Produire des casques après s'être fait connaître pour la qualité de ses enceintes, quoi de plus logique ? HEDD s'est lancé sur ce marché depuis quelques années et l'on a aujourd'hui le plaisir de pouvoir se pencher sur leur second modèle, le bien nommé HEDDPhone TWO.

Chez Audiofanzine, nous avons déjà eu l’occasion de tester plusieurs modèles d’enceintes de la marque HEDD, mais aujourd’hui, c’est un tout autre produit qui attire notre attention : le casque HEDDphone TWO. Un casque qui nous intrigue, non seulement par sa construction, mais aussi, et surtout, par la technologie embarquée (AMT, on y revient très vite) qui nous semble, à tout le moins, prometteuse.
HEDD (Heinz Electrodynamic Design), fondée en 2015 par Klaus Heinz et son fils, Frederik Knop, est surtout reconnue pour ses enceintes de monitoring équipées, au niveau de leurs tweeters, de cette fameuse technologie AMT, censée permettre une restitution plus précise et plus rapide des hautes fréquences. Le casque TWO, sorti en 2023, fait suite à un premier modèle (simplement appelé HEDDphone) lancé quant à lui en 2019.
Alors, HEDD réussit-elle à transposer son savoir-faire dans le domaine des enceintes vers celui des casques ? C’est ce que nous allons voir…
Spécifications et technologie (AMT VVT, matériaux, accessoires)
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
impédance : 41 Ω
réponse en fréquence : 10 HZ – 40 kHz
Le HEDDphone TWO est équipé de coussinets en cuir synthétique et il est livré avec un vaste ensemble de câble :
- Un câble asymétrique (jack 6,35 mm)
- Un câble symétrique (jack 4,4 mm)
- Un adaptateur de jack 6,35 mm à 3,5 mm
- Un adaptateur de jack 4,4 mm vers XLR 4 broches
On peut à ce niveau parler d’offre carrément luxueuse ! On vous laisse ci-dessous juger sur pièce de la qualité des pièces employées :
À cela vient s’ajouter une présentation en coffret totalement renversante. Sur ce point, soyons clairs : ce n’est pas un élément essentiel, bien entendu, et ce qui compte vraiment c’est la qualité sonore du casque. Mais, étant donné que celle-ci est totalement au rendez-vous (je vous divulgâche la suite de l’article, tant pis…), il n’y a pas de mal à se faire plaisir en admirant les efforts de présentation de la marque :
L’on a seulement remarqué un défaut : le revêtement mat et velouté recouvrant le coffret semble avoir tendance à prendre des marques assez rapidement lorsque celui-ci est transporté – ce qui était le cas du modèle que nous avions entre les mains, puisqu’étant un modèle de prêt, il avait un peu bourlingué. Les photographies ci-dessus nous semblent parlantes quant à ce petit défaut.
Démontage et maintenance : ce que l’on peut réellement remplacer
Soyons clairs, on a eu des sueurs froides en réalisant l’opération suivante. Ce n’est pas tout les jours que je sors mes tournevis miniatures pour démonter un casque à plus de mille euros… qui m’a été prêté !
Alors, ce HEDDphone TWO est-il démontable ? La réponse est oui, est assez facilement, même si je ne vois pas ce que l’utilisateur pourrait changer ou modifier par lui-même dans ce casque.
On retire d’abord les mousses, ce qui est facilement réalisé en tirant dessus. Elles fonctionnent avec un système de « clip » sur tout le pourtour intérieur.
Il suffit ensuite de retirer les 8 vis à tête Torx qui encerclent le transducteur.
Et l’on révèle ainsi l’architecture interne, qui est un summum de minimalisme :
Une simple cavité, une grille à l’arrière, et un transducteur pris dans un boîtier (impossible de le retirer de ce boîtier à la main, enfin, il m’a semblé… je n’ai pas insisté). Le transducteur est simplement connecté au jack par deux câbles d’un diamètre assez conséquent pour un casque, et qui nécessitent d’être soigneusement repositionnés contre le flanc intérieur de la cavité, au risque de les pincer et de les abîmer lorsque l’on referme l’ensemble.
Le bandeau, quant à lui, est monté sur un système de picot qui peut également être retiré aisément, et remplacé si la pièce venait à s’user ou prenait un choc.
Confort et réglages du HEDDband (hauteur, courbure, serrage)
Ce réglage n’est pas sans importance, car, le casque étant lourd, il permet de compenser l’inconfort généré par son poids, et de bien positionner les oreillettes, qui auraient sinon tendance à tomber trop bas. L’intéressant, ici, c’est que l’on peut facilement adapter le bandeau à différents utilisateurs, mais, surtout, que l’on pourra également le rerégler dans le temps, lorsque le bandeau se ramollira à l’usage ou si l’arceau commence à moins serrer.
Mais alors, est-ce que ça marche à longueur d’écoute ? Plutôt bien pour ce qui est de la pression sur le sommet du crâne, même si, au bout d’un certain temps, le poids commence à se faire sentir. En revanche, le serrage latéral peut-être ajusté de façon vraiment efficace, ce qui diminue la fatigue de ce côté-là.
Ajoutons à cela que les coussinets sont très confortables, d’une épaisseur importante et avec un niveau de compression élevé, comme on peut aisément le voir ci-dessous :
Isolation et fuite sonore
Non applicable, on est sur un casque ouvert.
Notons par ailleurs que, les haut-parleurs AMT étant des dipôles, avec une diffusion sonore théoriquement égale à l’avant et à l’arrière, et le casque étant ouvert à l’arrière du HP, les HEDDphones pourraient (ou devraient) avoir une forte « repisse », ce qui n’est pas le cas, grâce à une bonne conception acoustique de l’objet. C’est un très bon point.
Transport et protection (étui, coffret, accessoires)
Mesures objectives : réponse en fréquence et distorsion
Voici donc le nouveau protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
- Un léger creux vers 20 HZ
- Une zone linéaire, légèrement montante, de 50 à 200 Hz
- Une accentuation très légère vers 300 Hz
- Une autre zone relativement linéaire jusqu’à 1,5 kHz
- Un léger creux juste au dessus de 2 kHz
- Une accentuation marquée à 4 kHz
- Suivi d’un creux important de 5 à 7 kHz (-9 dB relativement à 1 kHz)
- Une dernière accentuation, la plus importante, au-dessus de 10 kHz
Les transducteurs sont appariés à 1 dB, rien à redire !
Avec un tel profil, on s’attend à des graves biens présents, mais pas surgonflés, un médium bien lisible, avec une accentuation des hauts médiums qui permettra de bien « détourer » les voix, et un aigu très détaillé tout en haut du spectre — donc très « aéré » — mais pas dans la partie plus médiane des aigus (creux de 5–7 kHz). Étonnant !
Distorsion :
La distorsion mesurée est basse, même très basse, avec peu de remontée dans le grave (que l’on constate trop souvent). Moins de 1 % à 20 Hz c’est exceptionnel ! On est généralement plutôt vers 5 %, parfois au-dessus de 10. Pour le reste du spectre audible, on reste presque toujours sous 0,1 %, signe d’un casque de qualité, avec un transducteur très rapide et très précis.
Écoute critique : extraits, image stéréo et transitoires
Les écoutes du HEDDphone TWO ont été réalisées à l’aide de l’amplificateur casque du Phonitor 3 DAC de chez SPL, appareil de référence employé dans l’élaboration du casque, étant donné que celui-ci est connu pour sa capacité à gérer des casques à haute impédance (à noter que cet ampli casque / DAC fera l’objet d’un test séparé sur notre site, où nous explorerons plus en détail ses performances et ses spécificités techniques). Par ailleurs toutes les écoutes ont aussi été réalisées, parallèlement et à titre de comparaison, sur l’ampli casque intégré d’une interface moyenne gamme, j’ai nommé la Quantum HD8 de PreSonus. Le compte-rendu est ensuite rédigé à partir de notre impression moyenne.
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. La voix baryton est rendue avec beaucoup de présence et de réalisme, sans pour autant masquer le lit instrumental très subtil, et qui reste adéquatement en arrière plan. Beaucoup de détails, grâce à la zone haute de l’aigu très accentuée : le plectre contre les cordes, la longueur et l’ampleur stéréo de la réverbération… La restitution des médiums nous paraît très neutre, et la contrebasse, que l’on trouve parfois un peu « brouillonne » dans ce mix est ici rendu avec une assez grande précision et rapidité. Ça commence bien.
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Les impressions du premier morceau se confirment. Le flow parlé-chanté bénéficie d’une articulation très lisible, avec une restitution fidèle de la tessiture grave de sa voix, qui peut sur d’autres casques ressortir comme trop pincée ou trop nasale. La subtilité dans la distinction entre l’attaque de la grosse caisse / l’attaque du clavier basse ressort avec une clarté très contrôlée. Le HEDDphone TWO donne à l’écoute une dimension un peu analytique, certes, mais sa neutralité d’ensemble, en particulier dans les médiums, vient redonner de la chair et du réalisme à l’ensemble.
Massive Attack – Teardrop
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. Le grave est ferme, mais non exagéré, soutenant une voix transcrite avec une grande finesse dans les hautes fréquences. Les « SH » et « S » du deuxième couplet (« Gentle Impulsion / Shakes me, makes me lighter ») ressortent peut-être avec un tout petit peu de sifflement, une légère sibilance : c’est toujours le risque avec ce morceau lorsqu’on écoute sur un casque très précis dans l’aigu. La séparation stéréo très détaillée donne une impression presque immersive, enveloppante.
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Sur ce point, aucun problème – les HEDDphones rendent parfaitement la coprésence d’instruments jouant dans la même zone de fréquence, par exemple, le saxophone baryton, le sax-basse et le trombone-basse, tout en leur permettant chacun de trouver sa place dans le mix. Les cymbales sont, comme souvent, un peu envahissantes, phénomène que seuls les casques pauvres en aigus semblent en mesure de maîtriser. Ici, on n’est clairement pas sur ce genre de profil, et de toute façon, ça n’est pas le but.
Edgar Varèse – Ionisation
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Chaque percussion est isolée avec une netteté impressionnante, en particulier les percussions graves qui sont retranscrites avec une précision et une vitesse assez bluffante. La scène sonore permet bien de localiser chaque source, tout en percevant aussi l’ampleur de sa résonance dans l’espace, et sans masquer l’impact du collectif – en bref, la restitution de l’acoustique de la salle est très réussie.
Caractéristiques techniques
- Conception : circum-aural ouvert
- Transducteur : AMT large bande avec procédé VVT (Variable Velocity Transform)
- Réponse en fréquence annoncée : 10 Hz – 40 kHz
- Impédance : 41 Ω
- Poids mesuré/annoncé : env. 550 g
- Matériaux : armature en fibres de carbone et magnésium
- Coussinets : similicuir, remplaçables
- Connectique fournie : câble asymétrique 6,35 mm (jack TRS), câble symétrique 4,4 mm (Pentaconn), adaptateur 6,35 → 3,5 mm, adaptateur 4,4 mm → XLR 4 broches
- Accessoires : étui rigide de transport, coffret de présentation
- Particularités : faible distorsion mesurée, appairage L/R à ±1 dB, transducteurs fabriqués et pliés à la main
FAQ
Faut-il un ampli casque dédié pour le HEDDPhone TWO ?
Oui, c’est préférable. Son impédance de 41 Ω n’est pas extrême, mais il gagne à être alimenté par un ampli offrant une réserve honnête en courant ; vous avez d’ailleurs écouté via un SPL Phonitor 3 DAC et comparé avec un ampli casque d’interface, la différence restant audible.
Le casque fuit-il beaucoup vers l’extérieur ?
C’est un ouvert, donc il y a forcément de la fuite. Cela dit, sa conception en dipôle et l’acoustique de la coque limitent la « repisse » : elle est moindre qu’attendu pour ce type. Évitez néanmoins l’enregistrement en prise de voix à proximité.
Est-il confortable sur de longues sessions ?
Le poids (≈550 g) finit par se sentir. Les réglages du HEDDband (hauteur/courbure/serrage) répartissent bien la charge et réduisent la fatigue. Les coussinets épais et compressifs aident aussi. Pour des sessions de plusieurs heures, faites des pauses régulières.
Convient-il au mixage/édition plutôt qu’à l’écoute loisir ?
Sa signature penche vers l’analytique : médiums lisibles, haut du spectre détaillé, distorsion très basse, image précise. C’est utile pour l’édition/mixage critique. Pour l’écoute loisir, cela dépendra de vos préférences.
Quels styles musicaux lui vont bien ?
Ceux qui bénéficient d’une micro-dynamique fine et d’un haut-aigu détaillé (acoustique, voix, musique de chambre, jazz, electronica détaillée). Les musiques très brillantes pourront paraître un peu vives si elles sont déjà chargées vers 4–8 kHz.
Les coussinets et le bandeau sont-ils remplaçables ?
Oui : coussinets faciles à déposer, et bandeau monté sur picots, remplaçable en cas d’usure.
Qu’apporte l’AMT VVT par rapport à un dynamique/planar ?
L’AMT déplace l’air différemment (membrane plissée). Le procédé VVT de HEDD adapte la géométrie pour couvrir tout le spectre audible, avec rapidité des transitoires et faible distorsion.