Après avoir accouché du DR-008, l'un des Drums Sampler les plus aboutis qui soit et après avoir révolutionné le petit monde de la batterie virtuelle avec BFD, FXpansion revient avec Guru, une boîte à rythmes virtuelle qui remet les pendules de la concurrence à l'heure, et celles du groove à 240 BPM.
Après avoir accouché du DR-008, l’un des Drums Sampler les plus aboutis qui soit et après avoir révolutionné le petit monde de la batterie virtuelle avec BFD, FXpansion revient avec Guru, une boîte à rythmes virtuelle qui remet les pendules de la concurrence à l’heure, et celles du groove à 240 BPM.
Il faut bien l’admettre : depuis l’âge d’or des groovebox et autres TR, le marché des boîtes à rythmes peine à se renouveler, au point que la révolution la plus marquante de ces dernières années concernant le groove fut informatique : avec l’arrivée du format REX et des slicers tels que BombThatBeat, PhatMatik ou encore Reflex, les utilisateurs ont découvert une nouvelle façon de travailler le rythme en torturant des boucles.
Et depuis ? Plus rien. En dépit de Drums Samplers évolués et de batteries virtuelles bardées de Go de samples, force est de reconnaître qu’il ne s’est pas passé grand-chose dans le petite monde du « Kick-Snare-Hat »… jusqu’à l’arrivée de Guru, développé par Devine Machine pour le compte de FXpansion, l’éditeur de la DR-008 et de BFD.
Une façon simple de présenter Guru serait de le désigner comme une octuple boîte à rythme. Le logiciel embarque ainsi 8 « engines » (« moteurs » en bon français) qui disposent chacun de 16 pads (pour charger des samples) et peuvent, chacun, gérer jusqu’à 24 patterns différents, le tout étant complété d’une section d’effets.
Mais au-delà de ce côté « super boîte à rythmes », Guru est avant tout un logiciel pensé pour le jeu en temps réel comme on en a rarement vu… et comme nous allons le voir.
Prise de contact
Livré sur DVD, Guru est accompagné d’une documentation anglaise relativement exhaustive et en couleurs s’il vous plait ! Copiant près de 3,4 Go de samples sur le disque dur (des kits, samples et boucles issu de la banque de BFD ou signée YellowTools, Gearshifts, Wizoo…) l’installation ne pose pas de problème particulier et ne réclame qu’un petit numéro de série en guise de protection : une intention délicate en ces temps où la mode est aux dongles et autres certifications en ligne lourdingues… Profitons-en pour rappeler que le logiciel est utilisable comme application autonome (stand-alone), comme application ReWire ou comme plug-in aux formats VST, DXi, AudioUnit ou RTAS sous Windows 2000/XP & Mac OS X.
Au lancement du logiciel, l’interface offre indéniablement un air de déjà vu : le faute en revient à 16 pads noirs qui occupent un quart de l’interface et qui nous rappellent au bon souvenir de la MPC d’Akai, une référence en matière d’ergonomie. Leur utilité ? Déclencher des samples bien entendu, le bloc se divisant en 4 lignes : perc, hi-hat, snare et kick. Notons enfin que ces pads sont surmontés de 2 octaves de touches façon Groove Box qui, sans surprise, servent à stocker puis déclencher jusqu’à 24 différents patterns pour chaque Engine.
A gauche des pads, l’explorateur de fichiers permet de naviguer via des onglets dans les patterns, les kits, les samples One Shot (hit) ou les boucles, le tout avec une fonction de pré-écoute en temps réel. A défaut d’un moteur de recherche, Guru propose un système de favoris très simple à utiliser pour retrouver en un clic tous vos grooves ou échantillons préférés. Mais le plus fort est à voir du côté des boucles car non seulement Guru gère le découpage à la volée de ces dernières (suivant différents modes), mais il est de plus en mesure de reconnaître le contenu audio de chaque slice. Exemple : via un simple cliqué-glissé, vous incorporez un fichier WAV dans le biniou. Guru le découpe aussitôt en slices et fait un mapping « intelligent » sur les 16 pads, mettant les kicks avec les kicks, les snares avec les snares et les hi-hats avec les hi-hats. Plutôt impressionnant, même si l’algorithme de détection fait souvent des erreurs (notamment sur des grooves acoustiques ou les motifs trop complexes). En tous cas, on ne peut s’empêcher, lorsque ça marche, de crier au génie : d’un coup d’un seul, toutes les boîtes à rythmes de la création viennent de prendre un sacré coup de vieux…
A l’opposé de ce 'browser’, dans le coin inférieur droit, se tient le bloc de commande global. Ce dernier permet de lancer/stopper l’enregistrement sur l’Engine en cours de sélection, de régler son volume et son accordage, mais aussi de définir le tempo de l’Engine 1 et les signatures rythmiques des autres Engines (ces derniers se calant sur le tempo de l’Engine 1 et pouvant accepter diverses signatures rythmiques, du classique 4/4 au moins évident 3/7). On notera à cet endroit la présence d’un bouton Undo qui, s’il ne propose qu’un niveau d’annulation, permet tout de même de revenir sur une saisie malheureuse. Enfin, un slider Groove complète le tout. Il s’agit d’une sorte de Shuffle sophistiqué qui joue sur le placement comme sur la vélocité des notes en recourant à des grilles prédéfinies.
Séparant l’interface en 2, une barre noire permet de sélectionner l’Engine sur lequel on travaille et d’accéder aux 7 différents éditeurs qui s’afficheront dans la partie supérieure du logiciel. Vu que c’est dans ces derniers que l’on passe l’essentiel de son temps lorsqu’on joue avec Guru, une description s’impose…
Séquence Emotion
Pattern
La fenêtre Pattern reprend l’ergonomie d’un Drum Edit traditionnel, avec une organisation façon piano roll : en ordonnée, les différents instruments chargés sur les pads, en abscisse les différents pas de votre groove (lesquels sont définissables de 1 à 128), le tout formant une grille dans laquelle il suffit de cliquer gauche ou droit selon que vous voulez placer un kick ici, un coup de caisse claire là.
Rien de nouveau sous le soleil, pourrait-on croire, sauf que question ergonomie, les développeurs nous donnent une petite leçon de savoir faire… Utilisant judicieusement le cliqué/glissé et les touches Control et ALT, l’interface Pattern de Guru permet de séquencer ultra rapidement des choses qui prennent des plombes avec les séquenceurs classiques : roulement de caisse avec fondu d’entrée ou de sortie (fade in/out), affectation des vélocités, tous se fait en quelques clics dès qu’on a appris les 3,4 manips de base.
Graph
Graph permet pour sa part de tracer des courbes d’automation pour les différents contrôleurs MIDI. De cette façon, on pourra bien sûr faire évoluer le volume ou le panoramique d’un groove, mais aussi piloter la fréquence de coupure et la résonance d’un filtre, jouer sur la hauteur tonale des samples (Pitch et Fine Pitch) ou, plus original, définir des répétitions (Repeat), introduire des syncopes (Shift) ou jouer avec le point de départ de chaque échantillon (scrub). Bien entendu, la résolution longueur de ces courbes est liée au nombre de pas du groove. Le tout se manipule d’un trait de souris et jouit d’une interface extrêmement claire. Rien à redire…
Sample Inside
Pad Edit
Comme son nom l’indique, la Pad Edit View sert à éditer le contenu et le comportement d’un pad. Cela passe d’abord par un éditeur de samples en bonne et due forme, qui offre la possibilité de définir le début et la fin de l’échantillons, mais aussi de définir son enveloppe de volume et une enveloppe FX qui pourra affecter, dans des proportions définissables, la hauteur tonale du sample (Pitch) et/ou la fréquence de coupure du filtre. Les enveloppes sont de types AHR (Attack, Hold, Release pour Attaque, Maintien et Relâchement) et sont instantanément visualisée sur la forme d’onde qui occupe l’essentiel de l’écran.
Sous cette forme d’onde, d’autres potars permettent de paramétrer le sample : Gain définit son volume, Pan son panoramique, Tune et Fine son accordage, tandis que Cut, Rez et Type permettent de choisir et régler le filtre résonnant qui sera soumis à l’enveloppe FX. Juste au dessous, 1 slot d’insertion permet d’ajouter un traitement dynamique, spectral ou une modulation (compresseur, bitcrusher, overdrive, eq et LFO sont notamment de la partie) au sample et 3 potars permettent de doser son envoi dans les effets auxiliaires de l’engine (voir paragraphe suivant). Terminons enfin avec la colonne de gauche qui permet de définir l’assignation MIDI du pad, la sortie audio qu’il utilise mais aussi de gérer les différentes couches qui le compose : un pad peut en effet contenir 8 samples qu’on pourra affecter à différentes vélocités… Si l’on fait le calcul, on en déduit donc qu’avec 8 engins, 16 pads par engine, 8 samples par pad, Guru peut générer des rythmes utilisant jusqu’à 8 × 16 × 8 = 1024 samples ! Bref, il y a de quoi voir venir…
Aux Effects
Ce mode permet bien évidemment de choisir et paramétrer les 3 effets auxiliaires de l’engine en cours de visualisation, effets vers lesquels on pourra router n’importe quel sample chargé dans un pad.
Ces effets sont à choisir parmi une liste conséquente regroupant pour l’essentiel des effets à modulation (flangers, phasers, chorus, modulateurs en anneau), des effets de spatialisation (delay, réverb) et divers filtres ou traitement dynamiques et spectraux… Bref, on ne manque de rien, si ce n’est peut-être de presets prêts à l’emploi pour éviter d’avoir à tripoter du potar : la plupart des effets comportent il est vrai 8 paramètres…
In the Mix !
Mix
Mix View n’est ni plus ni moins qu’une console de mixage dont les 8 tranches permettent de régler le volume, le panoramique et l’accordage de chaque Engine, de le réduire au silence (mute) ou de n’écouter que lui (solo) et de visualiser son activité au moyen d’une mini-représentation des octaves pattern et du bloc de pads.
A droite des 8 tranches Engine, une tranche Master permet d’accéder au volume général et à l’accordage global, mais aussi de régler les niveaux des 4 différentes percussions, tous engines confondus : kick, snare, hi-hats et percs. Notez qu’en plus des effets assignables aux pads, il est possible d’insérer un effet sur chaque tranche, lequel se paramètre depuis un bandeau occupant le bas de la fenêtre Mix View.
Scenes
Réellement pensée pour le Live, cette fenêtre permet de stocker différents états de Guru (des Scènes) dans des mémoires assignés à des notes MIDI, pour pouvoir alterner ensuite entre eux à la manière de presets.
Deux regrets toutefois : d’abord, ces états ne prennent pas en compte les changements de paramètres sur les effets, de sorte que cette fonctionnalité va surtout servir à alterner entre différents mixages des 8 engines.
Ensuite, il convient de noter qu’assez bizarrement, Guru ne propose aucun séquenceur de type 'Song’ qui permettrait d’enregistrer un enchainement de patterns sur une Time Line. Si la chose est certes contournable en utilisant la version plug-in dans un séquenceur, elle n’en reste pas moins regrettable…
Options
Finissons enfin avec la fenêtre Options qui permet d’intervenir sur une foule d’aspects du logiciel (de la quantisation aux sorties audio en passant par des détails de l’interface) et de paramétrer son utilisation avec un contrôleur MIDI.
Tant qu’on en est à parler contrôle, un mot s’impose sur les groupes d’automation du logiciel : pour pouvoir gérer plus facilement un grand nombre de contrôleurs, les développeurs ont en effet privilégié la création de 8 groupes d’automation auxquels on assigne un potar avec un simple Shift + Clic. A chaque groupe sa couleur : c’est simple comme bonjour et s’avèrera certainement salvateurs pour ceux qui ne disposent pas d’une surface de contrôle MIDI dotée de 8000 potars et 3000 faders…
Temps réel…
Passé ce tour d’horizon général, place au jeu. Et là, c’est quand même la grosse baffe ! Une fois familiarisé avec l’interface, on se rend compte qu’armé d’une simple souris, on peut faire évoluer le tchack-poum le plus basique en une multitude de grooves complexes pendant des heures. Certes, ces mêmes grooves peuvent sans doute être réalisés au moyen d’un séquenceur et d’un Drums Sampler classiques… mais au prix de quels efforts !
Intuitif et puissant, Guru dispose en outre d’un argument de poids face aux solutions rythmiques qui existaient jusqu’alors : le temps réel. Digne descendant de la Devine Machine, le soft permet de jouer et de séquencer sans jamais avoir à presser la touche Stop. Du coup, on le sent véritablement taillé pour la scène où, couplé à un contrôleur de type Trigger Finger, il devrait devenir une véritable arme fatale.
Attention toutefois, n’allez pas en déduire que Guru soit LE soft rythmique ultime pour n’importe quel utilisateur. Si puissant et ergonomique soit-il, il n’en demeure pas moins une boîte à rythmes qui, avec ses slices, ses patterns et ses pads, garde une stricte approche electro et ne saurait produire des parties de batterie acoustique aussi réalistes que celles d’un BFD, d’un dfhSUPERIOR ou encore d’un Groove Agent. Que ceux qui font du jazz et du rock dénués de toute composante électronique et qui ne jurent que par le swing de Stewart Copeland, Chad Smith ou Steve Gadd, passent donc leur chemin : Guru n’est pas conçu pour cela, même si la banque de sons (excellente au demeurant) propose plusieurs kits acoustiques de bonne facture.
Et par rapport à un Stylus RMX ? Disons que les deux logiciels n’ont clairement pas la même philosophie… Si Stylus n’a pas son pareil pour produire des grooves au kilomètre avec un son nickel sans trop se fatiguer, il est plus un accomodateur/remixeur de boucles qu’un véritable séquenceur rythmique/boîte à rythme et garde une couleur très « Eric Persing présente » qui, si elle ravira certains, en agacera d’autres… Sur le plan du live, le logiciel de Spectrasonics n’offre pas non plus une interaction aussi poussée que celle de Guru.
Conclusion
Il faut bien le reconnaître : peu de logiciels peuvent être comparés au bébé de FXpansion qui se situe à mi-chemin entre la boîte à rythmes electro et le sampler à boucles, avec une philosophie « Temps réel » qu’on n’avait pas vue aussi maîtrisée depuis le Live d’Ableton. Bref, une réussite qui n’attend qu’un ordinateur portable pour monter sur scène où, n’en doutons pas, elle devrait donner le tempo…