Quand une maison bien d’chez nous ose proposer une « Strat » à moins de 400 € alors que l’offre est déjà pléthorique, ça donne de nombreuses demandes de test de la bête. Et comme chez Audiofanzine on écoute (parfois) nos lecteurs, on ne pouvait décemment pas passer à côté de la petite Française.
Précisons tout de suite qu’à ce tarif, ce ne sont pas des ouvriers élevés au tablier de sapeur (celui qui se mange) et au pot de Côtes (celui qui se boit) qui se sont attelés à la lutherie : Custom 77 a choisi la Corée (du Sud, œuf corse) pour faire fabriquer ses instruments. Les guitares sont ensuite vérifiées et réglées une par une dans leur atelier rhodanien. Un choix judicieux étant donné le savoir-faire des ouvriers Coréens (sans compter que leur salaire frise la décence, ce qui fait toujours plaisir à la conscience) ainsi que l’importance du contrôle qualité dans les productions actuelles.
Des Iguanophiles
Disons-le d’entrée pour ceux qui ne connaissent pas la firme Lyonnaise : Custom 77 n’a aucun rapport avec la Seine et Marne. Il faut plutôt comprendre les deux sept comme un hommage à l’année 1977, début « officiel » du punk mais aussi l’année du renouveau pour un certain Iggy Pop qui sortit pas moins de trois albums solos (plus qu’épaulé par son pote David Bowie). D’ailleurs, les luthiers du Rhône ont choisi de baptiser leurs modèles à l’aide de titres emblématiques de la période. Ainsi, leur modèle stratoïde s’est vu affublé du nom du premier morceau de l’album « The Idiot » en guise de patronyme.
Plug and play
Puisque Custom 77 vend presque exclusivement par correspondance, la livraison en elle-même a son importance. Donc, pour la petite histoire, la guitare m’a été livrée par La Poste dans un double emballage tout à fait sécurisant. Pour preuve, à la sortie du carton, la petite Strat était réglée et même accordée ! Et comme elle est montée d’origine en D’Addario 10–46, il suffit de prendre un jack, de la brancher et de laisser le rock’n’roll s’exprimer ! Par contre, on se retrouve tout penaud avec sa guitare dans les mains une fois que la vie reprend ses droits car aucune housse n’est livrée avec. Un détail insignifiant pour les requins de studio, mais qui sera à prendre en compte pour les débutants.
J’te connais par cœur, en long, en large, en travers
Bien que les Lyonnais se soient fait connaître grâce à leurs modèles d’inspiration Gibson (comme la London’s Burning), la Sister Midnight respecte la tradition Fender jusque dans les moindres détails. Son corps est en aulne massif et son manche est en érable une pièce, avec touche rapportée de la même essence (excepté pour la finition noire, à touche palissandre). Il est profilé en D à la manière des Strats des 70's. Surmonté d’un sillet en plastique, il est garni de fines frettes impeccablement posées. Quant au vernis, son gloss n’altère pas la glisse et ne devrait poser problème qu’à ceux qui ont les glandes sébacées hypertrophiées. L’accastillage suit la même ligne « à l’ancienne » avec un chevalet à vibrato vintage et des mécaniques « Kluson like » chromées.
Concernant la partie électrique de l’instrument, on retrouve le fameux trio de simples bobinages à aimants Alnico étagés (nommés « single 77 »), le volume général, les potards de tonalité des micros manche et central ainsi qu’un sélecteur 5 positions. Le tout est assemblé sur une plaque 3 plis de bonne facture.
Et en détails
Le bleu de l’exemplaire testé est tout simplement magnifique. Rappelant les années surf music (et son revival noise-grunge), il est également présent sur la tête. Cette dernière a déjà fait parler d’elle à maintes reprises sur les forums… personnellement, je la trouve en effet pas très sexy, mais c’est à vous d’en juger.
Avec ses 3,8 kg, la Sister Midnight se situe dans la moyenne concernant l’impact sur nos vertèbres chéries. Aucun défaut notable de finition n’est à déplorer, et on l’enfourche avec aisance et évidence, pour qui à l’habitude de jouer sur une Strat. Le profil « en D » du manche se rapproche de la sensation d’un « modern C » sans véritable aplatissement en son centre. Pour autant, la position académique ne se révèle pas fatigante à l’usage. Les mécaniques font le job de manière tout à fait convenable, d’ailleurs, elles se sont aisément prêtées au jeu de l’open tuning pour l’extrait numéro 3 (en Open de sol). Le bouton de volume n’est pas particulièrement progressif tout en restant dans la moyenne et les tonalités remplissent leur fonction dignement. Vous pourrez entendre l’action du passe-bas sur le micro manche dans l’extrait numéro 1 (réglé ici à mi-course). Enfin, le vibrato est plus que correct et sera donc utilisable sans risquer de se désaccorder intempestivement.
J’ai déjà entendu ça quelque part…
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Cela n’étonnera personne, le son de la Franco-Coréenne se révèle très clair et « cristallin », sans être tout à fait froid. En un mot comme en cent : ça sonne comme une Stratocaster, avec des aigus brillants, le claquant de l’érable et de vraies différences de caractère entre toutes les positions du sélecteur. Ainsi, plutôt que de séparer les exemples en clair/crunch/saturé, j’ai préféré faire des extraits montrant le potentiel des 5 positions du sélecteur.
Les extraits débutent donc en son clair pour finir en crunch ou en saturation.
- Sister midnight position 1 00:27
- Sister midnight position 2 00:47
- Sister midnight position 3 00:35
- Sister midnight position 4 00:53
- Sister midnight position 5 00:56
Face à la grande sœur
Et comme vous êtes forcement sympathique puisque vous lisez ces lignes, je vous offre un petit bonus. N’ayant pas sous la main de Fender/Squier actuelle dans la même gamme de prix à ma disposition, j’ai pris ma vieille Strat Mexicaine des Nineties avec son micro central d’origine et j’ai joué à nouveau l’extrait numéro 3 pour que vous puissiez comparer le grain.
Le niveau de sortie du single 77 semble légèrement inférieur au simple bobinage mexicain, mais le grain en lui-même est extrêmement proche. La Fender semble avoir plus de corps, mais moins de brillance : on pourrait presque dire que la petite sœur sonne plus « Stratocaster » que la Mexicaine, ce qui est tout de même assez amusant. Il faut cependant tempérer ces propos car le 10–52 monté sur la Mexicaine mériterait de prendre sa retraite sous peu.
Si ce n’est elle, c’est donc sa sœur !
Pour 375 €, Custom 77 propose une copie plus que fidèle. Sa finition impeccable et son rendu sonore clairement typé Strat en font une vraie bonne guitare, évidemment loin du niveau d’une série L hors de prix, mais qui saura vraisemblablement vieillir sans prendre trop de rides. Son seul réel point faible résidant dans les micros, il sera facile pour les bricoleurs de la transformer en véritable tueuse à l’aide de capteurs plus « pêchus ».
Une guitare totalement recommandable aux débutants qui veulent un instrument fiable mais aussi aux plus expérimentés à la recherche d’une Strat pas chère.