Combinant une grande partie des fonctionnalités des Microwave 1 et 2, le M rassemble tables d’ondes numériques et filtres analogiques en un module généreux couvert de commandes. Fera-t-il oublier ses célèbres ancêtres hybrides ?
En 1989, la société Waldorf fait une entrée remarquée dans le monde de la synthèse, avec un petit module en rack 2U aussi sobre qu’intrigant : le Microwave. Basé sur les tables d’ondes mises au point par Wolfgang Palm dans les PPG Wave et des VCF/VCA signés Curtis, le synthé remet au goût du jour une synthèse très prometteuse mais pas forcément facile à appréhender. On aime ou on n’aime pas, mais les textures évolutives qui s’en dégagent ont un côté envoûtant, voire hypnotique. Pas très gâté au plan des commandes, le Microwave passe en version 2 et perd au passage la partie analogique au profit d’un moteur entièrement numérique. Les tables peuvent enfin interagir et plusieurs filtres sont combinés, ce qui étend la panoplie sonore tout en procurant un son plus propre. La version XT ajoute les commandes directes qui manquaient cruellement, ce qui en fait un synthé très recherché aujourd’hui.
Un quart de siècle plus tard, la firme allemande, qui a entretemps connu quelques péripéties business, est revenue au top avec le magnifique Quantum, le must des synthés hybrides. Il est décliné en version entièrement numérique, l’Iridium, venant compléter une gamme devenue très hétéroclite, composée de modules, petits analogiques, moyens numériques, string machines modélisées, gros numériques et logiciels… En 2021, Waldorf a annoncé un nouveau synthé hybride à tables d’ondes : le M. Est-il le digne successeur de la série Microwave ? Des PPG Wave ? Voyons tout cela avec un modèle en version 1.07.
Black and blue
Le M est un module classieux, aux matériaux nobles et à l’esthétique soignée. La façade est noire et bleue, les capuchons des rotatifs sont originaux, tout comme l’arrangement des modules en tuiles hétérogènes. La coque est tout en métal rigide et les côtés profilés placés légèrement en retrait en composite souple, d’où les 5,7 kg pour 44 × 31 cm. Les commandes sont assez nombreuses et largement dimensionnées : 23 encodeurs, 20 potentiomètres, 19 poussoirs et un écran OLED couleur très lisible aux graphismes très soignés. La prise en main n’en est que plus agréable, avec des détails ergonomiques appréciables : 2 encodeurs doubles pour sélectionner à la fois la table d’ondes (anneau cranté) et l’index de lecture (centre lisse), différents boutons poussoirs pour sélectionner les modules à éditer via le menu, un encodeur-poussoir pour naviguer dans les différentes pages d’un module, 4 encodeurs poussoirs crantés contextuels pour éditer 4 paramètres dans chaque page (en rangée inférieure), moyennant un petit travail psychomoteur car ils sont décalés, l’écran étant moins large. Tiens, Waldorf a prévu les fonctions Init/Recall/Random, tant mieux ! Mais pas Compare, tant pis !
Un dernier encodeur poussoir permet de faire défiler / sélectionner les programmes Single / Multi, avec bouclage au sein d’une même banque (128->1 – 1<-128), merci. En mode de chargement direct, le défilement est un peu lent et éteint parfois l’écran, heureusement qu’on a la touche Shift pour augmenter le pas et deux touches pour appeler les 16 banques (oui, 16 × 128 sons !). Tout n’est pas idéal, car les 4 enveloppes partagent leurs commandes. Fort heureusement, ce sont des encodeurs (lisses), donc aucun problème de saut de valeur (pas de repère visuel non plus, mais l’écran vient à la rescousse, avec valeurs et courbes affichées en temps réel). On regrette aussi que certains paramètres cruciaux ne soient pas en façade et nécessitent de passer par le menu, même si cela va très vite. Bref, il a fallu faire des choix dans la pléthore de paramètres de synthèse disponible et Waldorf a été assez catégorique.
La connectique, généreuse et vissée, occupe une bonne partie de l’arrière du module : sortie générale gauche / droite (jacks 6,35 TS), 4 sorties séparées stéréo (jack 6,35 TRS), sortie casque (jack 6,35 TRS, avec petit potentiomètre de volume séparé), trio Midi DIN, prise USB 2 type B (Midi uniquement, dommage !), lecteur de carte SD (archivage des programmes, import de tables d’ondes, mise à jour du système) et connecteur mini-DIN pour l’alimentation externe, type bloc central 12V/3A (argh, sur un synthé de cette trempe). On salue les nombreuses sorties, mais on regrette l’absence d’entrée audio. Sur le fond du boitier, on remarque 4 filetages permettant de fixer l’unité sur un support à la norme VESA, bien vu, puisqu’il n’est pas rackable. Le M peut également recevoir une carte d’extension interne, portant la polyphonie de 8 à 16 voix. On ignore encore tout de cette carte, disponibilité et tarif. Elle s’embrochera vraisemblablement sur les deux connecteurs rouges qu’on aperçoit sur la carte mère, ce qui ne devrait pas poser de problème d’installation par l’utilisateur. A suivre…
Retour aux sources
Le M est un synthé polyphonique 8 voix (extensibles à 16) et multitimbral sur 4 parties, chacune bénéficiant de sa sortie séparée stéréo, c’est plus que luxueux et suffisamment rare de nos jours pour être souligné. Le niveau de sortie est très élevé, on sent la qualité des convertisseurs, il faut souvent réduire les différents volumes internes pour ne pas coller les vumètres ou bargraphes. Pas de bruit de fond à l’horizon, on sent que le soin a été apporté dans la conception des circuits, en particulier la partie analogique qui prend le relai des générateurs numériques à partir du second filtre. La mémoire interne totalise 2.048 programmes Singles et 128 Multi, tous réinscriptibles. La moitié des programmes simples est occupée par la banque d’usine, élaborée par de nombreux développeurs qui ont œuvré pour Waldorf à travers les temps. Ainsi, on retrouve des sons de PPG Wave 2.3, Microwave, Microwave 2, en plus de banques originales.
D’ailleurs, le M est directement compatible avec les programmes et banques de Microwave, qu’il ingère goulument via Sysex.
Après, au plan qualitatif, c’est aussi une affaire de goût, comme le design de la machine : étant propriétaire des synthés originaux, c’est avec une certaine émotion que nous en retrouvons certains programmes emblématiques, mais aussi les pires. C’est donc une livrée à qualité inégale qui nous est proposée ; tant mieux, on va pouvoir faire les nôtres, il reste plein de place pour les stocker sans avoir à se prendre la tête pour savoir où les mettre. Concernant les Multi, Waldorf nous gratifie de seulement 8 programmes, sérieux là… Sans surprise, le M est à l’aise dans les textures hybrides évolutives, les orgues rutilants, les voix éthérées, les basses métalliques, les grosses synchro. Tout ce qui a fait la gloire de PPG et Waldorf. Ce sont plus de 40 ans d’histoire de la table d’ondes outre-rhinoise qui sont rassemblés dans ce module. Comparativement au PPG Wave, il n’a pas le côté cracra des générateurs numériques mais le filtre – donc la coloration sonore – est assez proche. A côté du Microwave (1A), on retrouve une filiation certaine dans les tables d’ondes (mode classique) mais la coloration du filtre est différente, surtout quand on pousse la résonance. Comparé au Microwave 2 enfin, le filtre analogique du M répond de manière beaucoup plus douce avec une résonance plus maîtrisée, mais les filtres numériques du Microwave 2 apportent plus de variété (en attendant une mise à jour système qui devrait ajouter les trois filtres manquants) ; le son du Microwave 2 semble aussi plus large et généreux, notamment grâce aux effets internes que n’a pas le M.
- M_1audio 01 Intro Wave00:38
- M_1audio 02 Pluck Hybrid00:38
- M_1audio 03 2144 Action00:47
- M_1audio 04 Rich M00:43
- M_1audio 05 Table Basse00:50
- M_1audio 06 Choir Wave00:54
- M_1audio 07 Church Time00:38
- M_1audio 08 Arped Pulse00:55
- M_1audio 09 PPG 7a00:24
- M_1audio 10 PPG Dual00:49
Tables à rallonge
Le M est un synthé hybride utilisant des tables d’ondes numériques passées dans un VCF et un VCA. Chaque voix est produite par deux générateurs de tables d’ondes, chacun pouvant utiliser une table indépendante (un gros progrès par rapport à la série Microwave qui utilisait une table unique pour les deux générateurs), un bruit rose et une modulation en anneau des deux générateurs. Le signal est ensuite mixé et passé dans un premier filtre numérique, puis converti en analogique pour attaquer le VCF multimode et le VCA stéréo. Dans chaque générateur, on commence par sélectionner la table d’ondes parmi les 128 tables disponibles (96 en Rom et 32 en Ram, à créer via un logiciel externe, hélas non fourni, puis à importer via la carte SD, une manipulation un peu fastidieuse), puis la position initiale de lecture. Chacune compte 64 ondes courtes chainées les unes aux autres, constituant 64 indexes.
Ce point de lecture est modulable par une enveloppe dédiée, la vélocité, le suivi de clavier et deux sources assignables (contrôleurs physiques, modulations, CC Midi), ce qui fait l’originalité de ce type de synthèse. La première source dispose d’une modulation latérale. On peut aussi régler la phase d’onde. Tradition PPG/Waldorf, dans chaque table, les trois dernières ondes sont toujours des triangle / carré / dent de scie, afin de faciliter la programmation quand on cherche une onde basique. Un astucieux réglage permet de contraindre l’étendue de lecture aux 64 ondes, aux 61 premières ondes ou aux 3 dernières. Par contre, il n’y a pas de réglage de transition ente les ondes, comme certains concurrents le permettent. Les 96 tables fournies intègrent les tables des PPG et Microwave : PWM, FM, cloches, orgues, voix, spectres, bruits… On peut les accorder par octave, demi-ton et 64ème de demi-ton. Le pitch peut être modulé par deux sources (l’une avec modulation latérale, l’autre avec quantification) et le portamento (linéaire ou exponentiel). Il peut aussi être figé (utile en synchro d’oscillateurs).
Klassisch oder modern ?
Le M est capable de simuler le fonctionnement du Microwave (mode « classique ») et du Microwave 2 (mode « moderne »). En mode classique, le filtre anti-aliasing est débrayé et on retrouve le côté brut 8 bits de l’ancêtre (buzz, aliasing…). Le comportement spécifique des ASIC du Microwave peut être activé, produisant un son métallique agressif quand les volumes des oscillateurs dépassent une certaine limite. On peut également remplacer la table d’ondes de second oscillateur par un échantillon PCM (une « transition » en langage PPG Waveterm, un module de sampling qui pouvait être associé au PPG Wave pour ajouter l’échantillonnage), avec réglages des points de lecture, points de bouclage et sens de lecture. Il y a 64 emplacements pour importer ces transitions (65K maxi, format WAV 16 bit/22kHz mono), la manipulation est très fastidieuse. Le constructeur indique les banques Waveterm converties par Hermann Seib comme bon point de départ.
Pour finir avec le mode classique, signalons qu’on ne peut ni synchroniser les oscillateurs ni les moduler en anneau.
En mode moderne, la résolution des ondes est à la base de 16 bits. On peut toutefois réduire le facteur de qualité jusqu’à 2 bits (!), pour un son aussi crado que méconnaissable. On bénéficie cette fois des interactions des oscillateurs (synchro et modulation en anneau), comme sur le Microwave 2. La quantité de modulation en anneau peut être modulée par une source au choix, avec modulation bipolaire. Lorsqu’on est en mode Multi, seule la première partie peut utiliser le mode moderne, vraisemblablement très gourmand en calculs, les trois autres devront se contenter du mode classique. Là où le système pourrait progresser, c’est dans les menus qui proposent tous les réglages quel que soit le mode en cours, ce qui peut déstabiliser puisque certains sont inopérants selon le mode dans lequel on se trouve.
Filtres en série
Les deux oscillateurs, le bruit et la modulation en anneau (uniquement en mode « moderne ») sont ensuite dosés dans un mélangeur numérique. Un volume au-delà de 70% produit une saturation légère dans le VCF, apportant un peu de chaleur dans ce monde métallique. Le niveau de chaque générateur sonore est modulable par une source au choix, avec quantité de modulation bipolaire. Le signal ainsi sommé passe en premier lieu dans un filtre numérique multimode résonant. En mode classique, on trouve les modes passe-bas, passe-bande et passe-haut 2 pôles, avec résonance douce, non auto-oscillante et réglage de compensation de résonance. La fréquence de coupure est limitée à une bande passante de 10Hz-10kHz. En mode moderne, s’y ajoutent la plupart des filtres du Microwave 2 : réjection 2 pôles, passe-bas 4 pôles, passe-bande 4 pôles, passe-haut 4 pôles, réjection 4 pôles, sinus Waveshaper + passe-bas 2 pôles, double passe-bas/passe-bande 2 pôles et coupe-bande 2 pôles (réjection à largeur de bande réglable). La fréquence de coupure peut être modulée par l’enveloppe de VCF, le suivi de clavier et deux sources assignables, la première avec modulation latérale. Ce filtre, absent du cahier des charges à l’origine, a été ajouté et amélioré en cours de route par les développeurs ; Ils prévoient même d’ajouter les trois filtres manquants du Microwave 2 dans une future mise à jour du système, particulièrement originaux (sinus>passe-bas, filtre FM et S&H>passe-bas), bravo pour cette écoute clients attentive ! Ce filtre numérique devenu sophistiqué est un bon complément au VCF que l’on va retrouver juste après la conversion du signal en analogique, qui le restera ensuite jusqu’au bout de la chaine (ce qui signifie que le routage série des filtres est fixe).
Le VCF est généré par un circuit intégré SSI2144 (inspiré du SSM2044 qui équipait notamment les PPG Wave 2.2 et 2.3, donc de comportement différent de celui du Microwave 1 qui utilisait des VCF+VCA CEM3389 puis CEM3387). Il s’agit d’un filtre passe-bas résonant 4 pôles en échelle, capable d’entrer en auto-oscillation. La réponse en fréquence est douce, lisse, impeccable. La fréquence de coupure est modulable par l’enveloppe, la vélocité, le suivi de clavier et deux sources assignables dont la première offre une modulation latérale. La résonance est également modulable par une source assignable, merci. Nous lui trouvons toutefois moins de caractère (coloration) que le SSM2044 qui équipe certains synthés du studio (Wave 2.3, Polysix et K3m). Toutefois, il fonctionne très bien avec les ondes numériques du M et est réglé pour saturer quand on pousse les niveaux dans le mixeur. Il n’est pas compensé, donc pousser la résonance écrase les basses, classique. En sortie de VCF, le signal passe dans le VCA stéréo final, généré par un circuit SSI2164. Il est modulable par une enveloppe, la vélocité, le suivi de clavier et deux sources assignables, la première équipée d’une modulation latérale, comme pour le VCF. Le panoramique est également réglable et modulable par une source assignable, super !
Modulations souples
Les synthés Waldorf sont toujours bien dotés en matière de modulations. Le M n’échappe pas à la règle. Nous avons vu qu’il fonctionnait sous le principe des destinations plutôt qu’une page réservée à une matrice de modulation, ce qui le rend facile à configurer. Dans chaque module, une ou plusieurs pages sont réservées à l’assignation des destinations de modulations pour les paramètres disponibles. On a vu cela en détail pour les tables d’ondes, les pitchs, les niveaux, les filtres, le volume et le panoramique. A chaque paramètre, une liste déroulante de sources est proposée. Il suffit d’en choisir une, parfois une seconde source latérale (même liste) et de régler la quantité de modulation bipolaire. Rien de plus simple !
Les sources sont composées de contrôleurs physiques (pitchbend, modulation, numéro de note, vélocité initiale, vélocité de relâchement, pression, pédales), modulateurs calculés (LFO, LFO global, enveloppes, min, max, inversion, aléatoire positif, aléatoire négatif) et CC Midi (8 à définir globalement). Détaillons les LFO : il y en a deux par voix, avec seulement 2 potentiomètres en façade (et une petite diode de pulsation), le reste se faisant par le menu. On peut régler la fréquence suivant trois modes (0,012 à 1,54 Hz – 0,1 à 15,4 Hz – 0,49 à 61,6 Hz). Les formes d’onde sont les classiques sinus, triangle, impulsion, aléatoire et S&H, avec réglages de symétrie et humanisation (caractère aléatoire dans la fréquence à chaque cycle). La fréquence et l’amplitude du LFO1 sont modulables par des sources assignables. De même, le LFO1 dispose d’une petite enveloppe délai/attaque/déclin agissant sur son amplitude et disponible comme source de modulation (rien ne se perd dans le M). Le cycle des LFO peut être lié à chaque note ou libre. Le cycle du LFO2 peut être calé sur le LFO1 et déphasé. Il existe un troisième LFO, global, reprenant les paramètres du LFO2, utile pour certaines modulations globales (genre faire varier la coupure du filtre en même temps pour toutes les notes ajoutées à un accord). La fréquence du LFO global peut être synchronisée à l’horloge Midi.
On termine cette section modulation par les enveloppes, au nombre de quatre. Trois sont préassignées à la table d’ondes, aux deux VCF et au VCA, mais peuvent très bien affecter d’autres destinations. Les enveloppes de VCF et VCA, de type ADSR, sont les plus simples. L’enveloppe de VCF ajoute un segment de délai. Les temps et niveaux sont indépendamment modulables par des sources au choix, puissant. L’enveloppe de table d’ondes est plus complexe, avec 8 temps et 8 niveaux. Les temps et niveaux sont globalement modulables par une source au choix. L’enveloppe d’onde peut être bouclée entre deux points à définir. La dernière enveloppe, libre d’assignation, offre 4 temps et 4 niveaux. Les réglages sont identiques à l’enveloppe de table d’ondes, auxquels s’ajoute une boucle de relâchement, pour les amateurs de drones… Ces enveloppes ont des amplitudes de temps très larges, du plus claquant au plus lent. Elles se comportent comme les deux versions de Microwave dans leurs modes respectifs classique / moderne (par multiplication / addition de la modulation), ce qui conduit à des réponses différentes quand on bascule d’un mode à l’autre.
Arpèges limités
Le M est équipé d’un petit arpégiateur. L’arpège peut être joué tant que des notes sont maintenues, après relâchement ou sur un seul cycle, utile pour se synchroniser en live. On peut choisir l’ordre des notes arpégées : haut, bas, alterné vers le haut et alterné vers le bas. On peut aussi transposer les arpèges sur 1 à 9 octaves (!). Pour rompre avec la monotonie, Waldorf a prévu 16 motifs rythmiques qui gèrent le timing des notes, allant d’intervalles réguliers à des rythmiques syncopées. La vélocité jouée est prise en compte. Les notes arpégées peuvent être transmises en Midi. Il manque à cet arpégiateur quelques fonctions pourtant devenues classiques, telles que motifs aléatoires, Ratchets, temps de Gate, swing… En mode multitimbral, nous n’avons pas réussi à faire fonctionner l’arpégiateur correctement, à part sur le canal Midi global (et encore, l’horloge se comporte parfois étrangement en détection automatique). Bref, le M doit encore progresser dans ce domaine, on est très loin des 16 arpèges simultanés du petit Blofeld !
Multimode à quatre
Les synthés multitimbraux sont de plus en plus rares, parfois-même dans le haut de gamme. Il n’en est rien pour le M, qui offre quatre parties multitimbrales, chacune pouvant disposer de ses propres sorties stéréo, comme déjà évoqué. C’est le mode idéal pour créer des arrangements complexes, Splits, empilages, ou utiliser un séquenceur externe. Par partie, on peut mémoriser le canal Midi de réception, le numéro de programme assigné, le volume, le panoramique, la modulation du panoramique (activation/désactivation des réglages du mode programme), la sortie audio, la tessiture, la fenêtre de vélocité, la transposition, l’accordage fin, la courbe de vélocité et l’activation simultanée des réglages de VCF (pour éditer toutes les parties activées en même temps).
Les voix sont allouées par priorité (la partie 1 est prioritaire sur la partie 2, etc.), mais on peut définir une réserve de voix et autoriser le vol de voix, ce qui est utile compte tenu de la polyphonie de base limitée à 8 voix. Il manque des réglages de filtres de contrôleurs physiques ou Midi pour être vraiment complet. Pour l’édition, on peut facilement passer d’une partie à l’autre avec les deux touches dédiées et éditer les programmes dans leur contexte de Multi, sans oublier d’aller les sauvegarder en mode programme, puisqu’un Multi n’enregistre que les réglages des parties (dont le numéro de programme, mais pas le programme lui-même). On a 128 mémoires, cela peut paraitre peu à côté des 2.048 mémoires de programmes, mais c’est tout à fait honorable, d’autant qu’on peut archiver tout cela sur la carte SD. La sauvegarde prend à chaque fois en temps fou, que ce soit pour les programmes Single ou Multi.
Conclusion
Le M est un synthé hybride à tables d’ondes et filtres analogiques, héritier des PPG Wave et Waldorf Microwave, dont il reprend une bonne partie des fonctionnalités. Il est notamment capable d’importer des tables d’ondes et des samples courts. A ces concepts devenus des classiques, il ajoute la capacité d’utiliser deux tables d’ondes distinctes par programme, ainsi qu’une combinaison de filtres numériques et analogiques. Ses modules sont conçus pour imiter tour à tour le Microwave 1 et le Microwave 2. Son filtre est plutôt inspiré du PPG Wave. Il ne remplace pas tous ces instruments à la fois. Pris individuellement, les ancêtres ont plus de caractère distinctif à nos oreilles, chacun dans leur domaine d’excellence. Le M est en quelque sorte le barycentre sonore de ses ancêtres.
Toutefois, il apporte une ergonomie bien supérieure (seul le Microwave XT ne s’en tire pas trop mal en comparaison), grâce à des commandes directes plus fournies et une navigation bien pensée, associée à un écran couleur OLED utilisé à bon escient. Mais le M (en système 1.07) doit encore progresser : réactivité et fluidité de l’affichage, gestion des imports, amélioration de l’arpégiateur, éditeur externe pour créer les tables d’ondes utilisateur. On sent que le développement est fastidieux et se fait à ressources réduites, mais l’équipe est très à l’écoute des utilisateurs. Le M a pas mal évolué depuis sa mise en service pourtant récente, mais si on le prend pour ce qu’il fait à ce jour (1.07), on a déjà un très bon synthé qui ravira les amateurs du son de ses ancêtres, le plaisir de programmer confortablement en plus.