Cette semaine sur notre banc d'essai, et sur nos petites oreilles, voici le petit nouveau de la nouvelle gamme pro Sennheiser, le HD-400 Pro. Avec ce casque, le constructeur allemand reprend un de ses best sellers récents, et lui apporte quelques petits plus bienvenus...
Éliminons tout de suite le gros sujet sur lequel risquent de se focaliser les commentaires : oui, le HD-400 Pro est en réalité une version rebadgée (et très légèrement customisée) du HD-560S, sorti lui-même il y a peu, ayant reçu de nombreuses critiques positives et qui fait partie des bonnes ventes de Sennheiser. C’est même officiel : la marque allemande l’a elle-même reconnu sur Twitter, suite aux questions répétées d’internautes à l’oeil – et à l’oreille – aiguisés. Et oui, le HD-400 PRO est plus cher que le 560S.
Nous précisons donc tout de suite le propos de cet article : cette semaine, nous nous penchons sur le HD-400 Pro. Nous n’avons pas eu le 560S entre les mains, et même si des comparaisons seront occasionnellement soulevées dans l’article, nous ne sommes en mesure de donner un avis que sur le produit testé. Certes, nous ne pouvons pas éviter de prendre en compte cette similarité, qui influera sur notre conclusion et la note finale. Toutefois, nous ne lancerons pas dans un procès des pratiques marketing de la marque allemande, qui ne concernent pas ce que nous jugeons principalement dans un test.
Pour finir, si cet article non-partisan peut servir de tremplin à ceux qui souhaitent se lancer dans un débat, qu’ils soient pour ou contre d’ailleurs, nous nous en réjouissons à l’avance, car chez AF, nous aimons les débats.
Cela étant dit, commençons à le déballer.
Déballage
Bien protégé dans sa boîte, le HD-400 Pro et un casque de conception circum-auriculaire, ouvert, et dont le design n’est pas sans nous rappeler d’autres casques de cette gamme : HD-600 ou 660S par exemple. Il s’agit, extérieurement, du même casque que le HD-560S, à cela près que le logo Sennheiser n’est pas coloré en argent. Un détail seulement ? On peut le nier. Mais si le HD-400 Pro doit répondre à un usage réellement professionnel (qui implique des manipulations et des transport réguliers), alors l’absence de peinture, qui peut s’écailler au fil du temps, est un détail plutôt bien pensé. Par ailleurs, le plastique utilisé nous a paru très robuste, ce qui laisse présager une bonne solidité sur le long terme. En revanche, la plupart des parties sont serties : peu de vis apparentes, exceptées deux juste au-dessus de chaque oreillette. Comme souvent dans ces colonnes, on aurait préféré un casque qui donne le sentiment que l’utilisateur lui-même, ou un réparateur professionnel, puisse aisément effectuer des réparations ou des modifications.
Si le plastique qui compose l’arceau est bien souple, les articulations du casque ne sont pas nombreuses : l’habituel réglage par glissière pour la hauteur des oreillettes/largeur de la tête, et l’orientation de l’oreillette sur son axe antéro-postérieur (c’est comme cela que ça s’appelle, j’y peux rien !) Bref… le casque ne se plie pas : bonus pour sa longévité (deux charnières de moins, qui risqueraient de s’user à la longue), malus pour l’aspect pratique du transport (c’est un casque qui, dans un sac, prendra de la place). Et à ce propos : ajouter un sac de transport aurait été une bonne idée.
Le HD-400 Pro est accompagné de deux câbles : un droit de 1,8 m et un câble torsadé de 3 m, tous les deux terminés par une prise jack de 3,5 mm. Le câble torsadé, c’est un peu « chacun sa came » : il a ses adeptes, d’autres qui détestent. On dira seulement que donner le choix est une bonne idée de la part du constructeur. Et puis bien sûr, il y a l’habituel et nécessaire adaptateur 6,3 mm. Si le câble droit a un peu tendance à ajouter des bruits et résonances dans les oreillettes lorsqu’il est manipulé, le câble torsadé du HD 400 Pro nous a paru au contraire très « discret ». Et un câble qui n’ajoute que très peu de bruit dans les oreillettes, c’est toujours un plus sur un casque dit « professionnel ».
Pour ce qui est des spécifications, l’impédance est de 120 ohms (donc assez peu adaptée à une utilisation sans amplificateur dédié), la réponse en fréquence avancée par le constructeur s’étendrait de 6 Hz à 38 kHz (plus que nécessaire, nous ne testerons le casque qu’entre 20 Hz et 20 kHz de toute façon) et avec un niveau de pression sonore de 210 dB (à 1 kHz à 1 VRMS). Le casque pèse 240g, ce qui reste assez léger pour un casque de studio, et nous avons trouvé que son arceau et ses coussinets en velours assuraient un bon confort sur les deux heures d’écoute que nous avons pratiquée pour l’article.
NB : la remarque ci-dessus est dépendante de la morphologie de chaque utilisateur, et ne correspondra pas au ressenti de chacun.
Benchmark
Si vous êtes un habitué de ces tests, vous le savez déjà : nous avons mis en place un protocole de mesures objectives, afin de compléter l’écoute comparative subjective. Avec l’aide précieuse de notre partenaire Sonarworks, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes précises de la réponse en fréquence et du taux de distorsion harmonique (THD), réalisées à l’aide d’une tête artificielle et de matériel de mesure de laboratoire.
Commençons par la réponse en fréquence :
C’est plutôt droit, ce qui est détonne avec une bonne partie de la production actuelle, voire de la production passée de Sennheiser eux-mêmes : pas trop de basses gonflées, ni de chute forte sous 80 Hz, ni de creux trop important entre 2 et 3 kHz. Enfin… Si, mais sur une voie seulement ! Et cela, c’est un peu embêtant : on voit bien qu’à la mesure, le casque révèle une disparité parfois importante d’une oreille à l’autre : presque 3 dB de différence à 40 Hz ou à 2 kHz. Est-ce que cela perturbera l’écoute ? Nous verrons. On note aussi que le casque monte très haut sans problème, et ça, on sait qu’on va l’entendre (même avec nos oreilles embrumées de vieux zikos).
Sur la THD, rien à redire, à part qu’elle est un peu élevée sous 30 Hz (ce qui n’est pas inhabituel). Sur le reste du spectre, c’est très bon !
Écoutes
Richard Hawley - Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. On ressent un bien l’étendue des aigus : sur la guitare et la voix, on est dans un rendu brillant, plein de détail et avec, par effet de contraste, peu de coffre et pas mal de souffle. Pour autant, pas de sifflantes fatigantes et une très bonne mise en valeur du timbre de la réverbe (merci la bosse dans l’aigu). C’est clair sur la scie musicale, pas agressive pour un sou, avec une réverbe longue, au panoramique large. La contrebasse perd un peu en précision par rapport au grave de la guitare, et de la voix : sur ce morceau, mieux vaut des basses écourtées, sinon l’articulation des graves a tendance à pâtir.
Sun Kil Moon - Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutés par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Avec le HD-400 Pro, on a beaucoup d’harmoniques, (merci le médium pas trop creusé), avec aussi un grave bien soutenu, bien présent. Le drive, joué à la croche par le batteur, est très en retrait dans cet enregistrement, et ce casque permet de très bien l’entendre sans pour autant le faire ressortir de manière exagérée. La voix, et sa réverbe, sont traitées d’une manière assez analytique grâce à la bosse dès 4 kHz, mais encore une fois pas de façon fatigante.
Massive Attack - Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. Ici, le synthé-basse, très grave, passe assez bien, ainsi que la résonance infrabasse du kick sur le couplet, qui reste audible (ou perceptible, plutôt). La voix est détaillée, sans trop de sifflantes, ce qui reste le danger particulier sur ce morceau : on a cette même impression d’une écoute assez analytique, très précise dans le médium et l’aigu. On remarque également une belle lisibilité des percussions électroniques, durant la coda, avec une image stéréo très précise et séparée. C’est la deuxième fois que nous sommes frappés par la qualité de l’image panoramique.
Charlie Mingus - Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Le casque se sort plutôt bien de l’enchevêtrement de cuivres : le mix complexe de la contrebasse, du trombone contrebasse et du saxophone baryton n’est pas trop masqué par le grave étendu du casque. Au contraire, la belle tenue du casque dans les médiums permet de bien articuler les cuivres entre eux. Le piano est bien perceptible également, et la réverbe sur la courte phrase solo du saxophone est bien suivie dans l’espace. Encore une fois, on est impressionné par la séparation stéréo, excellente.
Edgar Varèse - Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 mins. Pas de surprise, par rapport à ce que nous avons dit jusque là : tout est bien là, du grave à l’aigu, avec une belle image stéréo, très large, et un beau rendu de la réverbération de la salle. Pas de fatigue, alors qu’on arrive au bout de l’écoute : c’est sûrement le meilleur compliment pour un casque qui cible un public professionnel.
Conclusion
Le produit que j’ai testé était, tout simplement, très bon. Un confort excellent (même si, encore une fois, ce point dépend de la morphologie de chacun), une écoute agréable et très « linéaire » – le casque n’a pas une courbe littéralement linéaire, mais ses accentuations dans l’aigu jusqu’à 20 kHz et son grave bien tenu correspondent bien aux besoins de l’oreille humaine. La disparité des deux voies, notée à la mesure, ne m’a pas frappé à l’écoute. J’ai pu écouter attentivement de la musique pendant plusieurs heures sans fatigue, et j’ai été impressionné par la très bonne séparation stéréo. Je ne peux donc que noter très bien ce produit.
Reste une question : les ajouts faits au HD-560S ne seraient-ils pas un peu négligeables ? Il me semble que l’usager « moyen » ou « pro » a surtout besoin d’un bon casque, dont il connaisse bien le rendu, qui lui apporte du plaisir et sur lequel il puisse compter dans son travail, et à ce titre-là (et si leur similarité est véritablement si grande) le HD-560S ne pourrait-il pas lui suffire ? Cela ne m’amènera pas à moins bien noter le casque (car ce test concerne le HD-400 Pro, qui est à mon sens un très bon casque), juste à rappeler au lecteur qu’une option presque égale en tous points au HD-400 Pro s’ouvre à lui, pour une somme intéressante.