Ableton vient de nous livrer une surprise, à savoir une groovebox dans un format portable, avec écran, grille de 8 x 4 pads, plein de boutons et d'encodeurs, nous faisant penser autant au Push qu'aux Novation Circuits. Qu'est-ce que c'est que ça, comment, pourquoi, d'où, on vous dit tout !
Alors que Ableton vient de nous livrer la version 12.1 de sa STAN emblématique Live, nous avons été surpris d’apprendre que la société berlinoise travaillait depuis plusieurs derniers mois sur une nouvelle machine hardware, qui est tout juste disponible au moment où vous lirez ces lignes. Et ce seulement quelques mois à peine après la sortie de la troisième itération de leur contrôleur et groovebox autonome Push, dont nous avions parlé également, et qui avait divisé concernant ses limitations sans ordinateur allumé ou son autonomie chez son public.
Aussi, sortir une nouvelle groovebox peut être vu comme un pari osé, ce qui soulève évidemment la question du positionnement du produit. Est-ce une version « light » de Push 3 groovebox ? Un produit complètement différent ? Qu’est-ce que ça va apporter de novateur sur ce marché des grooveboxes, qui d’après mes occupations récentes pour AudioFanzine semble carburer aux stéroïdes en ce moment ? J’ai l’impression que les orientations récentes de Live 12, dont je vous ai parlé précédemment, nous donnaient des indications à ce sujet. Alors sans plus attendre, nous allons voir de quoi il retourne avec la nouvelle groovebox hardware de Ableton, le Ableton Move… Qui est aussi un contrôleur !
Elle m’a dit move de là
Ableton Move est donc un jouet pour adulte qui mesure 31.35 × 14.63 × 3.4 cm pour un poids d’un petit kilo, un peu plus large mais aussi plus rectangulaire qu’un Novation Circuit Tracks, dont on n’a pas fini de parler dans ce test. Proposé par Ableton au tarif de 440 euros environ, distribué uniquement par Ableton dans notre contrée via leur site internet, Move est livré dans une boite du plus bel effet avec un câble USB-C, un câble d’alimentation USB-C également en deux parties, de la documentation en anglais, la version Lite de Ableton Live 12 ainsi que des leçons gratuites sur Melodics en bundle, et des manuels au format PDF (en anglais pour le moment), en ligne, et vidéo.
La machine dispose d’un certain nombre de contrôles, à savoir une grille 8 × 4 de pads rétro-éclairés assez agréables qui font penser plus au Push 2 qu’au Push 3 (pas de MPE, mais de la couleur et de l’aftertouch polyphonique par pad), 8 petits encodeurs continus infinis sensibles au toucher, un neuvième un peu plus gros qui est dédié au volume global, et un encodeur cranté avec bouton poussoir situé en dessous d’un petit écran ! Celui n’affiche que du noir et blanc mais possède une assez bonne résolution (OLED, 128 × 64 pixels), permettant d’afficher pas mal d’informations comme nous allons le voir.
En dessous de chacun des 8 premiers encodeurs, il y a aussi 8 LEDs rondes qui peuvent prendre plusieurs couleurs, idem en dessous des 16 petits boutons ronds qui serviront pour le séquenceur à pas, mais cette fois-ci avec des formes différentes affichant des icônes, en référence à des menus accessibles en appuyant sur le bouton en question avec l’équivalent d’un bouton shift. Sous le gros encodeur cranté qui servira pour la navigation, il y a aussi deux boutons ronds moyens avec des icônes blanches qui peuvent s’éclairer ou pas pour se balader dans les menus, encore en dessous deux boutons ronds pour le transport « play » et « record », encore 2 × 4 boutons du même genre à droite des pads, 4 boutons plus petits en forme de croix directionnelle en dessous, et enfin 4 boutons rectangulaires pouvant afficher différentes couleurs tout de suite à gauche des pads pour sélectionner des pistes. Nous sommes dans une configuration avec moins de contrôles que sur d’autres grooveboxs en plus des pads, mais avec beaucoup de feedback potentiel fourni à l’utilisateur.
Niveau connectique, nous sommes par contre sur quelque chose de carrément minimaliste, puisque nous avons à l’arrière de la machine un bouton orange pour allumer et éteindre la machine, une entrée audio stéréo minijack, une sortie audio stéréo minjack pour brancher un casque ou des enceintes (à noter d’ailleurs que Move dispose d’un haut-parleur et d’un micro intégrés), un port USB-C dédié à l’alimentation et à la connexion à un ordinateur, et un port USB-A Host qui permet de brancher des contrôleurs MIDI. Et c’est tout ! En effet, il n’y a pas de ports MIDI, pas d’entrée / sorties dédiées à la synchronisation, pas de port pour carte SD ou autres… Ceci est un choix qui n’est pas anodin, même si il se retrouve contrebalancé en partie par la connectivité en Wi-Fi.
A l’allumage, la première chose que la machine nous indique en effet c’est qu’elle veut être connectée à votre réseau local en Wi-Fi justement, une étape sur les machines compatibles qui peut être éprouvante pour celles et ceux qui ont des mots de passe à rallonge ! Mais cela permet ensuite en quelques secondes et de manière presque automatique à la machine de vérifier que vous avez bien la dernière mise à jour du firmware, et de la télécharger puis de l’installer dans le cas contraire. Dans notre cas il s’agissait au moment de rendre le test de la version 1.1.2.
Une fois lancée, quelques secondes après le dernier redémarrage, Ableton Move nous propose une liste de 4 projets de démonstration, réalisés par l’artiste BNYX, associés à des pads, ce qui nous indique que nous serons limités à un nombre de 32 sets maximum dans la groovebox. En cliquant sur un autre pad, on sélectionne un slot pour un nouveau projet, et celui-ci se remplit automatiquement et aléatoirement d’instruments pour chaque piste en piochant dans les présets. Et on peut d’ors et déjà accéder via la touche shift à un vue de réglages globaux, pour activer les technologies Ableton Cloud et Ableton Link, régler la luminosité (ça éclaire bien pour l’extérieur merci !), activer un mode contrôleur pour Ableton Live, savoir le chargement de la batterie intégrée (plusieurs heures d’autonomie !), accéder à des réglages sur le MIDI, connecter la machine à distance à un ordinateur pour accéder à son contenu… En effet, il est possible via USB ou Wi-Fi de manipuler les projets présents dans la machine, les sons enregistrés, les présets utilisateurs, et même de réaliser un export sous forme d’audio d’un des projets présents, via une application web intitulée Move Manager, et accessible en tapant une adresse spécifique dans votre navigateur web.
- BNYX Demo 101:24
- BNYX Demo 201:00
- BNYX Demo 301:26
- BNYX Demo 401:08
La groovebox amovible
Toujours grâce au Wi-Fi il est possible d’importer et d’exporter des sets via Ableton Cloud, comme pour l’application Ableton Note, ce qui permet ensuite de les ouvrir directement dans Live 12.1 via le navigateur de contenu, dont il vous faudra la toute dernière version pour bénéficier de toutes les fonctionnalités. Ce qui nous amène tout de suite à vous indiquer les caractéristiques que vous attendiez toutes et tous sur le produit : oui c’est une groovebox qui partage pas mal de similarités avec les Novation Circuit Tracks et Rhythm, plus qu’avec les Push d’ailleurs, et surtout avec l’application iOS Note, dont elle partage en partie le concept, à savoir :
- 4 pistes (mais contre 8 dans Note) pouvant contenir 8 patterns,
- chaque piste utilise au choix un moteur sonore au choix de type sampling drums 16 sons basés sur le Drum Sampler de Live 12.1, sampling mélodique, synthétiseur Drift ou synthétiseur Wavetable, avec de la polyphonie qui n’est pas spécifiée mais qui visiblement peut aller assez loin au vu de la puissance de la machine (quadricœur ARM Cortex-A72 cadencé à 1,5 GHz avec 2 Go de RAM),
- chaque son provient d’une librairie de présets, classés par catégorie, associés à chaque fois à 8 macros accessibles avec les encodeurs, et à deux effets dont on peut également modifier des paramètres qui sont au nombre de 8 (Reverb, Delay, Saturator, Chorus-Ensemble, Phaser-Flanger, Redux, Channel EQ, Dynamics), dont des paramètres spécifiques de réglage par échantillon sonore pour les modes sampleur,
- le bus master qui peut avoir deux effets, et qui a un limiteur toujours enclenché et non customisable,
- une vue « Session » avec la liste des patterns et une vue « Note » pour jouer d’un des instruments et séquencer des notes sur 16 pas par mesure avec jusqu’à 16 mesures, avec la grille de pads qui suit une gamme et une organisation au choix, ou donne accès aux 16 sons du mode drums,
- un métronome, avec un réglage global de tempo et de « groove »,
- des capacités de sampling avec le microphone ou l’entrée ligne
Comme pour Note, la compatibilité avec Cloud dans Live implique des possibilités d’édition limitées pour les pistes qui utilisent Wavetable, si on ne possède pas la version Suite, avec seulement l’accès aux macros du préset qui est autorisé. Peut être serait-il un bon move de rendre disponible Wavetable pour les utilisateurs de la version Intro ou Lite 12 à cette occasion ? De plus, l’ergonomie de la fonctionnalité Cloud, lorsqu’on veut faire passer un set de Note à Move ou inversement est problématique, car le nombre de sets synchronisables est limité à 5, et qu’il n’est pas possible de déplacer un set en local d’un endroit à l’autre sans le supprimer automatiquement sur l’autre machine, à moins de faire des duplicatas. En effet, il est possible de lire les projets réalisés dans Note directement dans le Move et pas seulement dans Live, mais la groovebox affichera le cas échéant un message si il y a plus de 4 pistes avec du contenu, pour indiquer que les pistes au delà de quatre sont ignorées.
Au chapitre des différences avec l’application en quelques mots, en plus du nombre de pistes, on a l’ergonomie évidemment, des choses en plus dans le contenu fourni en présets pour Move, le hardware en général avec la possibilité notable de passer du signal dans l’entrée audio et de pouvoir l’écouter en même temps avec le mode de monitoring adéquat (pour mixer le son venant de l’extérieur dans la machine comme un certain Circuit Tracks, mais sans pouvoir rajouter d’effets dessus par contre). Par contre Move ne dispose pas (encore ?) de la fonctionnalité des scènes contrairement à Note malheureusement pour le moment. C’est une fonctionnalité pratique pour lancer plusieurs patterns facilement en même temps, sur laquelle on peut tricher en faisant un slide vertical sur les 4 pads en même temps. Je ne dirais d’ailleurs pas non à un song mode plus classique à la place, mais cela dénoterait peut être un peu avec le fonctionnement de Ableton Live.
Move to be alive
Après quelques manipulations, je me suis retrouvé avec plusieurs projets disponibles sur l’écran de démarrage. J’ai pu constater qu’on pouvait passer de l’un à l’autre en cours de lecture, comme on le ferait dans Live en sélectionnant plusieurs clips, et ce sans latence de déclenchement, ce qui est très intéressant pour de la performance live. Par contre, le tempo passe d’une valeur à l’autre instantanément également, à voir si il pourrait être possible de passer progressivement de l’un à l’autre dans une future update (je vais souvent le répéter ça dans ce test).
Une fois un set sélectionné, on peut passer sur la vue Session en appuyant sur un bouton spécifique, et aller sur la vue Note d’un autre appui ou en sélectionnant une piste via les quatre boutons colores sur le côté gauche de la grille. En Session, on voit tous les patterns disponibles sur 4 lignes correspondant à chaque piste, on peut aussi manipuler les deux effets master bus avec l’encodeur cranté, appuyer dessus pour changer de type d’effet et de préset, jouer avec les 8 encodeurs de macros pour changer les paramètres classiques de l’effet, et tourner l’encodeur cranté pour modifier le slot de FX qu’on édite. En mode Note, les pads permettent de jouer de l’instrument, les 8 encodeurs de macros de changer le son du moteur de génération, et on peut ensuite encore aller sur les effets avec l’encodeur cranté. Il est très agréable quelque soit l’étape de pouvoir juste lire le nom et la valeur des paramètres en effleurant les encodeurs, avec les LEDs qui clignotent au gré de la lecture pour signifier la présence de volume sonore, ou une idée du paramètre d’effet associé.
Ensuite dans le mode Note, on peut choisir sa gamme, enregistrer en live une performance, ou la séquencer à la main en restant appuyé sur un pas puis sur un pad pour le valider, puis en naviguant dans les mesures disponibles avec les boutons gauche et droite. La longueur des patterns peut être un nombre de mesures entier ou autre chose, on peut indiquer le nombre de pas par mesure, ce qui nous laisse entendre qu’il est possible de faire des choses sympathiques en polyrythmie. On peut également régler la longueur de chaque note individuellement (pour la faire jouer plus longtemps qu’un pas ou la rendre très courte), enregistrer des répétitions ou des arpégiateurs à la volée (ça manquait aux Circuits ça tiens), jouer sur les vélocités, et même enregistrer des automations de paramètres. Tout ce qui est fait dans la machine est sauvegardé à intervalles réguliers en live et peut être annulé grâce à un bouton undo / redo toujours pratique dans ce genre d’appareils. On regrettera simplement l’absence de paramètres de probabilité, et un certain temps d’adaptation au feedback visuel proposé par le séquenceur, qui se révèle très efficace, et permet même de sortir des temps stricts avec le paramètre de nudge et des options de quantisation.
Les boutons sur le côté droit permettent de faire un certain nombre de manipulations simplement : copie, mute, suppression de notes ou de clips, undo / redo donc, la touche shift pour accéder à des fonctions secondaires sur les boutons ou en appuyant sur les petits boutons du séquenceur à pas. Au passage, en restant appuyé sur Shift, des petites LEDs avec des icônes s’affichent sous les boutons, ce qui permet plus facilement de savoir ce que l’on y fait (tempo, groove, métronome, vélocité, logueur des patterns mode de répétition et d’arpégiateur, gammes, quantize etc.). Il y a également une fonction qui s’appelle Capture, qui permet de transformer en clip quelque chose que l’on vient de jouer sans avoir enclenché l’enregistrement voire même la lecture, en faisant des estimations sur le tempo utilisé et le placement des notes, plutôt intéressant pour le workflow.
D’ailleurs, pour chaque piste, le choix du son fait partie des rares choses qui se font en passant par un menu et l’écran dans cette machine ! Mais pour une bonne raison ici, puisque Ableton Move classe tous les présets en catégories (Drums, Bass, Brass, Evolving, Templates, Synth Lead etc.), et la navigation permet de les parcourir, avec leurs noms affichés, puis de jouer en live avec le son avant de le sélectionner ou de revenir en arrière. On note la petite icône qui s’affiche à côté du nom pendant la navigation, très pratique pour savoir quel moteur sonore est utilisé. En effet, chaque type de moteur sonore et aussi d’effet possède une icône associée que l’on pourra repérer à l’utilisation de Ableton Move.
Petit détail intéressant également, il existe pour le moteur Drum un mode qui s’appelle « 16-pitches », qui permet pour chaque son d’avoir accès à 16 pads supplémentaires sur la droite pour jouer de façon mélodique du son, ce qui permet facilement de rendre plus dynamique des patterns de drums, ou de mélanger sons mélodiques et percussifs dans un même instrument.
Ha, move it
Parlons maintenant d’un autre gros sujet, à savoir le sampling ! Dans Ableton Move, il est possible en sélectionnant un instrument de type drum ou sample mélodique d’enregistrer des sons venant de l’extérieur (microphone incorporé, entrée audio stéréo, resampling) en appuyant sur le bouton Sampling. On peut alors choisir un des 16 pads drums, ou une note de référence en mélodique, rester appuyé, relâcher, et c’est dans la boîte ! Avant l’enregistrement, on a accès également à des réglages de gain, ou de type de monitoring.
Une fois le son enregistré et assigné à un pad, il est également stocké dans le stock d’enregistrements de la machine, et peut être réutilisé à l’envi, ou réorganisé via la connectivité au Move Manager, avec une autre catégorie spécifique pour les samples importés directement depuis l’extérieur. On peut ainsi imaginer par exemple charger un kit de drums 909, sélectionner un pad, et remplacer le son de la ride par n’importe lequel des sons stockés, comme une prise de voix, une boucle audio, ou une note d’instruments. Ableton Move propose du contenu additionnel en matière de samples en plus des présets, avec des sons de toutes les drums machines possibles et imaginables, des accords sur des synthés ou des pianos électriques, des percussions acoustiques, des risers et sirènes, des voix, et même des boucles qu’il faudra utiliser au bon tempo en l’absence de time stretch automatique.
De plus, les sons disposent de deux jeux de réglages spécifiques spécifiques, pour transposer, régler le démarrage du son, filtrer avec un LFO additionnel, jouer avec des enveloppes, et même avec les différents modes de transformation qu’on a appréciés dans le nouveau Drum Sampler de Live 12.1, et qui sont ici pleinement paramétrables ! A noter également que le resampling du master bus promet plein de possibilités pour étendre le nombre d’événements qui se produisent en même temps dans la machine, et que l’on peut aussi enregistrer un son et le découper à la volée sur plusieurs pads pendant l’enregistrement, qui utiliseront toujours le même échantillon mais avec une position de départ différente…
Enfin, on peut enregistrer une config donnée sous forme de préset utilisateur, et à priori on a peu de limitations là dessus par rapport à des produits concurrents. En effet, d’après les spécifications que j’ai pu obtenir pour l’instant (on confirmera après la sortie du produit), il semblerait que les échantillons peuvent faire jusqu’à 100 Mo, avec une limite de 120 secondes pour les enregistrements, et la machine embarque une carte SD non amovible de 64 Go, ce qui est très généreux sur ce genre de machines, surtout si cela permet de la blinder de présets et de sons, accessibles instantanément !
Le contrôleur Ableton Move
Dernier pan à regarder de la machine, Ableton Move propose un mode de fonctionnement de contrôleur pour Ableton Live 12.1, que l’on peut imaginer prochainement compatible avec Bitwig Studio également, et qui prend le relais du mode groovebox / standalone, avec la connexion USB-C. On se retrouve avec un contrôleur USB assez proche des Launchpads, APC, ou même des Pushs, avec le mode Session, un mode Note qui suit la gamme indiquée dans Live 12 (du coup c’est tout de suite plus intéressant comme fonctionnalité ça !), les encodeurs rotatifs qui se retrouvent automatiquement associés à des macros ou des paramètres par défaut sur les instruments, la 8ème colonne en Session qui permet de lancer les Scènes.
Les différents boutons se retrouvent alors associés à des paramètres très proches de ce que l’on pouvait déjà faire dans Move groovebox pour contrôler Live, comme les volumes par pistes ou pads, le réglage du tempo, l’accès à la barre de transport, la manipulation de clips, les mutes… On peut aussi de balader d’un device à l’autre de Live 12 avec l’encodeur cranté et avoir accès à un jeu de paramètres sur chaque en direct, qui pour l’instant me semble limité aux 8 premiers à moins d’utiliser des macros. J’aimerais bien qu’on puisse avoir accès à facilement plus de choses sans toucher à la STAN, à voir avec les prochaines mises à jour là encore (le firmware sur la partie « Control Surface » affiche cette fois-ci 0.108). Et bien entendu, la moindre manipulation donne lieu à des indications sur l’écran, dont la taille ou la résolution ne nous a jamais semblé problématique jusque là, même quand on y voit affichées des petites formes d’ondes, ce qui est plutôt un très bon point ici pour Ableton.
Mais ce mode de surface de contrôle nous réserve encore deux surprises. La première c’est que le séquenceur à pas écrit directement le contenu des clips dans Live 12.1, sans avoir besoin de passer par une fonction « Print To Clip » auxquelles nous sommes habitués sur ce genre de produit, ce qui nous semble être une bonne proposition de workflow. Et surtout, Move est reconnu comme interface audio, ce qui signifie qu’on peut écouter ce qui rentre à l’intérieur dans l’ordinateur, utiliser le microphone et le haut parleur intégrés, brancher notre casque de sortie audio final dessus, ce qui peut avoir un certain nombre d’avantages dans des configurations avec un ordinateur portable, surtout un mac d’ailleurs à défaut d’un équivalent à Overbridge pour Windows, qui oblige encore à s’en servir comme interface principale ou à utiliser ASIO4ALL. La fonctionnalité est d’ailleurs disponible sur le mode groovebox, y compris en dehors de Live, ce qui permet d’enregistrer la sortie de la groovebox, mais pas encore de sampler quelque chose venant de l’extérieur. Nous aurions aimé avoir également du multi-pistes ou bien une compatibilité avec nos smartphones, là aussi on vous tiendra au courant.
Move it to the limit
Maintenant que vous avez vus avec moi un peu ce qu’était le Ableton Move, reste à répondre à une question fondamentale : qu’est-ce qu’on en fait, déjà concernant la groovebox ? Pour commencer, revenons un peu sur la partie génération de son. Le moteur de lecture de samples, bien que possédant des capacités rudimentaires de time stretching, permet de faire pas mal de choses à partir de matière sonore diverse et variée, y compris pour multiplier le nombre de sons utilisés en même temps grâce au resampling des pistes. C’est une technique que j’ai pas mal utilisée sur le Circuit Rhythm et que des experts avec d’autres sampleurs connaissent. C’est moins bien que des pistes en plus évidemment, mais comme la mémoire de stockage n’est pas un souci ici…
Concernant les moteurs de synthèse, on les connait un peu puisqu’ils étaient dans Note et surtout dans Live. Malheureusement il n’est pas possible pour le moment de créer ses présets et de les importer dans la machine, même si il existe déjà une fonctionnalité expérimentale un peu documentée qui permet de le faire pour les Drum Racks et pour Drift. Move n’est pas trop mal pourvu sur ma machine de test en termes de styles de sons, avec une catégorie « template » bienvenue qui permet quand même de faire du sound design à partir d’une base neutre. Sur le Circuit Tracks, ce genre de présets manquait un peu selon moi dans la plupart des packs, avec beaucoup de modulations dans tous les sens.
Ensuite, Drift permet d’un côté de faire des choses un peu « Virtual Analog » (voir mon test de Live 12) tandis que Wavetable est sur un registre vraiment plus typé synthétiseur numérique assumé, avec la possibilité de faire de la FM et même quelques présets dédiés qui fournissent des macros agissant sur des opérateurs. Mais à chaque fois, un préset donné ne fournit que des macros pour modifier le son de façon statique ou dynamique avec l’automation, et il arrive souvent qu’on ne soit pas satisfait par les choix de macros qui ont été faits par le designer de présets. Comme pour les Circuits, ce mode de fonctionnement est très bien pour donner de l’inspiration (parcourir des sons à la recherche d’une sonorité sur laquelle on accroche) mais un peu moins quand on a déjà une idée précise de son à obtenir…
Toutefois, cela est contrebalancé par la relative liberté dont on jouit au niveau des effets, notamment sur la saturation qui est ni plus ni moins que le Saturator de Live 12, complètement paramétrique. Les 8 effets couvrent pas mal de registres, avec le premier slot d’effet sur une piste qui peut être utilisé comme « send » sur les sons de drums, avec la possibilité de régler un volume différent pour chaque pad. La réverb, le délai, et la saturation sont incontournables, mais on appréciera de mettre un compresseur en master, et un peu de modulations ci et là. Le compresseur sidechain est aux abonnés absents pour le moment, ce qui fera partie aussi de ma liste de feature requests. Ces effets que l’on connaît de Live sont plutôt de très bonne facture, mais on reste cantonnés à certains registres quand même en dehors de ce que l’on peut faire avec les samples, et au vu de l’écosystème en matière d’instruments et de présets dans Live, on aimerait beaucoup voir beaucoup plus de contenu en présets de synthèse, et surtout de moteurs tels que Operator ou les instruments un peu plus barrés à base de résonateurs et de modèles physiques.
En tout cas ce produit est une bonne surprise, qui peut convenir à différents types d’utilisateurs et pour différents usages. Le mode contrôleur est une bonne surprise, surtout sur un produit « day one » avec une documentation encore partielle, au point qu’on aurait très bien pu imaginer voir un Ableton Move « light » moins cher montrer le bout de son nez sans la partie groovebox, et que ce produit aurait pu intéresser les gens qui cherchaient un mini Push ou une alternative aux Launchpads et APC avec quelques fonctionnalités sympathiques. Je me suis étonné à jouer pas mal avec Live 12 sur ce contrôleur, avec une vraie possibilité de ne pas trop décoller mon regard du contrôleur pour faire mes manipulations, et à passer moins de temps que prévu sur la groovebox. J’aurais forcément plein de requêtes à faire sur des mises à jour (les probabilités encore, l’accès à plus de paramètres de chaque instrument sans macros, pouvoir locker un encodeur sur un paramètre donné non dépendant de là où on se trouve etc.), mais nous sommes déjà sur quelque chose de très concluant et qui peut concurrencer les ténors du genre en plus des grooveboxes de cette gamme de prix.
En tant que groovebox, on est clairement sur un registre très proche des Novation Circuits, avec ses limitations en nombre de pistes et en possibilités de sound design, pour en faire un instrument « inspirant » qui aura une forte tendance à inspirer plutôt des débutants en production de musique électronique, des musiciens qui veulent être accompagnés par une machine, ou bien des artistes plus avancés dans leur technique qui veulent une machine à faire plein de choses pour l’insérer dans un setup « DAW-less » ou hybride hardware / software. De ce point de vue là, Ableton a fait assez fort, en reprenant plein de petites choses que j’aimais bien dans les Circuits, notamment une ergonomie aux petits oignons et une certaine immédiateté, et en comblant certains problèmes comme l’absence de feedback pour naviguer dans les présets (grâce à l’écran), le sound design avec les effets, la communication avec Live, et l’absence de limites stupides sur le nombre de présets et de sons accessibles à un moment donné.
Néanmoins, en faisant abstraction de tout ce qui peut bouger avec de futures mises à jours, Ableton aurait pu proposer un véritable Circuit-killer si une erreur majeure n’avait pas été commise, qui est l’absence d’entrée / sortie MIDI, le gros point noir de ce produit selon moi qui peut rendre inutilement compliqué l’insertion de la machine dans un setup hardware. Cet oubli peut être heureusement comblé en utilisant un câble USB vers MIDI, ou en branchant au hasard un Circuit Tracks dans le port USB-A (ne rigolez pas), ce qui permet d’avoir accès à l’information du tempo et de synchroniser tout ce beau monde. Mais on sent que le produit a surtout était pensé pour interagir avec Ableton Live, ou comme bloc-notes pour commencer une idée dessus et la terminer plus tard, avec toutefois un peu plus de flexibilité si on peut utiliser Ableton Link qui remplit la fonction de synchroniser tout ce beau monde, que ce soit avec Live directement ou avec des smartphones et tablettes compatibles. De plus, sans passer par Link, il n’est pour l’instant pas possible de commander le tempo de Move par l’extérieur, et la machine semble ne pas pouvoir d’après les réglages disponibles être à la fois commandée en MIDI et envoyer du MIDI vers l’extérieur, pour le moment en tout cas. Cela impose de le connecter au reste d’une certaine manière. Petit détail également, Ableton Move a besoin d’une alimentation costaud pour se recharger, et on vous déconseillera de le brancher en USB sur votre machine sur un hub.
De même, le Circuit Tracks est intéressant parce qu’il peut séquencer des instruments en MIDI (il a deux pistes dédiées à ça) et récupérer leur sortie audio pour les traiter comme le reste des pistes avec des effets, et avoir ainsi un rôle de « hub » ou mixeur général. Ici il est possible d’envoyer l’entrée stéréo ligne dans le bus master, mais on aurait apprécié de pouvoir aussi y rajouter des effets, voire avoir accès à des pistes supplémentaires qui pourraient être MIDI seulement, à défaut d’avoir la possibilité de mettre des instruments comme sur les quatre premières pistes. Pour le reste, il faut quand même admettre que Ableton Move touche la plupart du temps juste, et dispose d’un certain potentiel pour intéresser des marchés variés, notamment grâce à sa taille plus petite qu’un Push ou certaines grosses grooveboxes. Et visiblement, Move s’entend quand même pas mal avec mon téléphone pour le sampling, avec le Circuit Tracks ou avec un NTS-3 pour avoir de l’effet de performance en plus !
- Drums FX01:33
- French Kitchen01:22
- Rumble Dumble01:34
- Ableton Move It00:36