C’est aujourd’hui que nous nous lançons dans l’exploration des différents éléments matériels d’un synthétiseur. « Enfin ! » diront certains. Bah oui, mais il est toujours important d’avoir quelques petites bases théoriques pour savoir ce que l’on fait, d’autant que je ne vous ai pas assommés de formules mathématiques non plus. Ce qui en fera râler d’autres... on ne pourra donc jamais contenter tout le monde !
Revenons à notre sujet. Nous avons vu ce qu’étaient les ondes, qu’elles soient simples, complexes, périodiques ou non, et que ce sont elles qui allaient nous servir de matériau de base dans le cadre de la synthèse sonore. « Oui, mais », me direz-vous, « ces ondes, elles sortent d’où ? » Eh bien, ces ondes sont produites par un élément en particulier — qui en devient de fait l’élément crucial de quasiment toute production musicale synthétique — j’ai nommé l’oscillateur.
Oscillateur vient du latin « oscillare », qui signifie « se balancer » ou… « osciller », justement. En fait, un oscillateur est un dispositif dont la nature est de pouvoir moduler entre des valeurs extrêmes autour d’un point d’équilibre. Idéal donc pour créer des ondes dont cette modulation est l’une des principales caractéristiques, non ?
Pour cet usage, nous avons les VCOs (Voltage Controlled Oscillator), les DCOs (Digitally Controlled Oscillator) et les DOs (Digital Oscillator). Sur les synthétiseurs, ces oscillateurs servant à l’origine de la production de son peuvent aussi être simplement désignés par la mention « Osc ». Mais il existe également un autre type d’oscillateur employé en synthèse numérique, non destiné à la production de son en lui-même, et appelé universellement LFO (Low Frequency Oscillator).
Voyons tout ce petit monde d’un peu plus près.
Les VCOs et les DCOs
Comme leur nom l’indique, les VCOs sont des oscillateurs contrôlés par une tension électrique pour les valeurs de forme d’onde, d’amplitude et de fréquence.
Ces valeurs peuvent être modulées par des potentiomètres. Toutefois, la majeure partie du temps, fréquence (hauteur de note) et amplitude (puissance du signal) sont modulées directement à partir du clavier du synthétiseur. Ce qui n’empêche pas la section oscillateur d’être accompagnée souvent d’un potentiomètre appelé « pitch » ou « detune » qui permet d’accorder l’instrument. Certains permettent carrément de changer d’octave, comme sur le Minimoog Voyager dont nous voyons ci-contre la section d’oscillateurs.
Les DCOs sont, quant à eux, contrôlés non plus par des tensions électriques, mais par des valeurs numériques. Par contre, la production des formes d’ondes en elle-même reste analogique. Leurs caractéristiques sonores restent donc très proches de celles des VCOs.
Les oscillateurs analogiques ne sont pas forcément les plus stables — certains ne tiennent pas extrêmement bien l’accord, et/ou nécessitent un « temps de chauffe » pour atteindre une certaine stabilité — et les plus « propres ». Cela leur confère toutefois un grain particulier et un son moins prédictible que les oscillateurs purement numériques.
Les oscillateurs numériques
La troisième catégorie d’oscillateurs audio, les DOs, est quant à elle intégralement numérique. Le principal avantage de ces oscillateurs par rapport aux VCOs et DCOs est leur stabilité. Ils peuvent être employés dans certains synthétiseurs matériels non analogiques — appelés « virtuel analogiques » — ou au sein de modules purement logiciels. Dans les deux cas, l’objectif est souvent l’émulation du comportement d’oscillateurs analogiques, avec l’intérêt d’en supprimer ou d’en contrôler les défauts, ceux-ci devenant programmables à volonté.
Mais un autre effet recherché peut être aussi le dépassement des contraintes liées aux formes d’ondes traditionnelles et la recherche de toutes nouvelles structures sonores (cf les grains dans l’article « La synthèse sonore 4 – Les ondes en pleine forme »).
Le DO est ainsi également l’élément crucial de la synthèse par tables d’ondes. Nous reviendrons sur celle-ci dans un prochain article, mais sachez juste que le principe de base ne repose plus sur la production de formes d’ondes, mais sur la lecture d’échantillons (enregistrements) sonores.
D’une manière générale, le son, s’il gagne naturellement en stabilité et en propreté, peut être jugé plus froid qu’avec des oscillateurs analogiques.
Ci-contre, Synth 1, un exemple de synthétiseur logiciel, embarquant donc des oscillateurs entièrement numériques. Par ailleurs, si vous ne disposez pas encore de synthé, je vous conseille vivement celui-ci pour vous faire la main, car sa structure est très simple à appréhender (si, si, vous verrez, une fois que vous aurez terminé la lecture de ce dossier, cela vous semblera enfantin !)
Les LFOs
Les LFOs enfin sont une catégorie très particulière d’oscillateurs. Ils tiennent leur nom, Low Frequency Oscillator (oscillateur à basse fréquence), du fait qu’ils produisent, contrairement à leurs collègues, des fréquences en dessous de 20Hz, donc non audibles par l’être humain. Mais alors, à quoi cela sert-il ? Eh bien, ces oscillateurs-là ne sont pas destinés à créer des formes d’ondes ou à lire des échantillons, mais à moduler un signal déjà existant. En fait, on peut dire que si on n’entend pas le son même produit par ces oscillateurs, on en perçoit par contre très bien les effets sur un signal audible.
Ici, un exemple d’une sinusoïde jouée d’abord seule, puis la même modulée par un LFO à 4 Hz :