Continuant sa ligne de produits basée sur la modélisation analogique, FXpansion présente DCAM Dynamics, un ensemble composé de quatre outils de traitement de la dynamique. Pour un résultat explosif ?
FXpansion semble suivre une routine de production qui, toutes proportions gardées, pourrait être rapprochée de celle de Native ces dernières années. En effet, il ne se passe plus un trimestre (voire moins) sans annonce de sortie d’un logiciel ou d’un autre. Apparemment, la technique de modélisation de circuits analogiques qui est maintenant la patte de l’éditeur, lui donne de nombreuses idées de réalisation. Depuis la sortie de BFD2 (décembre 2007) et de l’ensemble DCAM Synth Squad (août 2009), la quasi-totalité des logiciels les ayant suivis ont intégré un ou plusieurs composants reprenant cette technique. Ainsi Geist, Tremor, Etch embarquent, ou sont directement dérivés, des effets inclus chez leurs aînés. L’ensemble DCAM Dynamics n’y échappe pas ; les quatre processeurs inclus (DCAM BusComp, DCAM ChanComp, DCAM CrossComp et DCAM EnvShaper) sont basés sur la modélisation de circuits, et les deux premiers découlent directement des Bus Compressor et Channel Compressor que l’on peut trouver dans les pages Mixer de BFD2 et autres plug-ins de la maison (on notera avec intérêt le fait que Andy Simper, créateur du Cytomic The Glue, a, à l’époque où il travaillait pour FXpansion, participé à l’élaboration des deux compresseurs). Les deux autres sont totalement originaux, selon les dires des développeurs maison, notamment Paul Chana dans les forums de KVR.
Introducing FXpansion DCAM Dynamics
|
La suite est vendue 79 euros directement sur le site de l’éditeur, uniquement via téléchargement. Compatible Mac/PC (à partir de Windows 7 et Mac 10.6.2, Intel seulement), l’ensemble est fourni sous forme de plug-ins VST, AU et RTAS en versions 32 et 64 bits. Pas de standalone, normal, on a affaire ici à des effets, pas des instruments. L’autorisation s’effectue par chalenge-réponse via l’utilitaire maison, le FX License Manager, en renseignant le numéro de série fourni à l’achat, et l’on peut autoriser jusqu’à trois machines simultanément, merci.
Nuke them !
Les noms des différents compresseurs proposés par FXpansion parlent d’eux-mêmes, pour trois d’entre eux du moins, le DCAM CrossComp pouvant sembler plus ésotérique, même si à l’usage on comprend tout de suite de quoi il s’agit. Mais on y reviendra. Les plugs partagent tous une interface graphique assez austère (on aurait presque l’impression de voir les premiers modules de Reaktor) mais lisible et ergonomique.
Commençons par le premier outil de l’ensemble, le DCAM ChanComp. Un simple survol de l’interface, des réglages et de leurs noms révèle immédiatement la source d’inspiration du plug-in : le dénommé Universal Audio (puis Urei) 1176 Limiting Amplifier né en 1966 (on verra que FXpansion dit couvrir les différentes versions de la bête via un réglage inédit et bien conçu). Pour un petit historique, un rappel de quelques fonctions et éventuelles comparaisons, voir aussi ce test.
Au menu, les traditionnels potards d’Input et Output, le premier agissant réellement sur la compression, ce qui n’est pas le coup de toutes les émulations disponibles. Ensuite les différents taux correspondent bien à ceux de l’original, et le mode All-Buttons (aussi appelé British Mode, ou Squash) est inclus, grâce au dénommé Nuke! (ça promet…). On retrouve bien évidemment les deux contrôles d’attaque et relâchement, avec quelques changements puisqu’ils ne reprennent pas la graduation originale (de 1 à 7), mais affichent à la place la durée réelle des réglages : pour l’Attack, de 0,02 milliseconde (si, si) à 1,2 ms, pour le Release de 50 ms à 1,2 s. Autre changement, la course des rotatifs est inversée par rapport à celle de ses modèles : sur un 1176, l’attaque la plus rapide est à fond à droite, sur la version FXpansion, elle est à fond à gauche (même chose pour le Release). Le VU-mêtre à aiguille est présent, proposant deux affichages (moins que le 1176, donc) : le niveau de sortie et la réduction de gain (G.R. via un bouton dédié).
Plus originale est la section Master, qui offre d’abord trois boutons propres à la lutherie informatique : Hi Def permet de basculer en oversampling x4 au lieu du x2 d’origine (meilleure qualité mais conso CPU plus élevée), Bypass (faut-il vraiment l’expliquer ? Ben non…) et Learn qui active le Midi Learn pour tous les contrôles ; il suffit de cliquer sur le paramètre (devenu vert) et de bouger le contrôleur sur la surface ou le clavier externe. Simple et efficace, merci. Mais surtout ChanComp intègre un potard Mix, grâce auquel la compression parallèle peut être obtenue directement dans le plug sans passer par les routines habituelles (envoi dans un bus, etc.). Et l’éditeur nous gratifie pour finir d’un réglage Bias, censé reproduire plusieurs valeurs de condensateurs utilisés dans les différentes versions du 1176. Ne disposant d’aucune des versions hardware existantes, on ne pourra que comparer les différentes sonorités découlant des réglages.
Place au son. Un petit mot sur la méthode employée, qui fera peut-être encore râler quelques-uns : je pars de fichiers tapant à –0,5 dB, et j’essaierai à chaque fois de coller à ce résultat en fonction du taux appliqué, le tout mesuré avec les VU-mêtres des plugs (réduction de gain et volume de sortie), ce qui permettra à la fois de voir le comportement des plugs et celui de leurs outils de mesure. Pour commencer, une boucle de batterie avec une attaque rapide (0,02 ms), un release relativement rapide (220 ms) et un taux de compression de 8:1, avec un réglage d’Input donnant une réduction de gain de 5 dB.
On reprend le même réglage en passant par différentes positions de Bias, avec quelques modifications de l’Input, le tout étant de rester dans les 5 dB de réduction.
Notons qu’à +100, le VU-mêtre en mode G.R. ne réagit, sur cet exemple, qu’à partir d’un gain d’entrée de 11,5 dB, avec un comportement plus qu’étrange, sans que l’on entende réellement de compression, à moins de pousser tous les réglages. Exemple suivant, d’abord avec oversampling normal puis Hi Def.
On finit pour la batterie avec Nuke!, avec divers attaque et release courts pour l’effet d’écrasement classique, puis avec un dosage Mix à 33 %, instant N.Y. comp…
Sur cet exemple vocal comportant d’assez grandes variations d’amplitude, les réglages sont : Attack à 3 qui permet de « coller » aux montées vocales, Release 5, ratio de 4:1 et Input réglé pour obtenir 5 dB de réduction de gain.
On continue avec les mêmes réglages d’attaque, et un taux de 8:1, Input modifié pour obtenir 10 dB de réduction. Sur une voix, c’est beaucoup, mais le fichier est très dynamique.
Le lissage est impressionnant, tout en restant musical, si une telle perte de dynamique peut encore être qualifiée de musicale… On termine par une guitare électrique que l’on veut « salir », en accentuant l’impact des mutes, avec divers réglages de Bias.
Bien sûr, certaines transitoires après traitement sont assez violentes, voire inutilisables, mais elles ont ici valeur d’exemple des possibilités du plug et non pas d’utilisation musicale. Quoique, dans un contexte…
Prenons le Bus 4000
Ce n’est un secret pour personne, le BusComp créé par Andy Simper puis repris par les développeurs de FXpansion, amendé, modifié, bref, revu et corrigé, est inspiré du compresseur de Bus de la SSL 4000. Simper a d’ailleurs développé son Cytomic The Glue comme une version survitaminée dudit compresseur.
Première section, Sidechain, dédiée à la détection du signal entrant, dotée d’un filtre passe-haut très bien venu, puisqu’il permettra de sélectionner la plage de fréquences au-dessus de sa fréquence de coupure (de 20 Hz à 5 kHz) utilisée pour compresser le signal entrant. En clair, et rappelons-nous qu’il s’agit d’un compresseur de bus (donc devant traiter des signaux complexes regroupant plusieurs sources), s’il y a trop de bas dans le signal à compresser (ce qui est somme toute normal, vu que c’est dans le bas du spectre qu’il y a le plus d’énergie), il suffira de « débarrasser » le signal qui commandera l’action du compresseur de ce grave encombrant (voir aussi encadré). Avec un réglage adapté, on peut imaginer qu’un submix de batterie pourra être compressé uniquement via son contenu en cymbales, par exemple (on en reparlera aussi avec le CrossComp).
|
On retrouve les réglages d’enveloppe, Attack et Release, ainsi que leurs valeurs caractéristiques (le fameux mode Auto y compris), même si l’on aurait pu souhaiter un réglage continu pour toutes ces valeurs, plutôt que le crantage de six et cinq positions (de même pour les autres plugs de l’ensemble). Les réglages de compression sont les habituels Threshold, MakeUp (le gain pour compenser la réduction) et les trois positions de Ratio de l’original, 2, 4 et 10. La section Master regroupe les déjà mentionnés Bypass, Hi Def et Learn, plus un bouton Saturate, qui semble n’être actif que dans le circuit de Sidechain, et non sur l’Output général (je n’ai pas eu de réponse de la part de FXpansion sur ce point). Pour finir, on retrouve les trois In, Out et Mix et l’on peut basculer sur le VU-mètre de niveau de sortie à niveau de réduction de gain via le traditionnel bouton G.R. Voici quelques exemples d’utilisation du compresseur. D’abord un mix batterie (BD, Snare, HiHat, Toms, Overhead L/R), le HPF non actif et différents réglages.
Ensuite, le même réglage, mais avec le HPF paramétré de façon à diminuer l’impact de la grosse caisse dans le Sidechain.
Très efficace, le plug sera aussi utile sur un Bus que sur le Master, et la possibilité de sortir du signal de commande le surplus de graves, donc d’énergie, est un plus bienvenu.
The great designer
Avant de passer au CrossComp, arrêtons-nous sur l’EnvShaper. Comme nombre de ses semblables, ce plug de gestion simplifiée des transitoires et du sustain est inspiré par le célèbre Transient Designer de SPL, qui lui-même a été porté en version logicielle par Universal Audio et par son concepteur. Un petit rappel technique : le Transient Designer repose sur la technologie Differential Envelope Technology signée Ruben Tilgner, l’effet est tout analogique, et dans sa version stéréo utilise huit suiveurs d’enveloppe et deux VCA. Par canal, un premier suiveur d’enveloppe analyse l’attaque du signal entrant, un deuxième réagit aux réglages de l’utilisateur, le Transient Designer calcule la différence entre les deux résultats et délivre au VCA le voltage correspondant (plus d’info ici).
Bien entendu, FXpansion y a ajouté quelques petites choses de son cru, comme et le filtre HPF inclus dans la section Sidechain, cette fois dotée d’un sélecteur de voix pour les fichiers stéréo (L, L+R, R) et un bouton Listen permettant d’entendre le signal de contrôle. Du côté des contrôles directs, on retrouve le côté spartiate de l’original, Attack et Sustain, avec cependant un potard supplémentaire, Signal Bias, qui privilégie selon sa position les transitoires courtes ou plus longues. On dispose aussi du bouton Saturate. Enfin, la section Master offre les trois In, Out et Mix, ainsi que les boutons Hi Def, Bypass et Listen.
Écoutons tout de suite la bête. D’abord avec un pattern de batterie (fichier stéréo), placé dans une réverbe très présente, puis après divers traitements, soit pour accentuer la réverbe, soit pour la diminuer, avec possibilité d’aller jusqu’à des effets de Gate.
Une autre utilisation, diminuer la repisse sur un premix batterie stéréo live, tout en accentuant légèrement les sons de la batterie (grand merci à Alex Jacquemin)
Pour finir, une voix de très mauvaise qualité, dont on veut enlever au maximum la résonance de pièce.
Indéniablement, le plug fait son effet, la présence du Signal Bias étant un vrai plus par rapport à ses concurrents directs, même si le Transient Designer original montre peut-être une plus grande efficacité, et une relative douceur dans le traitement, là où l’EnvShaper passe parfois d’un état à l’autre de façon trop abrupte.
Under The CrossComp
Finissons avec la dernière composante de l’ensemble, le CrossComp. Il s’agit à la base d’un BusComp, sur lequel l’éditeur a greffé de nombreuses fonctions offrant une compression via et sur une plage de fréquences à sélectionner, mais loin de la parfois complexe architecture d’un compresseur multibande. Toujours au menu, la section Sidechain et son filtre, plus un ensemble de quatre sélecteurs d’entrée (donc de type de signal qui sera analysé) : In, le même que celui à traiter, Ext, un autre signal (en fonction des possibilités de la DAW), Low, la plage de fréquences en-dessous du réglage effectué, High, la plage de fréquences au-dessus de la fréquence de coupure ; pour ces deux derniers le réglage en question n’est pas celui du HPF (toujours en activité), mais celui effectué dans la section X-Over. Celle-ci comporte un rotatif Frequency, qui permet de définir le point central entre Low et High. Ensuite les sections Pass-Thru et Process définiront quelles bandes de fréquences passent sans être affectées et quelles bandes seront traitées. La section Envelope offre Attack et Release en continu, avec un bouton Fast accélérant le retour à la normale du release. Le reste des réglages, Threshold, Knee, Ratio (1:1 à 60:1) et MakeUp n’appellent pas de commentaires particuliers.
Saluons cependant le très beau visualiseur, avec ces indicateurs de niveaux d’entrée, de Sidechain, de réduction de gain et de sortie, ainsi qu’une représentation temps réel de l’action des quatre paramètres, avec les fameuses pentes Ratio-Knee. Enfin, la section Levels, permet d’ajuster ceux de Pass Thru et Process, avec inverseur de phase et bouton de saturation pour chaque. Très utile, la partie Listen offre sept choix de monitoring du signal à quasi toutes les étapes du parcours de l’audio. Bien entendu, la section Master est identique à celles des autres plugs. Pour résumer, même s’il est capable d’une compression « normale » (pleine bande), l’intérêt du CrossComp est de pouvoir compresser une seule bande de fréquences, son utilisation sur un Bus pouvant permettre un subtil mélange du signal original et du signal compressé, soit par les faders respectifs, soit (et ce sera mieux pour le respect de la phase) via les potards et sélections de Pass-Thru et Process. Voici quelques exemples de traitement d’une bande de fréquences, au sein du fichier batterie déjà utilisé. Le dosage du signal original et du signal traité est entièrement réalisé dans le plug, grâce aux possibilités de routing et de monitoring internes.
Téléchargez les fichiers sonores : flac article
Bilan
Les habitués des produits FXpansion espéraient secrètement que certains des effets inclus dans les logiciels de l’éditeur soient un jour disponibles, et notamment ceux de compression. C’est chose faite avec ce bundle bien conçu qui, s’il ne couvre pas la totalité des outils nécessaires au traitement de la dynamique (expandeur, réel compresseur multibandes, gate, etc.), n’en propose pas moins une version assez complète de la compression dite traditionnelle, incluant aussi bien compression de tranche, de bus que traitement façon Transient Designer, et le CrossComp plutôt original. Réglages à l’identique (pour les plugs inspirés de) et nouveautés remplissent parfaitement leur rôle, pas de chichis (le choix de GUI spartiate), pas de bugs, une réussite indéniable. Les possesseurs d’émulations concurrentes ne se poseront peut-être pas la question, par exemple s’ils sont en possession des produits équivalents chez UA (quoique le ChanComp avec son Bias peut faire pencher la balance), mais si l’on est en recherche de plugs pour compléter (remplacer…) ceux de sa DAW, DCAM Dynamics se révèle une solution de choix par son approche quatre outils-quatre fonctions (même si les plugs peuvent aisément être utilisés dans un autre contexte que celui auquel ils sont destinés) et sa personnalité bien marquée. Pour vous faire une idée, FXpansion propose une démo Mac et PC et cerise sur le gâteau, une version gratuite du Bus Compressor, le DCAM FreeComp…