Depuis 2009, Presonus a imposé Studio One comme l'une des STAN les plus appréciées du marché. Ce que l'on sait peut-être moins, c'est que le fabricant américain propose depuis 2018 une surface de contrôle, ATOM, pour accompagner sa STAN.Vendue aux alentours de 135 €, je vous invite à voir ensemble ce qu'elle a dans le ventre !
Vu de l’extérieur
Le contenu de la boîte de l’ATOM se réduit à l’essentiel: le contrôleur, un câble USB et un guide de prise en main papier. Rassurez-vous, vous pourrez obtenir un mode d’emploi complet sur le site du fabricant. Une fois le produit dûment enregistré sur le site de Presonus, vous pourrez télécharger la version « Artist » de Studio One.
L’ATOM de Presonus se présente comme un parallélépipède de 202mm de largeur sur 195 mm de profondeur pour 20 mm de hauteur, et un poids de 450 grammes. Bien qu’en plastique et plutôt léger, il est tout à fait robuste et inspire confiance: il résistera notamment à toutes les tentatives un peu sadiques de ma part de le tordre, par exemple…
La répartition des commandes est à la fois simple et efficace: une matrice de 16 pads sensibles à la vélocité et à la pression (polyphonique svp!), encadrée par deux rangées de 10 poussoirs chacune pour accéder aux différentes fonctions, ainsi qu’un très discret bouton « setup » dont le nom révèle l’usage qu’on en aura. Tout cela est naturellement rétroéclairé par des LEDS RGB.
Au-dessus, on trouve une rangée de quatre potards sans fin non crantés, eux-mêmes surmontés d’une LED reprenant le logo de Studio One. Cette dernière a pour particularité de s’éclairer en bleu lorsque l’appareil est connecté à une STAN compatible, et en vert quand l’appareil est en mode MIDI standard. Les potards et les pads sont bien ancrés et viennent confirmer cette sensation de qualité. Les premiers proposent une course très douce et agréable, et les seconds n’ont pas ce côté un peu « bloblotant » que l’on peut trouver chez certains concurrents. En revanche, les petits poussoirs qui garnissent les côtés de l’appareil sont de facture un peu moins soignée, mais rien qui ne soit honteux dans cette gamme de prix, et ils répondent très bien à la pression.
Sur la tranche arrière de l’appareil, on se prend à se réjouir d’y trouver une bonne vieille prise USB-B standard, carrée, solide, avec un véritable crantage, quelque chose qui a tendance à se faire rare de nos jours sur des appareils de la taille de l’ATOM. On sait que l’on n’aura pas à craindre de sitôt les débranchements intempestifs et les pertes de contact électrique des USB-mini, -micro, etc. En dehors de la prise USB, on trouvera une encoche Lexington, et c’est tout. Ni prises MIDI-DIN, ni interrupteur: l’ATOM est prévu pour être connecté à un ordinateur et rien d’autre.
Configuration
L’ATOM est plug and play et fonctionnera instantanément très bien avec toutes les DAWs pour lesquelles il est conçu, notamment Studio One et Ableton Live. Mais vous pourrez toutefois souhaiter personnaliser certaines fonctionnalités, ou bien définir le comportement de l’appareil en dehors de son utilisation avec les DAW précitées. Deux modes de configuration sont alors disponibles directement à partir du contrôleur: les modes « rapide » et « avancé ». Le mode « rapide » permet de sélectionner la disposition des touches de jeu sur la matrice de pads selon que l’on souhaite jouer d’un instrument mélodique ou bien s’en servir pour déclencher des samples ou jouer d’une batterie. Un mode « Mardi Gras » assez peu utile, mais distrayant fera passer en revue toutes les couleurs affichables grâce aux capacités RGB de l’appareil. On pourra également choisir entre trois courbes de vélocité.
En ce qui concerne l’aftertouch, on aura le choix entre la désactivation complète, le seuil de pression à partir duquel un message est envoyé, et enfin la nature de ce message: CC prédéfini, message d’aftertouch par canal ou bien polyphonique. Cette dernière caractéristique est d’autant plus intéressante qu’elle entrouvre pour l’ATOM les portes du MPE, norme à laquelle sont maintenant compatibles quasiment toutes les versions les plus actuelles de nos STAN préférées. Le mode de configuration rapide permet également de définir le tempo de l’horloge interne de l’ATOM. Enfin, un bouton « panique » permettra d’envoyer un ordre de coupure général sur tous les canaux MIDI, afin d’interrompre les notes qui seraient restées coincées.
Le mode de configuration « avancé » permet quand à lui de sélectionner le canal MIDI respectif des pads, des boutons rotatifs et des poussoirs, ainsi que celui utilisé par l’aftertouch par canal. Il permettra également de définir la luminosité de l’appareil. Toutefois, l’une de ses fonctionnalités les plus intéressantes sera sans doute de pouvoir supprimer l’envoi de notes via les pads, pour ne conserver que l’envoi de CC. On pourra alors faire appel à l’aftertouch pour doser l’envoi des messages en question, et constater par la même occasion la très grande précision de réaction de l’aftertouch en question, sensible à la moindre variation de pression.
Mais la principale raison d’être de l’ATOM de Presonus, c’est de pouvoir piloter Studio One, la célèbre STAN du fabricant. Voyons donc comment le contrôleur s’acquitte de cette tâche.
Principes de fonctionnement
Comme pour beaucoup de contrôleurs à pads (Maschine, Launchpad, Push…), l’ATOM propose différents modes de fonctionnement traduits par des layouts spécifiques de sa matrice de pads. Et le point de départ du travail avec l’ATOM au sein de Studio One, c’est le layout « Song Setup » qui permet notamment d’accéder au browser. On pourra alors naviguer à travers notre bibliothèque complète d’instruments virtuels, qu’il s’agisse des modules natifs de Studio One ou bien des plug-ins développés par des éditeurs tiers. Une fois notre choix d’instrument effectué, il suffira d’une pression sur la touche « select » pour que Studio One crée automatiquement une nouvelle piste incluant le plug-in choisi. Pour les modules Presonus, on pourra alors faire défiler directement les presets et sélectionner celui qui nous plaît. Pour les VSTs tiers, cela sera possible uniquement avec les presets que vous aurez préalablement sauvegardés vous-même. Rien qui sorte du fonctionnement habituel d’une STAN affublée d’un contrôleur attitré.
On retrouvera d’ailleurs ce comportement un peu « favoritiste », mais somme toute banal dans l’affichage du layout en fonction du type d’instrument virtuel chargé. Si l’utilisation d’Impact, la drum machine virtuelle maison de Presonus, entraînera bien l’affichage d’une matrice de type MPC, vous aurez droit lorsque vous chargez les batteries virtuelles d’autres éditeurs à un layout de type « gamme » comme pour un instrument mélodique. À ce sujet, vous pourrez d’ailleurs choisir entre 13 gammes et modes différents, et définir leur tonique directement à partir du contrôleur. Mais c’est loin d’être tout !
Contrôle MIDI
Les quatre potards de l’ATOM peuvent être répartis en quatre banques et contrôler ainsi jusqu’à 16 paramètres, que ce soit par plug-in ou bien alors de manière globale par projet. Les plug-ins Presonus bénéficient d’un mapping de paramètres par défaut, mais qui pourra aisément être modifié. Les habitués de Studio One connaissent déjà bien le système très pratique de « Control Link » qui permet de créer des profils de contrôle différents selon que l’on travaille sur la fenêtre générale du logiciel ou bien que l’on vienne d’ouvrir l’interface utilisateur d’un plug-in en particulier. Mais je me permets toutefois de m’y attarder un peu, à la fois pour les petits nouveaux dans l’écosystème Studio One ainsi que pour ceux qui souhaitent savoir comment l’ATOM s’y intègre. Par définition, les profils de contrôles affectés à des projets ne seront valables que pour les projets concernés, alors que ceux affectés à des plug-ins seront automatiquement repris d’un projet à l’autre, à chaque fois que vous rappellerez le plug-in en question. Dans le cas spécifique de l’ATOM, on notera que seuls les potards pourront être affectés aussi bien à des plug-ins qu’à des projets. Le cas des pads est en effet un peu différent.
Tout d’abord, bien que tous puissent envoyer des messages de Control Change en plus de leurs messages de note-on, seuls les pads des deux rangées du bas pourront être affectés au contrôle de paramètres –32 au total, répartis sur 4 banques de 8 pads chacune. Et contrairement aux potards, ils ne pourront être affectés qu’à des profils de contrôle de projets. D’ailleurs, cette différence entre potards et pads se manifeste déjà par la manière dont on leur affecte les paramètres à contrôler: si pour les potards, cette affectation se réalise via un « MIDI learn » effectué sur le paramètre du plug-in ou de l’interface de Studio One que l’on souhaite contrôler, pour ce qui est des pads en revanche, ladite affectation ne peut se dérouler que via un menu déroulant listant l’ensemble des paramètres du séquenceur (hors plug-ins). On notera d’ailleurs que cette liste inclut également les macros, celles d’origine tout comme celles que vous avez éventuellement créées vous-même. Vous pouvez ainsi presque transformer votre ATOM en une sorte de petit Stream Deck, sans toutefois la possibilité de créer des sous-dossiers de commandes.
À ce sujet, en l’absence d’écran physique intégré sur l’appareil lui-même, on profitera pleinement de la fenêtre de Studio One dédiée à la gestion des périphériques de contrôle, fournissant dans une interface claire et concise toutes les informations nécessaires, notamment les noms des plug-ins et des paramètres contrôlés, ainsi que les valeurs de ces derniers. Mais si l’ATOM permet de contrôler des paramètres, qu’en est-il du jeu, de la gestion de clips, de séquences, bref, de la composition musicale à proprement parler?
Séquenceur et Piano Roll
Les habitués de la STAN de Presonus le savent déjà: celle-ci peut gérer aussi bien une traduction des messages de notes MIDI sous forme de piano-roll que sous forme de séquence à pas (ou pattern). Et bien entendu, l’ATOM va également gérer cet aspect-là du workflow de Studio One. En effet, vous pouvez bien entendu déclencher l’enregistrement d’une piste et la création instantanée du clip MIDI correspondant avec son piano roll traditionnel d’une simple pression de touche sur le contrôleur. Mais le profil de contrôle de projet par défaut de l’ATOM vous autorise également à créer une séquence par pas, ainsi que les différentes variations de séquence autorisées par Studio One. Dans le cas d’un clip avec piano roll, on pourra bien sûr entrer les notes en les jouant sur la matrice de pads.
Ces derniers sont d’ailleurs plutôt agréables à jouer, avec une bonne réponse à la vélocité même si parfois des frappes trop douces ne déclencheront pas d’envoi de message MIDI. On appréciera également particulièrement l’aftertouch polyphonique appliqué à des instruments virtuels compatibles, ainsi que la présence d’une fonction classique, mais toujours pratique de répétitions de notes. Les notes ainsi enregistrées pourront ensuite être copiées, collées, dupliquées et voir leur hauteur modifiée directement via le contrôleur.
Dans le cas d’un pattern, on pourra soit enregistrer les pas de séquence en jouant comme pour un clip MIDI classique, soit programmer lesdits pas sur une version « step-sequenceur » de la matrice de pads. Dans les deux cas de figure, on pourra également gérer la vélocité indépendamment. Tout cela se fait de manière très simple et ergonomique, et l’on prend un vrai plaisir à enchaîner les clips MIDI et les patterns.
Arrangement
Et grâce à l’ATOM, on peut non seulement créer ces clips et ces patterns, mais également les arranger entre eux pour composer son morceau. Tout comme pour les événements MIDI, vous pouvez copier, coller, dupliquer et supprimer vos clips comme vous le souhaitez à travers toute la fenêtre d’arrangement de Studio One directement à partir du contrôleur. Additionné à tout ce que nous venons de voir ensemble, on peut constater qu’il est tout à fait possible de créer une première maquette de morceau sur Studio One quasi intégralement à partir de l’ATOM, en ne recourant qu’exceptionnellement à la souris. Même la sauvegarde pourra se faire à partir de l’ATOM.
Utilisation avec Ableton
La seconde DAW à laquelle le contrôleur de Presonus est officiellement compatible, c’est Ableton Live. Bien que nettement moins complet que celui prévu pour Studio One, le template conçu pour piloter la STAN germanique permet tout de même un certain nombre de choses intéressantes. On peut ainsi alterner entre la vue « arrangement » et la vue « session », naviguer librement dans la matrice de celle-ci par groupe de 4×4 clips, et lancer la lecture ou l’enregistrement de ces derniers.
Tout comme pour Studio One, le layout des pads s’adaptera automatiquement en fonction du type d’instrument virtuel chargé dans la piste en question: drum rack ou instrument virtuel, le tout en bénéficiant ici pleinement de l’aftertouch polyphonique pour tous les modules compatibles MPE. Chaque piste individuelle peut être sélectionnée, armée, mutée ou bien mise en solo à partir du contrôleur de Presonus. Les potards seront mis à profit pour contrôler le volume, le panoramique, et les deux premiers envois auxiliaires. Enfin, un mode « User » permet de réaffecter des contrôles de l’ATOM à des paramètres de Live avec une liberté … plutôt relative sur laquelle nous reviendrons. En résumé, soyons très clairs: ceux qui attendaient un niveau d’intégration égal à celui de Studio One seront déçus. Mais après tout, les utilisateurs de Live ne sont pas le public visé en premier lieu par l’ATOM, et l’on peut déjà saluer le fait que Presonus ait pensé à eux.
Utilisation avec Bitwig Studio
Une autre STAN bénéficiant d’un script dédié au contrôleur de Presonus est Bitwig Studio. Le script en question nous propose deux modes de fonctionnement, le « Drum Pad Mode » et le « Step Sequencer Mode », respectivement dédiés au jeu et au séquençage. Dans le premier mode, on accède aux 16 pads de jeu en bénéficiant des options de vélocité fixe et de répétition de notes. On peut également naviguer entre les pistes, les activer et lancer l’enregistrement ou la lecture de clips. Le mode « Step Sequencer » quant à lui permet comme son nom l’indique de programmer des séquences dans les clips concernés en sélectionnant les sons individuels, leur emplacement et leur durée dans la séquence, ainsi que la longueur de celle-ci.
Dans les deux modes, les potards du haut permettent de contrôler les paramètres des plug-ins par MIDI learn, ou via les ensembles de macros de Bitwig. Ces derniers étant souvent prévus pour des contrôleurs disposant d’au moins 8 boutons, il faudra un peu les adapter aux 4 boutons de l’ATOM en redistribuant leur macro non plus par groupes de 8 mais groupes de 4 sur autant de pages que nécessaire. Une opération que l’ergonomie très bien pensée de Bitwig Studio rend toutefois aussi peu douloureuse que possible.
On regrettera toutefois principalement deux choses. Tout d’abord, les réglages par défaut ne permettent pas la prise en charge du mixage des projets. Et ensuite et surtout, on pardonnera beaucoup moins la limitation à 16 notes tout autant pour le jeu que pour la partie séquenceur.
Que peut-on lui reprocher?
Alors, que peut-on reprocher au contrôleur de Presonus? Rien de très grave finalement. En ce qui concerne le template d’Ableton Live, il déçoit surtout par le fait qu’il ne permette pas l’affectation dynamique aux paramètres des plug-ins. Il ya bien le mode « user » que j’ai cité plus haut, mais celui-ci ne permet que des affectations fixes, sans compter qu’il ne tient pas compte des réglages de configuration interne effectués via le « setup » physique. Je conseille plutôt à ceux qui souhaitent se constituer leur véritable petit profil d’affectations tirant pleinement parti des possibilités de l’ATOM de se programmer leur propre petit script grâce au template de création de scripts offert par Ableton avec Live, et au mode d’emploi de l’ATOM qui fournit une charte complète des messages MIDI employés par son contrôleur.
Et pour ce qui est du template de Studio One… je n’aurais vraiment qu’un seul reproche à lui adresser: l’absence de prise en charge du mixeur. Peut-être pour ne pas faire d’ombre à un autre produit phare de Presonus, le FaderPort qui propose entre autres un fader motorisé? On ne le saura pas…
Quant au contrôleur lui-même… eh bien si je voulais être vraiment pointilleux je dirais cela m’ennuie que la course des potards ne soit pas réglable par l’utilisateur et que l’on soit du coup intégralement dépendant de la manière dont les templates interprètent chacun l’amplitude du mouvement que nous appliquons aux potards en question. Pour exemple: il faut effectuer plusieurs rotations pour amener le fader d’une piste de Live au bout de sa course, alors qu’un seul tour vigoureux suffit pour balayer toute l’étendue des valeurs d’un paramètre sous Studio One.
Conclusion
Lorsque l’on voit l’ATOM avec ses 16 pads, ses 4 potards et sa vingtaine de boutons, vendu pour 135 €, on se dit d’abord que l’on a sans doute affaire à un énième contrôleur à pads qui nous promet monts et merveilles en termes de pilotage « sans la souris » et qu’on finira par laisser dans un coin pour finalement revenir vers notre bon vieux mulot.
Sauf qu’ici, les promesses sont effectivement tenues : sous Studio One, vous pouvez effectivement vous passer très majoritairement de la souris et du clavier pour une très grande partie du travail! On ne pourra pas en dire autant toutefois pour Ableton Live ou pour Bitwig, pour lesquels l’intégration, sans être honteuse, est tout de même moins approfondie. Mais soyons lucides, ce n’est pas à eux que ce produit s’adresse en priorité. Les utilisateurs de Studio One, quant à eux, auraient tort de se passer de ce compagnon aux multiples ressources!