Dans les derniers articles, nous nous sommes penchés sur l'étude de la nature et de l'élaboration des gammes synthétiques. Ce préalable était nécessaire pour pouvoir appréhender le sujet qui nous intéresse aujourd'hui, à savoir la gamme majeure harmonique. Je vous propose donc maintenant de nous lancer dans l'étude des modes issus de cette gamme et leur utilisation.
Présentation de la gamme et des modes qui en découlent
La gamme majeure harmonique est une gamme synthétique. Nous avons pu voir dans les articles précédents qu’elle pouvait être fabriquée de deux manières différentes : soit par l’association d’un tétracorde majeur et d’un tétracorde harmonique, soit par la sensibilisation de la 13e (sensible descendante sur la dominante). Et si cela vous amuse, je vous laisse chercher ses modes dans la série des gammes et modes synthétiques que nous avons construits dans les derniers articles ! Vous les trouverez intégralement listés dans l’illustration suivante :
Ici, découvrons ensemble l’harmonisation de cette gamme par triades :
Et là, l’harmonisation de cette gamme par accords de septième :
Le mode ionien b6
Le premier mode issu de la gamme majeure harmonique est le mode ionien b6. C’est un mode particulièrement intéressant car il porte une identité double : majeure par son premier tétracorde et mineure de par son tétracorde harmonique d’habitude typique de la gamme mineure harmonique. La bémolisation du sixième degré en fait un mode facilement utilisable avec les accords de septième majeurs enrichis d’une treizième mineure :
D’ailleurs de par son utilisation fréquente avec ce type d’accord à treizième mineure, ce mode est souvent appelé également « ionien b13 ». Il fonctionne également très bien quand nous ajoutons une neuvième, comme dans l’exemple suivant :
Le mode dorien b5
Le mode dorien b5 est le deuxième mode issu de la gamme majeure harmonique. Ce mode partage avec les gammes demi-diminuée et « half-diminished » que nous avons étudiées dans l’article 59 notamment la tierce et la septième mineures ainsi que la quinte diminuée. De ce fait, c’est donc sans surprise que ce mode trouve lui aussi principalement son usage avec les accords de septième à quinte diminuée (7b5), comme dans l’exemple suivant :
Par enharmonie, un accord construit selon ce mode peut être considéré comme un assemblage de deux accords : le premier, en basse, basé sur la tonique (ici un Ré mineur 7) surmonté d’une triade en Mi majeur (avec l’enharmonie au niveau du La b qui serait à penser dans ce cas plutôt comme un Sol #) :
Le mode phrygien b4
Le mode phrygien b4 est le troisième mode issu de la gamme majeure harmonique. Le phénomène d’enharmonie observé dans le mode dorien b5 s’exprime ici aussi, et la quarte diminuée peut ainsi être facilement confondue avec une tierce majeure. Cette pseudo tierce majeure, associée à une quinte juste et une septième mineure, peut ainsi permettre à ce mode de s’exprimer dans le cadre d’un accord de dominante, trouvant donc sa principale raison d’être dans un cadre tonal et non modal. Il s’avère qu’il est toutefois assez peu utilisé.
En attendant la suite de notre étude des modes issus de cette gamme, je vous invite à faire vos propres expérimentations, et je vous retrouve la semaine prochaine !