Entre les nouveaux plug-ins, le gros rack H9000 et les mises à jour de leur multieffet H9, les gars de chez Eventide ont quand même trouvé le temps de sortir une nouvelle pédale guitare, la Rose, et l’air de rien, ça faisait longtemps qu’on n’avait pas vu une nouvelle petite boite chez le constructeur américain…
Un nouveau produit chez Eventide, ça n’arrive pas tous les jours, alors forcément, l’attente est grande. D’autant plus quand on sait que la marque n’est pas du genre à copier bêtement ce que fait le voisin. On s’attend donc à de l’originalité, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’avec la Rose, nous sommes servis ! Certes, la pédale peut être résumée à un simple délai à modulations, mais nous savons qu’avec ce genre de traitement, les paramètres éditables, les sources de modulations ou encore l’architecture sont autant de facteurs qui peuvent changer complètement la donne. Ajoutez à cela des choses plus générales comme l’ergonomie et le design et vous obtiendrez, ou non, une pédale digne d’intérêt.
Le boîtier de la pédale est d’une taille relativement classique pour un modèle à deux footswitchs (comme la H9, grosso modo), et on repère à l’arrière une entrée disposant d’un petit switch proposant un niveau d’entrée ligne ou instrument. La Rose drague donc ouvertement les claviéristes, home-studistes, beatmakers, et autres personnes qui font du son, tout simplement. En revanche, la pédale restera mono quoiqu’il arrive, l’entrée et la sortie étant au format Jack TS 6,35 mm.
Un troisième connecteur de même type permettra de brancher, au choix, une pédale d’expression, un switch auxiliaire ou un adaptateur MIDI. Tout cela promet pas mal de contrôle sur l’effet. L’alimentation se fait en 9 V et une prise mini-USB permettra de mettre à jour la pédale, de la contrôler en MIDI ou encore de gérer les presets.
Au nom de la Rose
Pour les contrôles, tout se passe sur le dessus de l’interface, et on commence tranquillement avec le potard de Mix qui permettra de doser l’effet. Le potard Delay aura quant à lui la fonction de régler le temps de délai de deux façons différentes : en le tournant simplement pour un ajustement fin et en appuyant dessus tout en le tournant pour un ajustement plus grossier. Le potard Filter est un filtre passe-bas, mais de type analogique, tout comme le feedback accessible via le potard du même nom. On verra que cela a une incidence sur le son. Attention tout de même au feedback, car il peut vite devenir sauvage, pour le plus grand plaisir des bruitistes bien sûr !
Trois autres réglages s’occuperont de la modulation du délai, avec les classiques « rate » (vitesse de la modulation) et « depth » (intensité de la modulation), mais aussi avec le bouton « shape » qui permettra de choisir la forme de la modulation. On aura le choix entre une modulation sinusoïdale, un signal carré, un suivi d’enveloppe, un signal aléatoire ou encore un contrôle via une pédale d’expression ou un contrôleur MIDI. Deux petits boutons φ et Δ permettront d’accéder à des paramètres plus originaux. Pour le premier, on pourra inverser la phase sur les délais courts afin d’obtenir un filtrage en peigne, et inverser le délai sur les temps plus longs. Le deuxième bouton permet de multiplier le temps de délai, on pourra choisir la valeur (2x, 3x, 4x, 5x) via une combinaison de touches, et à l’instar des réglages généraux, tout est indiqué dans le joli manuel. Un petit bouton « preset » permettra de charger un réglage, mais aussi d’accéder à quelques paramètres concernant le bypass, le contrôle via MIDI/Mod/CV ou la pédale d’expression.
En bas de la pédale, nous retrouvons logiquement deux footswitchs, le premier pour enclencher l’effet, et le deuxième, dénommé « hotswitch », pour accéder à différentes fonctions. Ce commutateur pédestre pourra servir à régler le tempo (tap), à enclencher une répétition infinie, à tenir une modulation ou à faire une remise à zéro sur cette dernière, ou encore à passer du sous-preset A au sous-preset B. En effet, pour chaque preset, on pourra sauver deux états de la pédale (ce qui inclut les potards et les boutons φ, Δ et Shape). Chose intéressante, une pédale d’expression pourra être connectée afin de faire un « morphing » entre ces deux états, c’est-à-dire de passer progressivement d’un son à un autre.
Vous l’aurez compris, le manuel est obligatoire pour profiter pleinement de la pédale. Heureusement, ce dernier est plutôt bien réalisé et permet d’appréhender la Rose avec un peu moins de difficulté. Néanmoins, l’effet reste assez singulier, ce qui est une bonne chose en soi, mais il faut prévoir du temps afin de l’apprivoiser totalement. S’il peut être utilisé comme simple délai, nous lui trouvons une véritable utilité lorsque nous nous écartons des sentiers battus, à la croisée des délires bruitistes et du design sonore. Nous avons apprécié les comportements du feedback et du filtre analogiques qui donnent vraiment vie à la pédale, cette dernière devenant même parfois limite incontrôlable. La modulation aléatoire permettra de se laisser surprendre et l’utilisation d’une pédale d’expression est fortement recommandée afin de garder le contrôle sur la folie sonore que la Rose peut parfois engendrer. Sa spécificité et son prix (400 €) la placent sur un marché de niche, et nous recommandons aux musiciens intéressés de l’essayer en magasin avant de l’acheter.
Afin de vous donner quand même un léger aperçu des possibilités sonores, nous avons tourné une vidéo, car nous considérons que la pédale prend du sens lorsque ses paramètres sont manipulés en temps réel.
Conclusion
Difficile de noter une pédale comme la Rose, qui, malgré ses défauts, propose quelque chose d’assez unique. Les choix techniques, comme le fait de proposer un feedback et un filtre analogiques, apportent vraiment quelque chose sur le plan sonore et on retrouve une certaine folie dans le son obtenu. Il faudra néanmoins mettre en garde le futur acquéreur. En effet, la Rose ne se laisse pas dompter comme ça, et si techniquement tout est surmontable grâce au manuel, c’est artistiquement qu’il y aura le plus de défi. La Rose n’est pas une solution clé en main, mais elle promet de l’originalité à ceux qui prendront le temps de forcer leur talent.