Comme nous l’avons vu précédemment, la construction d’une gamme nécessite le respect de certains intervalles bien précis entre les notes. Pour cela, en fonction de la tonique choisie, il faudra employer un certain nombre de dièses ou de bémols – des altérations, représentées en début de chaque ligne de la partition à côté de la clef – pour pouvoir coller au mode (majeur ou mineur) voulu.
Par effet de miroir, on peut utiliser cette caractéristique pour déduire la tonalité d’un morceau.
L’armure
Une gamme donnée comprendra donc toujours les mêmes altérations. Ainsi, Sol majeur ne comporte que l’unique altération Fa#, alors que Ré b majeur en comporte cinq (les versions « bémolisées » de Si, Mi, La, Ré et Sol). Ces altérations sont inscrites en tout début de chaque portée, à côté de la clé. On dit d’ailleurs qu’elles sont « à la clé ». Elles correspondent en quelque sorte à la signature d’une gamme donnée – terme d’ailleurs employé par les Anglo-saxons. En France, nous utilisons le terme d’ « armure », qui découle du concept d’ « armoiries » ou blason. Bref, dans les deux cas, nous avons l’idée de quelque chose qui caractérise la tonalité.
La tonalité à partir de l’armure
Toutefois, l’armure ne rend que partiellement compte de la tonalité d’une œuvre. Mais avant de poursuivre, il faut savoir que les altérations de l’armure se suivent toujours dans le même ordre :
FA-DO-SOL-RE-LA-MI-SI pour les dièses.
SI-MI-LA-RE-SOL-DO-FA pour les bémols.
Pour commencer à cerner la tonalité d’un morceau à partir de son armure, il faut procéder de la manière suivante. Si l’on a des dièses, on prend le dernier dièse (de gauche à droite), et on l’augmente d’un demi-ton.
Exemple : avec 2 dièses à la clé, FA et DO, on obtient RE majeur. Si l’on a des bémols, on prend l’avant-dernier bémol, et … on n’y touche pas ! Exemple, avec 3 bémols à la clé, SI, MI et LA, on obtient MI bémol majeur. S’il n’y a qu’un seul bémol à la clé, on obtient FA majeur. Oui, mais… Rappelons-nous une chose : un même ensemble de notes peut aussi bien correspondre à une gamme majeure qu’à sa relative mineure ! C’est pourquoi la simple lecture de l’armure d’un morceau ne permet en fait pas de définir avec certitude si l’on est en présence d’une tonalité majeure, ou bien de sa relative mineure. Dans l’exemple précédent concernant les dièses, on pourrait donc tout aussi bien être en Ré majeur qu’en Si mineur.
La même chose vaut pour l’exemple des bémols : il n’est pas possible de définir, à la simple lecture de l’armure, si l’on est bien en Mi bémol majeur ou alors en Do mineur, sa relative.
C’est là qu’intervient un élément important: la dernière note du morceau ! En fait, dans un très grand nombre de cas, le morceau se terminera par la tonique de la gamme employée, ce qui permettra la plupart du temps de confirmer définitivement la tonalité du morceau.
Le cycle des quintes
Et puisque nous parlons de tonalité et d’armure, il est un outil très puissant qui permet de repérer d’un seul coup d’œil à la fois les altérations d’une gamme donnée, sa relative majeure ou mineure, et les relations entre toutes les notes de la gamme chromatique.
Cet outil s’appelle le « cycle des quintes ». A l’extérieur de ce cycle, nous avons les noms des gammes majeures. Leurs gammes mineures relatives sont quant à elles inscrites à l’intérieur du cycle des quintes.
D’ailleurs, s’il est convenu de l’appeler comme cela, c’est un nom qui ne lui correspond que partiellement. En effet, en consultant le cycle des quintes dans le sens horaire, on découvre les tonalités générées par l’ajout de dièses, et l’on progresse effectivement par quintes. Par contre, dans le sens antihoraire, ce sont les tonalités générées par l’ajout progressif de bémols à la clé que l’on découvre, et là, on progresse… par quartes ! Dans un sens comme dans l’autre, on fait le tour de l’ensemble des tonalités correspondant aux 12 degrés de l’échelle chromatique.
Les tons voisins
Pour conclure cet article, un petit mot sur les « tons voisins ». Tout d’abord, il ne faut pas les confondre avec les « tons » comme unités de mesure des intervalles (cf article 1). Les tons voisins d’une gamme donnée sont tout d’abord sa relative, et les tonalités situées immédiatement à gauche (une quarte au-dessus) et à droite (une quinte au-dessus) sur le cycle des quintes. Enfin, on y ajoute les relatives respectives de ces deux dernières gammes.
Chaque gamme dispose donc de cinq tons voisins. Par exemple, pour Sol majeur, les tons voisins seront :
- Mi mineur (sa relative)
- Do majeur (sa quarte supérieure)
- Ré majeur (sa quinte supérieure)
- La mineur (relative de Do majeur)
- Si mineur (relative de Ré majeur)
Ce sont des tonalités qui ont donc, soit la même armure (pour la gamme relative), soit une altération de différence avec la gamme de départ. À noter que lors d’un travail de composition ou d’improvisation, il est intéressant d’enchaîner les tonalités voisines pour obtenir rapidement des résultats. Je dis ça, je ne dis rien…
Mais avant de nous occuper de composition – et plus précisément d’harmonisation – nous allons, dans le prochain article, nous pencher sur la génération d’accords.