Adam propose une nouvelle version de sa série A, et surtout un contrôleur numérique à distance, le très novateur A control. La marque allemande ouvre ainsi un champ de possibilités assez impressionnant pour l’utilisateur de ses moniteurs. On a testé et on vous raconte notre aventure.
Alors que les Adam A7X, référence bien connue des home-studios, trônent dans notre studio depuis quelques mois, on nous a proposé de tester leurs successeurs, le modèle A7V. On a donc découvert avec curiosité cette nouvelle mouture, même s’il faut l’avouer, nous ne sommes pas les plus fervents défenseurs des premiers moniteurs de la série A. Avant même de recevoir les enceintes, nous avons eu le droit à un cours sur le A control, que la marque met en avant à juste titre, et nous avons tout de suite saisi que l’enjeu n’est pas seulement d’apprendre à connaître une paire d’enceintes, mais aussi de se lancer dans son calibrage. De quoi pimenter un peu notre aventure avec Adam dans le jardin d’Eden.
L’autoroute des nouVeautés
On découvre une paire d’enceintes du même format que la série précédente, plutôt hautes (33 cm), étroites (20 cm), mais très profondes (28 cm) pour des enceintes 7 pouces. Les bords des panneaux avant sont biseautés en haut, pour des raisons acoustiques et non esthétiques, et deux évents évasés sont placés sous le haut-parleur. Jusqu’ici on n’est pas loin des A7X que certains lecteurs connaissent probablement, mais il y a des changements importants à observer, et en premier lieu sur l’essentiel : les haut-parleurs. Adam conserve la technologie X-Art pour ses tweeters à ruban, c’est l’une des signatures principales de la marque, mais la marque a quand même mis en place un nouveau guide d’onde « Made in Germany ». En plus d’un nouveau matériau — polymère fibres de verre — la forme de ce guide d’onde permet d’élargir le point d’écoute et de limiter les réflexions sur les meubles ou consoles, et surtout il peut être tourné à 90 ou 180 degrés ! Quatre vis à enlever, puis remettre, et vous pourrez choisir de poser les A7V horizontalement ou verticalement (ce qui, a priori, est plus recommandé). En fonction de l’agencement de votre espace de travail, ça peut être utile d’avoir le choix. En tout cas, pour nous, ça l’a été. Concernant le woofer, le matériau change cette fois, pour plusieurs couches de fibres minérales. On n’ira pas jusqu’à vous raconter que ça sonne minéral, mais franchement ce haut-parleur restitue les fréquences différemment de celui des A7X. Enfin, au rayon des nouveautés de cette nouvelle série, exit les interrupteurs et potentiomètres sur le panneau avant, tous les contrôles sont à l’arrière des enceintes : un potentiomètre de niveau qui va de –12 dB à +12dB, non cranté (certes, la course marque un arrêt à 0 dB, mais ça ne nous parait pas une bonne idée ce genre de réglages hasardeux), un égaliseur quatre bandes, et un choix entre les mystérieux « voicings » Pure, UNR et Ext, sur lesquels on reviendra.
Control Freak
Mais la grande nouveauté de cette nouvelle série A, c’est que les différents modèles sont équipés d’un DSP (Digital Signal Processing) qui permet d’effectuer un certain nombre de réglages auxquels on n’a pas accès par des potentiomètres ou interrupteurs physiques. Nous voici donc projetés dans le monde merveilleux des moniteurs avec numérique embarqué. Avec cette paire de moniteurs, on a donc accès au « A control » qui est un logiciel (téléchargeable gratuitement depuis le site web Adam) dans lequel on pourra faire ces réglages à distance, à condition que les enceintes et l’ordinateur soient reliées par un câble RJ45 à un réseau. De prime abord, tout ça nous avait semblé un peu compliqué, mais au final ça a été plutôt simple et rapide à mettre en place : un réseau depuis la box internet, relié à un hub RJ45 pour brancher trois câbles, et c’est parti. Le « A control » reconnaît rapidement nos deux enceintes A7V, l’interface est assez intuitive, et on y retrouve dans un premier temps les réglages qui étaient proposés au dos des enceintes. L’égaliseur 4 bandes est clairement dédié à l’adaptation à la pièce : Basses (+2 à –4 dB), Desk pour les fréquences qui peuvent être accentuées par la surface sur laquelle repose l’enceinte (0 à –4 dB), Présence (+1 à –1 dB), et Treble (+1,5 à –1,5 dB). En utilisant ces différentes bandes, on trouve les corrections un peu légères, on aurait peut-être aimé qu’elles soient un peu plus efficientes. Ce réglage est accessible pour les « voicings » Pure et UNR. Le terme de voicing est un peu étrange, mais l’idée est la suivante : Pure propose une réponse en fréquence la plus linéaire et transparente possible tandis que UNR reprend les caractéristiques sonores des produits historiques de la marque Adam. En d’autres termes, pour mixer on préfèrera Pure, tandis que UNR pourra intéresser les aficionados de la marque allemande, ou peut-être des producteurs qui voudraient travailler avec un son qu’ils jugent plus flatteur… Pour notre part, on ne trouve pas beaucoup d’intérêt à cette deuxième option. En revanche, la suite est assez captivante ! Il reste trois possibilités à choisir dans le A control, qui sont toutes reliées au voicing Externe apparaissant à l’arrière des enceintes. L’ordinateur prend alors le contrôle et les potentiomètres sur l’enceinte sont neutralisés. Une première option « ADV » consiste en un égaliseur 6 bandes par voie, totalement paramétrique. De quoi faire des réglages hyper précis, on s’en réjouit, mais on regrettera juste qu’on ne puisse pas lier les deux voies et choisir de leur appliquer ou pas les ajustements en simultané. La troisième option est un « Off » qui permet d’écouter avec ou sans les réglages, et la deuxième ouvre une porte vers un voyage assez fantastique sur lequel il va falloir s’attarder : Adam a travaillé en partenariat avec Sonarworks pour proposer tout un processus qui commence dans le SoundID Refence, se prolonge dans le A control des moniteurs A7V et enfin nos oreilles. Sonarworks est une marque bien connue de nos lecteurs qui propose avec son logiciel d’étudier l’acoustique de notre pièce, et de générer des corrections en fonction de celle-ci, et du profil des enceintes utilisées. Sans trop rentrer dans les détails, le SoundID Reference seul permet déjà de faire des corrections dans l’ordinateur et donc en sortie des convertisseurs audionumériques, mais avec Adam on peut appliquer ces corrections directement dans chaque enceinte ! Après une (longue) série de mesures, guidées par le logiciel, on obtient un fichier qui détermine les caractéristiques de notre pièce, et qui peut être enregistré dans le A control et ainsi communiquer aux enceintes les corrections à faire. Les Adam A7V enregistreront les réglages et il ne sera ainsi plus utile de lancer le logiciel SoundID. Impressionnant ! Adam propose aux acheteurs un essai gratuit du SoundID pendant 60 jours. Cela suffira pour une première mise en place, mais si vous déménagez, il faudra repasser à la caisse.
Des Moniteurs Classe A
On se lance dans une comparaison entre les 2 générations d’enceintes ; le résultat est sans appel, et les différences sont flagrantes au niveau du bas médium et des fréquences très aiguës. Les A7X sont beaucoup plus chargées autour de 200 Hz alors que les A7V paraissent bien plus homogènes, même si elles ont une plus petite bosse autour de 500 Hz. De la même manière, dans le haut du spectre, on retrouve une bien plus grande linéarité dans les A7V à partir de 4 kHz.
La phase de test peut commencer, tout d’abord avec du bruit rose, et on se promène entre les différents réglages de correction du A control, afin de trouver celui qui nous paraît le plus plat et homogène en termes de réponse en fréquence selon notre micro de mesure. C’est évidemment le réglage intégrant le fichier de calibration de SoundID qui nous semble le plus équilibré. On décide donc de garder ce préréglage jusqu’à la fin du test. Les mesures relevées nous confirment les impressions déjà ressenties, le bas médium nous parait beaucoup plus contenu et linéaire, on gagne beaucoup d’air, car la courbe se maintient au-delà de 10 kHz, contrairement aux A7X qui semblent s’effondrer au-delà de ces fréquences (peut être un rapport avec l’âge de celles-ci également, maintenons un doute là-dessus). Des résultats similaires sont observés en émettant un signal sinusoïdal à différentes fréquences, et en particulier à 250 Hz ou les A7X sont beaucoup plus généreuses et 500 Hz ou le rapport s’inverse.
En musique
Passons aux écoutes comparatives. Comme à notre habitude, on va passer en revue quelques morceaux que l’on connait très bien, et dont les textures, la spatialisation, et la largeur du spectre nous paraissent intéressantes à comparer. On s’est demandé comment on allait procéder pour comparer ces deux générations parce que Adam nous propose maintenant beaucoup de solutions de corrections différentes. On a finalement pris le parti de garder pour chacune des enceintes la correction qui nous paraissait la plus efficiente pour pouvoir estimer leurs vrais potentiels. On a donc gardé la correction Sonarwork appliquée à 60 % pour les A7V, et on est évidemment restés sur la correction manuelle des A7X qu’on a pu faire dans notre régie. Précisons qu’une fois le fichier de calibration envoyé dans le DSP des enceintes, on peut débrancher les enceintes du réseau Ethernet et ne plus avoir besoin du logiciel de Sonarworks.
Radiohead « 15 steps »
Le résultat est sans appel, on gagne indéniablement en clarté, le bas du spectre nous parait moins brouillon. Les fréquences aiguës sont beaucoup plus douces et définies, on gagne de l’air et le tout semble plus équilibré sans être pourtant amputé du caractère nerveux que peuvent avoir les enceintes Adam. On sent que le guide d’onde des tweeters nous donne une belle linéarité et qu’en se désaxant un peu du point d’écoute, on garde une belle cohérence. Toutes les composantes de la rythmique sont extrêmement bien restituées et les transitoires sont particulièrement précises et restituent le champ de dynamiques particulièrement important dans ce morceau. L’image sonore et la largeur de la stéréo sont aussi agréablement surprenantes, à tel point que la comparaison avec des enceintes trois voies serait presque tentante. La voix de Tom Yorke affiche elle une belle présence dans le haut médium et toutes les réverbes qui peuvent y être associées paraissent en même temps plus profondes et moins diffuses que sur les A7X. On est plutôt très convaincus pour l’instant.
Kendrick Lamar « Alright »
Dès les premières notes, on sent que le grave et le sub sont beaucoup plus contrôlés, la ligne de basse qui descend très bas sur ce titre reste parfaitement homogène sur toutes les notes, malgré le large ambitus utilisé. La profondeur du mix est vraiment mise en valeur entre les éléments les plus secs et serrés qui occupent bien le premier plan, on parle des voix et de certains éléments percussifs de la programmation, alors que d’autres éléments tels que les chœurs ou les saxophones se répartissent les différents plans de profondeur très identifiables. C’est une très belle restitution de cette production ambitieuse. Encore une fois, les voix de Kendrick bénéficient d’une présence très agréable et se placent avec évidence dans le mix, sans pour autant donner la petite agressivité qu’on pouvait ressentir avec les A7X.
Lou Reed « Walk on the wild side »
On sait que les enceintes Adam ont tout de même la spécificité d’être particulièrement adaptées aux productions modernes, et on a envie de mettre cette toute nouvelle mouture à l’épreuve d’un morceau plus ancien, et constitué exclusivement de sources acoustiques.
Le résultat est encore une fois très flatteur tant la totalité des éléments de productions et les arrangements se placent avec beaucoup de naturel. La profondeur de l’image est encore mieux révélée quand les chœurs de femmes arrivent, l’impression d’approche est très détaillée et très immersive, jusqu’à ce qu’on se sente presque entouré par ces voix quand elles finissent de s’assécher. Les petites guitares acoustiques qui peuvent sur certaines écoutes paraitre un peu trop distantes sont ici parfaitement présentes, et l’air qu’elles contiennent est révélé par ces hautes fréquences précises, nerveuses et douces à la fois. Le constat est assez similaire pour les violons, qui savent rester discrets en gardant une belle présence. Le seul petit bémol serait la légère bosse que l’on a constatée autour de 500 Hz lors de nos mesures, qui peut conférer un léger manque de profondeur à la grosse caisse, malgré un joli grave contrôlé, et à la contrebasse dont certains artefacts vont avoir tendance à ressortir.
V comme Victoire
Les A7V sont de très bons moniteurs, clairement meilleurs que leurs prédécesseurs A7X. Pour une paire d’enceintes à 1400 € environ, la qualité est indéniablement au rendez-vous et les possibilités de réglages et corrections qu’offre le A control sont très intéressantes, le partenariat avec Sonarworks ajoutant encore une dimension supplémentaire dans ce domaine. Nous recommandons chaudement !