Dans l'article précédent, nous avons vu que l'un des principaux attributs des échelles symétriques était le fait d'être « à transposition limitée ».
D’ailleurs, pour compléter ce que nous avons pu dire la semaine dernière autour de ce concept, je me permets de reprendre la définition que proposent Abromont et Montalembert dans leur Théorie de la Musique : « est dit à transposition limitée, tout accord ou échelle retrouvant l’intégralité de ses notes constitutives en moins de douze transpositions successives au demi-ton. » Et dans l’article d’aujourd’hui, je vous propose de commencer à découvrir d’autres structures qui partagent cette caractéristique, j’ai nommé les modes de Messiaen. Mais commençons par un mot sur leur créateur.
Olivier Messiaen
Olivier Messiaen est un compositeur, théoricien et pédagogue musical français né en 1908 et décédé en 1992. Il est l’un des principaux acteurs de l’avant-garde française et internationale, et ce de multiples manières. D’une part il a été, en tant que professeur au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, le mentor de figures telles que Pierre Boulez, Pierre Henry, mais également Karlheinz Stockhausen ou encore Iannis Xenakis. Mais il a surtout été l’un des compositeurs « classiques » les plus significatifs du XXe siècle. Son travail toujours alimenté par une profonde ferveur religieuse s’est articulé principalement autour de sa passion pour le rythme ainsi que pour le chant des oiseaux pour l’étude duquel il s’est d’ailleurs formé à l’ornithologie, et autour de ses constantes recherches concernant ce qu’il appelait la « couleur » sonore. C’est dans le cadre de ses dernières recherches qu’il a développé les modes harmoniques qui depuis portent son nom et auxquels nous consacrons l’article d’aujourd’hui. Comme nous le verrons, Messiaen n’est pas forcément à l’origine de tous les modes présentés ici, mais il les a réunis en une sorte de boîte à outils compositionnelle personnelle.
Mais trève de bavardage, voici pour l’article d’aujourd’hui les trois premiers modes initiés par le compositeur.
Mode de Messiaen numéro 1
Le premier mode de Messiaen nous est bien connu, puisqu’il s’agit de l’échelle unitonique dont nous avons parlé la dernière fois. Je vous la présente à nouveau ici :
Pour chacun des modes présentés ici et dans le prochain article, je vous proposerai leur structure exprimée en demi-tons. Dans le cas présent, comme son nom le suggère, sa structure demi-tonale est la suivante : 2–2–2–2–2–2.
Je vous renvoie à l’article précédent pour (re-)voir son unique transposition possible ainsi que son harmonisation.
Mode de Messiaen numéro 2
Le deuxième mode de Messiaen ne nous est pas inconnu non plus, puisqu’il s’agit de la gamme demi-diminuée (cf article 59) :
Sa structure demi-tonale est la suivante : 1–2–1–2–1–2–1–2.
La gamme demi-diminuée peut être transposée trois fois :
En ce qui concerne l’harmonisation, les modes de Messiaen proposent souvent plusieurs harmonisations possibles, cela provenant du fait que l’on peut souvent constituer à partir d’une même fondamentale des tierces majeures ou mineures tout en restant dans le même mode.
Voici un exemple d’harmonisation pour la gamme demi-diminuée :
Mode de Messiaen numéro 3
Le troisième mode de Messiaen est le suivant :
Voici sa structure demi-tonale : 2–1–1–2–1–1–2–1–1
Le troisième mode de Messiaen peut être transposé quatre fois :
Et voici un exemple d’harmonisation :
Je vous propose de nous retrouver la prochaine fois afin de poursuivre notre présentation des modes établis par Olivier Messiaen. Nous en profiterons également pour nos pencher rapidement sur le cas particulier de la gamme chromatique.
D’ici là, je vous souhaite une excellente semaine musicale !