ESI n’en est pas à son coup d’essai lorsqu’il s’agit de proposer du matériel audio compact et abordable. Mais avec le Xsynth, la marque allemande intrigue : mini-clavier, synthé et interface audio/MIDI réunis dans un boîtier fin et léger. Reste à vérifier ce qu’il en est en situation réelle.

Depuis une dizaine d’années, le marché du matériel pour musiciens nomades s’est multiplié : mini-claviers USB, petits synthés portatifs, interfaces audio de poche… Mais rares sont les produits qui parviennent à combiner plusieurs rôles à la fois sans tomber dans le gadget (regardez dans la direction qu’il vous plaira pour trouver un ou deux exemples ;) ).
Dans un monde où musiciens et producteurs cherchent à réduire leur setup sans sacrifier leur créativité, ESI propose avec le XSynth un instrument atypique. Plus qu’un simple synthé miniature ou un clavier MIDI classique, le XSynth combine quatre fonctions en un seul appareil : synthétiseur numérique autonome, mini-clavier contrôleur sensible à la vélocité et à l’aftertouch polyphonique, interfaces audio et MIDI intégrées. Le XSynth offre une polyvalence rare pour un appareil de cette taille.
Si la promesse est séduisante, reste à vérifier en situation réelle : peut-on réellement composer, produire et jouer avec un instrument regroupant autant de fonctionnalités tout en restant aussi compact, sans se perdre dans une ergonomie pénible ? Voyons voir.
Design, prise en main et connectique du Xsynth
Au centre, la majorité de la surface est occupée par le clavier de 25 touches, très fines. Bien évidemment, il ne prétend pas égaler le toucher d’un clavier standard et pondéré, mais pour la composition ou l’exécution de séquences synthétiques, il s’en sort honorablement. L’aftertouch polyphonique, rare à ce prix, fait le job, même si, compte tenu de la finesse des touches, la progressivité reste limitée. Dans l’ensemble, le clavier demandera un petit temps d’adaptation aux musiciens habitués à un clavier plus classique.
Tout à droite, on trouve les boutons dédiés au jeu et à l’expressivité. Outre celui de l’arpeggiator, on y retrouve le glide, les octaves + et –, le bouton de maintien (hold), ainsi que les boutons de modulation et de pitch bend. Ces derniers, moins pratiques que des molettes classiques ou des strips tactiles, ont néanmoins le mérite de contribuer à la compacité du design, et on s’y habitue assez rapidement.
Au-dessus du clavier, en plus de l’encodeur de volume (ainsi que de mise en tension) et des boutons de configuration (Global, Enter, Cancel…), on retrouve principalement les commandes de contrôle du moteur de synthèse numérique, organisées autour d’un écran OLED. Avec des boutons d’accès direct aux sections oscillateurs, filtre, enveloppes, LFOs, FX, mix, matrice de modulation, macros, ainsi que quatre encodeurs, l’ensemble s’assimile très vite. L’édition se fait en sélectionnant un module, puis en ajustant ses paramètres grâce à l’écran qui les affiche et aux quatre encodeurs. Les boutons et les encodeurs offrent une résistance agréable, sans jeu excessif. Bien que l’ergonomie générale soit agréable et simple à prendre en main, la programmation complète d’un son reste relativement fastidieuse. L’écran, quant à lui, est peu lisible en plein jour.
L’ensemble est clairement pensé pour un usage nomade, capable de supporter des transports fréquents sans sacrifier la solidité.
Moteur autonome : 10 voix, 3 oscillateurs/voix, filtre multimode, 512 presets

- 01 – Xsynth – Ambipad01:24
- 02 – Xsynth – Searainside02:04
- 03 – Xsynth – Pad PAT sensibility01:11
- 04 – Xsynth – marimkey01:03
- 05 – Xsynth – Arp Wast You01:30
- 06 – Xsynth – Arp On Clouds00:47
- 07 – Xsynth – Arp RT Line00:36
- 08 – Xsynth – Arp Low Nose00:33
- 09 – Xsynth – Arp Peggio00:33
- 10 – Xsynth – AP Drums00:55
- 11 – Xsynth – DKit00:44
- 12 – Xsynth – synthbass 101:02
- 13 – Xsynth – Behind the whales00:32
- 14 – Xsynth – Velcro00:38
Oscillateurs : ondes classiques, sons complexes, et intermodulations
Chaque oscillateur peut être accordé en demi-tons et en cents, et dispose d’un suivi de clavier (Keytrack) pouvant être activé ou désactivé. Une PWM est disponible pour le premier oscillateur. Pour enrichir encore les possibilités, plusieurs types d’intermodulation sont proposés, comme la FM (Osc 3 modulant Osc 1), une modulation en anneau, et une synchronisation dure (Osc 2 et 3 synchronisés sur Osc 1). Enfin, un drift, qui introduit des micro-variations de hauteur, donne un peu de vie et ces oscillateurs un peu trop droit.
Au final, rien qu’avec les oscillateurs, sans toucher au filtre ou aux effets,, il est déjà possible de créer une grande variété de sons.
Filtre numérique et matrice de modulation
Assez efficace, ce filtre assume un caractère résolument numérique. Cela plaira à certains, mais pas à d’autres. Personnellement, je l’ai parfois trouvé un peu agressif, voire harsh. La résonance poussée à fond peut laisser entendre des artefacts numériques, et les effets d’escalier sont très perceptibles. Gageons cependant que certains sauront exploiter ces caractéristiques de manière créative.
Le Drive, quant à lui, apporte une couleur intéressante, discrète mais capable d’ajouter ce petit supplément de chaleur au signal.
Avec ses 16 cordons virtuels, la matrice de modulation est suffisamment complète pour élaborer des patchs complexes et vivants. Parmi les 35 sources, on retrouve les classiques, la vélocité, la molette de modulation, les LFO, les enveloppes (un peu molles, au passage) et leurs releases. Et, bien sûr, l’aftertouch polyphonique.
Du côté des destinations, on retrouve là encore du classique (pitch, cutoff, résonance, FM, ring mod, niveau des oscillateurs…), auquel s’ajoutent les segments individuels des enveloppes et la possibilité de moduler les autres cordons de la matrice.
Signalons la présence de macros, au nombre de quatre. Chacune peut regrouper jusqu’à trois paramètres et les assigner à un seul contrôle physique ou virtuel. Cela permet, par exemple, de créer des morphings de timbres (le volume d’un oscillateur baisse tandis que celui d’un autre augmente) ou encore de modifier simultanément le cutoff et la résonance d’un filtre. C’est particulièrement pratique en live ou lors de sessions de sound design rapides. Dommage toutefois que le nombre de paramètres disponibles à l’assignation reste limité (22 au total).
Effets et arpégiateur sync
La première section inclut un EQ passe-bande, un compresseur, une distorsion avec trois types (overdrive, distortion et fuzz), un effet WahWah et un LoFi. La deuxième section est consacrée aux réverbérations, avec huit types proposés : 2 Halls, 3 Rooms, 2 Stages et une Plate. La troisième section, quant à elle, se consacre aux delays, modulés ou non, avec notamment plusieurs types de chorus et de delays stéréo.
Les paramètres ne sont pas très nombreux, au maximum six par effet. Pour la plupart, cela ne pose pas de problème et évite de se perdre dans des pages de réglages. Cependant, les réverbérations apparaissent un peu limitées, ne disposant que de trois réglages (Post Level, Time et PreDelay), on peut espérer une amélioration à ce niveau.
Malgré cela, ces réverbérations, tout comme les delays, remplissent agréablement l’espace sonore. Cette section d’effets est d’une qualité honnête, suffisante pour enrichir les sons du XSynth, tout en ne prétendant pas remplacer des effets externes dédiés.
L’arpégiateur du Xsynth est classique, mais suffisamment flexible pour la plupart des usages. L’activation se fait simplement via la touche ARP, dont la LED clignote au tempo. On retrouve les modes habituels – Up, Down, Up/Down, Random, Played et Chord – mais des patterns additionnels sont disponibles via l’éditeur logiciel, répartis en deux banques de 128, ce qui laisse de quoi faire. Bien sûr, la synchronisation au tempo (interne ou externe) est disponible, tout comme un mode latch. À noter également que les notes générées sont transmises en MIDI, permettant d’animer d’autres instruments.
Interface audio, MIDI et drivers
L’interface audio sert donc surtout à capturer rapidement le son du synthé ou à intégrer une source externe ne nécessitant pas de préamplification, mais elle ne remplace pas une interface dédiée.
Du côté MIDI, le Xsynth s’en sort beaucoup mieux. La connexion USB-MIDI plug-and-play fonctionne parfaitement avec les DAW modernes (drivers ASIO/EWDM pour Windows inclus), et l’appareil offre aussi des entrées et sorties MIDI via mini-jack TRS. Attention toutefois : aucun adaptateur DIN n’est fourni, il faudra donc prévoir vos propres câbles pour connecter le synthé à des modules ou séquenceurs classiques.
Éditeur macOS/Windows : gestion complète des paramètres et des presets
Le programme n’est cependant pas exempt de limites. L’ergonomie reste assez basique, avec un rendu graphique fonctionnel mais sans fioritures : pas de visualisation dynamique des modulations, ni de waveform en temps réel pour les oscillateurs. Les utilisateurs habitués à des éditeurs plus modernes et plus sophistiqués peuvent donc rester sur leur faim. La compatibilité est correcte, avec des versions pour Windows et macOS, mais il n’existe pas de déclinaison Linux ni de plugin VST/AU pour piloter directement le synthé depuis une DAW. Malgré ces réserves, le logiciel fait le job en permettant de configurer rapidement le synthé, de gérer les presets et de faciliter les réglages fins.