les Clair Bros S-4, Rat Sound (ma société) Rat Trap 5 et, dans une certaine mesure, les Showco Prism (les composants et la configuration des Prism étaient tenus secrets mais, pour avoir mixé sur ces enceintes et observé leurs caractéristiques acoustiques, il me semble qu’elles sont conçues pour la sonorisation par somme).
Généralement, ce type d’enceintes utilise peu de transducteurs montés assez près les uns des autres pour donner l’impression d’une source sonore unique. Le problème majeur vient de l’espacement des enceintes entre elles qui les fait sonner comme des sources distinctes. Cela entraîne des recoupements entre les champs de dispersion des différentes enceintes, un effet de filtre en peigne et une couverture sonore non uniforme.
Sonorisation par ligne
Comme toute autre chose, les caractéristiques du son ne sont jamais soit noires, soit blanches, mais passent par différents dégradés de gris. Par conséquent, dans la pratique, les systèmes de sonorisation combinent les deux approches dans des proportions variables. On adoptera plutôt la sonorisation par somme pour les basses fréquences et la méthode par zone pour les hautes fréquences.
Les techniques utilisées par les concepteurs de systèmes de sonorisation tendent donc vers l’approche par zone ou par somme ; ce faisant, le choix de la fréquence de coupure est prépondérant pour la clarté sonore et la couverture uniforme de la zone d’écoute.
L’une des variantes de la sonorisation par somme est la structure en ligne (line array). A ce propos, il faut souligner que cette solution n’est pas nouvelle puisqu’elle est utilisée depuis plusieurs décennies. L’un de ses représentants les plus anciens est le vénérable Shure Vocal Master, un système de sonorisation portable des années 60 qui utilisait une ligne verticale de woofers 10" montés dans une seule enceinte.
Regardez de plus près les enceintes Clair S-4 et vous découvrirez que leurs woofers 18" et 10" sont disposés sur une ligne verticale pour qu’elles forment un système line array lorsqu’elles sont empilées. Les enceintes Rat Trap 5 peuvent également être configurées en line array. Jetez aussi un œil au « Wall of Sound » de Grateful Dead qui était constitué de lignes verticales pour quasiment chaque instrument.
Dans les années 90, la méthode de diffusion des hautes fréquences des systèmes de grande taille se rapprochait de la sonorisation par zone pendant que la diffusion du bas du spectre correspondait à la méthode par somme.
La différence majeure entre les deux approches concernait la qualité globale de chacune des deux architectures (en zone ou en somme) et le choix de la fréquence de coupure. Le but des partisans de la sonorisation par zone était d’utiliser une fréquence de coupure basse alors que les adeptes de l’approche par somme visaient une fréquence de coupure plus haute.
Puis, L-Acoustics a développé une enceinte qui incarnait pour la première fois ce que le fabricant a appelé le concept V-DOSC ; conçue pour les systèmes de sonorisation de grande taille, cette enceinte novatrice utilisait l’approche par somme pour tout le spectre sonore, autrement dit elle incorporait les hautes fréquences à la sonorisation par somme.
L’approche unifiée était née. Elle permettait aux concepteurs de systèmes de sonorisation d’éliminer la transition entre la structure par somme et l’architecture par zone ou de la déplacer dans les hautes fréquences de sorte qu’elle devienne insignifiante.
Arrondir les angles
Concentrons-nous à présent sur les détails qui font l’intérêt, l’utilité et l’unicité des systèmes line array bien conçus. Contrairement à la sonorisation par zone, l’architecture line array de bonne qualité améliore l’uniformité du volume sonore sur toute la distance de diffusion.
A ce stade, soit vous optez pour le concept de « forme d’onde cylindrique » proposé par certains fabricants, soit vous réfléchissez au phénomène de réduction du volume sonore au fur et à mesure que la distance de diffusion s’accroît, tout en sachant que le fait d’augmenter le nombre d’enceintes contrebalance la baisse de volume causée par l’augmentation de la distance d’écoute. Il n’en reste pas moins que les systèmes line array peuvent projeter le son sur des distances plus ou moins grandes en modifiant simplement l’angle vertical entre les enceintes.
Une caractéristique avantageuse des line arrays réside dans leur largeur réduite grâce à laquelle ils se marient assez facilement aux grands écrans vidéo et aux autres effets de scène. Outre le fait que la grande majorité des spectateurs ne veut rien manquer de ce qui se passe sur scène sans nécessairement voir la sono, cette caractéristique offre également l’avantage majeur de permettre l’utilisation d’enceintes plus puissantes dans les lieux exigus.
De plus, la façade peut être suspendue assez facilement en jouant uniquement sur son ajustement vertical, ce qui permet de prévoir le résultat sonore de façon fiable et nécessite moins de points de traction dans la plupart des endroits.
La simplicité, les avantages logistiques et la possibilité d’anticipation du résultat sonore des systèmes line array sont de véritables atouts par rapport aux autres méthodes de sonorisation qui nécessitent de nombreux points de traction espacés avec précision pour l’obtention d’une couverture sonore correcte du lieu.
Pourtant, malgré ces avantages, les systèmes line array ne sont pas systématiquement la meilleure méthode de sonorisation. L’architecture par zone constitue par exemple une solution fiable pour remédier aux problèmes d’homogénéité du volume sonore sur toute la distance de diffusion grâce à l’utilisation d’enceintes à longue portée et à la multiplication des points de diffusion qui compensent la baisse de la pression acoustique sur les longues distances.
De plus, lorsqu’ils sont bien conçus, les systèmes de sonorisation par zone compacts et à forte puissance peuvent parfaitement s’intégrer aux différents effets du show et peuvent même être suspendus derrière les écrans vidéo perméables aux ondes sonores.
Les systèmes suspendus bien conçus destinés à la sonorisation par zone existent déjà ou ne sont pas loin de voir le jour. Et les nouvelles générations de subwoofers à dispersion cardioïde possèdent quant à elles des atouts certains pour la couverture sonore par zone dans le bas du spectre.
Enfin, les logiciels de simulation du résultat sonore ne sont pas la chasse gardée des systèmes line array, de sorte que les champs d’application des deux approches sont quasiment les mêmes d’un point de vue purement technique.
Facteur humain
Finalement, le choix de la méthode utilisée dépend essentiellement des goûts et des capacités logistiques du lieu, hormis sur un point qui concerne notre anatomie : nos oreilles sont placées de part et d’autre de notre tête.
Cette caractéristique nous permet de localiser les sources sonores avec une précision extrême sur le plan horizontal mais n’offre qu’une perception approximative de leur position sur le plan vertical.
Il en va de même de notre cou qui permet une rotation horizontale étendue mais un déplacement vertical limité. Nous tournons la tête et faisons pivoter notre corps sans arrêt pour scanner l’ensemble des sources acoustiques sur le plan horizontal.
En bref, nous disposons d’un système de perception stéréo dont on exploite toutes les qualités en espaçant les sources sonores horizontalement. C’est pour cette raison que les différentes sources des systèmes de diffusion ne sont pas espacées verticalement.
Les structures en line array possèdent des avantages esthétiques indéniables pour l’intégration de la sono aux équipements de scène modernes.
Dans certains environnements domestiques, la disposition verticale des sources sonores peut s’avérer avantageuse d’un point de vue logistique ; pourtant, notre système auditif permet de saisir toute l’esthétique et toute la complexité des signaux sur le plan horizontal alors qu’il a plus de difficultés à localiser les sources sonores espacées verticalement.
Si vous n’êtes pas convaincu, faites l’essai et écoutez !
Avez-vous déjà essayé de coucher un système line array ? L’expérience est intéressante et je suis sûr que le son produit par cette disposition vous paraîtra moins bon.
Observez les produits disponibles sur le marché et vous constaterez que, dans la plupart des cas, il est impossible de varier les angles entre les enceintes quand elles sont disposées sur une ligne horizontale. Cela permet de minimiser les recoupements des champs de dispersion des enceintes entre elles dans le haut du spectre pour une couverture sonore aussi homogène que possible.
Mais au fait, ça ne vous rappelle rien ? Et oui, nous retrouvons le principe de sonorisation par zone !
Arrangeons
Donc voilà toute la problématique, ou du moins ma façon de voir les choses.
En l’état actuel des techniques, il faut utiliser de nombreuses enceintes pour pouvoir couvrir de grands espaces ; en effet, aucune enceinte n’est capable à elle seule de développer suffisamment de puissance, de couvrir tout le spectre sonore et d’offrir suffisamment de polyvalence pour s’adapter à tous les lieux et à toutes les zones d’écoute.
On est donc contraint d’utiliser de nombreuses enceintes en optant pour une architecture horizontale, verticale, bidimensionnelle ou même pour une disposition des enceintes les unes derrière les autres.
Les enceintes actuellement disponibles peuvent sonner ensemble de façon satisfaisante mais pas parfaite. Par conséquent, on peut réaliser des groupes d’enceintes cohérents mais pas parfaits.
Notre système auditif est très sensible à ces imperfections sur le plan horizontal et beaucoup moins exigeant sur le plan vertical.
L’atout principal des systèmes line array est qu’ils tirent profit des déficiences de notre système auditif en cantonnant les imperfections sonores au plan vertical, qui est la dimension dans laquelle nous sommes le moins en mesure de les percevoir.
À cela s’ajoute le fait que la structure en « collier de perles » de l’architecture line array présente des avantages esthétiques certains. C’est pourquoi j’affirme que ces systèmes ne sont pas un simple effet de mode.
Naturellement, on en vient à se demander quelle solution sera utilisée dans l’avenir.
Je pense qu’il s’agira d’une technologie qui permet d’adapter encore mieux la qualité d’écoute à la façon dont est présentée la musique. Ou bien sûr, il pourra s’agir d’une solution à l’image du MP3, c’est-à-dire moins onéreuse, plus compacte et plus pratique… mais malheureusement de qualité moindre.
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